L’université va mal
Nous avons, personnellement ainsi que d’autres universitaires, souvent attiré l’attention des pouvoirs publics dans ces mêmes colonnes, particulièrement ceux de la tutelle, que l’université algérienne est sérieusement éprouvée. Nos cris d’alarme sont, non seulement non entendus, mais étouffés. Les responsables persistent dans leur autisme légendaire jusqu’à ce qui ne devrait pas arriver arriva en ce matin du 18 octobre 2008. Peut-être que cet assassinat inqualifiable qui a eu lieu dans l’enceinte de l’université de Mostaganem, leur permettra de dessiller les yeux et finiront par nous entendre et nous écouter.
Quel que soit le mobile, rien ne justifie ce crime odieux perpétré contre la personne du professeur Mohammed Benchehida, de surcroît dans l’exercice de sa noble mission ravalée à une dévalorisation «émérite.»
L’université est descendue trop bas
Il y a à peine deux décennies, l’université était le sanctuaire du savoir. Le professeur du supérieur était respecté comme un prophète. Il accomplissait son rôle qui lui était dévolu, en l’occurrence la formation de l’élite nationale pour le pays. Aujourd’hui, enjeu égoïste et combinard des politiques, elle est devenue l’otage du Pouvoir et des partis influents. Elle a totalement déraillé, sinon dévoyée sous nos yeux impuissants. Le personnel enseignant, s’il a le savoir, n’a pas le pouvoir pour y remédier. Alors, il se voit contraint d’exécuter parfois des aberrations du fait qu’il n’a pas voix au chapitre, encore moins d’être consulté pour les grandes décisions du pays.
Les pouvoirs publics acculent manifestement l’université à l’inculture. Elle s’est ravalée à un statut qui est loin d’être le sien parce que mal gérée et surtout mal aiguillée au lieu et place d’être un établissement de la recherche et des découvertes scientifiques. Le professeur Benchehida n’a pas été assassiné par son seul étudiant, mais aussi par l’absurdité du système universitaires.
Allons-nous vers un «mai 1968 algérien ?»
Sommes-nous conduits à croire qu’il faut aller vers un «mai 1968 algérien» pour forcer la main aux décideurs de décider les bonnes décisions.
La première est d’abandonner, ne serait-ce que temporairement, l’idée du LMD pour penser à une refonte profonde et salvatrice de l’université. Pour ce faire :
- Elle doit recouvrer ses lettres de noblesse d’antan.
- Elle doit cesser d’être une crèche pour adultes.
- Le retour à l’élitisme au moyen du système modulaire et cesser avec le système compensatoire comme c’est le cas aujourd’hui.
- Suppression des examens de synthèse de la session de juin.
- Seuls les étudiants tangents ayant une moyenne générale variant entre 09,50 et 09,99 peuvent se présenter aux examens de rattrapage.
- La sélection doit se faire au niveau de la première année. N’accèdent à la deuxième année universitaire que ceux qui présentent des aptitudes pour les études supérieures.
- Elle doit cesser d’être une caricature. Elle doit garantir, non seulement un diplôme mais surtout une formation universitaire requise.
- Retour urgent et impératif à la performance. N’enseignent à l’université que ceux à compétences avérées.
- Renversement de l’esprit de notre enseignement qui souffre de la «massification».
- Le statut de l’enseignant-chercheur de rang magistral doit équivaloir à celui du député en tant qu’élite scientifique.
En répondant à ces conditions, l’université algérienne recouvrera, sans nul doute, sa mission première qui est la formation de l’élite et surtout des chercheurs dont le pays en a plus que jamais besoin. Notre université est sinistrée parce que l’échelle des valeurs s’est totalement inversée. Une politique qui accorde la priorité des priorités à la politique pour veiller sur le système.
