Tweet
Posté par Rédaction LQA on juin 16th
Abdelhak Serrab
Condamné à l’exil forcé pour hérésie,Ibn Rochd renda son dernier souffle à Marrakech en 1198,loin de Cordoue sa ville natale et loin des siens . Grand théologien musulman,parfait connaisseur du Coran et du Hadith qu’il a appris par coeur dés son plus jeune âge,Ibn Rochd manifesta dés le début de sa scolarité son intérêt pour la philosophie et particuliérement pour les travaux d’Aristote et d’Ibn Sina . Trés tôt,Ibn Rochd découvre l’origine du blocage qui caractérisait déja les sociétés musulmanes . Ses travaux,symbolisèrent à jamais les capacités intellectuelles du monde musulman . Sa condamnation,demeure une date symbolique marquant l’officialisation des clôtures dogmatiques qui nous enferment tout en nous empêchant d’aborder la renaissance et l’humanisme du 14e siécle . Trés critique vis à vis de la médiocrité,du fatalisme et du conservatisme qui dominaient à cette époque le monde musulman,convaincu par la nécessité d’user de la raison (المعقول ) comme support de la religion (المنقول ),Ibn Rochd,décida de procéder à une analyse critique des travaux du conservateur Abou Hamed Al Ghazali (1058 - 1111) qui fut à cette époque et bien après, considéré comme la référence intellectuelle par excellence . Dans son livre intitulé : l’incohérence de l’incohérence ( تهافت التهافت ) ,Ibn Rochd (1126-1198 ), passa au peigne fin le fameux livre publié par Abou Hamed Al Ghazali sous le titre de : L’incohérence des philosophes (تهافت الفلاسفة) . Le philosophe Andalou,rejetta ainsi la condamnation de la philosophie et de la pensée rationnelle faite par son ainé Abou Hamed Al Ghazali .
Enseigné en Occident jusqu’au 17e siécle,Ibn Rochd, quitta le monde dans des circonstances malheureuses,sans que ses travaux ne soient prises au sérieux par ses coreligionnaires . Pire,Ibn Taymia (1263-1328),éloigna un peu plus les musulmans de la pensée rationnelle en décrétant la philosophie comme un acte illicite et en considérant Ibn Rochd comme Kafir . Les publications de Sayed Kotb au 20e siécle ,n’arrongeront rien et ce malgré les résistance de Malek Bennabi et de Mohamed Arkoun .
Prisonnier du 13e siécle,le monde musulman,n’ a connu ni la renaissance et sa pensée humaniste du 14e siécle,ni les siécles des lumiéres des 16e et 17e siécles . Pour s’enfoncer un peu plus,alors que le philosophe Kant encourageait au 18e siécle l’Europe à concrétiser la pensée humaniste,Mohamed Ibn Abdelwaheb (1703-1792),emprutait à la même époque le chemin inverse en accentuant l’éloignement du monde musulman de la pensée rationnelle d’Ibn Rochd tout en se rapprochant encore plus des positions dogmatiques d’Ibn Taymia !
A défaut d’une pensée rationnelle capable de libérer l’individu des idéologies imposées au nom du dogme et sans un projet humaniste pouvant faire de l’homme le centre de toute reflexion et projet,le monde musulman s’est enfermé dans des considérations dogmatiques considérées à tort comme d’origine islamique . A partir de cette crise de pensée,le monde musulman s’est bloqué intellectuellement et culturellement au 13e siécle,faisant de l’individu un être figé,infantilisé,dépourvu de la moindre liberté de penser et soumis à une lecture textuelle des textes sacrés . De cette crise de pensée,nous avons débouché sur des crises politiques qui ont eu comme conséquences l’historique défaite musulmane lors de la bataille de Las Navas de Tolosa en Andalousie en 1212 ,la chute de Codoue en 1236,la catastrophique chute de Baghdad entre les mains des mongols en 1258,la perte de Grenade comme dernier bastion andalou en 1492,l’occupation de nos pays au 19e siècle par les occidentaux puis depuis les années 50 et 60 du 20e siécle ,les dictatures post « indépendances » !
Aujourd’hui,en l’absence de capacités intellectuelles capables de nous faire quitter le 13e siécle pour que nous puissions enfin aborder la pensée humaniste et rationnelle tout en respectant les valeurs islamiques authentiques,notre crise de pensée a débouché sur des crises politiques sources d’instabilité et de conflits .
Conscients de nos lacunes intellectuelles et connaissant parfaitement nos divisions,les puissances réalisent leurs objectifs géostratégiques au sein de notre région en s’appliquant à instrumentaliser les pétrodollars des pays du Golfe ainsi que l’isolement de différents régimes politiques des pays musulmans par rapport à leurs peuples . C’est ainsi que ce qui a commencé par une simple crise de la pensée,s’est transformé en de complexes crises politiques marquées par la naissance de courants idéologiques et politiques aussi contradictoires que conflictuels . L’islam qui devrait nous unir,est transformé en un amas de tendances plus proches des sectes que des courants religieux . Ce qui se passe actuellement en Libye,en Syrie ,en Irak,au Mali et bientôt au Nigéria,n’est que l’instrumentalisation de notre ignorance faite par les puissances avec la complicité de certains de nos régimes politiques pour atteindre des objectifs géostratégiques dont les seuls bénéficiaires sont les puissances au détriment de nos peuples et de notre stabilité . Notre crise de pensée,nous pousse à exécuter des projets de guerres par procuration qui ne profitent qu’à nos ennemis .
