L’opposant Alexeï Navalny épingle, dans un documentaire, le rôle trouble joué par le procureur général russe, Iouri Tchaïka, dans l’enrichissement de ses fils, en lien avec la mafia. Une affaire qui n’épargne ni Poutine ni le Kremlin.
En mai 2014, sur la presqu’île de Chalcidique, en Grèce, est inauguré en grande pompe l’hôtel cinq étoiles Pomegranate, refait à neuf, devenu l’établissement le plus luxueux du coin. Des centaines d’invités triés sur le volet assistent à un féerique show lumineux, des feux d’artifice, un concert. Le champagne coule à flots. Sur scène, le ministre russe de la Culture, Vladimir Medinski, salue l’assemblée, composée de l’élite politique et du show-biz grec et russe, en souhaitant de longues années à l’amitié entre les deux pays. C’est ainsi que commence le film Tchaïka, réalisé par la Fondation anticorruption (FAC) d’Alexeï Navalny, l’un des chefs de file de l’opposition russe. Iouri Tchaïka, le procureur général de Russie, se trouve impliqué, selon les résultats d’une longue enquête menée par la FAC, dans l’enrichissement de ses fils, Artem et Igor Tchaïka, à la tête d’entreprises multimillionnaires liées à des gangs criminels.
L’une des spécialités de la FAC est de dénicher les propriétés fastueuses absentes des déclarations fiscales et les comptes en banque offshore des fonctionnaires russes. La découverte de l’hôtel-spa sur les bords de la mer Egée, dont Artem Tchaïka est propriétaire, pousse Navalny à s’intéresser aux fils du procureur général et à leur fortune, car les travaux de rénovation du Pomegranate ont coûté entre 25 et 29 millions d’euros, «ce qui est beaucoup trop cher, même dans le cadre de la corruption autorisée au fils du procureur général», commente Alexeï Navalny.
«Série Z»
L’autre propriétaire de l’hôtel, Olga Lopatina, est l’ancienne épouse de l’adjoint du procureur général, Guennadi Lopatine. Selon des documents découverts par la FAC, sa fortune à elle provient d’une entreprise de sucre qu’elle possédait en partenariat avec les épouses de Sergueï Tsapok, Viatcheslav Tsepovyaz et Alexeï Staroverov. «Nous n’y avons pas cru au début, mais tout d’un coup, notre enquête prenait la tournure d’un mauvais polar de série Z», s’exclame Alexeï Navalny. Sergueï Tsapok est un chef mafieux mort en prison l’année dernière, condamné à perpétuité pour l’un des crimes les plus sanglants de l’histoire récente. En 2010, le «massacre de Kouchtchevskaïa», dans la région de Krasnoïarsk, choque le pays lorsque, dans un règlement de comptes, la bande de Tsapok assassine sauvagement douze personnes, dont trois enfants et un nourrisson, en mettant le feu à leur maison après les avoir tous poignardés. Avec son bras droit Tsepovyaz, Sergueï Tsapok est finalement arrêté après des années d’activité criminelle, de mèche avec les autorités locales : viols collectifs, raids, racket et meurtres, en toute impunité. Quant à Alexeï Staroverov, il est l’ancien directeur de l’administration du parquet général, poste dont il a été limogé pour avoir donné refuge à un gang de tueurs qui ont piégé et exécuté quatorze personnes sur une autoroute à l’entrée de Moscou en 2014.
Artem Tchaïka, lui, a fait son premier million en s’emparant illégalement d’une entreprise de transport maritime publique, dans la région d’Irkoutsk, pour la mettre en faillite et revendre la flotte, tandis que le «suicide» de l’ancien directeur ne fera jamais l’objet d’une enquête. Par la suite, révèle la FAC, Tchaïka s’approprie, toujours au mépris de la loi et avec la complicité des autorités locales, des carrières de sable et des mines de sel dans des régions qui ont toutes en commun d’avoir des procureurs qui ont commencé sous la houlette d’une certaine Albina Kovaleva, procureure générale d’Irkoutsk dans les années 80 et «marraine» de Iouri Tchaïka. L’argent que rapporte cet empire industriel serait blanchi en Suisse, où Artem Tchaïka est résident.
