Deux études publiées cette semaine tablent sur une hausse de 80 cm à 1 mètre à la fin du siècle. Beaucoup moins que le 1,60 m annoncé en décembre dernier.
C'EST le énième rebondissement d'un débat qui n'a pas fini de faire couler beaucoup d'encre. Sous-estimée ? Surestimée ? La hausse du niveau des mers que risque d'entraîner le changement climatique fait des vagues. Si l'on en croit une étude qui paraît dans le numéro de vendredi de la revue Science, son évolution ne sera peut-être pas aussi catastrophique que certains l'avaient laissé entendre voilà quelques mois. Elle sera vraisemblablement, en revanche, bien supérieure aux prévisions du Groupe intergouvernemental d'experts pour l'évolution du climat (Giec).
 
Retour sur les différents épisodes de cette polémique. En février 2007, les experts gouvernementaux du Giec (ou IPCC, en anglais) annoncent, dans leur quatrième rapport, que le niveau des mers pourrait augmenter de 18 à 59 cm vers 2100, avec une fourchette plus vraisemblablement comprise entre 28 et 43 cm. Cette prudence dans les prévisions est assortie d'explications. « On ne saurait exclure des valeurs plus élevées, mais la compréhension de ces effets est trop limitée pour évaluer la vraisemblance ou fournir une meilleure estimation ou un seuil maximum », justifient les experts. Ces derniers font allusion aux phénomènes de rétroaction, encore mal connus, susceptibles d'accélérer la fonte du Groenland et de l'Antarctique, deux des trois facteurs contribuant à l'élévation du niveau des eaux avec la fonte des petits glaciers.
 
D'ailleurs, le jour même paraît dans la revue Science une étude indiquant que la hausse du niveau des mers a été 50 % plus rapide entre 1990 et 2001 que ne l'avaient estimé ces mêmes experts, dans leur troisième rapport de 2001. Stefan Rahmstorf affirme que les données recueillies montrent une élévation annuelle de 3,3 mm, soit 50 % de plus que les 2 mm annoncés. Le chercheur allemand table, lui, sur une élévation moyenne à long terme de 50 cm à 1,4 mètre.
 
Épouvantail
 
« C'est un des paramètres les plus difficiles à modéliser », tempère Anny Cazenave, chercheuse au laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (Legos) de Toulouse et coauteur de cette étude. Selon elle, « on ne peut pas exclure que cette différence corresponde à une oscillation sur une échelle de temps décennale, et non à une accélération du processus. Or les modèles, qui ne voient que les tendances à long terme, ne prennent pas en compte ces oscillations ».
 
Les prévisions alarmistes lancées depuis, en décembre 2007, n'ont donc guère surpris. Les valeurs avaient pourtant de quoi dérouter : on parle alors d'1,60 mètre d'ici à la fin du siècle.
 
Les chiffres les plus fous circulent alors. D'aucuns se plaisent à rappeler qu'une fonte totale du Groenland entraînerait une élévation du niveau des océans de sept mètres. Voici 9 000 ans, c'est ce qu'avait provoqué la fonte de la banquise des Laurentides au Québec (à raison de 1,3 mètre par an), suivie par un bond de 5 mètres 1 500 ans plus tard. D'ailleurs, une étude parue en ligne dimanche dernier dans la revue Nature Geoscience vient de montrer que cette fonte avait été beaucoup plus rapide que prévu. Mais les deux situations ne sont pas comparables : le Groenland est baigné par des eaux froides et sa géologie diffère de celle de l'Amérique du Nord. Cette perspective est néanmoins régulièrement agitée comme un épouvantail.
 
Les glaciologues de l'université du Colorado remettent aujourd'hui les pendules à l'heure : une hausse supérieure à deux mètres n'est pas réaliste. Elle ne serait possible « que si toutes les variables physiques connaissaient une accélération maximum ». La valeur la plus plausible selon eux est de 80 cm. Ils rejoignent ainsi les estimations des auteurs des travaux sur le Groenland, qui tablent sur un mètre. Ce qui revient néanmoins à pousser à l'exil les 100 millions de personnes vivant à moins d'un mètre au-dessus du niveau de la mer.
 
