Vieillards en manque de soins que l’on délaisse Absence cruelle d’hôpitaux de gériatrie
Par suite d’un système de santé qui, en dépit de quelques avancées notables, est pour l’ensemble assez défaillant, il n’est pas conseillé de vivre très vieux en Algérie. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs des Algériens disent souvent craindre «l’aâqouba», ce proche moment de fin de vie tant redouté où, parce que nos forces nous ont abandonnés, l’on est sur le point de s’en aller rejoindre le Monde de l’éternité.
Face à l’absence cruelle de structures médicales d’accompagnement des malades d’âge avancé, elles sont combien, ces familles, dépourvues de moyens et vivant le plus souvent dans la promiscuité, à devoir s’occuper, seules, de leurs vieux parents malades, sujets parfois à des souffrances indicibles, et que les établissements hospitaliers refusent obstinément de garder parce qu’ils ne sont pas équipés pour ce faire. Il est d’ailleurs courant pour les proches d’une vieille personne pour laquelle la médecine, compte tenu de ses moyens, ne peut plus grand-chose, de s’entendre recommander par des personnels des hôpitaux de la ramener chez elle, en réalité une manière subtile ou bien détournée de leur laisser croire qu’il vaudrait mieux que celle-ci finisse les derniers moments de son existence au milieu des siens.
Il faut reconnaître que pendant un moment, les établissements hospitaliers ont été amenés à jouer le rôle de véritables hospices mais, face à l’augmentation de la population et au nombre grandissant de patients à devoir prendre en charge, ces derniers se sont trouvés dans l’obligation de refuser d’accueillir les plus vieux parmi les malades dont l’état demande, en outre, la présence d’une combinaison de moyens de traitements spécifiques. Le vieillissement de la population algérienne est devenu une réalité dont les retombées en matière d’assistance médicale doivent sérieusement être appréhendées par les pouvoirs publics.
En 1962, l’Algérie possédait une population évaluée approximativement à 8 millions d’individus dont une majorité avait moins de 20 années d’âge. Le problème concernant la santé des personnes âgées était à l’époque marginal. Celles-ci, quand elles étaient en difficultés matérielles ou bien impotentes, étaient prises en charge par leurs enfants jusqu’au moment de leur mort. Aujourd’hui, et du fait de situations socioéconomiques difficiles, ajoutées à des conditions de logement précaires, des familles désemparées en viennent parfois à abandonner, à même la rue ou dans les rares hospices qui existent et dont certains ont toute l’apparence de mouroirs, des proches devenus séniles ou atteints de séquelles graves, à l’exemple de la paralysie, de pathologies vasculaires, respiratoires, cérébrales ou bien de la ma-ladie d’Alzheimer. Le Pr Hocine Chaouche, chef du service de chirurgie thoracique, cardiovasculaire et de transplantation rénale au CHU Mustapha considère que «maintenant que la population a relativement vieilli, (une frange importante a plus de 50 ans), il devient indispensable d’engager une réflexion sur un programme à long terme visant à créer des cen-tres de gériatrie et à former, au fur et à mesure, des personnels spécialisés et qualifiés».
Une première tentative avortée
A l’initiative du Pr Grangueau, alors conseiller au ministère de la Santé, l’idée de créer des hôpitaux de gériatrie a commencé, un moment, à prendre corps, mais elle est restée en l’état, signale le Dr Djamal-Eddine Oulmane, spécialisé en promotion de la santé. Celui-ci relève que maintenant que l’espérance de vie des nationaux a atteint une moyenne variant de 70 à 74 années, il devient urgent de créer des structures de santé spécifiques pour prendre en charge, dans les meilleures conditions possibles, les vieux patients. «De la même manière qu’il existe des services de pédiatrie, il faut, dit-il, penser à créer une structure de gériatrie dans chaque wilaya». Le Dr Boubezari, médecin urgentiste à l’hôpital Mustapha, considère lui aussi que l’allongement de l’espérance de vie, avec comme corollaire l’apparition d’une forte demande en soins gériatriques, «en raison de l’augmentation aiguë des pathologies métaboliques, rénales, respiratoires et cardiaques» relève d’une absolue nécessité. La première tentative de créer un hôpital de gériatrie de 120 lits à Sétif, dont les travaux devaient débuter dans le courant du mois d’août 2006, a tout de suite tourné court, le ministre de la Santé de l’époque, Amar Tou, déclarant redouter qu’une pareille structure, transformée depuis