En fouillant en Grèce et en Suisse, dans les régions d’Irkoutsk (dont Iouri Tchaïka est originaire), de Krasnodar et de Kalouga, en étudiant registres et cadastres, déclarations douanières et transactions bancaires, en interrogeant les proches de gens assassinés ou ceux qui se sont vus confisquer leur entreprise avec la complicité des procureurs régionaux, la FAC finit par dessiner une impressionnante toile d’araignée qui s’étend dans toute la Russie, d’est en ouest.
«Complots de cartels»
«Nous ne sommes pas des services spéciaux, rigole Alexeï Navalny, nous n’avons pas de preuves matérielles de la culpabilité de Tchaïka père. Mais nous avons collecté énormément d’informations et nous considérons que toutes les machinations que nous avons découvertes auraient été impossibles sans son aval. Cette Albina Kovaleva, la reine de la ruche, est le lien entre tous ces procureurs véreux. L’un de ses disciples est devenu le procureur général de Russie, il a placé tous ses copains à des postes clés et ils permettent à ses enfants de s’enrichir.» Après un exposé en détail, documents à l’appui, des actifs et de la manière dont ils ont été obtenus, la FAC conclut que le business d’Artem Tchaïka est fondé sur le soutien des procureurs, qui assurent les conditions favorables pour ses entreprises, en lui faisant remporter les appels d’offres et en écartant la concurrence. En échange, les fonctionnaires obtiennent promotions et immunité.
Ce modèle ne pourrait pas exister sans «l’aide criminelle» de Tchaïka père, le procureur général de Russie. Son fils Igor, 27 ans, doit lui aussi son succès professionnel à papa. Le filon de ce passionné d’urbanisme et de musique classique qui brasse des millions, ce sont les commandes publiques, révèle encore l’enquête. Ses entreprises remportent des contrats mirobolants pour l’aménagement des parcs moscovites ou des routes olympiques, l’élaboration de la signalétique des gares ou des brand-books des municipalités, en recourant à des «complots de cartels», quand plusieurs entreprises appartenant au même propriétaire répondent à un appel d’offres sous des noms différents afin de brouiller les pistes.
En outre, Igor est intimement lié aux affaires de son frère Artem, dont il partage les dividendes. «Gagner des appels d’offres publics de telle envergure ne pourrait pas se faire si ce n’était avec l’accord direct de Vladimir Poutine, résume Navalny. Mais ce type de corruption est admis dans notre système. Tchaïka et ses fils ont le droit d’être corrompus, tout le monde l’est. En revanche, les liens que nous avons établis entre le procureur général et les truands de Kouchtchevskaïa, ça, c’est trop. Je suis sûr qu’ils sont furieux au Kremlin. Nos accusations sont au-dessus du seuil de tolérance. C’est un dommage politique sérieux.»
Sauf que, pour le régime de Poutine, non seulement le conflit d’intérêt et les méthodes criminelles sont constitutifs du système, mais en plus le mot d’ordre est : «on ne livre pas les siens». Les hauts dignitaires, même s’ils finissent par être démasqués, ne sont jamais punis publiquement, et surtout pas sous la pression de l’opinion publique. Il n’y aura pas de «Tchaïkagate» en Russie, même si l’enquête a enflammé la Toile et que le documentaire de 43 minutes a été visionné 3,5 millions de fois. «Quand nous commençons à nous intéresser à quelqu’un, sa position est ostensiblement renforcée, explique Navalny. Parce que le Kremlin ne peut pas céder. C’est une peur irrationnelle du Kremlin de me concéder quoi que ce soit. Imaginez la pub que ça me fait ! Et, surtout, le précédent que cela crée.»