Mais comment le monde musulman,a t-il réussi un tel naufrage intellectuel et culturel pour se retrouver au fond d’un 13e siécle où il s’est piégé de la sorte ?
En insistant sur les droits de dieu tout en négligeant ceux de l’individu comme si le Coran et la Sunna avaient pour mission de défendre le créateur et non pas d’émanciper l’individu,nos théologiens,ont fini par promouvoir ce qu’ils considéraient comme la morale islamique tout en ignorant que la morale n’est que l’aboutissement de tout acte émanant d’un individu musulman . Or l’acte de tout individu,qu’il soit conforme à la morale ou pas,ne peut être jugé que si l’individu est libre dans sa pensée et dans ses actes !
La contradiction qui caractérise notre actuelle approche de la religion,est liée aux exigences qu’on impose à un individu musulman non reconnu puisqu’il n’existe qu’à travers le groupe et donc un individu sans liberté et par conséquent non responsable !
La raison en terre d’islam,n’est pas obligatoirement immorale et l’humanisme n’est pas forcement synonyme d’individualisme et
d’ égoïsme . La raison est un moyen permettant au musulman de se responsabiliser en mettant fin à son infantilisation et à sa paresse intellectuelle . L’humanisme est une façon de mettre la religion et tout projet au service de l’individu dans le but de lui permettre accéder au bonheur et au progrés sans qu’il renie pour autant sa foi et sa morale .
Contrairement aux dogmes islamiques imposés aux musulmans depuis le 13e siécle avec particuliérement l’avènement du rigorisme d’Ibn Taymia qui rappelle celui d’Ibn Hanbal(780-855),l’islam est une religion qui vise le bonheur et le progrés de l’individu . Un tel objectif n’est possible que dans le cadre d’une pensée islamique rationnelle et humaniste . Plus que jamais,nous sommes appelés à quitter le 13e siécle pour enfin faire de l’individu le centre de tout projet . Dans le cas contraire,nos lacunes iintellectuelles et culturelles seront instrumentalisées par les puissances avec comme conséquences, d’interminables guerres par procuration,de la misère malgré nos richesses souterraines et une perte de notre souveraineté avec exposition de nos pays à des occupations étrangères d’un autre type .
Abdelhak Serrab
Condamné à l’exil forcé pour hérésie,Ibn Rochd renda son dernier souffle à Marrakech en 1198,loin de Cordoue sa ville natale et loin des siens . Grand théologien musulman,parfait connaisseur du Coran et du Hadith qu’il a appris par coeur dés son plus jeune âge,Ibn Rochd manifesta dés le début de sa scolarité son intérêt pour la philosophie et particuliérement pour les travaux d’Aristote et d’Ibn Sina . Trés tôt,Ibn Rochd découvre l’origine du blocage qui caractérisait déja les sociétés musulmanes . Ses travaux,symbolisèrent à jamais les capacités intellectuelles du monde musulman . Sa condamnation,demeure une date symbolique marquant l’officialisation des clôtures dogmatiques qui nous enferment tout en nous empêchant d’aborder la renaissance et l’humanisme du 14e siécle . Trés critique vis à vis de la médiocrité,du fatalisme et du conservatisme qui dominaient à cette époque le monde musulman,convaincu par la nécessité d’user de la raison (المعقول ) comme support de la religion (المنقول ),Ibn Rochd,décida de procéder à une analyse critique des travaux du conservateur Abou Hamed Al Ghazali (1058 - 1111) qui fut à cette époque et bien après, considéré comme la référence intellectuelle par excellence . Dans son livre intitulé : l’incohérence de l’incohérence ( تهافت التهافت ) ,Ibn Rochd (1126-1198 ), passa au peigne fin le fameux livre publié par Abou Hamed Al Ghazali sous le titre de : L’incohérence des philosophes (تهافت الفلاسفة) . Le philosophe Andalou,rejetta ainsi la condamnation de la philosophie et de la pensée rationnelle faite par son ainé Abou Hamed Al Ghazali .
Enseigné en Occident jusqu’au 17e siécle,Ibn Rochd, quitta le monde dans des circonstances malheureuses,sans que ses travaux ne soient prises au sérieux par ses coreligionnaires . Pire,Ibn Taymia (1263-1328),éloigna un peu plus les musulmans de la pensée rationnelle en décrétant la philosophie comme un acte illicite et en considérant Ibn Rochd comme Kafir . Les publications de Sayed Kotb au 20e siécle ,n’arrongeront rien et ce malgré les résistance de Malek Bennabi et de Mohamed Arkoun .
