Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Philippines : "Le typhon Haiyan, au moins comparable au tsunami de 2004"

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Philippines : "Le typhon Haiyan, au moins comparable au tsunami de 2004"

    Le Point.fr -
    Edith Van Wijngaarden, directrice du programme Philippines de Handicap International, explique pourquoi l'aide aux victimes tarde autant. Entretien.


    Propos recueillis par ARMIN AREFI

    Il aura fallu une semaine pour que l'aide humanitaire s'accélère enfin en direction des rescapés du féroce ouragan Haiyan. L'arrivée jeudi aux Philippines du porte-avions George Washington et de sept autres navires américains laissait enfin entrevoir une lueur d'espoir pour le demi-million de sinistrés du typhon, qui a fait au moins 4 460 morts, selon l'ONU. Directrice du programme Philippines de l'ONG française Handicap International, Edith Van Wijngaarden, basée à Manille, décrit pour Le Point.fr l'enfer des conditions de secours sur le terrain et explique comment les Français peuvent venir en aide aux populations démunies.



    Le Point.fr : La ville de Tacloban, détruite à 90 %, symbolise aujourd'hui le drame causé par Haiyan. D'autres villes sont-elles touchées ?

    Edith Van Wijngaarden : Outre Tacloban, l'ouragan a également touché la ville de Guiuan, à l'est, qui est quasiment inaccessible. Mais plus que des villes, l'ouragan a surtout frappé des régions entières. C'est le cas de l'île de Leyte, du nord de l'île de Cebu, et de la côte est de l'île de Panay.

    Comment votre aide s'organise-t-elle sur le terrain ?

    Trois équipes d'urgence de Handicap International sont arrivées de France mardi soir. Elles se trouvent sur l'île de Cebu depuis jeudi soir, d'où elles doivent rejoindre les zones sinistrées. Une mission, montée conjointement avec des ONG médicales, doit se rendre dans la ville de Tacloban pour travailler aux soins et à la réhabilitation des populations. Une deuxième doit se rendre sur l'île de Panay, notamment dans la ville d'Iloilo. La dernière part pour l'île de Leyte. Dans les deux derniers cas, il s'agit d'évaluer la situation et de distribuer des kits d'urgence qui proviennent de nos stocks de Dubaï. Ils comprennent des tentes, des couvertures et du matériel de cuisine.

    Vous ne distribuez pas de nourriture ?

    Ce n'est pas notre premier domaine d'intervention.

    Quels sont actuellement les besoins des populations ?

    Des besoins de base : l'accès à la nourriture, à l'eau et à la santé.

    L'ONU a reconnu jeudi que l'aide aux victimes était trop lente...

    C'est tout à fait exact. Plus d'une semaine après la catastrophe, l'aide humanitaire n'arrive toujours pas à être distribuée.

    Pourquoi ?

    C'est un problème d'accès aux zones sinistrées. La coordination entre organisations se passe très bien, mais il existe d'énormes obstacles en termes de logistique, ce qui nous prend beaucoup de temps. C'est personnellement difficile à vivre quand on voit les besoins de la population.

    Quels sont ces obstacles ?

    Les routes posaient un gros problème jusqu'à mercredi. Elles sont désormais quasiment toutes praticables, même si le trafic y est très difficile en raison des nombreux débris subsistant sur la chaussée. Le problème est que l'aide doit atteindre des îles. Il nous manque des avions, des camions et des bateaux. Et une fois sur place, il faut que les vivres soient distribués. Or, il n'y a pas d'essence sur le chemin. Il faut enfin que nos équipes puissent rester sur place. Tous ces moyens lourds doivent venir de l'étranger.

    Un porte-avions américain est toutefois arrivé dans l'Archipel, avec de nombreux équipements et 21 hélicoptères...

    Son aide et ses importants moyens nous seront en effet très précieux.

    Depuis la catastrophe, le pays est en proie à de nombreux pillages. Qu'en est-il ?

    C'est vrai, mais cela me paraît compréhensible. Les populations n'ont pas mangé depuis plus d'une semaine et se précipitent donc sur ce qu'elles trouvent. Beaucoup de sacs de riz sont ainsi volés. Mais il s'agit ici de survie, pas de banditisme.

    On assiste à une guerre des chiffres, entre l'ONU qui dénombre 4 460 morts, alors que le bilan officiel du gouvernement est de 3 621 morts. Qui croire ?

    En ce qui nous concerne, on ne fait pas de décompte, mais je me fie davantage aux chiffres de l'ONU qui rapporte les décès confirmés. Quant aux 10 000 morts qui ont été un temps annoncées par les autorités, je pense que le nombre est surestimé. Maintenant, le bilan, déjà très lourd, n'est pas définitif. On découvre chaque jour des cadavres et des blessés.

    Estimez-vous que le gouvernement philippin n'a pas su anticiper le drame ?

    Le gouvernement a fait au mieux en évacuant au préalable les populations. Avant le drame, nous menions avec les autorités locales et d'autres ONG internationales des travaux de prévention des catastrophes, afin d'aider les populations à mieux appréhender ce type de risques. Ainsi, dans de nombreuses zones, les Philippins ont été placés dans des centres d'évacuation, mais ces constructions n'ont pas résisté à la force du typhon et au raz-de-marée qui a suivi. Les maisons traditionnelles construites dans des matériaux légers n'avaient aucune chance de résister. Sans compter que des maisons en dur ont également été détruites. Si on voulait sauver tout le monde, il aurait fallu évacuer des îles entières. Personne n'avait envisagé un ouragan d'une telle ampleur.

    L'archipel avait-il déjà subi une telle tempête ?

    Haiyan est une catastrophe naturelle sans précédent dans le pays. Mais les plus gros dégâts n'ont pas été causés par le typhon lui-même, mais par le raz-de-marée qu'il a provoqué, avec des vagues dépassant les deux mètres.

    Comment les Français peuvent-ils se mobiliser ? Les erreurs commises après le tsunami de 2004 en Asie du Sud-Est ne risquent-elles pas de se répéter ?

    Nous avons besoin d'un appui financier. L'erreur qui a été commise en 2004 vient des pressions qui ont été exercées pour que l'argent récolté soit dépensé en six mois, alors que les besoins nécessitaient une réponse beaucoup plus longue. En ce qui concerne Handicap International, je peux garantir que nos comptes et nos activités sont scrupuleusement contrôlés.

    Les besoins humanitaires après le passage de Haiyan sont-ils comparables à ceux qui ont suivi le tsunami de 2004 ?

    Les personnes qui ont connu les deux catastrophes estiment que les deux drames sont au moins comparables. Seul l'avenir dira si le typhon Haiyan a été pire que le tsunami de 2004.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
Chargement...
X