Pour l’instant, la réaction du pouvoir est habituelle. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, s’est contenté de dire que ces accusations, «déjà connues, […] n’avaient pas suscité l’intérêt du Kremlin» car elles ne concernent pas le procureur général, mais ses fils, qui sont majeurs et ont le droit de mener leurs propres affaires privées dont l’Etat ne se mêle pas. Vladimir Poutine, interrogé lors de sa conférence de presse annuelle, a étonné l’assemblée par son incapacité à répondre du premier coup, comme si la question le prenait au dépourvu. «Tchaïka est isolé, on le voit, se réjouit Navalny. Personne ne prend sa défense ouvertement. Pour l’instant, les grands propagandistes du Kremlin se tiennent à l’écart, ils ne disent rien.»
«Ni loi ni justice»
Le mandat de Iouri Tchaïka s’achève à l’été 2016, et c’est la prérogative personnelle du président Poutine de le reconduire, ou non. Iouri Tchaïka, lui, a fini par publier une lettre fleuve dans le quotidien Kommersant pour expliquer que l’enquête de la FAC serait en fait une commande du Britannique Bill Browder, le patron du fonds d’investissement Hermitage Capital, soutenu par la CIA.
En 2013, Bill Browder a été condamné par contumace à neuf ans de prison par un tribunal russe pour fraude fiscale, après avoir lui-même accusé des responsables de la police et du fisc russes d’avoir détourné plus de 130 millions d’euros. Ce scandale avait été révélé par un de ses employés, Sergueï Magnitski, qui est depuis décédé de mauvais traitements dans une prison moscovite en 2009. Selon Iouri Tchaïka, l’objectif de Bill Browder serait de discréditer les organes judiciaires russes, avec l’aide des services secrets américains, tout en détournant l’attention de ses propres méfaits en Russie, où il doit bientôt faire l’objet d’une nouvelle enquête.
Alexeï Navalny et sa Fondation anticorruption ont déjà essayé de saisir plusieurs tribunaux moscovites, en vain : aucun n’accepte d’ouvrir une instruction contre le procureur général de Russie. Mais ils ne baissent pas les bras. «Ce qui nous intéresse nous, c’est l’opinion publique, car c’est la seule chose dont ils ont peur, conclut Alexeï Navalny, optimiste. Aujourd’hui, en Russie, il n’y a ni loi ni justice. Nous voudrions que le coût politique de maintenir Iouri Tchaïka au pouvoir dépasse le coût de son limogeage. Ils finiront bien par s’en débarrasser.»
libération fr
En mai 2014, sur la presqu’île de Chalcidique, en Grèce, est inauguré en grande pompe l’hôtel cinq étoiles Pomegranate, refait à neuf, devenu l’établissement le plus luxueux du coin. Des centaines d’invités triés sur le volet assistent à un féerique show lumineux, des feux d’artifice, un concert. Le champagne coule à flots. Sur scène, le ministre russe de la Culture, Vladimir Medinski, salue l’assemblée, composée de l’élite politique et du show-biz grec et russe, en souhaitant de longues années à l’amitié entre les deux pays. C’est ainsi que commence le film Tchaïka, réalisé par la Fondation anticorruption (FAC) d’Alexeï Navalny, l’un des chefs de file de l’opposition russe. Iouri Tchaïka, le procureur général de Russie, se trouve impliqué, selon les résultats d’une longue enquête menée par la FAC, dans l’enrichissement de ses fils, Artem et Igor Tchaïka, à la tête d’entreprises multimillionnaires liées à des gangs criminels.
L’une des spécialités de la FAC est de dénicher les propriétés fastueuses absentes des déclarations fiscales et les comptes en banque offshore des fonctionnaires russes. La découverte de l’hôtel-spa sur les bords de la mer Egée, dont Artem Tchaïka est propriétaire, pousse Navalny à s’intéresser aux fils du procureur général et à leur fortune, car les travaux de rénovation du Pomegranate ont coûté entre 25 et 29 millions d’euros, «ce qui est beaucoup trop cher, même dans le cadre de la corruption autorisée au fils du procureur général», commente Alexeï Navalny.
