La fausse biographie du Prophète
Islam de Damas et Salafisme : la religion des Califes
Qui sont les Chiites au sein de l’Islam ? Qu’est-ce que le salafisme ?
28.11.2015
Par Nicolas Bruel
Il faut comprendre en premier lieu que « musulman » est un terme générique comme « chrétien». Or, on sait que le Christianisme se divise en trois principales branches qui sont le catholicisme, le christianisme orthodoxe et le protestantisme (chaque branche se divisant à son tour). Il faut donc retenir qu’il en est de même pour l’Islam qui se divise en deux grandes branches : le sunnisme et le chiisme. Il faut savoir que ces deux courants sont ennemis et se livrent une guerre qui risque d’être éternelle.
Le sunnisme est le courant majoritaire de l’Islam : environ 90% des musulmans sont ainsi sunnites. Le sunnisme se divise à son tour en quatre branches principales qui sont : le hanafisme, le malikisme, le chafiisme et le hanbalisme.
En plus du Coran, les sunnites se réfèrent à la Sunna – qui signifie « le cheminement » ou « pratique(s) » – qui est la tradition prophétique, le chemin tracé par le prophète des musulmans. Elle se compose principalement :
des hadîths : paroles et actions attribuées au prophète, il en existe plus de 700.000, dont 100.000 considérés comme « authentiques »
la sîra : sa biographie, la plus ancienne a été écrite par Ibn Ishaq.
Cette base permet aux croyants d’avoir des sources théologiques supplémentaires, voire pour certains courants des sources juridiques. Il existe également la Charia mais elle n’est mentionnée qu’une fois dans la Coran et a été codifiée bien après la mort du prophète sous le califat abbasside.
Dans la suite de cette chronique, je n’évoquerai plus les chiites. Cela n’est pas par désintérêt mais tout simplement car l’article perdrait en clarté : je préfère donc vous mettre les liens nécessaires. De plus, le problème que rencontre l’Islam actuellement est un problème issu d’une branche sunnite et non chiite.
Maintenant que ces distinctions sont faites, allons plus loin. Dans mon précédent billet, je parlais de jeunes nihilistes – au sens actif – qui étaient prêts à faire leur la première idéologie au service de leurs pulsions de mort. Mais quelle est cette idéologie ? Est-ce le Sunnisme ? C’est ce que nous tenterons d’expliquer sans angélisme ni concession.
Je parlais de quatre branches du sunnisme qui peuvent être ramenées à deux grands groupes :
L’Islam de Médine : les branches malikite et chaféite ainsi que le Chiisme.
L’Islam de Damas et Bagdad : les branches hanafiste et hanbalite. Le Hanbalisme est l’école la plus conservatrice de l’Islam sunnite. Dans cette forme très traditionaliste, la sunna tient une place prépondérante. Il est arrivé plusieurs fois dans l’Histoire que les troupes de l’islam de Damas, sous les ordres d’un calife, se lancent dans des exactions contre les gens de Médine, pourtant ville du Prophète. Les mêmes exactions ont d’ailleurs été répétées par les wahhabites (Arabie Saoudite) depuis la naissance de leur mouvement (voir l’article de Michel Leter à ce sujet).
Qu’est-ce donc que cette mouvance qui ne fait pas partie des grandes branches de l’islam ? J’apporte ici des éléments sourcés – il en existe d’autres – démontrant que la base idéologique salafiste n’est pas religieuse mais une falsification commise par certains compagnons du prophète, califes etc. qui se sont servis de cette religion pour asseoir leur pouvoir : un pouvoir divin, illimité et fondé sur la violence.
