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Racisme: le bal des faux culs

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  • Racisme: le bal des faux culs

    Par
    Sébastien Fontenelle


    ven, 15/11/2013 - 18:00(bakchich)


    Racisme: le bal des faux culs



    Soudain: les mêmes beaux esprits qui ont libéré dans l'espace public, sous le sceau du «parler vrai», des discours d'exclusion, découvrent, effarés, que la France est prise de racisme...

    Le racisme, nous dit le dictionnaire, est une «hostilité systématique contre un groupe social». Depuis le début des années 2000, cette hostilité s’exerce principalement contre les musulman(e)s - mais elle vise également les Noir(e)s et les Roms (liste non exhaustive).
    Qui la nourrit, depuis tout ce temps, sous le très orwellien prétexte d’user d’une liberté d’expression que menacerait un prétendu «terrorisme» (appelé aussi «tyrannie») de la «bien-pensance», d’analyses (et autres commentaires) «décomplexés», (presque) toujours présentés comme de courageux bris de «tabous»?
    D’éminent(e)s oligarques. Des éditocrates, comme Claude Imbert, fondateur de l’hebdomadaire Le Point, qui fut à sa manière un pionnier lorsqu’il déclara qu’il était «un peu islamophobe» - et qu’il avait, après tout, bien «le droit de le dire». (Ou comme Jean Daniel, co-fondateur du Nouvel Observateur, qui s’est tôt fait une gloire d’avoir tôt adressé à François Mitterrand cette mise en garde: «Le clocher de votre affiche électorale, dans peu de temps, vous le verrez entouré par deux minarets.»)



    Des penseurs de médias, comme Alain Finkielkraut, qui a, au fil des ans, beaucoup donné de sa personne. Quand il a considéré, par exemple, qu’il n’était pas spécialement scandaleux de se livrer – sur la foi de mystérieux critères - au comptage des «collaborateurs juifs» d’une émission de France Culture, pour déplorer qu’ils soient en «nette surreprésentation». Ou quand il a jugé que la journaliste italienne Oriana Fallaci usait, certes, dans le pamphlet où elle excrétait que «les fils d’Allah se reproduisent comme des rats», d’un vocabulaire un peu outrancier - mais qu’elle avait cependant l’«insigne mérite de ne pas se laisser intimider par le mensonge vertueux» et de s’effrorcer de regarder la réalité en face». Ou quand il a estimé (après s’être livré à leur comptage) qu’il y avait quand même beaucoup de joueurs noirs dans l’équipe de France de football, et que ça faisait «ricaner toute l’Europe» – non sans préciser: «Si on fait une telle remarque en France, on va en prison.» (Mais ces diverses considérations – suivies par tant d’autres qu’il serait vain de vouloir toutes les mentionner –, qui dessinaient une assez incommodante philosophie, n’ont jamais empêché qu’il soit considéré par ses ami[e]s [et complices] éditocrates comme un expert ès-tout, dont les avis méritaient d’être pieusement popularisés: ce n’est que tout récemment que les tenanciers des comptoirs de presse et de médias où il déclame depuis dix ans ses sentences identitaires ont [timidement] commencé à entrevoir qu’elles n’étaient peut-être pas si délicieusement anticonformistes et stimulantes qu’ils ne l’avaient jusqu’alors cru.)

    L'insitutionnalisation de la mal-pensance

    L’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République a scellé en 2007 l’institutionnalisation de cette «mal-pensance» – puisque plus une semaine ne s’est après cela écoulée sans que des proférations systématiquement hostiles à de très ciblés groupes sociaux ne soient dites par les plus haut(e)s représentant(e)s de l’État: par son nouveau chef, dont le tristement fameux «discours de Grenoble» allait marquer d’une pierre blanche l’histoire de l’accablement des Roms, ou par tel ministre pétri de l’idée qu’il y avait en France «trop» de musulman(e)s.
    François Hollande, au lendemain de son élection, s’est doté d’un ministre de l’Intérieur dont chacun(e) pouvait assez facilement prédire qu’il maintiendrait cette détestable tradition - et c’est très exactement ce qui s’est passé, puisque Manuel Valls (1) depuis sa nomination, se complaît, comme ses prédécesseurs, dans la stigmatisation des mahométan(e)s et des Roms (liste non exhaustive): c’est ce qui lui vaut d’être poursuivi par le MRAP.
    Bien évidemment: cette libération, dans l’espace public, d’une libre parole affranchie de la pesanteur des retenues qui empêchaient naguère la récitation «républicaine» de versets pris dans la propagande de l’extrême droite produit des effets concrets. La Commission nationale consultative des droits de l’homme NCDH, qui n’est pas exactement un repaire d’islamo-gauchistes, constate tous les ans, désormais, que «le discours d’une partie de la classe politique», qui rompt «avec un discours “politiquement correct“ qui interdisait de mettre en cause certaines catégories de la population en fonction de leurs origines», et que «cela vient renforcer la légitimité d’attaques visant nommément tel ou tel groupe».
    En 2012, cet organisme dénonçait «l’impact que peuvent avoir certains discours politiques ou certains débats nationaux sur l’attitude de quelques-uns de nos concitoyens vis-à-vis de la population musulmane», et concluait: «Il est nécessaire de veiller à ce que ces différents débats publics n’aient pas pour résultat de faire augmenter des sentiments de défiance (à l’égard de l’islam), car ces sentiments pourraient à terme entraîner une augmentation réellement significative des comportements antimusulmans.» Cette mise en garde, remarquablement explicite, a-t-elle été entendue? Absolument pas. Moyennant quoi: depuis de longs mois, les profanations de mosquées et les agressions de musulmanes voilées se multiplient, dans des proportions terrifiantes.