«Série Z»
L’autre propriétaire de l’hôtel, Olga Lopatina, est l’ancienne épouse de l’adjoint du procureur général, Guennadi Lopatine. Selon des documents découverts par la FAC, sa fortune à elle provient d’une entreprise de sucre qu’elle possédait en partenariat avec les épouses de Sergueï Tsapok, Viatcheslav Tsepovyaz et Alexeï Staroverov. «Nous n’y avons pas cru au début, mais tout d’un coup, notre enquête prenait la tournure d’un mauvais polar de série Z», s’exclame Alexeï Navalny. Sergueï Tsapok est un chef mafieux mort en prison l’année dernière, condamné à perpétuité pour l’un des crimes les plus sanglants de l’histoire récente. En 2010, le «massacre de Kouchtchevskaïa», dans la région de Krasnoïarsk, choque le pays lorsque, dans un règlement de comptes, la bande de Tsapok assassine sauvagement douze personnes, dont trois enfants et un nourrisson, en mettant le feu à leur maison après les avoir tous poignardés. Avec son bras droit Tsepovyaz, Sergueï Tsapok est finalement arrêté après des années d’activité criminelle, de mèche avec les autorités locales : viols collectifs, raids, racket et meurtres, en toute impunité. Quant à Alexeï Staroverov, il est l’ancien directeur de l’administration du parquet général, poste dont il a été limogé pour avoir donné refuge à un gang de tueurs qui ont piégé et exécuté quatorze personnes sur une autoroute à l’entrée de Moscou en 2014.
Artem Tchaïka, lui, a fait son premier million en s’emparant illégalement d’une entreprise de transport maritime publique, dans la région d’Irkoutsk, pour la mettre en faillite et revendre la flotte, tandis que le «suicide» de l’ancien directeur ne fera jamais l’objet d’une enquête. Par la suite, révèle la FAC, Tchaïka s’approprie, toujours au mépris de la loi et avec la complicité des autorités locales, des carrières de sable et des mines de sel dans des régions qui ont toutes en commun d’avoir des procureurs qui ont commencé sous la houlette d’une certaine Albina Kovaleva, procureure générale d’Irkoutsk dans les années 80 et «marraine» de Iouri Tchaïka. L’argent que rapporte cet empire industriel serait blanchi en Suisse, où Artem Tchaïka est résident.
En fouillant en Grèce et en Suisse, dans les régions d’Irkoutsk (dont Iouri Tchaïka est originaire), de Krasnodar et de Kalouga, en étudiant registres et cadastres, déclarations douanières et transactions bancaires, en interrogeant les proches de gens assassinés ou ceux qui se sont vus confisquer leur entreprise avec la complicité des procureurs régionaux, la FAC finit par dessiner une impressionnante toile d’araignée qui s’étend dans toute la Russie, d’est en ouest.
«Complots de cartels»
«Nous ne sommes pas des services spéciaux, rigole Alexeï Navalny, nous n’avons pas de preuves matérielles de la culpabilité de Tchaïka père. Mais nous avons collecté énormément d’informations et nous considérons que toutes les machinations que nous avons découvertes auraient été impossibles sans son aval. Cette Albina Kovaleva, la reine de la ruche, est le lien entre tous ces procureurs véreux. L’un de ses disciples est devenu le procureur général de Russie, il a placé tous ses copains à des postes clés et ils permettent à ses enfants de s’enrichir.» Après un exposé en détail, documents à l’appui, des actifs et de la manière dont ils ont été obtenus, la FAC conclut que le business d’Artem Tchaïka est fondé sur le soutien des procureurs, qui assurent les conditions favorables pour ses entreprises, en lui faisant remporter les appels d’offres et en écartant la concurrence. En échange, les fonctionnaires obtiennent promotions et immunité.
Ce modèle ne pourrait pas exister sans «l’aide criminelle» de Tchaïka père, le procureur général de Russie. Son fils Igor, 27 ans, doit lui aussi son succès professionnel à papa. Le filon de ce passionné d’urbanisme et de musique classique qui brasse des millions, ce sont les commandes publiques, révèle encore l’enquête. Ses entreprises remportent des contrats mirobolants pour l’aménagement des parcs moscovites ou des routes olympiques, l’élaboration de la signalétique des gares ou des brand-books des municipalités, en recourant à des «complots de cartels», quand plusieurs entreprises appartenant au même propriétaire répondent à un appel d’offres sous des noms différents afin de brouiller les pistes.
