Algérie : Nouvelle année, nouvelles aspirations
Le Qutidieb d'Oran
par Mohamed Bensalah
Mardi 30 décembre 2008
2008, l’année de tous les dangers, s’est enfin achevée. Année brûlante dans tous les sens du terme pour l’ensemble des habitants de la planète, et plus particulièrement pour la population de Gaza qui subit un véritable holocauste.
Triste bilan que celui de l’année qui vient de s’écouler : cataclysmes meurtriers, ouragans ravageurs, pluviométrie démentielle, inondations spectaculaires, sécheresse dévastatrice, incendies gigantesques, températures caniculaires, accidents routiers en hausse et toujours un terrorisme nihiliste aux soubresauts sanglants. Le journal entier ne suffirait pas à inscrire toutes les catastrophes, toutes les calamités et toutes les tragédies enregistrées durant cette année 2008. Tous ces massacres collectifs, toutes ces victimes innocentes, tout ce sang et toutes ces larmes versées ne sont, selon les futurologues patentés, qu’un avant-goût des drames à venir. Pour ces derniers, les angoisses du futur connaîtront un regain d’intensité. Craintes irrationnelles, fantasmes irraisonnés, prédictions apocalyptiques ? Si nul ne peut prédire, prévoir et dire, avec certitude, ce que sera demain, il est toutefois possible de constater que l’état actuel du monde et les périls croissants qui menacent l’humanité n’incitent guère à l’optimisme.
Comment s’annonce la nouvelle année ?
Vaste question ! La réponse immédiate est qu’elle ne s’annonce pas sous de bons auspices avec le déchaînement des violences israéliennes, les coups d’Etat en Afrique et les autres drames qui s’inscrivent en filigrane. Cette dernière semaine, le spectacle délétère du cauchemar palestinien n’incite guère à l’optimisme. Calfeutrés dans leurs manteaux de certitudes et enfoncés dans leur blindage mental, les dirigeants arabes font, encore une fois, preuve d’une lâcheté inqualifiable. Le martyre du peuple palestinien les laisse de glace. Les misères de leur propre peuple n’arrivent ni à les émouvoir, ni à les secouer de leur torpeur ! Pas la moindre émotion, pas la moindre réprobation publique. Forts, lorsqu’il s’agit d’imposer, avec une morgue sans pareille, leurs règles d’airain à leurs compatriotes écrasés par le malheur, ou lorsqu’il s’agit de réprimer ces derniers, les leaders arabes autoproclamés savent se faire discrets et même secrets au moment où il faut redresser la tête. Ce mutisme révélateur est toutefois préférable aux propos incongrus, tels ceux du président de l’Autorité palestinienne qui, au lendemain des massacres perpétrés par les Israéliens, a rendu le Hamas responsable des tueries. Que la Ligue arabe détourne la tête et retarde volontairement une réunion d’urgence, rien de surprenant de la part de cette coquille vide, mais, ce qui révulse par-dessus tout, ce qui révolte, c’est le silence assourdissant de la communauté planétaire dont les ondes de la conscience ne s’agitent plus et l’attitude bienveillante des grandes puissances et des organismes internationaux qui confine à la duplicité.
Sous quelque angle qu’on le prenne, le présent semble donc sans issue et le futur sans avenir. La liberté interdite et les droits de l’Homme bafoués suscitent angoisses et craintes. Face aux périls croissants, au Moyen-Orient, en Afrique, en Amérique Latine et ailleurs, c’est le même néant, les mêmes impasses. Même balisées, les colères populaires qui arrivent à s’exprimer, ici et là, (sauf en Algérie où le peuple est tenu au devoir de réserve), n’ont plus le même écho face à la tétanie générale. 2009, n’échappera pas à la règle. Ce changement de date sera sans importance. Les Palestiniens, les Irakiens, les Afghans, les Africains et beaucoup d’autres peuples continueront à souffrir dans l’indifférence générale. Les journaux télévisés continueront à nous abreuver d’images atroces de visages déformés par la douleur, de cadavres désagrégés par les bombes, de regards hagards en quête de repères. Dans un monde obsédé par la force, le pouvoir, l’argent et la puissance, il ne faudrait pas s’attendre à des miracles.
Qu’en-est-il en Algérie, un pays qui ne cesse d’interroger son destin ?
