Jerusalem Post, 25 février 2008
Négocier avec le diable
Gershon Baskin *
Traduction : Gérard pour La Paix Maintenant
Israël ne négocie pas avec des terroristes. Cette "vérité" constitue
l¹une
des plus grandes manipulations de l¹opinion dans l¹histoire moderne de
la
communication politique. Car Israël a toujours négocié avec des
terroristes
et continuera à le faire aussi longtemps que nous continuerons à donner
de
la valeur à la vie humaine.
Israël négocie avec le Hezbollah pour obtenir des informations sur le
sort
de ses deux soldats enlevés. Israël négocié avec le Hamas pour obtenir
la
libération du soldat Gilad Shalit. Si cela était possible, Israël
négocierait directement avec Hassan Nasrallah et Khaled Mesh¹al en
personne.
Mais eux ne souhaitent pas négocier directement, de sorte que ce sont
des
médiateurs qui effectuent des allez et retours. Quasiment personne en
Israël
ne critique l¹idée de négocier avec ces terroristes pour obtenir la
libération des soldats kidnappés. La plupart des Israéliens sont prêts
à
payer un prix très lourd en échange de leur libération.
Alors, pourquoi la négociation d¹un cessez-le-feu avec le Hamas qui
pourrait
sauver des dizaines, voire des centaines de vies humaines, serait-elle
moins
légitime qu¹une négociation pour sauver une vie humaine ?
La direction du Hamas, à Damas et à Gaza, a envoyé des signaux qui
indiquent
qu¹un cessez-le-feu avec Israël les intéresse. Pour être clairs, ils
parlent
de ce qu¹ils nomment "tahadiyeh", une accalmie, et non d¹une "hudna",
un
cessez-le-feu à long terme, d¹après l¹histoire et des enseignements
musulmans.
Généralement, une tahadiyeh a une durée de vie relativement courte (un
an
environ), bien qu¹il n¹y ait pas de règle sur son calendrier, et elle
peut
être plus courte ou plus longue. Elle peut également être prolongée
au-delà
de l¹accord initial.
Les dirigeants du Hamas déclarent, en public et en privé, être prêts à
garantir que la tahadiyeh soit respectée par toutes les factions de
Gaza.
Ils ont déclaré aussi souhaiter un accord global, comprenant un échange
de
prisonniers (dont Shalit) et l¹ouverture des passages frontaliers de
Gaza,
en particulier à la frontière égyptienne.
Le Hamas comprend bien qu¹il doit d¹abord conclure un accord de
cessez-le-feu avant un accord sur la libération de Shalit, car une fois
Shalit hors de Gaza, rien ne protégera ses dirigeants du feu israélien.
Il
est donc plus que probable qu¹il n¹y aura aucun accord sur Shalit qui
ne
comprenne un cessez-le-feu. Ce que j¹ai tenté d¹expliquer à Ehoud
Olmert,
quelques jours après avoir été approché par des dirigeants du Hamas qui
proposaient un cessez-le-feu (il y a plus de 600 jours).
Le Hamas veut un accord sur les frontières de Gaza parce que, sans
dispositions concernant la circulation des biens et des personnes, la
population forcera de nouveau les frontières, ce qui pourrait entraîner
des
conséquences effrayantes.
Israël a imposé à la population de Gaza des sanctions économiques, dans
l¹espoir de la voir retourner sa colère contre le Hamas. Cette
politique
était vouée à l¹échec. Elle aurait eu de meilleures chances de succès
si les
Palestiniens de Gaza avaient pu constater soudain des améliorations
spectaculaires dans la Cisjordanie de Mahmoud Abbas, mais depuis
Annapolis,
pas un seul check point important n¹a été démantelé. Et, à l¹exception
de
Ramallah, il n¹y a eu aucune amélioration visible de la situation
économique
en Cisjordanie. En réalité, les gens constatent plutôt le contraire.
La brèche dans la frontière de Rafah, planifiée et effectuée par le
Hamas, a
suscité un large soutien public en faveur du gouvernement de Gaza. Les
chances que la pression économique exercée par Israël modifie quoi que
ce
soit à cette situation sont nulles. Cette pression va en réalité se
retourner contre Israël et contre Abbas, considéré par de nombreux
Palestiniens comme un collaborateur. C¹est la raison pour laquelle le
président palestinien et son premier ministre Fayyad prennent
aujourd¹hui
position, publiquement et en privé, contre ces sanctions économiques.