Tout d’abord, revenons au salafisme. Le salafisme est l’enfant terrible, l’abomination de l’Hanbalisme. Le terme provient de « salaf », signifiant les « prédécesseurs » – en référence aux premiers compagnons du Prophète. Les salafistes prônent un retour à l’islam des origines fondé sur le Coran et la Sunna (hadîths et sîra). Et pour ce faire, il prône une lecture littérale du Coran où toute tentative d’interprétation s’avère totalement interdite. De plus, ils mènent leur vie comme le Prophète la « menait » au VIIème siècle. Le principal théoricien du salafisme est Ibn Taymiyya, qui tentait d’organiser au XIIIème et XIVème le djihad contre l’envahisseur Mongol et a publié plusieurs livres. Il est considéré par les sunnites comme un cheikh Al-Islam au mêmes titre que Ahmad Ibn Hanbal, Mâlik ibn Anas, Al-Nawawi, Ash-Shâfi’î : des fondateurs de branche. Vous pouvez donc apprécier l’importance du personnage.
Dans un de ses livres, As-Sârim ul-Maslûl ‘alâ shâtim ir-rasûl (« à propos de la punition de celui qui insulte le prophète de l’islam »), Ibn Taymiyya rapporte une situation où un calife abbasside demande si un témoin connait un hadîth permettant de punir de mort une personne ayant insulté le prophète. Le calife étant l’émir des croyants il aurait pu de fait lui appliquer la même peine mais il avait besoin d’un exemple prophétique pour se faire. Le souci est que Ibn Taymiyya rapporte que le témoin fut payé 1.000 dinars or de l’époque (soit une fortune) et que le calife mit directement dans la bouche du témoin la réponse attendue. Cela l’arrangeait sûrement pour se débarrasser d’un opposant politique…
Mais attendez la suite… ( pour le lien vidéo, cette information est disponible et expliquée en détails à partir de la 28ème minute, toutes les sources sont disponibles dans le descriptif de celle-ci).
Abī as-Sarh est une des personnes qui a écrit le Coran sous la dictée du Prophète. Il est reconnu par Ibn Taymiyya, encore une fois, que celui-ci n’écrivait pas tout ce qui était dicté par le Prophète. Voici le récit (et ses sources) :
L’homme tomba alors dans l’épreuve (« fa’ftutina« ) (Al-Maghâzî li-l-Wâqidî). Il apostasia, alla s’installer chez les Mecquois idolâtres et leur dit : « Par Dieu, c’est moi qui le tourne comme je veux » (Al-Bidâya wa-n-Nihâya). « Mohamed ne sait pas ce qu’il dit. C’est moi qui écrivais ce que je voulais » (Al-Maghâzî li-l-Wâqidî). « Si je le voulais, moi aussi je pourrais dire des choses comme Mohamed en dit et apporter des choses comme Mohamed en apporte. Parce qu’il me disait quelque chose, je le tournai vers autre chose, et il me disait : « C’est correct » » (Tafsîr ut-Tabarî).
(Ces références sont extraites des notes des deux savants ayant procédé à la takhrîj des relations présentes dans As-Sârim.)
L’apostat est, comme chez les chrétiens et les juifs, condamné à mort. Pourtant Abī as-Sarh connut un destin particulier : étant le demi-frère (frère de lait) de Othmân Ibn Affân– qui sera le troisième calife « bien guidé » – il fut gracié malgré son apostasie et ses vols, meurtres et divers pillages. Lors du règne de son demi-frère, il sera même nommé gouverneur d’Égypte. Vous pensez bien que son destin est « exceptionnel » pour quelqu’un présentant un tel curriculum vitae…
Autre élément sur le Coran : dans le Sahih Muslim, des propos rapportés de Omar Ibn al-Khattâb (compagnon du Prophète et qui finira par être second calife « bien guidé ») indique que la lapidation – qui n’est pas présente dans le Coran – faisait partie des révélations apportées par Dieu. Voici comment est entrée la lapidation en islam, par la porte des hadîths.