Le premier symbole évident est que l’Algérie a retrouvé sa place dans le concert des Nations. Globalement, on peut dire que son développement économique est en marche comme l’attestent les investissements fabuleux dans plusieurs secteurs. Il serait démagogique et tendancieux de prétendre que le pays est en déclin, ou qu’il s’achemine vers le pire. Cependant, les programmes censés mettre fin aux crises du logement, des transports, de l’éducation et du chômage, accusent, de l’aveu même du président de la République, de sérieux retards. Mais si, selon la Banque d’Algérie, notre pays a renforcé sa stabilité macroéconomique et connaît une forte croissance, nul ne peut nier le fait que le progrès qui devait accompagner l’embellie financière, liée à la manne pétrolière exceptionnelle, n’est pas encore au rendez-vous. L’Algérie, par ailleurs, est toujours en mauvaise position dans le classement de la corruption à l’échelle mondiale. Ce phénomène multiforme et incontrôlable qui se perpétue n’accouchera certainement pas d’un bond de la conscience et de la condition humaine. Les procès interminables des responsables de l’anarchie, du marasme et de la désespérance, s’ils ne confinent pas à l’impunité, sont la preuve évidente d’un laxisme dévastateur. Docilité, compromissions et apathie ont favorisé la résurgence d’une mafia nuisible, composée d’un ramassis de harkis d’un nouveau genre toujours prompts à trahir les leurs.
Ces traîtres en costume trois pièces qui bradent les intérêts de la nation, ces parasites sociaux qui squattent en permanence tous les circuits, administratifs, bancaires, financiers, constituent un danger réel. Ils observent, surveillent et guettent les moindres fissures pour s’y engouffrer, aidés pour cela par des bureaucrates zélés trop enclins à confondre leurs intérêts privés avec ceux de la société politique. Certains félons ont été jusqu’à revêtir les habits des glorieux moudjahiddine tombés au champ d’honneur, et cela dans l’indifférence quasi-totale.
Parmi les autres risques majeurs auxquels notre pays est confronté, il nous faut citer, entre autres, les accidents de la circulation, les catastrophes naturelles (inondations, séismes, etc.), la violence dans les villes, la toxicomanie, les intoxications alimentaires, l’infanticide, les crimes sexuels. Endiguer ces grands fléaux est devenu l’Arlésienne. On en parle sans cesse, mais la parole masque mal l’inertie d’action, de prévention et de gestion. « Une nette régression des droits de l’Homme en Algérie » a, en outre, été constatée par la LADDH, qui vient de célébrer le 60e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’Homme. L’interdiction d’organiser des manifestations, même dans les lieux publics, le refus de délivrance de quitus pour la création de partis politiques et de syndicats hors UGTA, le maintien de l’Etat de siège, l’interdiction des grèves et l’opposition au pluralisme médiatique audiovisuel, participent à la stagnation de la société. Enfin, les peurs et les angoisses semblent resurgir. Face à la montée des périls et à l’incurie des gestionnaires, le citoyen algérien s’interroge sur son destin. La manifestation de son raz-le-bol, ici et là, n’a pas été perçue comme un signal fort. En l’absence de mesures draconiennes pour juguler tous ces fléaux et tous ces dysfonctionnements, les inquiétudes, les frustrations accumulées risquent, à terme, de se transformer en effervescence. Une occasion inouïe, voire inespérée, nous a été donnée par la hausse du prix du baril de pétrole pour sortir du marasme. Les gestionnaires politiques l’ont escamoté. La nouvelle année s’annonce morose pour l’économie nationale en raison de la chute vertigineuse des prix du baril de pétrole et sombre pour les autres secteurs d’activité quoi qu’en disent les décideurs politiques.
Répéter à satiété que le terrorisme est vaincu et que la situation sécuritaire est en nette amélioration, alors que les indicateurs sont toujours au rouge, que la criminalité est en hausse, que l’insécurité et le banditisme ne cessent de progresser et que les forces du mal, omniprésentes et omnipotentes démontrent au grand jour leur capacité de nuisance, relève de l’absurde. Brocarder haut et fort la fin de la corruption et des spéculations, alors que les mafiosi, bien tapis à l’ombre du pouvoir, continuent d’agir en toute impunité, relève de l’incohérence. Dresser enfin, à grand renfort de publicité, des bilans hasardeux de bonne santé économique alors que sur le terrain, l’atmosphère délétère incite plutôt au pessimisme, n’est guère raisonnable.
