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Michel Rocard, ex-Premier ministre français, à El Khabar
« On ne parle plus en France d’évènements mais de guerre d’Algérie »
« Le projet d’union méditerranéenne n’a pas de chance de réussir »
Michel Rocard, ex- Premier ministre français et député au Parlement européen, a assuré que le projet d’union méditerranéenne annoncé par le président français, Nicolas Sarkozy, n’a pas beaucoup de chances de réussir, considérant qu’il est difficile de convaincre les pays européens ne donnant pas sur la Méditerranée de son utilité. Dans un entretien accordé à El Khabar, il a estimé que le développement des pays de la zone du Maghreb est la meilleure façon de stopper l’immigration clandestine. Rocard a également appelé à ne pas faire d’amalgame entre Islam et terrorisme.
El Khabar : Vous avez été l’un des premiers à dénoncer les crimes perpétrés par la France en Algérie, et cela en 1958, pourquoi à votre avis la France officielle refuse-elle de reconnaître ce qui s’est passé ?
Michel Rocard : C’est une question importante qui mérite qu’on y réfléchisse. Cependant, je suis député au Parlement européen depuis 14 ans, et je me suis éloigné de la scène politique française depuis des années. Je pense que d’autres pourront répondre mieux que moi sur ce sujet, mais je considère qu’il y a une évolution importante dans cette affaire, car on ne parle plus en France d’évènements d’Algérie mais de guerre d’Algérie, et cela peut avoir des répercussions juridiques.
El Khabar : Tout de suite après son arrivée au sommet de l’Etat français, le président Nicolas Sarkozy a annoncé le projet de l’union méditerranéenne, dont les détails restent flous, un projet refusé par Bruxelles et Berlin. A votre avis quelles sont les chances de réussite de ce projet ?
Michel Rocard : On ne peut pas trancher sur l’avenir de ce projet, mais il faut comprendre que la France doit s’adresser au reste des pays de l’Union européenne pour un sujet comme celui-là, afin d’obtenir leur approbation et leur feu vert. Le problème est qu’on ne peut convaincre facilement les pays de l’union, qui ne donnent pas sur la Méditerranée, d’affecter des sommes pour le financement de projets de développement dans les pays de la rive sud de la Méditerranée, car même si ces projets de développement sont financés par l’argent du secteur privé, une partie du financement de ces projets doit s’effectuer par les deniers publics. Ce sont là des questions dont la France doit débattre avec les Etats de l’Union européenne.
El Khabar : Certains prétendent que l’objectif de Sarkozy, à travers le projet de l’union méditerranéenne, est de barrer la route aux Américains et sauvegarder la position de la France dans la région de la Méditerranée et le Maghreb en particulier.
Michel Rocard : Je ne pense que pas que ce soit une analyse sérieuse, car les pays de la Méditerranée ont besoin de croissance et de développement. En ce qui concerne les Américains, je ne pense pas que nous soyons en concurrence avec eux, sachant que la position de la France reste stable et inébranlable. Je pense que les pays maghrébins doivent se développer économiquement et socialement. La France est concernée à partir du moment où elle veut réduire le nombre d’immigrés clandestins. Cette immigration ne s’arrêtera que lorsque les postulants à l’immigration réaliseront que leurs rêves et leurs aspirations peuvent se réaliser dans leur pays d’origine, pour cela il faut du temps et dépenser de grandes sommes d’argent.
El Khabar : Quel est votre avis sur la politique d’immigration adoptée en France depuis l’arrivée de Sarkozy au pouvoir, et qui a conduit à l’expulsion de dizaines de milliers d’immigrés clandestins en l’espace de quelques mois ?
Michel Rocard : Naturellement, tout Etat ne peut accepter un nombre illimité d’immigrés mais je suis choqué par la façon inhumaine d’expulser les immigrés. La police française sépare les membres d’une même famille de façon regrettable, comme elle effectue des arrestations à l’intérieur des classes, et conduit souvent les personnes arrêtées directement vers l’aéroport pour les expulser vers leur pays d’origine. On ne peut tolérer de tels actes car ils sont inhumains.
El Khabar : Est-ce que le terrorisme d’Al Qaïda fait partie désormais de l’équation sécuritaire aussi bien en Europe qu’en Afrique du Nord ?
Michel Rocard : Oui, le terrorisme représente une menace pour la plupart des Etats de l’Europe et de la région maghrébine, comme l’Algérie, le Maroc dans une moindre mesure, et même si la Tunisie n’a pas connu un terrorisme de la même intensité que celle de ses voisins, elle prend des mesures préventives que je juge violentes. Ce qui reste inacceptable est la vision de l’Occident sur les pays musulmans, en les taxant tous de terroristes, ce qui est absolument faux. Nous militons, de notre côté, afin de changer cette image, car les terroristes représentent une très faible proportion dans les sociétés musulmanes, qui refusent et condamnent le terrorisme dans leur majorité. Il y a cependant dans ces pays des conditions sociales et économiques difficiles, et un sentiment de frustration et un manque de perspective, qui conduisent certaines catégories vers l’extrémisme, et il faut remédier à cette situation afin d’endiguer le terrorisme et ses racines.