D’où l’inflation du pouvoir et de l’avoir, notamment, en ces temps qui courent et la déconsidération programmée du savoir. Tant que la médiocrité reste agrippée au pouvoir (tous niveaux confondus), elle gardera une haine viscérale à l’égard des intellectuels qu’elle considère comme des opposants, voire même des ennemis à évincer. Elle veut saper le fondement de la culture même qui, normalement, doit être élevée au rang d’une deuxième religion de l’Etat après l’islam.
Notre université enseigne-t-elle l’ignorance ?
Un peuple instruit sait se battre mais ne sait pas se soumettre. Ce que refuse mordicus nos gouvernants. Pour Noam Chomsky, «Le pouvoir ne souhaite pas que les gens comprennent qu’ils peuvent provoquer des changements.» L’enseignant est le soldat qui fait la guerre au pire des ennemis : «l’ignorance» qui obscurcit les esprits et enténèbre les cœurs. Le paysan laboure la terre dans l’espoir de nourrir le corps.
L’enseignant laboure les esprits pour un meilleur réveil de la conscience nationale et civique. Il semble que notre université enseigne l’ignorance plutôt que les valeurs positives que nous venons d’énumérer supra sinon pourquoi est-elle tombée dans une pareille décrépitude loin derrière nos voisins maghrébins.
L’Algérie de demain jaillira de celle d’aujourd’hui. Or, celle-ci est malade de ses politiques.
Le système actuel a, non seulement démontré son incapacité, mais il est en train de prouver ostensiblement son inutilité. Bien que dépassé par tout et pour tout, il refuse de céder le pouvoir aux compétences nationales.
Les étudiants veulent une autre université, à même de répondre à leurs aspirations. Les dirigeants veulent maintenir la même Algérie. Un conflit d’intérêts qui ne prête «guerre» à l’optimisme. Au lieu de décider une université capable de former des élites performantes active et attractive, le Pouvoir, consciemment ou non, est en train de faire de l’université un vivier de délinquants, voire de criminels. Voilà comment le professeur universitaire est ravalé du statut de «prophète» (A. Chawki) à celui du forclos.
L’université semble être résignée, aujourd’hui, à l’échec, en raison des insuffisances abyssales qu’elle a cumulées. Nous n’avons nullement la prétention de lui demander de réinventer le savoir, mais aux gouvernants d’être tenus moralement et politiquement de discuter avec elle, de la respecter en tant que Haut Lieu de la connaissance. Actuellement, elle est comme une île complètement coupée de la réalité nationale. C’est pourquoi, elle est en train de subir un sort qui ne le mérite pas.
L’université est tellement sinistrée qu’il faut procéder d’urgence à un diagnostic approfondi. Elle a besoin d’une thérapie de choc pour un changement radical de comportement tant pédagogique, administratif qu’estudiantin et surtout politique.
Le 18 octobre dernier, c’était le professeur Benchehida qui a été assassiné dans son bureau dans l’enceinte de l’université. Demain, ce sera au tour de l’entité universitaire dans son ensemble, si on continue à faire comme si de rien n’était.
Il faut cesser de faire de la société algérienne une simple société de consommation et d’en faire une société à appétence insatiable de connaissances et de culture. En un mot, il faut promouvoir la performance des compétences si on veut avoir une université nouvelle et motivée, régénérée par sa propre jeunesse qui est la seule force vive de demain. Pour ce faire, il faut bannir la médiocrité des postes de décisions si on veut faire de l’Algérie une Corée du Sud arabe.
Faut-il rêver pour croire ?
Ce sera le début de la concorde entre étudiants et enseignants. Alors, la mort du professeur Benchehida n’aura pas été gratuite. Il reposera en paix aux côtés des prophètes, des saints et des martyrs.
Ceci n’est qu’un rêve. Martin Luther King a rêvé en 1968 d’une Amérique sans classes ni sans races. Son rêve commence à se réaliser en 2008 avec Barak Obama président des USA à 46 ans. Dois-je attendre encore 40 ans pour voir mon rêve se réaliser ? Ce sera une autre génération d’étudiants, mais aussi une autre génération de gouvernants plus performants que leurs prédécesseurs.
