Bonjour
A Lounès Matoub,
le Rebelle enragé, le porteur d’espoir,
qui savait parler le langage du peuple,
assassiné au virage de Tiberqouqin
jeudi 25 juin 1998 peu après 13 heures 30.
LA VOIE DU SAIGNEUR
« Ceux-là vivent, Seigneur !
les autres je les plains,
car de son vague ennui,
le néant les enivre,
car le plus lourd fardeau,
c’est d’exister sans vivre. »
Victor Hugo
Le poète (Il est dans un jardin. Il taille des rosiers en chantant) :
Une rose rose rose
c’est pas une simple chose
elle s’ouvre parle cause
entretient de toutes choses
Une rose rouge rouge
n’est pas une courge
elle frémit remue et bouge
Une rose jaune jaune
n’est pas...
La voix (derrière un buisson qui n’est pas ardent) : Seule ma rose a le droit de s’épanouir.
Le poète :Toutes doivent s’ouvrir à la lumière, elles auront chacune l’attention du jardinier.
La voix : Je t’enfermerai.
Le poète : Que de prisons ont éclaté par la magie du verbe. Ils sont des cents et des milles à savoir cultiver les mots.
La voix : Je plierai ta volonté rebelle à la discipline de ma Loi.
Le poète : Rebelle, je suis né pour ne pas me prosterner devant ta Loi. A un, je préfère le pluriel.
La voix : J’ai à commander l’échec.
Le poète : Et moi à briser ton commandement, j’arme la patience pour la réussite.
La voix : Je ferai couler des ruisseaux de larmes sur ton visage que j’ai buriné.
Le poète : Il n’est pas à ton image, il est perlé du sourire de l’enfant.
La voix : Seul mon enfant a droit au sourire quand il sera près de moi.
Le poète : Le sourire est à tous les enfants de la terre, ici et maintenant. Ils auront chacun une fenêtre ouverte sur les mers et les continents.
La voix : Je vous priverai de bonheur.
Le poète : Le bonheur ne s’offre pas. C’est par touches et notes qui s’égrainent qu’il s’édifie.
La voix : Je détruirai tes édifices de mots.
Le poète : Babel s’est multipliée pour ne plus venir vers toi. Je suis le poète qui façonne des mots pluriels pour dire. Ta voix n’habite pas ma voix, elle n’est qu’une voie dans les chemins qui s’ouvrent.
La voix : Je t’ôterai tes espérances.
Le poète : J’ai le rêve pour ériger mes espoirs de granit et la palette pour leur donner la couleur de la vie.
La voix : Traître ! Je te tuerai !
Le poète : Je serai l’enfant martyr. Les martyrs savent mourir comme ils savent vivre dans le cœur des vivants. Ayant achevé de devenir, mon souvenir ne sera pas mon accomplissement. Il n’y aura pas de commémoration après ma mort, mais on célébrera un jour nouveau. Il sera la fête des Imazighen, les hommes libres, partout où ils seront. (il chante sur l’air de Qassaman)
Ul aygher nerdj’ assirem, an nsenned f ssber ;
Amsedrar ur ihekkem,ghas yeghra yezwer ;
Afus l-lbattel itswaleqqem, lghella s d ccerr ;
Jegren s eddin d taerabt tamurt l-Lezzyer ;
D aghurru, d aghurru, d aghurru.
Pourquoi désirer l’attente d’un espoir,
Même savant et même brave le Kabyle
N’aura jamais le pouvoir
L’ente du greffon cède à la barbarie
Le beau sujet perd son éclat
L’Algérie teinte d’arabe et de religion ternit
De trahison, trahison, trahison
( On entend un bruit de bottes, apparaissent un militaire et un « barbu », tous deux armés de kalachnikov, on entend un bruit de rafales, le poète meurt. La foule entre et reprend en chœur et achève l’hymne du poète.)
Pauvres simplets, vous consignez la porte
Croyant détenir la clé du pouvoir, pauvres de vous !
Qui a goûté la bonne chair ne quitte pas la table.
Le pays est déchiré, maintenant en êtes-vous conscients,
Est-ce ainsi, mes frères, que l’Algérie renaîtra
De la trahison, trahison, trahison.
Nombreux ceux qui plantent leurs serres sur le pays :
L’un s’en va rempli, l’autre arrive et prend les restes.
La solidaire fraternité, atteinte, ne peut se relever,
Le mal, plus encorné, enfile les montagnes de la résistance
Le temps donné au temps tarde à débarrasser l’Algérie
De la trahison, trahison, trahison.
Combien même, affamés et sans nul ressort,
Les bien nés ne fléchissent jamais sous les chaînes de la servitude.
Combien même, le soleil darde ses rayons, ils ne quittent le chemin
Combien même, à flots le sang est versé, ils ne reculent
Lucides et armés de sagesse ils libèrent l’Algérie
De la trahison, trahison, trahison.
La voix (restée seule après la mort du poète) : Je suis fatigué des deuils, il n’est plus d’échange pour moi. Je n’entends que ma propre voix que les hommes libres me renvoient dans mon désert.
Ne restent plus que les échos froids de la voix, comme dans un temple vide, qui s’éteint, qui s’éteint, qui s’éteint.
Ps: contribution d'Ali Sayad.