- Le Figaro
					C'EST le énième rebondissement d'un débat qui n'a pas fini de faire couler beaucoup d'encre. Sous-estimée ? Surestimée ? La hausse du niveau des mers que risque d'entraîner le changement climatique fait des vagues. Si l'on en croit une étude qui paraît dans le numéro de vendredi de la revue Science, son évolution ne sera peut-être pas aussi catastrophique que certains l'avaient laissé entendre voilà quelques mois. Elle sera vraisemblablement, en revanche, bien supérieure aux prévisions du Groupe intergouvernemental d'experts pour l'évolution du climat (Giec).
Retour sur les différents épisodes de cette polémique. En février 2007, les experts gouvernementaux du Giec (ou IPCC, en anglais) annoncent, dans leur quatrième rapport, que le niveau des mers pourrait augmenter de 18 à 59 cm vers 2100, avec une fourchette plus vraisemblablement comprise entre 28 et 43 cm. Cette prudence dans les prévisions est assortie d'explications. « On ne saurait exclure des valeurs plus élevées, mais la compréhension de ces effets est trop limitée pour évaluer la vraisemblance ou fournir une meilleure estimation ou un seuil maximum », justifient les experts. Ces derniers font allusion aux phénomènes de rétroaction, encore mal connus, susceptibles d'accélérer la fonte du Groenland et de l'Antarctique, deux des trois facteurs contribuant à l'élévation du niveau des eaux avec la fonte des petits glaciers.
D'ailleurs, le jour même paraît dans la revue Science une étude indiquant que la hausse du niveau des mers a été 50 % plus rapide entre 1990 et 2001 que ne l'avaient estimé ces mêmes experts, dans leur troisième rapport de 2001. Stefan Rahmstorf affirme que les données recueillies montrent une élévation annuelle de 3,3 mm, soit 50 % de plus que les 2 mm annoncés. Le chercheur allemand table, lui, sur une élévation moyenne à long terme de 50 cm à 1,4 mètre.
Épouvantail
« C'est un des paramètres les plus difficiles à modéliser », tempère Anny Cazenave, chercheuse au laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (Legos) de Toulouse et coauteur de cette étude. Selon elle, « on ne peut pas exclure que cette différence corresponde à une oscillation sur une échelle de temps décennale, et non à une accélération du processus. Or les modèles, qui ne voient que les tendances à long terme, ne prennent pas en compte ces oscillations ».
Les prévisions alarmistes lancées depuis, en décembre 2007, n'ont donc guère surpris. Les valeurs avaient pourtant de quoi dérouter : on parle alors d'1,60 mètre d'ici à la fin du siècle.
Les chiffres les plus fous circulent alors. D'aucuns se plaisent à rappeler qu'une fonte totale du Groenland entraînerait une élévation du niveau des océans de sept mètres. Voici 9 000 ans, c'est ce qu'avait provoqué la fonte de la banquise des Laurentides au Québec (à raison de 1,3 mètre par an), suivie par un bond de 5 mètres 1 500 ans plus tard. D'ailleurs, une étude parue en ligne dimanche dernier dans la revue Nature Geoscience vient de montrer que cette fonte avait été beaucoup plus rapide que prévu. Mais les deux situations ne sont pas comparables : le Groenland est baigné par des eaux froides et sa géologie diffère de celle de l'Amérique du Nord. Cette perspective est néanmoins régulièrement agitée comme un épouvantail.
Les glaciologues de l'université du Colorado remettent aujourd'hui les pendules à l'heure : une hausse supérieure à deux mètres n'est pas réaliste. Elle ne serait possible « que si toutes les variables physiques connaissaient une accélération maximum ». La valeur la plus plausible selon eux est de 80 cm. Ils rejoignent ainsi les estimations des auteurs des travaux sur le Groenland, qui tablent sur un mètre. Ce qui revient néanmoins à pousser à l'exil les 100 millions de personnes vivant à moins d'un mètre au-dessus du niveau de la mer.
- Le Figaro