- Le Quotidien d’Oran
Nous avons, personnellement ainsi que d’autres universitaires, souvent attiré l’attention des pouvoirs publics dans ces mêmes colonnes, particulièrement ceux de la tutelle, que l’université algérienne est sérieusement éprouvée. Nos cris d’alarme sont, non seulement non entendus, mais étouffés. Les responsables persistent dans leur autisme légendaire jusqu’à ce qui ne devrait pas arriver arriva en ce matin du 18 octobre 2008. Peut-être que cet assassinat inqualifiable qui a eu lieu dans l’enceinte de l’université de Mostaganem, leur permettra de dessiller les yeux et finiront par nous entendre et nous écouter.
Quel que soit le mobile, rien ne justifie ce crime odieux perpétré contre la personne du professeur Mohammed Benchehida, de surcroît dans l’exercice de sa noble mission ravalée à une dévalorisation «émérite.»
L’université est descendue trop bas
Il y a à peine deux décennies, l’université était le sanctuaire du savoir. Le professeur du supérieur était respecté comme un prophète. Il accomplissait son rôle qui lui était dévolu, en l’occurrence la formation de l’élite nationale pour le pays. Aujourd’hui, enjeu égoïste et combinard des politiques, elle est devenue l’otage du Pouvoir et des partis influents. Elle a totalement déraillé, sinon dévoyée sous nos yeux impuissants. Le personnel enseignant, s’il a le savoir, n’a pas le pouvoir pour y remédier. Alors, il se voit contraint d’exécuter parfois des aberrations du fait qu’il n’a pas voix au chapitre, encore moins d’être consulté pour les grandes décisions du pays.
Les pouvoirs publics acculent manifestement l’université à l’inculture. Elle s’est ravalée à un statut qui est loin d’être le sien parce que mal gérée et surtout mal aiguillée au lieu et place d’être un établissement de la recherche et des découvertes scientifiques. Le professeur Benchehida n’a pas été assassiné par son seul étudiant, mais aussi par l’absurdité du système universitaires.
Allons-nous vers un «mai 1968 algérien ?»
Sommes-nous conduits à croire qu’il faut aller vers un «mai 1968 algérien» pour forcer la main aux décideurs de décider les bonnes décisions.
La première est d’abandonner, ne serait-ce que temporairement, l’idée du LMD pour penser à une refonte profonde et salvatrice de l’université. Pour ce faire :
- Elle doit recouvrer ses lettres de noblesse d’antan.
- Elle doit cesser d’être une crèche pour adultes.
- Le retour à l’élitisme au moyen du système modulaire et cesser avec le système compensatoire comme c’est le cas aujourd’hui.
- Suppression des examens de synthèse de la session de juin.
- Seuls les étudiants tangents ayant une moyenne générale variant entre 09,50 et 09,99 peuvent se présenter aux examens de rattrapage.
- La sélection doit se faire au niveau de la première année. N’accèdent à la deuxième année universitaire que ceux qui présentent des aptitudes pour les études supérieures.
- Elle doit cesser d’être une caricature. Elle doit garantir, non seulement un diplôme mais surtout une formation universitaire requise.
- Retour urgent et impératif à la performance. N’enseignent à l’université que ceux à compétences avérées.
- Renversement de l’esprit de notre enseignement qui souffre de la «massification».
- Le statut de l’enseignant-chercheur de rang magistral doit équivaloir à celui du député en tant qu’élite scientifique.
En répondant à ces conditions, l’université algérienne recouvrera, sans nul doute, sa mission première qui est la formation de l’élite et surtout des chercheurs dont le pays en a plus que jamais besoin. Notre université est sinistrée parce que l’échelle des valeurs s’est totalement inversée. Une politique qui accorde la priorité des priorités à la politique pour veiller sur le système.