Prisonnier du 13e siécle,le monde musulman,n’ a connu ni la renaissance et sa pensée humaniste du 14e siécle,ni les siécles des lumiéres des 16e et 17e siécles . Pour s’enfoncer un peu plus,alors que le philosophe Kant encourageait au 18e siécle l’Europe à concrétiser la pensée humaniste,Mohamed Ibn Abdelwaheb (1703-1792),emprutait à la même époque le chemin inverse en accentuant l’éloignement du monde musulman de la pensée rationnelle d’Ibn Rochd tout en se rapprochant encore plus des positions dogmatiques d’Ibn Taymia !
A défaut d’une pensée rationnelle capable de libérer l’individu des idéologies imposées au nom du dogme et sans un projet humaniste pouvant faire de l’homme le centre de toute reflexion et projet,le monde musulman s’est enfermé dans des considérations dogmatiques considérées à tort comme d’origine islamique . A partir de cette crise de pensée,le monde musulman s’est bloqué intellectuellement et culturellement au 13e siécle,faisant de l’individu un être figé,infantilisé,dépourvu de la moindre liberté de penser et soumis à une lecture textuelle des textes sacrés . De cette crise de pensée,nous avons débouché sur des crises politiques qui ont eu comme conséquences l’historique défaite musulmane lors de la bataille de Las Navas de Tolosa en Andalousie en 1212 ,la chute de Codoue en 1236,la catastrophique chute de Baghdad entre les mains des mongols en 1258,la perte de Grenade comme dernier bastion andalou en 1492,l’occupation de nos pays au 19e siècle par les occidentaux puis depuis les années 50 et 60 du 20e siécle ,les dictatures post « indépendances » !
Aujourd’hui,en l’absence de capacités intellectuelles capables de nous faire quitter le 13e siécle pour que nous puissions enfin aborder la pensée humaniste et rationnelle tout en respectant les valeurs islamiques authentiques,notre crise de pensée a débouché sur des crises politiques sources d’instabilité et de conflits .
Conscients de nos lacunes intellectuelles et connaissant parfaitement nos divisions,les puissances réalisent leurs objectifs géostratégiques au sein de notre région en s’appliquant à instrumentaliser les pétrodollars des pays du Golfe ainsi que l’isolement de différents régimes politiques des pays musulmans par rapport à leurs peuples . C’est ainsi que ce qui a commencé par une simple crise de la pensée,s’est transformé en de complexes crises politiques marquées par la naissance de courants idéologiques et politiques aussi contradictoires que conflictuels . L’islam qui devrait nous unir,est transformé en un amas de tendances plus proches des sectes que des courants religieux . Ce qui se passe actuellement en Libye,en Syrie ,en Irak,au Mali et bientôt au Nigéria,n’est que l’instrumentalisation de notre ignorance faite par les puissances avec la complicité de certains de nos régimes politiques pour atteindre des objectifs géostratégiques dont les seuls bénéficiaires sont les puissances au détriment de nos peuples et de notre stabilité . Notre crise de pensée,nous pousse à exécuter des projets de guerres par procuration qui ne profitent qu’à nos ennemis .
Mais comment le monde musulman,a t-il réussi un tel naufrage intellectuel et culturel pour se retrouver au fond d’un 13e siécle où il s’est piégé de la sorte ?
En insistant sur les droits de dieu tout en négligeant ceux de l’individu comme si le Coran et la Sunna avaient pour mission de défendre le créateur et non pas d’émanciper l’individu,nos théologiens,ont fini par promouvoir ce qu’ils considéraient comme la morale islamique tout en ignorant que la morale n’est que l’aboutissement de tout acte émanant d’un individu musulman . Or l’acte de tout individu,qu’il soit conforme à la morale ou pas,ne peut être jugé que si l’individu est libre dans sa pensée et dans ses actes !
La contradiction qui caractérise notre actuelle approche de la religion,est liée aux exigences qu’on impose à un individu musulman non reconnu puisqu’il n’existe qu’à travers le groupe et donc un individu sans liberté et par conséquent non responsable !
La raison en terre d’islam,n’est pas obligatoirement immorale et l’humanisme n’est pas forcement synonyme d’individualisme et
d’ égoïsme . La raison est un moyen permettant au musulman de se responsabiliser en mettant fin à son infantilisation et à sa paresse intellectuelle . L’humanisme est une façon de mettre la religion et tout projet au service de l’individu dans le but de lui permettre accéder au bonheur et au progrés sans qu’il renie pour autant sa foi et sa morale .
Contrairement aux dogmes islamiques imposés aux musulmans depuis le 13e siécle avec particuliérement l’avènement du rigorisme d’Ibn Taymia qui rappelle celui d’Ibn Hanbal(780-855),l’islam est une religion qui vise le bonheur et le progrés de l’individu . Un tel objectif n’est possible que dans le cadre d’une pensée islamique rationnelle et humaniste . Plus que jamais,nous sommes appelés à quitter le 13e siécle pour enfin faire de l’individu le centre de tout projet . Dans le cas contraire,nos lacunes iintellectuelles et culturelles seront instrumentalisées par les puissances avec comme conséquences, d’interminables guerres par procuration,de la misère malgré nos richesses souterraines et une perte de notre souveraineté avec exposition de nos pays à des occupations étrangères d’un autre type .
Commentaire