Cordialement
A Lounès Matoub,
le Rebelle enragé, le porteur d’espoir,
qui savait parler le langage du peuple,
assassiné au virage de Tiberqouqin
jeudi 25 juin 1998 peu après 13 heures 30.
LA VOIE DU SAIGNEUR
« Ceux-là vivent, Seigneur !
les autres je les plains,
car de son vague ennui,
le néant les enivre,
car le plus lourd fardeau,
c’est d’exister sans vivre. »
Victor Hugo
Le poète (Il est dans un jardin. Il taille des rosiers en chantant) :
Une rose rose rose
c’est pas une simple chose
elle s’ouvre parle cause
entretient de toutes choses
Une rose rouge rouge
n’est pas une courge
elle frémit remue et bouge
Une rose jaune jaune
n’est pas...
La voix (derrière un buisson qui n’est pas ardent) : Seule ma rose a le droit de s’épanouir.
Le poète :Toutes doivent s’ouvrir à la lumière, elles auront chacune l’attention du jardinier.
La voix : Je t’enfermerai.
Le poète : Que de prisons ont éclaté par la magie du verbe. Ils sont des cents et des milles à savoir cultiver les mots.
La voix : Je plierai ta volonté rebelle à la discipline de ma Loi.
Le poète : Rebelle, je suis né pour ne pas me prosterner devant ta Loi. A un, je préfère le pluriel.
La voix : J’ai à commander l’échec.
Le poète : Et moi à briser ton commandement, j’arme la patience pour la réussite.
La voix : Je ferai couler des ruisseaux de larmes sur ton visage que j’ai buriné.
Le poète : Il n’est pas à ton image, il est perlé du sourire de l’enfant.
La voix : Seul mon enfant a droit au sourire quand il sera près de moi.
Le poète : Le sourire est à tous les enfants de la terre, ici et maintenant. Ils auront chacun une fenêtre ouverte sur les mers et les continents.
La voix : Je vous priverai de bonheur.
Le poète : Le bonheur ne s’offre pas. C’est par touches et notes qui s’égrainent qu’il s’édifie.
La voix : Je détruirai tes édifices de mots.
Le poète : Babel s’est multipliée pour ne plus venir vers toi. Je suis le poète qui façonne des mots pluriels pour dire. Ta voix n’habite pas ma voix, elle n’est qu’une voie dans les chemins qui s’ouvrent.
La voix : Je t’ôterai tes espérances.
Le poète : J’ai le rêve pour ériger mes espoirs de granit et la palette pour leur donner la couleur de la vie.
La voix : Traître ! Je te tuerai !
Le poète : Je serai l’enfant martyr. Les martyrs savent mourir comme ils savent vivre dans le cœur des vivants. Ayant achevé de devenir, mon souvenir ne sera pas mon accomplissement. Il n’y aura pas de commémoration après ma mort, mais on célébrera un jour nouveau. Il sera la fête des Imazighen, les hommes libres, partout où ils seront. (il chante sur l’air de Qassaman)
Ul aygher nerdj’ assirem, an nsenned f ssber ;
Amsedrar ur ihekkem,ghas yeghra yezwer ;
Afus l-lbattel itswaleqqem, lghella s d ccerr ;
Jegren s eddin d taerabt tamurt l-Lezzyer ;
D aghurru, d aghurru, d aghurru.
Pourquoi désirer l’attente d’un espoir,
Même savant et même brave le Kabyle
N’aura jamais le pouvoir
L’ente du greffon cède à la barbarie
Le beau sujet perd son éclat
L’Algérie teinte d’arabe et de religion ternit
De trahison, trahison, trahison
( On entend un bruit de bottes, apparaissent un militaire et un « barbu », tous deux armés de kalachnikov, on entend un bruit de rafales, le poète meurt. La foule entre et reprend en chœur et achève l’hymne du poète.)
Pauvres simplets, vous consignez la porte
Croyant détenir la clé du pouvoir, pauvres de vous !
Qui a goûté la bonne chair ne quitte pas la table.
Le pays est déchiré, maintenant en êtes-vous conscients,
Est-ce ainsi, mes frères, que l’Algérie renaîtra
De la trahison, trahison, trahison.
Nombreux ceux qui plantent leurs serres sur le pays :
L’un s’en va rempli, l’autre arrive et prend les restes.
La solidaire fraternité, atteinte, ne peut se relever,
Le mal, plus encorné, enfile les montagnes de la résistance
Le temps donné au temps tarde à débarrasser l’Algérie
De la trahison, trahison, trahison.
Combien même, affamés et sans nul ressort,
Les bien nés ne fléchissent jamais sous les chaînes de la servitude.
Combien même, le soleil darde ses rayons, ils ne quittent le chemin
Combien même, à flots le sang est versé, ils ne reculent
Lucides et armés de sagesse ils libèrent l’Algérie
De la trahison, trahison, trahison.
La voix (restée seule après la mort du poète) : Je suis fatigué des deuils, il n’est plus d’échange pour moi. Je n’entends que ma propre voix que les hommes libres me renvoient dans mon désert.
Ne restent plus que les échos froids de la voix, comme dans un temple vide, qui s’éteint, qui s’éteint, qui s’éteint.
Ps: contribution d'Ali Sayad.
Cordialement
Commentaire