En outre, Igor est intimement lié aux affaires de son frère Artem, dont il partage les dividendes. «Gagner des appels d’offres publics de telle envergure ne pourrait pas se faire si ce n’était avec l’accord direct de Vladimir Poutine, résume Navalny. Mais ce type de corruption est admis dans notre système. Tchaïka et ses fils ont le droit d’être corrompus, tout le monde l’est. En revanche, les liens que nous avons établis entre le procureur général et les truands de Kouchtchevskaïa, ça, c’est trop. Je suis sûr qu’ils sont furieux au Kremlin. Nos accusations sont au-dessus du seuil de tolérance. C’est un dommage politique sérieux.»
Sauf que, pour le régime de Poutine, non seulement le conflit d’intérêt et les méthodes criminelles sont constitutifs du système, mais en plus le mot d’ordre est : «on ne livre pas les siens». Les hauts dignitaires, même s’ils finissent par être démasqués, ne sont jamais punis publiquement, et surtout pas sous la pression de l’opinion publique. Il n’y aura pas de «Tchaïkagate» en Russie, même si l’enquête a enflammé la Toile et que le documentaire de 43 minutes a été visionné 3,5 millions de fois. «Quand nous commençons à nous intéresser à quelqu’un, sa position est ostensiblement renforcée, explique Navalny. Parce que le Kremlin ne peut pas céder. C’est une peur irrationnelle du Kremlin de me concéder quoi que ce soit. Imaginez la pub que ça me fait ! Et, surtout, le précédent que cela crée.»
Pour l’instant, la réaction du pouvoir est habituelle. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, s’est contenté de dire que ces accusations, «déjà connues, […] n’avaient pas suscité l’intérêt du Kremlin» car elles ne concernent pas le procureur général, mais ses fils, qui sont majeurs et ont le droit de mener leurs propres affaires privées dont l’Etat ne se mêle pas. Vladimir Poutine, interrogé lors de sa conférence de presse annuelle, a étonné l’assemblée par son incapacité à répondre du premier coup, comme si la question le prenait au dépourvu. «Tchaïka est isolé, on le voit, se réjouit Navalny. Personne ne prend sa défense ouvertement. Pour l’instant, les grands propagandistes du Kremlin se tiennent à l’écart, ils ne disent rien.»
«Ni loi ni justice»
Le mandat de Iouri Tchaïka s’achève à l’été 2016, et c’est la prérogative personnelle du président Poutine de le reconduire, ou non. Iouri Tchaïka, lui, a fini par publier une lettre fleuve dans le quotidien Kommersant pour expliquer que l’enquête de la FAC serait en fait une commande du Britannique Bill Browder, le patron du fonds d’investissement Hermitage Capital, soutenu par la CIA.
En 2013, Bill Browder a été condamné par contumace à neuf ans de prison par un tribunal russe pour fraude fiscale, après avoir lui-même accusé des responsables de la police et du fisc russes d’avoir détourné plus de 130 millions d’euros. Ce scandale avait été révélé par un de ses employés, Sergueï Magnitski, qui est depuis décédé de mauvais traitements dans une prison moscovite en 2009. Selon Iouri Tchaïka, l’objectif de Bill Browder serait de discréditer les organes judiciaires russes, avec l’aide des services secrets américains, tout en détournant l’attention de ses propres méfaits en Russie, où il doit bientôt faire l’objet d’une nouvelle enquête.
Alexeï Navalny et sa Fondation anticorruption ont déjà essayé de saisir plusieurs tribunaux moscovites, en vain : aucun n’accepte d’ouvrir une instruction contre le procureur général de Russie. Mais ils ne baissent pas les bras. «Ce qui nous intéresse nous, c’est l’opinion publique, car c’est la seule chose dont ils ont peur, conclut Alexeï Navalny, optimiste. Aujourd’hui, en Russie, il n’y a ni loi ni justice. Nous voudrions que le coût politique de maintenir Iouri Tchaïka au pouvoir dépasse le coût de son limogeage. Ils finiront bien par s’en débarrasser.»
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