La dernière base théologique que je voudrais aborder est la sîra, la biographie du Prophète. Celle-ci a été initialement écrite par Ibn Ishaq. Je rappelle que le salafisme a pour objectif l’imitation des actes de la vie du Prophète, même dans ses activités quotidiennes : tenue vestimentaire, alimentation etc. Il faut savoir que le travail d’Ibn Ishaq est très mal perçu par des piliers du sunnisme comme Mâlik Ibn Anas. Celui-ci a qualifié Ibn Ishaq de Dajjal (imposteur) important des éléments judaïques :
Imam Malik on Ibn Ishaq:
Imam Malik was not the only contemporary of Ibn Ishaq’s to have problems with him. Despite writing the earliest biography of Prophet Muhammad, Scholars such as al-Nisa’I and Yahya b. Kattan did not view Ibn Ishaq as a reliable or authoritative source of Hadith. (Jones, J.M.B. Ibn Ishak. Vol. IV, in Encyclopaedia of Islam, edited by Ch. Pellat, and J. SchachtV.L.M.B. Lewis. London: Luzac & Co., 1971: pages 810-811)Malik bin Anas Bin Malik bin Abu Amir Al-Asbahi (715-801 C.E.) or Imam Malik– lived closest in the time to the life of Prophet Muhammad of all the collectors of the hadith (Bukhari, Muslim, Abu Dawud, etc). He was born more than 80 years after the death of the Prophet. Imam Malik was a complier of a respected hadith collection, called Muwatta. Imam Malik was a hadith scholar. Imam Malik called Ibn Ishaq a liar and an imposter for writing false stories about Prophet Muhammad. Imam Malik has said that Ibn Ishaq « reports traditions on the authority of the Jews ».(Kadhdhab wa Dajjal min al-dajajila. Uyun al-athar, I, 16-7)
Traduction
L'Imam Malik n'était pas le seul contemporain d'Ibn Ishaq à avoir des problèmes avec lui. Bien qu'écrivant la toute première biographie du Prophète Mohamed, des érudits comme Al-Nisa'i et Yahya b. Kattan n'ont pas considéré Ibn Ishaq comme une source fiable ou d’autorité de Hadith.
(Jones, J.M.B. Ibn Ishak. Vol. IV, in Encyclopaedia of Islam, edited by Ch. Pellat, and J. SchachtV.L.M.B. Lewis. London: Luzac & Co., 1971: pages 810-811). Malik bin Anas Bin Malik bin Abu Amir Al-Asbahi (715-801 C.E.) ou Imam Malik– vécut le plus près en terme de temps de la vie du Prophète Mohamed que tous les collecteurs de hadiths (Bukhari, Muslim, Abu Dawud, etc). Il naquit plus de 80 ans après la mort du Prophète. L’imam Malik fut un compilateur d’une respectueuse collection de hadiths, nommée Muwatta. L’imam Malik fut un érudit du hadith. L’imam Malik qualifia Ibn Ishaq de menteur et d’imposteur pour avoir écrit de faux récits sur le Prophète Mohamed. L’imam Malik a dit que Ibn Ishaq « a rapporté des traditions sous l’autorité de Juifs ».(Kadhdhab wa Dajjal min al-dajajila. Uyun al-athar, I, 16-7).
Ahmad Ibn Hanbal le traite de menteur dans d’autres textes.
Ibn Hajar al-Asqalani, autre pilier de l’islam sunnite, dans Al-Fath’ul Bâri est considéré comme le commentaire le plus important et le plus fiable sur le Jami ‘al-Sahih d’al-Bukhari : un des deux grands recueils de hadîths avec le Sahih Muslim.
Ce livre d’Al-Asqalani contient une classification des personnages du Bukhari, les classant de 1 à 5 : ceux de la première catégorie étaient rarement désignés comme des menteurs et ceux de la cinquième étant des sources non fiables, des mythomanes avérés. Pour Ibn Hajar al-Asqalani, Ibn Ishaq est classé en catégorie 4, confirmant les commentaires à son sujet de Ibn Hanbal et de Mâlik Ibn Anas.
