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Un test contre l'E. coli victime des lourdeurs de l'administration

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  • Un test contre l'E. coli victime des lourdeurs de l'administration

    Le 21 mars, les supermarchés Carrefour et Monoprix ont commencé à alerter les consommateurs que plus de deux tonnes de viande hachée infectée par la bactérie Escherichia coli avaient été vendues dans leurs magasins de la France entière.

    La Socopa, l'une des principales entreprises de préparation alimentaire, a révélé que des tests de routine effectués sur de la viande préparée les 10 et 11 mars avaient détecté la bactérie, mais sa présence n'a été confirmée que le 21 mars. Ce laps de temps a suffi à ce que les produits arrivent dans l'assiette des consommateurs. Au moins 40 personnes sont tombées malades. La bactérie cause non seulement des troubles intestinaux violents mais aussi des atteintes rénales, et peut être mortelle.

    Si GeneSystems arrive à ses fins, ce scénario ne se reproduira plus jamais. L'entreprise de biotechnologie fondée il y sept ans et située près de Rennes affirme que sa technologie peut réduire le délai nécessaire pour confirmer la présence d'E. coli dans la viande de boeuf crue de plusieurs jours à huit heures. C'est assez rapide pour empêcher les produits d'arriver dans les supermarchés.

    GeneSystems, qui a levé près de 10 millions d'euros de capital-risque, a accompli cet exploit grâce à une technique de biologie moléculaire baptisée réaction de polymérisation en chaîne (PCR) et qui produit jusqu'à 100 milliards de copies d'un brin d'ADN en un seul après-midi, contrairement à la méthode traditionnelle, très lente, qui repose sur la mise en culture. Avec un échantillon important sur lequel travailler, les techniciens de laboratoire peuvent utiliser leurs équipements de diagnostic pour repérer plus facilement les bactéries telles que l'E. coli. La technologie de l'entreprise permet également de repérer la Salmonella, la Legionella et la Listeria.

    Pour le bien du grand public


    La PCR a été mise au point en 1983 par Kary Mullis, un scientifique américain qui a reçu en 1993 le prix Nobel pour ses travaux. Cette technique est aujourd'hui utilisée pour effectuer tout un éventail de tests génétiques, et également pour détecter le Sida, la sepsie et les infections urinaires. GeneSystems est parti du processus de PCR de base et l'a couplé avec de l'automatisation. Ainsi, son utilisation n'est plus limitée à la recherche ou aux tests spécialisés qui ciblent un seul agent.

    Gabriel Festoc, docteur en microbiologie de 35 ans, directeur et créateur de GeneSystems, a déclaré : "Mon objectif était de démocratiser la biologie moléculaire en combinant la PCR avec des biopuces. Le public est gagnant parce que les résultats, plus rapides et plus précis, amélioreront la sécurité alimentaire et réduiront les risques sanitaires."

    Comparée aux tests précédents pour l'E. coli, la solution de GeneSystems est remarquablement facile et rapide. Elle consiste en un "microlaboratoire" de la taille d'un CD, dans lequel sont gravées 36 microchambres, de minuscules puits, remplis de réactifs nécessaires à la détection et à la quantification de multiples cibles ADN. Une fois chargé du matériel du test, le disque est inséré dans une machine qui peut exécuter jusqu'à 12 tests simultanés, ce qui accélère les résultats et diminue le risque d'erreur humaine.


    Bouillon de culture

    Un seul point noir, mais il est de taille : GeneSystems se trouve confronté à une quantité impressionnante de réglementations et à des institutions de santé publique, européennes en général et françaises en particulier, réfractaires au changement, et qui ne sont pas prêtes à accepter des résultats basés sur la PCR. Selon Darryl Spurling, directeur général de la société, l'industrie agroalimentaire et ses régulateurs sont toujours "très attachés" aux tests lents utilisant les milieux de culture, une méthode qui a fait son apparition pour la première fois en 1887.

    Les inconvénients de cette méthode sont apparus clairement lors de la récente contamination d'E. coli en France, quand la lenteur du processus de confirmation de la présence de la bactérie a permis à de la viande contaminée de se retrouver dans les linéaires de grandes surfaces. GeneSystems n'offre pas simplement l'avantage de la rapidité. La technologie est aussi la première au monde à pouvoir détecter cinq des souches d'E. coli les plus dangereuses, alors que les milieux de culture traditionnels permettent uniquement de déceler la présence de la souche 0157 grâce à un test qui utilise des anticorps.

    E. coli n'est pas le seul pathogène que GeneSystems peut détecter. En 1998, la France avait connu une série de cas de légionellose, la pneumonie virulente causée par la bactérie Legionella, qui prospère dans les réseaux d'alimentation en eau. Le gouvernement a voté une loi exigeant que les tours aéroréfrigérantes des usines et des douches publiques soient testées régulièrement, donnant ainsi naissance à un marché de tests pour la légionellose d'une valeur de plus de 100 millions d'euros par an.

    Les commerçants devancent le gouvernement

    Il faut à la culture de la Legionella au moins deux semaines pour produire des résultats, mais GeneSystems peut la repérer en seulement trois heures. Malgré ce qui est clairement un atout en matière de santé publique, la société se bat depuis 2000 pour faire accepter les tests basés sur la PCR. GeneSystems fait pression sur le gouvernement français pour que la loi qui spécifie l'utilisation de milieu de culture soit amendée, mais ignore quand cette décision pourrait être prise.

    En attendant, une application plus générale du test GeneSystems pour l'E. coli pourrait se concrétiser bientôt. La technologie a obtenu de bons résultats lors de tests indépendants effectués par des laboratoires d'État européens, y compris le laboratoire national de référence allemand, à Berlin. Mais la PCR ne peut pas être utilisée à l'échelle européenne tant que l'Union n'aura pas mis au point un test "de référence", dont un projet a déjà circulé, qui couvrirait les cinq souches d'E. coli que GeneSystems peut détecter. Darryl Spurling déclare s'attendre à ce qu'une référence formelle soit adoptée en 2009, ce qui donnerait officiellement le feu vert à sa technologie.

    Entre-temps, la société bretonne ne se tourne pas les pouces. Gabriel Festoc explique : "Heureusement, les supermarchés ne vont pas attendre que la réglementation gouvernementale rattrape son retard." Bien que, légalement, les commerçants qui vendent de la viande contaminée ne soient pas en faute, ce sont eux qui ont le plus à perdre en termes d'image de marque et de confiance du public. D'après GeneSystems, dans les semaines à venir, au moins une des grandes chaînes européennes de supermarchés devrait signer un contrat avec l'entreprise.

    Par BusinessWeek
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