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​ Algérie : « El Dama », la série du ramadan qui cartonne (et qui dérange)

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  • ​ Algérie : « El Dama », la série du ramadan qui cartonne (et qui dérange)

    TÉLÉVISION. Records d’audience et plébiscite des spectateurs : une série algérienne explore avec un réalisme inédit la vie quotidienne d’un quartier populaire d’Alger.
    Par notre correspondant à Alger, Adlène Meddi


    Quel serait le secret d'une série réussie ? Prenons The Wire (Sur écoute), créée par l'Américain David Simon et considérée comme l'une des meilleures séries de tous les temps. Les ingrédients de son succès ? Son réalisme, son souffle quasi littéraire (David Simon cite souvent Balzac pour parler de son univers et de ses personnages), ses personnages embourbés dans leurs destins dans les bas-fonds de Baltimore, ville réinventée, disséquée, traversée de mythes urbains.

    L'ingrédient premier reste son réalisme et, toutes proportions gardées, nous retrouvons cet aspect frappant dans la série du ramadan en Algérie qui fait tabac, tout en créant des polémiques, El Dama.

    Conflits entre gangs et trafic de drogue


    Diffusée par la télévision publique (ENTV) et réalisant des records d'audimat, El Dama plonge dans la vie quotidienne (nocturne notamment) de l'emblématique quartier populaire d'Alger, Bab El Oued. « Nous ne sommes plus dans les drama [séries] tranquilles du ramadan qui se déroulent dans des villas luxueuses avec des intrigues familiales à rallonges », soutient un critique sur les réseaux sociaux.

    Ici, Bab El Oued, ses rues et ses nuits vibrent aux rythmes des conflits entre gangs, du trafic de drogue ou des filières de contrebande d'or. La série épouse ce rythme effréné, mobilise cascades et courses-poursuites, bagarres et règlements de comptes couverts par l'obscurité des venelles algéroises non loin du port. Le tout porté par des « gueules » d'actrices et d'acteurs habités par la tension, les défis, la volonté de survivre.

    Événements et dialogues sont portés par un scénario qui, enfin, parle comme dans la réalité algéroise. Chose appréciable dans un environnement audiovisuel cadenassé par la doxa du « bien parlé » et soucieux, sous le regard de la censure, de rester dans les clous de la bonne morale et les valeurs familiales, la religion, les « constantes nationales », etc.

    Loin des stéréotypes plan-plan


    L'universitaire Habiba Laloui salue le travail d'appropriation de la langue de Bab El Oued et de la Casbah par la jeune scénariste, Sara Berretima, et elle souligne le coup de force d'avoir travaillé le langage de la violence et de la rue pour en extraire des dialogues au service d'une efficace écriture scénaristique. « Il y a une rhétorique qui attire les spectateurs avides d'écouter leur propre langue à la télévision publique qui reste monopolisée par la langue de bois, une langue calcifiée depuis des lustres », souligne l'universitaire sur un post Facebook. De plus, ajoute-t-elle, « il ne faut pas oublier que représenter la langue de la rue, toujours marquée par la masculinité, n'est pas une tâche facile pour une écrivaine, car pénétrer cette langue lui demandera un double effort… ».

    Le duo entre la jeune scénariste et le réalisateur Yahia Mouzahem semble parfaitement fonctionner pour insuffler une bonne dose de réel à la série, loin des stéréotypes plan-plan de certaines séries du ramadan qui ciblent un public large et « familial » au prime time ramadanesque. À souligner le jeu des acteurs – dont des premiers rôles et des habitants mêmes du quartier, ainsi que les enfants acteurs – qui a été salué par un public de plus en plus conquis.

    « Une série n'est pas une leçon de morale »


    Ce réalisme et les sujets abordés, notamment le phénomène de la drogue dans les écoles, n'ont pas manqué de faire réagir les plus conservateurs. Par exemple, ce député qui déclare à des médias que la série « encourage à la prolifération des stupéfiants dans les écoles car on montre que c'est un moyen rapide et efficace pour gagner de l'argent ». Le même élu insiste sur le fait que « les productions audiovisuelles doivent avoir un rôle de sensibilisation de la société ». « Elles doivent traiter les maux sociaux avec responsabilité, en présentant des solutions et à travers une langue de dialogues bien choisie et qui respecte les références [culturelles et morales] des Algériens », poursuit le député.

    « Les spectateurs ont le droit de discuter et de polémiquer autour d'une œuvre », a réagi le réalisateur Yahia Mouzahem, tout en considérant que certaines « critiques ne veulent absolument rien dire puisqu'une série n'est pas une leçon de morale ».


    Le Point





  • #2

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