La sîra est donc un récit certainement en tout ou partie farfelu, mais est pourtant utilisé aujourd’hui par des cheikhs salafistes, comme Al Albani (auteur contemporain salafiste), comme étant une base certaine et fiable.
Enfin, avant de conclure, je voudrais également vous démontrer que les compagnons du Prophète et ceux qui leur ont succédé à la tête du califat ne sont pas respectueux de l’héritage de leur guide.
Sur le chemin de retour de son pèlerinage d’adieu, Mohamed fit une halte à mi-chemin entre La Mecque et Médine au lieu-dit Ghadir Khumm. Là, au cours d’un sermon, il annonça sa fin prochaine. Dans le hadith, dit Hadith de Ghadir Khumm, rapporté par Muslim, il aurait dit qu’il laissait derrière lui deux choses importantes : La première c’est le Livre de Dieu (Le Coran) et les gens de la maison (Ahlul bayt) :
Un jour, l’Envoyé d’Allah se leva parmi nous pour prononcer un sermon près d’un point d’eau nommé Khumm, entre La Mecque et Médine. Il loua Allah, fit Son éloge, exhorta les fidèles et leur rappela leurs devoirs, puis il dit : ‘Ô hommes, je ne suis qu’un être humain en passe de répondre à l’appel de l’envoyé de mon seigneur. Cependant je laisse parmi vous ces deux arguments de poids : le premier est le Livre d’Allah qui contient la guidance et la lumière ; prenez-le et tenez-y vous ferme. Il nous incita à nous cramponner au Livre d’Allah et nous inspira l’amour du livre. Puis il continua : et les gens de ma Maison : je vous rappelle à l’obéissance à Allah.
Le sort réservé aux descendants du prophète ici et là par exemple n’est pas enviable. Les derniers survivants de la lignée du prophète sont les membres de la famille royale du Maroc, pays où ils ont fui après la bataille de Fakh. Seul l’océan les a empêchés de fuir plus loin, vous donnant une idée de la violence des califes contre les propres ordres de leur prophète.
SUITE CI-DESSOUS
Islam de Damas et Salafisme : la religion des Califes
Qui sont les Chiites au sein de l’Islam ? Qu’est-ce que le salafisme ?
28.11.2015
Par Nicolas Bruel
Il faut comprendre en premier lieu que « musulman » est un terme générique comme « chrétien». Or, on sait que le Christianisme se divise en trois principales branches qui sont le catholicisme, le christianisme orthodoxe et le protestantisme (chaque branche se divisant à son tour). Il faut donc retenir qu’il en est de même pour l’Islam qui se divise en deux grandes branches : le sunnisme et le chiisme. Il faut savoir que ces deux courants sont ennemis et se livrent une guerre qui risque d’être éternelle.
Le sunnisme est le courant majoritaire de l’Islam : environ 90% des musulmans sont ainsi sunnites. Le sunnisme se divise à son tour en quatre branches principales qui sont : le hanafisme, le malikisme, le chafiisme et le hanbalisme.
En plus du Coran, les sunnites se réfèrent à la Sunna – qui signifie « le cheminement » ou « pratique(s) » – qui est la tradition prophétique, le chemin tracé par le prophète des musulmans. Elle se compose principalement :
des hadîths : paroles et actions attribuées au prophète, il en existe plus de 700.000, dont 100.000 considérés comme « authentiques »
la sîra : sa biographie, la plus ancienne a été écrite par Ibn Ishaq.
Cette base permet aux croyants d’avoir des sources théologiques supplémentaires, voire pour certains courants des sources juridiques. Il existe également la Charia mais elle n’est mentionnée qu’une fois dans la Coran et a été codifiée bien après la mort du prophète sous le califat abbasside.
Dans la suite de cette chronique, je n’évoquerai plus les chiites. Cela n’est pas par désintérêt mais tout simplement car l’article perdrait en clarté : je préfère donc vous mettre les liens nécessaires. De plus, le problème que rencontre l’Islam actuellement est un problème issu d’une branche sunnite et non chiite.