Le Qutidieb d'Oran
par Mohamed Bensalah
Mardi 30 décembre 2008
2008, l’année de tous les dangers, s’est enfin achevée. Année brûlante dans tous les sens du terme pour l’ensemble des habitants de la planète, et plus particulièrement pour la population de Gaza qui subit un véritable holocauste.
Triste bilan que celui de l’année qui vient de s’écouler : cataclysmes meurtriers, ouragans ravageurs, pluviométrie démentielle, inondations spectaculaires, sécheresse dévastatrice, incendies gigantesques, températures caniculaires, accidents routiers en hausse et toujours un terrorisme nihiliste aux soubresauts sanglants. Le journal entier ne suffirait pas à inscrire toutes les catastrophes, toutes les calamités et toutes les tragédies enregistrées durant cette année 2008. Tous ces massacres collectifs, toutes ces victimes innocentes, tout ce sang et toutes ces larmes versées ne sont, selon les futurologues patentés, qu’un avant-goût des drames à venir. Pour ces derniers, les angoisses du futur connaîtront un regain d’intensité. Craintes irrationnelles, fantasmes irraisonnés, prédictions apocalyptiques ? Si nul ne peut prédire, prévoir et dire, avec certitude, ce que sera demain, il est toutefois possible de constater que l’état actuel du monde et les périls croissants qui menacent l’humanité n’incitent guère à l’optimisme.
Comment s’annonce la nouvelle année ?
Vaste question ! La réponse immédiate est qu’elle ne s’annonce pas sous de bons auspices avec le déchaînement des violences israéliennes, les coups d’Etat en Afrique et les autres drames qui s’inscrivent en filigrane. Cette dernière semaine, le spectacle délétère du cauchemar palestinien n’incite guère à l’optimisme. Calfeutrés dans leurs manteaux de certitudes et enfoncés dans leur blindage mental, les dirigeants arabes font, encore une fois, preuve d’une lâcheté inqualifiable. Le martyre du peuple palestinien les laisse de glace. Les misères de leur propre peuple n’arrivent ni à les émouvoir, ni à les secouer de leur torpeur ! Pas la moindre émotion, pas la moindre réprobation publique. Forts, lorsqu’il s’agit d’imposer, avec une morgue sans pareille, leurs règles d’airain à leurs compatriotes écrasés par le malheur, ou lorsqu’il s’agit de réprimer ces derniers, les leaders arabes autoproclamés savent se faire discrets et même secrets au moment où il faut redresser la tête. Ce mutisme révélateur est toutefois préférable aux propos incongrus, tels ceux du président de l’Autorité palestinienne qui, au lendemain des massacres perpétrés par les Israéliens, a rendu le Hamas responsable des tueries. Que la Ligue arabe détourne la tête et retarde volontairement une réunion d’urgence, rien de surprenant de la part de cette coquille vide, mais, ce qui révulse par-dessus tout, ce qui révolte, c’est le silence assourdissant de la communauté planétaire dont les ondes de la conscience ne s’agitent plus et l’attitude bienveillante des grandes puissances et des organismes internationaux qui confine à la duplicité.
Sous quelque angle qu’on le prenne, le présent semble donc sans issue et le futur sans avenir. La liberté interdite et les droits de l’Homme bafoués suscitent angoisses et craintes. Face aux périls croissants, au Moyen-Orient, en Afrique, en Amérique Latine et ailleurs, c’est le même néant, les mêmes impasses. Même balisées, les colères populaires qui arrivent à s’exprimer, ici et là, (sauf en Algérie où le peuple est tenu au devoir de réserve), n’ont plus le même écho face à la tétanie générale. 2009, n’échappera pas à la règle. Ce changement de date sera sans importance. Les Palestiniens, les Irakiens, les Afghans, les Africains et beaucoup d’autres peuples continueront à souffrir dans l’indifférence générale. Les journaux télévisés continueront à nous abreuver d’images atroces de visages déformés par la douleur, de cadavres désagrégés par les bombes, de regards hagards en quête de repères. Dans un monde obsédé par la force, le pouvoir, l’argent et la puissance, il ne faudrait pas s’attendre à des miracles.
Qu’en-est-il en Algérie, un pays qui ne cesse d’interroger son destin ?