    Le grand silence

    Mais les forgerons de presse de l’opinion, loin de s’alarmer de cette banalisation de la violence raciste, l’ensevelissent sous un grand silence - et continuent de confectionner, plutôt que des enquêtes sur cette monstruosité, des «dossiers» (et autres «débats») anxiogènes où l'islam est systématiquement mis en examen, et dans lesquels les profanateurs islamophobes pourront éventuellement se réassurer.
    De fait aussi: profitant de la levée des inhibitions qui empêchaient naguère que trop d’ignominies soient explicitement formulées, tel édile de la droite dite «modérée» - produit de longs siècles d’évolution de la civilisation d’Occident -, peut désormais dire posément qu’Adolf Hitler n’a peut-être «pas tué assez» de Roms - et cela suscite éventuellement l’ire, passagère, des forgerons de presse et de médias de l’opinion. Mais ils reviennent vite à leurs fondamentaux, et continuent de psalmodier que le refus d’entériner la normalisation de la xénophobie nourrit des «polémiques en toc» - et de pointer, sous le sceau toujours du franc-parler, «le comportement délinquant de certains Roms».
    Et de fait encore: cela fait de longs mois qu’une ministre en exercice endure, en sus d’autres ignominies racistes, l’abjection de se voir traitée de «singe». Mais il aura fallu attendre que cette infamie soit récupérée par une feuille d’extrême droite, pour qu’enfin les oligarchies se décident à réagir.

    Démonstration

    Et les voilà – les mêmes, exactement, qui depuis tant d’années scandent que tout peut et doit être dit (car l’«angélisme» est passé de mode) et s’obstinent à ne pas voir les horribles effets chiffrés de cette désinhibition - qui désormais jurent qu’en ces matières: il ne faut «plus rien laisser passer», et proclament l’état de «sursaut».
    Voilà que les mêmes briseurs de tabous, qui depuis tant d’années brisent des digues langagières à grands coups d’«anticonformisme», déplorent, dans un exceptionnel élan de tartufferie, que trop de tabous aient été brisés, et que trop de digues aient sauté.
    Voilà que les mêmes éditocrates qui depuis tant d’années usinent (dans le meilleur des cas) de l’anxiété antimusulmane distribuent des cartons rouges aux fabricants de «unes indignes» - non sans fustiger, tout de même, «ceux qui par un excès de bien-pensance font le lit des racismes». Voilà que, dans le même temps que d’anciens ministres de Nicolas Sarkozy, que les saillies de l’intéressé n’ont jamais dissuadé de le servir très fidèlement, disent leur dégoût de toute xénophobie: Manuel Valls, très posément, «exhorte la gauche à se ressaisir face au racisme».
    Et cela dure quelques dizaines d’heures. Puis des salauds déposent des têtes de cochons sur le chantier de la future mosquée d’Hazebrouck (Nord) – et cela devrait horrifier, ne serait-ce que par un surcroît de cynisme opportuniste, les belles âmes qui viennent précisément de promettre qu’elles ne laisseraient «plus rien passer». Mais elles se taisent – et cette nouvelle profanation est de nouveau passée sous silence: fin de la démonstration.




    (1) Qui déplorait naguère, lorsqu’il n’était que député-maire, qu’il y eût tant de Noir(e)s sur certain marché de sa bonne ville d’Évry, et suggérait qu’on les mélangeât de quelques « Whites»
    "En ces temps d'imposture universelle, dire la vérité est un acte révolutionnaire" (G. Orwell)
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