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Japon : Akie Abe, l'imprévisible first Lady

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  • Japon : Akie Abe, l'imprévisible first Lady

    Akie Abe est une first lady qui détonne un peu. Elle embarrasse les diplomates et que faire d'une telle first Lady qui ferait presque regretter que l'ancien premier ministre nippon Junichiro Koizumi ait été un homme divorcé et qu'il n'y avait donc rien à raconter.

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    «Quand Akie rentre à la maison complètement saoule, elle jette souvent ses vêtements un à un sur le sol avant de s'effondrer dans son hébétude. Ça met Shinzo hors de lui, parce qu'il doit passer derrière elle pour ramasser ses habits et les mettre à laver. Il se plaint, mais elle se retourne en lui hurlant qu'il n'a aucun reproche à lui faire » : scène de la vie quotidienne d'un couple ordinaire au Japon ? À cela près que Shinzo n'est autre que Shinzo Abe, le premier ministre du pays, et Akie, son épouse. Et qu'on pouvait lire récemment cette description sans eau plate de la Bernadette Chirac nipponne dans les colonnes du Shukan Gendai, un hebdomadaire à sensation, qui tire à 850 000 exemplaires. La première dame a même son surnom : « The Thirst Lady », la Dame de la soif !

    Junichiro Koizumi a été un grand premier ministre, mais il avait un défaut : son divorce. C'était l'homme seul des sommets du G 8 et des visites d'État. Privée de ragots, la presse du coeur se rabattait sur la famille impériale, inépuisable source de cancans. Avec l'arrivée au pouvoir en septembre du jeune Shinzo Abe, premier dirigeant né après-guerre, les Japonais ont enfin leur première dame en la personne de son épouse. Et quelle dame !

    Akie Abe est un cocktail - c'est le mot - inédit. Fille du président de Morinaga, un géant de la confiserie, elle a passé son enfance et son adolescence au Sacré-Coeur, la meilleure école catholique de Tokyo. À 25 ans, en 1987, elle rencontre Shinzo Abe grâce à un ami commun. C'est le mariage du feu et de la glace. Shinzo Abe est un « Sansei », un politicien de troisième génération qui ne dépareille pas au Parti libéral démocrate, la formation politique majoritaire depuis cinquante ans.

    Signe particulier, surtout dans la classe politique nipponne : il ne boit jamais d'alcool. Tandis qu'il mène une carrière sans accroc vers les sommets, son épouse, cadre dans l'agence publicitaire Dentsu, est une égérie des folles nuits du Juliana, discothèque mythique. Elle devient même un temps disc-jockey dans une radio locale de Yamaguchi, la circonscription de son mari, sous le pseudonyme de Akki. Pendant les campagnes électorales, elle se distingue par son aptitude à lever le coude avec les partisans de Shinzo.

    « Elle aime à l'évidence boire, mais elle connaît aussi bien les vins », raconte un des amis du couple. « Elle est vraiment gentille, élégante, pas prétentieuse pour un sou, et elle aide énormément Shinzo. C'est une femme moderne, à l'Occidentale », estime-t-il.

    « Pour moi, c'est une épouse traditionnelle typique, qui soutient son mari, nuance une interprète qui a travaillé pour elle. Mais elle a tellement changé en deux ans ! Quand je l'ai connue, elle avait les cheveux longs et elle était timide. Aujourd'hui, ses cheveux sont courts. Elle a l'air plus jeune, plus active. »

    Junichiro Koizumi était une personnalité assez iconoclaste pour être, en quelque sorte, « sa propre première dame ». Son amour immodéré d'Elvis Presley et de l'oeuvre d'Ennio Morricone, sa coupe de cheveux frisottée et ses pas de danse avec Richard Gere alimentaient la presse à sensation. Sur le terrain de l'extravagance, Akie est son véritable successeur.

    D'un maintien inquiet, d'un nationalisme frileux, Shinzo Abe n'a pas la malice et le franc-parler, à phrases courtes, de Junichiro Koizumi. On ne lui connaît que deux tocades : la glace à la vanille et la série américaine Lost ! Dans le couple Abe, c'est lui qui, malgré sa fonction, est l'ombre. Akie Abe scintille dans une culture où la femme est généralement réduite à jouer la doublure de son mari. Elle avoue, sans fausse honte, sa passion pour la « K-Pop », la culture populaire sud-coréenne, et apprend même, comme des millions de femmes de sa génération, le coréen. Akie sait aussi toucher les sentiments : elle est récemment revenue avec une candeur confondante sur l'absence d'enfants du couple, parlant de la pression qui s'exerçait sur elle pour donner un héritier à la lignée de politiciens Abe. « Mon mari a envisagé l'adoption », révèle-t-elle, une pratique très rare au Japon.

    «Une bonne analogie est Nancy Reagan, raconte l'éditorialiste politique Takao Toshikawa. Une femme qui avait son mot à dire jusque dans les nominations à la Maison-Blanche. Shinzo Abe demande souvent à son épouse son avis. Il faut revenir à l'épouse du premier ministre Kaifu, en 1989, pour voir un tel phénomène. » Le contraste est d'autant plus saisissant que Shinzo Abe est la bête noire des féministes au Japon. Il passe pour un rétrograde à propos des questions du statut de la femme, et est perçu comme le politicien le moins apte à renverser le tragique déclin démographique de l'Archipel.

    Depuis qu'il a accédé au pouvoir, la lune de miel entre Shinzo Abe et la presse a tourné court. Cette dernière le trompe désormais avec Akie. Début décembre, sur les 130 journalistes japonais accrédités pour le sommet de l'Asean à Cebu (Philippines), 80 venaient officiellement pour Akie. Le protocole l'a flanquée d'un diplomate anciennement posté en Irak et d'une ex-hôtesse de l'air pour l'encadrer. Avec la presse étrangère, elle s'en tient au script des First Ladies classiques. Elle insiste sur son travail au sein de Care Japan, une association humanitaire présidée par sa belle-mère Yoko. « Je souhaite ouvrir des écoles dans les endroits les plus pauvres d'Asie. Je veux aussi présenter la culture japonaise au reste du monde. Je veux montrer le bon côté du Japon et des femmes japonaises », confiait-t-elle lors d'une récente interview à la BBC. Mais ça ne suffit visiblement pas. Les médias racontent ses frasques avec un luxe de détails à faire rougir un tabloïd anglais. Témoin, la visite « historique » de Shinzo et Akie Abe en Chine en octobre. À Pékin, lors d'un dîner avec le président chinois Hu Jintao et son épouse, l'entourage a laissé filer qu'elle avait bu plus de dix verres de maotai, un alcool chinois à 53 degrés, incontournable dans les réceptions. Devant l'inquiétude des serveurs, elle se serait brutalement levée en leur lançant un sonore « I'm OK ! » pour les rassurer.

    Ces jours-ci, ce sont les diplomates qui préparent la tournée en Europe du couple Abe qui s'inquiètent. Un proche du premier ministre résume : « Du 9 au 13 janvier, elle sera reçue par les chefs d'État ou de gouvernement d'Allemagne, de France, de Grande-Bretagne et de Belgique. Si elle demande à boire, on devra la servir. Rien à faire : c'est le protocole ! »

    Par Le Figaro

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