Un haut responsable du cabinet d¹Abbas m¹a confié qu¹aujourd¹hui, Abbas
souhaite un cessez-le-feu avec le Hamas. Abbas y met, bien entendu, ses
propres conditions. Pour l¹essentiel, il exige d¹être partie prenante
dans
les négociations et leur résultat, de sorte qu¹il soit bien clair pour
tout
le monde qu¹il est le président de toute la Palestine, y compris de
Gaza. Il
ne serait pas surprenant s¹il exigeait d¹Israël que l¹accord de
cessez-le-feu concerne également la Cisjordanie.
Si l¹on souhaite parvenir à un cessez-le-feu qui mettra un terme aux
tirs de
roquettes sur Sderot, il est important d¹y inclure la Cisjordanie, car
si
Israël cible et abat un leader politique ou militaire du Jihad
islamique en
Cisjordanie après qu¹un cessez-le-feu à Gaza est entré en vigueur, on
peut
s¹attendre à des tirs de représailles depuis Gaza, et le cessez-le-feu
aura
une durée de vie particulièrement courte.
Sans accord de cessez-le-feu, la probabilité d¹une opération terrestre
israélienne de grande échelle est de plus en plus grande. Un Qassam
finira
par atteindre une cible importante, un bus scolaire, un jardin
d¹enfants ou
un centre commercial. avec un grand nombre de victimes. Et le
gouvernement
n¹aura d¹autre choix que de réagir. Dans ce cas, le nombre de soldats
israéliens tués indirectement par les Qassams augmentera de zéro à Dieu
sait
combien. Les victimes palestiniennes se compteront probablement par
centaines, dont de nombreux civils innocents qui se trouveront pris
entre
deux feux.
Pendant les combats dans Gaza, le Hamas et d¹autres forces continueront
à
tirer des roquettes sur Israël, sur un rythme encore plus élevé. Et il
est
probable que le jour même où Israël décidera de quitter Gaza, d¹autres
roquettes seront tirées, ne serait-ce que pour démontrer que Tsahal,
avec
toute sa puissance, ne suffit pas à briser la volonté des Palestiniens
à
combattre.
Une attaque militaire contre Gaza n¹atteindra pas l¹objectif
stratégique de
stopper les attaques contre Israël. Seul un accord de cessez-le-feu
négocié
avec le Hamas peut l¹atteindre et arrêter les Qassam.
* Gershon Baskin est le co-directeur israélien du Israel/Palestine
Center
Source: http://www.ipcri.org/
Négocier avec le diable
Gershon Baskin *
Traduction : Gérard pour La Paix Maintenant
Israël ne négocie pas avec des terroristes. Cette "vérité" constitue
l¹une
des plus grandes manipulations de l¹opinion dans l¹histoire moderne de
la
communication politique. Car Israël a toujours négocié avec des
terroristes
et continuera à le faire aussi longtemps que nous continuerons à donner
de
la valeur à la vie humaine.
Israël négocie avec le Hezbollah pour obtenir des informations sur le
sort
de ses deux soldats enlevés. Israël négocié avec le Hamas pour obtenir
la
libération du soldat Gilad Shalit. Si cela était possible, Israël
négocierait directement avec Hassan Nasrallah et Khaled Mesh¹al en
personne.
Mais eux ne souhaitent pas négocier directement, de sorte que ce sont
des
médiateurs qui effectuent des allez et retours. Quasiment personne en
Israël
ne critique l¹idée de négocier avec ces terroristes pour obtenir la
libération des soldats kidnappés. La plupart des Israéliens sont prêts
à
payer un prix très lourd en échange de leur libération.
Alors, pourquoi la négociation d¹un cessez-le-feu avec le Hamas qui
pourrait
sauver des dizaines, voire des centaines de vies humaines, serait-elle
moins
légitime qu¹une négociation pour sauver une vie humaine ?
La direction du Hamas, à Damas et à Gaza, a envoyé des signaux qui
indiquent
qu¹un cessez-le-feu avec Israël les intéresse. Pour être clairs, ils
parlent
de ce qu¹ils nomment "tahadiyeh", une accalmie, et non d¹une "hudna",
un
cessez-le-feu à long terme, d¹après l¹histoire et des enseignements
musulmans.
Généralement, une tahadiyeh a une durée de vie relativement courte (un
an
environ), bien qu¹il n¹y ait pas de règle sur son calendrier, et elle
peut
être plus courte ou plus longue. Elle peut également être prolongée
au-delà
de l¹accord initial.
Les dirigeants du Hamas déclarent, en public et en privé, être prêts à
garantir que la tahadiyeh soit respectée par toutes les factions de
Gaza.
Ils ont déclaré aussi souhaiter un accord global, comprenant un échange
de
prisonniers (dont Shalit) et l¹ouverture des passages frontaliers de
Gaza,
en particulier à la frontière égyptienne.