en établissement de pédiatrie, ne serve de lieu propice aux personnes cherchant à abandonner leurs vieux parents. Il avait annoncé que la spécialité de gériatrie allait être introduite dans les hôpitaux dans lesquels des pavillons seront spécialement aménagés pour accueillir les malades du troisième âge. Le Pr Larbi Abid, directeur du département de médecine à la Faculté de médecine d’Alger, estimait à l’époque, que «c’est une solution de facilité d’avancer que l’on n’ouvrira pas d’hôpitaux de gériatrie parce que ceux-ci représenteraient une aubaine pour ceux qui veulent y abandonner leurs parents après avoir engagé des travaux de réalisation depuis plus de deux ans». Ce médecin indique qu’en Tunisie, il existe déjà une Société de gériatrie dont le siège est situé à l’hôpital de Manouba à Tunis. Questionné sur d’éventuels projets de création d’hôpitaux de gériatrie, le Dr Zerrouki, adjointe à la direction de la planification au ministère de la Santé, annonce qu’un premier programme de création de cinq centres spécialisés, dont le premier va commencer à être érigé dans la wilaya d’Alger, est sur le point d’être lancé. Pour de plus amples renseignements, elle invite à se rapprocher de la cellule de communication dont il n’a pas été possible, deux journées durant, de pouvoir joindre le responsable «en réunion à ce moment au niveau du Cabinet». Le Dr Zerrouki n’en précise pas moins que le premier de ces hôpitaux devrait, une fois réceptionné, servir à former les médecins et personnels paramédicaux appelés à être disséminés dans les autres structures du même type qui seront construits par la suite au bénéfice des patients âgés. «Il s’agit, ajoute-t-elle, d’une spécialité pour laquelle nous n’avons pas encore assez d’expérience».
Une définition de la gériatrie
Le Dr Khelifa, un praticien algérien, spécialiste de gériatrie et travaillant en Europe, définit cette spécialité comme la médecine des personnes âgées qui s’intéresse plus spécifiquement à la santé des personnes arrivées à un âge avancé, (physiologie du vieillissement et maladies des personnes âgées). La gérontologie dont la gériatrie est l’une des composantes désigne, quant à elle, l’étude du vieillissement dans toutes ses dimensions, notamment sociales, économiques, démographiques, psychologiques, anthropologiques, culturelles, médicales et autres. Pour le Pr Abid, «il faut absolument différencier les personnes âgées dépendantes économiquement et les malades âgés pouvant, de plus, être handicapés ou à la retraite après avoir exercé pendant des dizaines d’années et dont c’est le droit de bénéficier de traitements adéquats et spécifiques».
Par Ahmed Mahieddine
lejourdalgerie
Par suite d’un système de santé qui, en dépit de quelques avancées notables, est pour l’ensemble assez défaillant, il n’est pas conseillé de vivre très vieux en Algérie. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs des Algériens disent souvent craindre «l’aâqouba», ce proche moment de fin de vie tant redouté où, parce que nos forces nous ont abandonnés, l’on est sur le point de s’en aller rejoindre le Monde de l’éternité.
Face à l’absence cruelle de structures médicales d’accompagnement des malades d’âge avancé, elles sont combien, ces familles, dépourvues de moyens et vivant le plus souvent dans la promiscuité, à devoir s’occuper, seules, de leurs vieux parents malades, sujets parfois à des souffrances indicibles, et que les établissements hospitaliers refusent obstinément de garder parce qu’ils ne sont pas équipés pour ce faire. Il est d’ailleurs courant pour les proches d’une vieille personne pour laquelle la médecine, compte tenu de ses moyens, ne peut plus grand-chose, de s’entendre recommander par des personnels des hôpitaux de la ramener chez elle, en réalité une manière subtile ou bien détournée de leur laisser croire qu’il vaudrait mieux que celle-ci finisse les derniers moments de son existence au milieu des siens.
Il faut reconnaître que pendant un moment, les établissements hospitaliers ont été amenés à jouer le rôle de véritables hospices mais, face à l’augmentation de la population et au nombre grandissant de patients à devoir prendre en charge, ces derniers se sont trouvés dans l’obligation de refuser d’accueillir les plus vieux parmi les malades dont l’état demande, en outre, la présence d’une combinaison de moyens de traitements spécifiques. Le vieillissement de la population algérienne est devenu une réalité dont les retombées en matière d’assistance médicale doivent sérieusement être appréhendées par les pouvoirs publics.