Maintenant que ces distinctions sont faites, allons plus loin. Dans mon précédent billet, je parlais de jeunes nihilistes – au sens actif – qui étaient prêts à faire leur la première idéologie au service de leurs pulsions de mort. Mais quelle est cette idéologie ? Est-ce le Sunnisme ? C’est ce que nous tenterons d’expliquer sans angélisme ni concession.
Je parlais de quatre branches du sunnisme qui peuvent être ramenées à deux grands groupes :
L’Islam de Médine : les branches malikite et chaféite ainsi que le Chiisme.
L’Islam de Damas et Bagdad : les branches hanafiste et hanbalite. Le Hanbalisme est l’école la plus conservatrice de l’Islam sunnite. Dans cette forme très traditionaliste, la sunna tient une place prépondérante. Il est arrivé plusieurs fois dans l’Histoire que les troupes de l’islam de Damas, sous les ordres d’un calife, se lancent dans des exactions contre les gens de Médine, pourtant ville du Prophète. Les mêmes exactions ont d’ailleurs été répétées par les wahhabites (Arabie Saoudite) depuis la naissance de leur mouvement (voir l’article de Michel Leter à ce sujet).
Qu’est-ce donc que cette mouvance qui ne fait pas partie des grandes branches de l’islam ? J’apporte ici des éléments sourcés – il en existe d’autres – démontrant que la base idéologique salafiste n’est pas religieuse mais une falsification commise par certains compagnons du prophète, califes etc. qui se sont servis de cette religion pour asseoir leur pouvoir : un pouvoir divin, illimité et fondé sur la violence.
Tout d’abord, revenons au salafisme. Le salafisme est l’enfant terrible, l’abomination de l’Hanbalisme. Le terme provient de « salaf », signifiant les « prédécesseurs » – en référence aux premiers compagnons du Prophète. Les salafistes prônent un retour à l’islam des origines fondé sur le Coran et la Sunna (hadîths et sîra). Et pour ce faire, il prône une lecture littérale du Coran où toute tentative d’interprétation s’avère totalement interdite. De plus, ils mènent leur vie comme le Prophète la « menait » au VIIème siècle. Le principal théoricien du salafisme est Ibn Taymiyya, qui tentait d’organiser au XIIIème et XIVème le djihad contre l’envahisseur Mongol et a publié plusieurs livres. Il est considéré par les sunnites comme un cheikh Al-Islam au mêmes titre que Ahmad Ibn Hanbal, Mâlik ibn Anas, Al-Nawawi, Ash-Shâfi’î : des fondateurs de branche. Vous pouvez donc apprécier l’importance du personnage.
Dans un de ses livres, As-Sârim ul-Maslûl ‘alâ shâtim ir-rasûl (« à propos de la punition de celui qui insulte le prophète de l’islam »), Ibn Taymiyya rapporte une situation où un calife abbasside demande si un témoin connait un hadîth permettant de punir de mort une personne ayant insulté le prophète. Le calife étant l’émir des croyants il aurait pu de fait lui appliquer la même peine mais il avait besoin d’un exemple prophétique pour se faire. Le souci est que Ibn Taymiyya rapporte que le témoin fut payé 1.000 dinars or de l’époque (soit une fortune) et que le calife mit directement dans la bouche du témoin la réponse attendue. Cela l’arrangeait sûrement pour se débarrasser d’un opposant politique…
Mais attendez la suite… ( pour le lien vidéo, cette information est disponible et expliquée en détails à partir de la 28ème minute, toutes les sources sont disponibles dans le descriptif de celle-ci).