Le Hamas comprend bien qu¹il doit d¹abord conclure un accord de
cessez-le-feu avant un accord sur la libération de Shalit, car une fois
Shalit hors de Gaza, rien ne protégera ses dirigeants du feu israélien.
Il
est donc plus que probable qu¹il n¹y aura aucun accord sur Shalit qui
ne
comprenne un cessez-le-feu. Ce que j¹ai tenté d¹expliquer à Ehoud
Olmert,
quelques jours après avoir été approché par des dirigeants du Hamas qui
proposaient un cessez-le-feu (il y a plus de 600 jours).
Le Hamas veut un accord sur les frontières de Gaza parce que, sans
dispositions concernant la circulation des biens et des personnes, la
population forcera de nouveau les frontières, ce qui pourrait entraîner
des
conséquences effrayantes.
Israël a imposé à la population de Gaza des sanctions économiques, dans
l¹espoir de la voir retourner sa colère contre le Hamas. Cette
politique
était vouée à l¹échec. Elle aurait eu de meilleures chances de succès
si les
Palestiniens de Gaza avaient pu constater soudain des améliorations
spectaculaires dans la Cisjordanie de Mahmoud Abbas, mais depuis
Annapolis,
pas un seul check point important n¹a été démantelé. Et, à l¹exception
de
Ramallah, il n¹y a eu aucune amélioration visible de la situation
économique
en Cisjordanie. En réalité, les gens constatent plutôt le contraire.
La brèche dans la frontière de Rafah, planifiée et effectuée par le
Hamas, a
suscité un large soutien public en faveur du gouvernement de Gaza. Les
chances que la pression économique exercée par Israël modifie quoi que
ce
soit à cette situation sont nulles. Cette pression va en réalité se
retourner contre Israël et contre Abbas, considéré par de nombreux
Palestiniens comme un collaborateur. C¹est la raison pour laquelle le
président palestinien et son premier ministre Fayyad prennent
aujourd¹hui
position, publiquement et en privé, contre ces sanctions économiques.
Un haut responsable du cabinet d¹Abbas m¹a confié qu¹aujourd¹hui, Abbas
souhaite un cessez-le-feu avec le Hamas. Abbas y met, bien entendu, ses
propres conditions. Pour l¹essentiel, il exige d¹être partie prenante
dans
les négociations et leur résultat, de sorte qu¹il soit bien clair pour
tout
le monde qu¹il est le président de toute la Palestine, y compris de
Gaza. Il
ne serait pas surprenant s¹il exigeait d¹Israël que l¹accord de
cessez-le-feu concerne également la Cisjordanie.
Si l¹on souhaite parvenir à un cessez-le-feu qui mettra un terme aux
tirs de
roquettes sur Sderot, il est important d¹y inclure la Cisjordanie, car
si
Israël cible et abat un leader politique ou militaire du Jihad
islamique en
Cisjordanie après qu¹un cessez-le-feu à Gaza est entré en vigueur, on
peut
s¹attendre à des tirs de représailles depuis Gaza, et le cessez-le-feu
aura
une durée de vie particulièrement courte.
Sans accord de cessez-le-feu, la probabilité d¹une opération terrestre
israélienne de grande échelle est de plus en plus grande. Un Qassam
finira
par atteindre une cible importante, un bus scolaire, un jardin
d¹enfants ou
un centre commercial. avec un grand nombre de victimes. Et le
gouvernement
n¹aura d¹autre choix que de réagir. Dans ce cas, le nombre de soldats
israéliens tués indirectement par les Qassams augmentera de zéro à Dieu
sait
combien. Les victimes palestiniennes se compteront probablement par
centaines, dont de nombreux civils innocents qui se trouveront pris
entre
deux feux.
Pendant les combats dans Gaza, le Hamas et d¹autres forces continueront
à
tirer des roquettes sur Israël, sur un rythme encore plus élevé. Et il
est
probable que le jour même où Israël décidera de quitter Gaza, d¹autres
roquettes seront tirées, ne serait-ce que pour démontrer que Tsahal,
avec
toute sa puissance, ne suffit pas à briser la volonté des Palestiniens
à
combattre.
Une attaque militaire contre Gaza n¹atteindra pas l¹objectif
stratégique de
stopper les attaques contre Israël. Seul un accord de cessez-le-feu
négocié
avec le Hamas peut l¹atteindre et arrêter les Qassam.
* Gershon Baskin est le co-directeur israélien du Israel/Palestine
Center
Source: http://www.ipcri.org/