En 1962, l’Algérie possédait une population évaluée approximativement à 8 millions d’individus dont une majorité avait moins de 20 années d’âge. Le problème concernant la santé des personnes âgées était à l’époque marginal. Celles-ci, quand elles étaient en difficultés matérielles ou bien impotentes, étaient prises en charge par leurs enfants jusqu’au moment de leur mort. Aujourd’hui, et du fait de situations socioéconomiques difficiles, ajoutées à des conditions de logement précaires, des familles désemparées en viennent parfois à abandonner, à même la rue ou dans les rares hospices qui existent et dont certains ont toute l’apparence de mouroirs, des proches devenus séniles ou atteints de séquelles graves, à l’exemple de la paralysie, de pathologies vasculaires, respiratoires, cérébrales ou bien de la ma-ladie d’Alzheimer. Le Pr Hocine Chaouche, chef du service de chirurgie thoracique, cardiovasculaire et de transplantation rénale au CHU Mustapha considère que «maintenant que la population a relativement vieilli, (une frange importante a plus de 50 ans), il devient indispensable d’engager une réflexion sur un programme à long terme visant à créer des cen-tres de gériatrie et à former, au fur et à mesure, des personnels spécialisés et qualifiés».
Une première tentative avortée
A l’initiative du Pr Grangueau, alors conseiller au ministère de la Santé, l’idée de créer des hôpitaux de gériatrie a commencé, un moment, à prendre corps, mais elle est restée en l’état, signale le Dr Djamal-Eddine Oulmane, spécialisé en promotion de la santé. Celui-ci relève que maintenant que l’espérance de vie des nationaux a atteint une moyenne variant de 70 à 74 années, il devient urgent de créer des structures de santé spécifiques pour prendre en charge, dans les meilleures conditions possibles, les vieux patients. «De la même manière qu’il existe des services de pédiatrie, il faut, dit-il, penser à créer une structure de gériatrie dans chaque wilaya». Le Dr Boubezari, médecin urgentiste à l’hôpital Mustapha, considère lui aussi que l’allongement de l’espérance de vie, avec comme corollaire l’apparition d’une forte demande en soins gériatriques, «en raison de l’augmentation aiguë des pathologies métaboliques, rénales, respiratoires et cardiaques» relève d’une absolue nécessité. La première tentative de créer un hôpital de gériatrie de 120 lits à Sétif, dont les travaux devaient débuter dans le courant du mois d’août 2006, a tout de suite tourné court, le ministre de la Santé de l’époque, Amar Tou, déclarant redouter qu’une pareille structure, transformée depuis en établissement de pédiatrie, ne serve de lieu propice aux personnes cherchant à abandonner leurs vieux parents. Il avait annoncé que la spécialité de gériatrie allait être introduite dans les hôpitaux dans lesquels des pavillons seront spécialement aménagés pour accueillir les malades du troisième âge. Le Pr Larbi Abid, directeur du département de médecine à la Faculté de médecine d’Alger, estimait à l’époque, que «c’est une solution de facilité d’avancer que l’on n’ouvrira pas d’hôpitaux de gériatrie parce que ceux-ci représenteraient une aubaine pour ceux qui veulent y abandonner leurs parents après avoir engagé des travaux de réalisation depuis plus de deux ans». Ce médecin indique qu’en Tunisie, il existe déjà une Société de gériatrie dont le siège est situé à l’hôpital de Manouba à Tunis. Questionné sur d’éventuels projets de création d’hôpitaux de gériatrie, le Dr Zerrouki, adjointe à la direction de la planification au ministère de la Santé, annonce qu’un premier programme de création de cinq centres spécialisés, dont le premier va commencer à être érigé dans la wilaya d’Alger, est sur le point d’être lancé. Pour de plus amples renseignements, elle invite à se rapprocher de la cellule de communication dont il n’a pas été possible, deux journées durant, de pouvoir joindre le responsable «en réunion à ce moment au niveau du Cabinet». Le Dr Zerrouki n’en précise pas moins que le premier de ces hôpitaux devrait, une fois réceptionné, servir à former les médecins et personnels paramédicaux appelés à être disséminés dans les autres structures du même type qui seront construits par la suite au bénéfice des patients âgés. «Il s’agit, ajoute-t-elle, d’une spécialité pour laquelle nous n’avons pas encore assez d’expérience».
Une définition de la gériatrie
Le Dr Khelifa, un praticien algérien, spécialiste de gériatrie et travaillant en Europe, définit cette spécialité comme la médecine des personnes âgées qui s’intéresse plus spécifiquement à la santé des personnes arrivées à un âge avancé, (physiologie du vieillissement et maladies des personnes âgées). La gérontologie dont la gériatrie est l’une des composantes désigne, quant à elle, l’étude du vieillissement dans toutes ses dimensions, notamment sociales, économiques, démographiques, psychologiques, anthropologiques, culturelles, médicales et autres. Pour le Pr Abid, «il faut absolument différencier les personnes âgées dépendantes économiquement et les malades âgés pouvant, de plus, être handicapés ou à la retraite après avoir exercé pendant des dizaines d’années et dont c’est le droit de bénéficier de traitements adéquats et spécifiques».
Par Ahmed Mahieddine
lejourdalgerie
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