Deux sœurs, ayant hérité ensemble d’une maison d’Alger, vinrent l’habiter.
L’une était connue pour sa vertu .
La destinée de l’autre l’avait conduite à devenir courtisane.
La plus sage habitait l’étage. La courtisane, le west eddar (patio).
Elles partageaient la terrasse avec son minzah (séjour) et la cuisine, qui se trouvait aussi tout en haut de l’escalier.
Un soir de Ramadhan, la femme « légère » dépendait le linge sec tandis que la « sérieuse » faisait la cuisine.
Elle préparait un tadjin au fumet vraiment étourdissant. Une voisine, pauvre et enceinte, parut au bord de la terrasse, et demanda si l’on pouvait lui donner un peu de braise pour allumer son feu.
Fatima, la courtisane, vint vers sa sœur et elle prit du kanoun (foyer) quelques braises, dans une vieille tassa (récipient) à l’étain usé, et la donna à la femme qui partit après avoir remercier les yeux baissées .
Le fumet du tadjin se répandait de plus en plus, propre à donner de l’appétit aux plus rassasiés.
Une seconde fois, la voisine apparut au muret de séparation des terrasses et dit, d’une voix un peu altérée, que son feu ne voulait pas prendre .Voudrait-on lui accorder encore quelques braises?
On les lui donna, dans la même tassa qu’elle avait rapportée, et elle disparut de nouveau dans son escalier.
La sage remit des charbons dans le kanoun et éventa le feu pour qu’ils prennent .
La mer, en contrebas, était d’un grand calme encore lumineux. L’heure était plutôt lointaine où il serait enfin permis de manger.
Mais Sélima, la petite voisine, était dispensée de jeûne puisqu’elle était enceinte. Ainsi pensa Fatima, la courtisane.
-As-tu remarqué, dit elle à sa sœur, ses joues creuses? la pauvre ne mange peut être pas tous les jours. Je n’ai entendu personne pousser son portail aujourd’hui pour lui apporter des provisions.
-Dieu pourvoira (allah inoub), marmonna la vertueuse. Que je sache, je n’ai pas été spécialement désignée pour subvenir aux besoins des autres.
De l’autre côté de la murette, dans l’escalier voisin, Fatima crut entendre un soupir.
-Ma part d’héritage si tu donnes à Sélima une portion de tadjin.
La vertueuse ne dit rien Elle regarda seulement sa sœur avec surprise.
Si celle-ci renonçait à ses droits sur la maison, il n’y avait aucune raison qu’elle y demeurât. Ainsi, la honte de son activité coupable s’effacerait avec sa présence.
Elle louerait l’appartement libéré et vivrait de cette location.
Comment cette étourdie ne se rendait-elle pas compte de la sottise du marché qu’elle proposait?
A ce moment-là , la voisine apparut pour la troisième fois à la frontière des deux terrasses, la tassa vide à la main. Elle n’osait plus demander et regarda Fatima avec des yeux humbles.
.
L’une était connue pour sa vertu .
La destinée de l’autre l’avait conduite à devenir courtisane.
La plus sage habitait l’étage. La courtisane, le west eddar (patio).
Elles partageaient la terrasse avec son minzah (séjour) et la cuisine, qui se trouvait aussi tout en haut de l’escalier.
Un soir de Ramadhan, la femme « légère » dépendait le linge sec tandis que la « sérieuse » faisait la cuisine.
Elle préparait un tadjin au fumet vraiment étourdissant. Une voisine, pauvre et enceinte, parut au bord de la terrasse, et demanda si l’on pouvait lui donner un peu de braise pour allumer son feu.
Fatima, la courtisane, vint vers sa sœur et elle prit du kanoun (foyer) quelques braises, dans une vieille tassa (récipient) à l’étain usé, et la donna à la femme qui partit après avoir remercier les yeux baissées .
Le fumet du tadjin se répandait de plus en plus, propre à donner de l’appétit aux plus rassasiés.
Une seconde fois, la voisine apparut au muret de séparation des terrasses et dit, d’une voix un peu altérée, que son feu ne voulait pas prendre .Voudrait-on lui accorder encore quelques braises?
On les lui donna, dans la même tassa qu’elle avait rapportée, et elle disparut de nouveau dans son escalier.
La sage remit des charbons dans le kanoun et éventa le feu pour qu’ils prennent .
La mer, en contrebas, était d’un grand calme encore lumineux. L’heure était plutôt lointaine où il serait enfin permis de manger.
Mais Sélima, la petite voisine, était dispensée de jeûne puisqu’elle était enceinte. Ainsi pensa Fatima, la courtisane.
-As-tu remarqué, dit elle à sa sœur, ses joues creuses? la pauvre ne mange peut être pas tous les jours. Je n’ai entendu personne pousser son portail aujourd’hui pour lui apporter des provisions.
-Dieu pourvoira (allah inoub), marmonna la vertueuse. Que je sache, je n’ai pas été spécialement désignée pour subvenir aux besoins des autres.
De l’autre côté de la murette, dans l’escalier voisin, Fatima crut entendre un soupir.
-Ma part d’héritage si tu donnes à Sélima une portion de tadjin.
La vertueuse ne dit rien Elle regarda seulement sa sœur avec surprise.
Si celle-ci renonçait à ses droits sur la maison, il n’y avait aucune raison qu’elle y demeurât. Ainsi, la honte de son activité coupable s’effacerait avec sa présence.
Elle louerait l’appartement libéré et vivrait de cette location.
Comment cette étourdie ne se rendait-elle pas compte de la sottise du marché qu’elle proposait?
A ce moment-là , la voisine apparut pour la troisième fois à la frontière des deux terrasses, la tassa vide à la main. Elle n’osait plus demander et regarda Fatima avec des yeux humbles.
.
Commentaire