- El Khabar
« On ne parle plus en France d’évènements mais de guerre d’Algérie »
« Le projet d’union méditerranéenne n’a pas de chance de réussir »
Michel Rocard, ex- Premier ministre français et député au Parlement européen, a assuré que le projet d’union méditerranéenne annoncé par le président français, Nicolas Sarkozy, n’a pas beaucoup de chances de réussir, considérant qu’il est difficile de convaincre les pays européens ne donnant pas sur la Méditerranée de son utilité. Dans un entretien accordé à El Khabar, il a estimé que le développement des pays de la zone du Maghreb est la meilleure façon de stopper l’immigration clandestine. Rocard a également appelé à ne pas faire d’amalgame entre Islam et terrorisme.
El Khabar : Vous avez été l’un des premiers à dénoncer les crimes perpétrés par la France en Algérie, et cela en 1958, pourquoi à votre avis la France officielle refuse-elle de reconnaître ce qui s’est passé ?
Michel Rocard : C’est une question importante qui mérite qu’on y réfléchisse. Cependant, je suis député au Parlement européen depuis 14 ans, et je me suis éloigné de la scène politique française depuis des années. Je pense que d’autres pourront répondre mieux que moi sur ce sujet, mais je considère qu’il y a une évolution importante dans cette affaire, car on ne parle plus en France d’évènements d’Algérie mais de guerre d’Algérie, et cela peut avoir des répercussions juridiques.
El Khabar : Tout de suite après son arrivée au sommet de l’Etat français, le président Nicolas Sarkozy a annoncé le projet de l’union méditerranéenne, dont les détails restent flous, un projet refusé par Bruxelles et Berlin. A votre avis quelles sont les chances de réussite de ce projet ?
Michel Rocard : On ne peut pas trancher sur l’avenir de ce projet, mais il faut comprendre que la France doit s’adresser au reste des pays de l’Union européenne pour un sujet comme celui-là, afin d’obtenir leur approbation et leur feu vert. Le problème est qu’on ne peut convaincre facilement les pays de l’union, qui ne donnent pas sur la Méditerranée, d’affecter des sommes pour le financement de projets de développement dans les pays de la rive sud de la Méditerranée, car même si ces projets de développement sont financés par l’argent du secteur privé, une partie du financement de ces projets doit s’effectuer par les deniers publics. Ce sont là des questions dont la France doit débattre avec les Etats de l’Union européenne.
El Khabar : Certains prétendent que l’objectif de Sarkozy, à travers le projet de l’union méditerranéenne, est de barrer la route aux Américains et sauvegarder la position de la France dans la région de la Méditerranée et le Maghreb en particulier.
Michel Rocard : Je ne pense que pas que ce soit une analyse sérieuse, car les pays de la Méditerranée ont besoin de croissance et de développement. En ce qui concerne les Américains, je ne pense pas que nous soyons en concurrence avec eux, sachant que la position de la France reste stable et inébranlable. Je pense que les pays maghrébins doivent se développer économiquement et socialement. La France est concernée à partir du moment où elle veut réduire le nombre d’immigrés clandestins. Cette immigration ne s’arrêtera que lorsque les postulants à l’immigration réaliseront que leurs rêves et leurs aspirations peuvent se réaliser dans leur pays d’origine, pour cela il faut du temps et dépenser de grandes sommes d’argent.
El Khabar : Quel est votre avis sur la politique d’immigration adoptée en France depuis l’arrivée de Sarkozy au pouvoir, et qui a conduit à l’expulsion de dizaines de milliers d’immigrés clandestins en l’espace de quelques mois ?
Michel Rocard : Naturellement, tout Etat ne peut accepter un nombre illimité d’immigrés mais je suis choqué par la façon inhumaine d’expulser les immigrés. La police française sépare les membres d’une même famille de façon regrettable, comme elle effectue des arrestations à l’intérieur des classes, et conduit souvent les personnes arrêtées directement vers l’aéroport pour les expulser vers leur pays d’origine. On ne peut tolérer de tels actes car ils sont inhumains.
El Khabar : Est-ce que le terrorisme d’Al Qaïda fait partie désormais de l’équation sécuritaire aussi bien en Europe qu’en Afrique du Nord ?
Michel Rocard : Oui, le terrorisme représente une menace pour la plupart des Etats de l’Europe et de la région maghrébine, comme l’Algérie, le Maroc dans une moindre mesure, et même si la Tunisie n’a pas connu un terrorisme de la même intensité que celle de ses voisins, elle prend des mesures préventives que je juge violentes. Ce qui reste inacceptable est la vision de l’Occident sur les pays musulmans, en les taxant tous de terroristes, ce qui est absolument faux. Nous militons, de notre côté, afin de changer cette image, car les terroristes représentent une très faible proportion dans les sociétés musulmanes, qui refusent et condamnent le terrorisme dans leur majorité. Il y a cependant dans ces pays des conditions sociales et économiques difficiles, et un sentiment de frustration et un manque de perspective, qui conduisent certaines catégories vers l’extrémisme, et il faut remédier à cette situation afin d’endiguer le terrorisme et ses racines.
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