Abī as-Sarh est une des personnes qui a écrit le Coran sous la dictée du Prophète. Il est reconnu par Ibn Taymiyya, encore une fois, que celui-ci n’écrivait pas tout ce qui était dicté par le Prophète. Voici le récit (et ses sources) :
L’homme tomba alors dans l’épreuve (« fa’ftutina« ) (Al-Maghâzî li-l-Wâqidî). Il apostasia, alla s’installer chez les Mecquois idolâtres et leur dit : « Par Dieu, c’est moi qui le tourne comme je veux » (Al-Bidâya wa-n-Nihâya). « Mohamed ne sait pas ce qu’il dit. C’est moi qui écrivais ce que je voulais » (Al-Maghâzî li-l-Wâqidî). « Si je le voulais, moi aussi je pourrais dire des choses comme Mohamed en dit et apporter des choses comme Mohamed en apporte. Parce qu’il me disait quelque chose, je le tournai vers autre chose, et il me disait : « C’est correct » » (Tafsîr ut-Tabarî).
(Ces références sont extraites des notes des deux savants ayant procédé à la takhrîj des relations présentes dans As-Sârim.)
L’apostat est, comme chez les chrétiens et les juifs, condamné à mort. Pourtant Abī as-Sarh connut un destin particulier : étant le demi-frère (frère de lait) de Othmân Ibn Affân– qui sera le troisième calife « bien guidé » – il fut gracié malgré son apostasie et ses vols, meurtres et divers pillages. Lors du règne de son demi-frère, il sera même nommé gouverneur d’Égypte. Vous pensez bien que son destin est « exceptionnel » pour quelqu’un présentant un tel curriculum vitae…
Autre élément sur le Coran : dans le Sahih Muslim, des propos rapportés de Omar Ibn al-Khattâb (compagnon du Prophète et qui finira par être second calife « bien guidé ») indique que la lapidation – qui n’est pas présente dans le Coran – faisait partie des révélations apportées par Dieu. Voici comment est entrée la lapidation en islam, par la porte des hadîths.
La dernière base théologique que je voudrais aborder est la sîra, la biographie du Prophète. Celle-ci a été initialement écrite par Ibn Ishaq. Je rappelle que le salafisme a pour objectif l’imitation des actes de la vie du Prophète, même dans ses activités quotidiennes : tenue vestimentaire, alimentation etc. Il faut savoir que le travail d’Ibn Ishaq est très mal perçu par des piliers du sunnisme comme Mâlik Ibn Anas. Celui-ci a qualifié Ibn Ishaq de Dajjal (imposteur) important des éléments judaïques :
Imam Malik on Ibn Ishaq:
Imam Malik was not the only contemporary of Ibn Ishaq’s to have problems with him. Despite writing the earliest biography of Prophet Muhammad, Scholars such as al-Nisa’I and Yahya b. Kattan did not view Ibn Ishaq as a reliable or authoritative source of Hadith. (Jones, J.M.B. Ibn Ishak. Vol. IV, in Encyclopaedia of Islam, edited by Ch. Pellat, and J. SchachtV.L.M.B. Lewis. London: Luzac & Co., 1971: pages 810-811)Malik bin Anas Bin Malik bin Abu Amir Al-Asbahi (715-801 C.E.) or Imam Malik– lived closest in the time to the life of Prophet Muhammad of all the collectors of the hadith (Bukhari, Muslim, Abu Dawud, etc). He was born more than 80 years after the death of the Prophet. Imam Malik was a complier of a respected hadith collection, called Muwatta. Imam Malik was a hadith scholar. Imam Malik called Ibn Ishaq a liar and an imposter for writing false stories about Prophet Muhammad. Imam Malik has said that Ibn Ishaq « reports traditions on the authority of the Jews ».(Kadhdhab wa Dajjal min al-dajajila. Uyun al-athar, I, 16-7)
Traduction
L'Imam Malik n'était pas le seul contemporain d'Ibn Ishaq à avoir des problèmes avec lui. Bien qu'écrivant la toute première biographie du Prophète Mohamed, des érudits comme Al-Nisa'i et Yahya b. Kattan n'ont pas considéré Ibn Ishaq comme une source fiable ou d’autorité de Hadith.