Le premier symbole évident est que l’Algérie a retrouvé sa place dans le concert des Nations. Globalement, on peut dire que son développement économique est en marche comme l’attestent les investissements fabuleux dans plusieurs secteurs. Il serait démagogique et tendancieux de prétendre que le pays est en déclin, ou qu’il s’achemine vers le pire. Cependant, les programmes censés mettre fin aux crises du logement, des transports, de l’éducation et du chômage, accusent, de l’aveu même du président de la République, de sérieux retards. Mais si, selon la Banque d’Algérie, notre pays a renforcé sa stabilité macroéconomique et connaît une forte croissance, nul ne peut nier le fait que le progrès qui devait accompagner l’embellie financière, liée à la manne pétrolière exceptionnelle, n’est pas encore au rendez-vous. L’Algérie, par ailleurs, est toujours en mauvaise position dans le classement de la corruption à l’échelle mondiale. Ce phénomène multiforme et incontrôlable qui se perpétue n’accouchera certainement pas d’un bond de la conscience et de la condition humaine. Les procès interminables des responsables de l’anarchie, du marasme et de la désespérance, s’ils ne confinent pas à l’impunité, sont la preuve évidente d’un laxisme dévastateur. Docilité, compromissions et apathie ont favorisé la résurgence d’une mafia nuisible, composée d’un ramassis de harkis d’un nouveau genre toujours prompts à trahir les leurs.
Ces traîtres en costume trois pièces qui bradent les intérêts de la nation, ces parasites sociaux qui squattent en permanence tous les circuits, administratifs, bancaires, financiers, constituent un danger réel. Ils observent, surveillent et guettent les moindres fissures pour s’y engouffrer, aidés pour cela par des bureaucrates zélés trop enclins à confondre leurs intérêts privés avec ceux de la société politique. Certains félons ont été jusqu’à revêtir les habits des glorieux moudjahiddine tombés au champ d’honneur, et cela dans l’indifférence quasi-totale.
Parmi les autres risques majeurs auxquels notre pays est confronté, il nous faut citer, entre autres, les accidents de la circulation, les catastrophes naturelles (inondations, séismes, etc.), la violence dans les villes, la toxicomanie, les intoxications alimentaires, l’infanticide, les crimes sexuels. Endiguer ces grands fléaux est devenu l’Arlésienne. On en parle sans cesse, mais la parole masque mal l’inertie d’action, de prévention et de gestion. « Une nette régression des droits de l’Homme en Algérie » a, en outre, été constatée par la LADDH, qui vient de célébrer le 60e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’Homme. L’interdiction d’organiser des manifestations, même dans les lieux publics, le refus de délivrance de quitus pour la création de partis politiques et de syndicats hors UGTA, le maintien de l’Etat de siège, l’interdiction des grèves et l’opposition au pluralisme médiatique audiovisuel, participent à la stagnation de la société. Enfin, les peurs et les angoisses semblent resurgir. Face à la montée des périls et à l’incurie des gestionnaires, le citoyen algérien s’interroge sur son destin. La manifestation de son raz-le-bol, ici et là, n’a pas été perçue comme un signal fort. En l’absence de mesures draconiennes pour juguler tous ces fléaux et tous ces dysfonctionnements, les inquiétudes, les frustrations accumulées risquent, à terme, de se transformer en effervescence. Une occasion inouïe, voire inespérée, nous a été donnée par la hausse du prix du baril de pétrole pour sortir du marasme. Les gestionnaires politiques l’ont escamoté. La nouvelle année s’annonce morose pour l’économie nationale en raison de la chute vertigineuse des prix du baril de pétrole et sombre pour les autres secteurs d’activité quoi qu’en disent les décideurs politiques.
Répéter à satiété que le terrorisme est vaincu et que la situation sécuritaire est en nette amélioration, alors que les indicateurs sont toujours au rouge, que la criminalité est en hausse, que l’insécurité et le banditisme ne cessent de progresser et que les forces du mal, omniprésentes et omnipotentes démontrent au grand jour leur capacité de nuisance, relève de l’absurde. Brocarder haut et fort la fin de la corruption et des spéculations, alors que les mafiosi, bien tapis à l’ombre du pouvoir, continuent d’agir en toute impunité, relève de l’incohérence. Dresser enfin, à grand renfort de publicité, des bilans hasardeux de bonne santé économique alors que sur le terrain, l’atmosphère délétère incite plutôt au pessimisme, n’est guère raisonnable.
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