D’où l’inflation du pouvoir et de l’avoir, notamment, en ces temps qui courent et la déconsidération programmée du savoir. Tant que la médiocrité reste agrippée au pouvoir (tous niveaux confondus), elle gardera une haine viscérale à l’égard des intellectuels qu’elle considère comme des opposants, voire même des ennemis à évincer. Elle veut saper le fondement de la culture même qui, normalement, doit être élevée au rang d’une deuxième religion de l’Etat après l’islam.
Notre université enseigne-t-elle l’ignorance ?
Un peuple instruit sait se battre mais ne sait pas se soumettre. Ce que refuse mordicus nos gouvernants. Pour Noam Chomsky, «Le pouvoir ne souhaite pas que les gens comprennent qu’ils peuvent provoquer des changements.» L’enseignant est le soldat qui fait la guerre au pire des ennemis : «l’ignorance» qui obscurcit les esprits et enténèbre les cœurs. Le paysan laboure la terre dans l’espoir de nourrir le corps.
L’enseignant laboure les esprits pour un meilleur réveil de la conscience nationale et civique. Il semble que notre université enseigne l’ignorance plutôt que les valeurs positives que nous venons d’énumérer supra sinon pourquoi est-elle tombée dans une pareille décrépitude loin derrière nos voisins maghrébins.
L’Algérie de demain jaillira de celle d’aujourd’hui. Or, celle-ci est malade de ses politiques.
Le système actuel a, non seulement démontré son incapacité, mais il est en train de prouver ostensiblement son inutilité. Bien que dépassé par tout et pour tout, il refuse de céder le pouvoir aux compétences nationales.
Les étudiants veulent une autre université, à même de répondre à leurs aspirations. Les dirigeants veulent maintenir la même Algérie. Un conflit d’intérêts qui ne prête «guerre» à l’optimisme. Au lieu de décider une université capable de former des élites performantes active et attractive, le Pouvoir, consciemment ou non, est en train de faire de l’université un vivier de délinquants, voire de criminels. Voilà comment le professeur universitaire est ravalé du statut de «prophète» (A. Chawki) à celui du forclos.
L’université semble être résignée, aujourd’hui, à l’échec, en raison des insuffisances abyssales qu’elle a cumulées. Nous n’avons nullement la prétention de lui demander de réinventer le savoir, mais aux gouvernants d’être tenus moralement et politiquement de discuter avec elle, de la respecter en tant que Haut Lieu de la connaissance. Actuellement, elle est comme une île complètement coupée de la réalité nationale. C’est pourquoi, elle est en train de subir un sort qui ne le mérite pas.
L’université est tellement sinistrée qu’il faut procéder d’urgence à un diagnostic approfondi. Elle a besoin d’une thérapie de choc pour un changement radical de comportement tant pédagogique, administratif qu’estudiantin et surtout politique.
Le 18 octobre dernier, c’était le professeur Benchehida qui a été assassiné dans son bureau dans l’enceinte de l’université. Demain, ce sera au tour de l’entité universitaire dans son ensemble, si on continue à faire comme si de rien n’était.
Il faut cesser de faire de la société algérienne une simple société de consommation et d’en faire une société à appétence insatiable de connaissances et de culture. En un mot, il faut promouvoir la performance des compétences si on veut avoir une université nouvelle et motivée, régénérée par sa propre jeunesse qui est la seule force vive de demain. Pour ce faire, il faut bannir la médiocrité des postes de décisions si on veut faire de l’Algérie une Corée du Sud arabe.
Faut-il rêver pour croire ?
Ce sera le début de la concorde entre étudiants et enseignants. Alors, la mort du professeur Benchehida n’aura pas été gratuite. Il reposera en paix aux côtés des prophètes, des saints et des martyrs.
Ceci n’est qu’un rêve. Martin Luther King a rêvé en 1968 d’une Amérique sans classes ni sans races. Son rêve commence à se réaliser en 2008 avec Barak Obama président des USA à 46 ans. Dois-je attendre encore 40 ans pour voir mon rêve se réaliser ? Ce sera une autre génération d’étudiants, mais aussi une autre génération de gouvernants plus performants que leurs prédécesseurs.
- Le Quotidien d’Oran