(Jones, J.M.B. Ibn Ishak. Vol. IV, in Encyclopaedia of Islam, edited by Ch. Pellat, and J. SchachtV.L.M.B. Lewis. London: Luzac & Co., 1971: pages 810-811). Malik bin Anas Bin Malik bin Abu Amir Al-Asbahi (715-801 C.E.) ou Imam Malik– vécut le plus près en terme de temps de la vie du Prophète Mohamed que tous les collecteurs de hadiths (Bukhari, Muslim, Abu Dawud, etc). Il naquit plus de 80 ans après la mort du Prophète. L’imam Malik fut un compilateur d’une respectueuse collection de hadiths, nommée Muwatta. L’imam Malik fut un érudit du hadith. L’imam Malik qualifia Ibn Ishaq de menteur et d’imposteur pour avoir écrit de faux récits sur le Prophète Mohamed. L’imam Malik a dit que Ibn Ishaq « a rapporté des traditions sous l’autorité de Juifs ».(Kadhdhab wa Dajjal min al-dajajila. Uyun al-athar, I, 16-7).
Ahmad Ibn Hanbal le traite de menteur dans d’autres textes.
Ibn Hajar al-Asqalani, autre pilier de l’islam sunnite, dans Al-Fath’ul Bâri est considéré comme le commentaire le plus important et le plus fiable sur le Jami ‘al-Sahih d’al-Bukhari : un des deux grands recueils de hadîths avec le Sahih Muslim.
Ce livre d’Al-Asqalani contient une classification des personnages du Bukhari, les classant de 1 à 5 : ceux de la première catégorie étaient rarement désignés comme des menteurs et ceux de la cinquième étant des sources non fiables, des mythomanes avérés. Pour Ibn Hajar al-Asqalani, Ibn Ishaq est classé en catégorie 4, confirmant les commentaires à son sujet de Ibn Hanbal et de Mâlik Ibn Anas.
La sîra est donc un récit certainement en tout ou partie farfelu, mais est pourtant utilisé aujourd’hui par des cheikhs salafistes, comme Al Albani (auteur contemporain salafiste), comme étant une base certaine et fiable.
Enfin, avant de conclure, je voudrais également vous démontrer que les compagnons du Prophète et ceux qui leur ont succédé à la tête du califat ne sont pas respectueux de l’héritage de leur guide.
Sur le chemin de retour de son pèlerinage d’adieu, Mohamed fit une halte à mi-chemin entre La Mecque et Médine au lieu-dit Ghadir Khumm. Là, au cours d’un sermon, il annonça sa fin prochaine. Dans le hadith, dit Hadith de Ghadir Khumm, rapporté par Muslim, il aurait dit qu’il laissait derrière lui deux choses importantes : La première c’est le Livre de Dieu (Le Coran) et les gens de la maison (Ahlul bayt) :
Un jour, l’Envoyé d’Allah se leva parmi nous pour prononcer un sermon près d’un point d’eau nommé Khumm, entre La Mecque et Médine. Il loua Allah, fit Son éloge, exhorta les fidèles et leur rappela leurs devoirs, puis il dit : ‘Ô hommes, je ne suis qu’un être humain en passe de répondre à l’appel de l’envoyé de mon seigneur. Cependant je laisse parmi vous ces deux arguments de poids : le premier est le Livre d’Allah qui contient la guidance et la lumière ; prenez-le et tenez-y vous ferme. Il nous incita à nous cramponner au Livre d’Allah et nous inspira l’amour du livre. Puis il continua : et les gens de ma Maison : je vous rappelle à l’obéissance à Allah.
Le sort réservé aux descendants du prophète ici et là par exemple n’est pas enviable. Les derniers survivants de la lignée du prophète sont les membres de la famille royale du Maroc, pays où ils ont fui après la bataille de Fakh. Seul l’océan les a empêchés de fuir plus loin, vous donnant une idée de la violence des califes contre les propres ordres de leur prophète.
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