Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Election présidentielle en Algérie sur fond de conservatisme accru de la société

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Election présidentielle en Algérie sur fond de conservatisme accru de la société

    La société algérienne est plus conservatrice qu'il y a dix ans et les libertés des femmes sont menacées. Les mentalités ont même régressé.
    En 2000, 27 % des Algériens se disaient favorables à l'égalité des sexes. Ils ne sont plus que 16 % aujourd'hui. La moitié de la population se déclarait prête à élire une femme à la présidence de la République. Alors que le pays se prépare selon toute vraisemblance à réélire, jeudi 9 avril, Abdelaziz Bouteflika pour un troisième mandat présidentiel, un tiers des habitants seulement envisage désormais qu'une femme occupe la magistrature suprême. Autre exemple : en matière d'héritage, un Algérien sur deux était d'accord pour un partage égalitaire entre frères et soeurs. Moins d'un sur trois y est prêt dorénavant.
    Une étude publiée au mois de mars à Alger par le Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (Ciddef), reconnu pour la qualité de ses travaux, a fait l'effet d'une douche froide dans les milieux intellectuels algériens. "Cette enquête confirme ce que nous constatons sur le terrain. Les femmes paient le prix de dix années de pression islamiste", s'inquiète l'avocate Nadia Ait Zai, fondatrice du Ciddef.
    A l'exception notable de la Kabylie, toutes les régions d'Algérie semblent touchées par une vague rétrograde. Seuls deux Algériens sur dix se disent ainsi favorables au travail des femmes.
    En matière d'habillement, sept personnes sur dix souhaitent que "toutes les femmes et les filles algériennes portent le hidjab (le voile islamique)". Les adolescents ne se montrent guère plus progressistes que leurs aînés (même si les filles le sont davantage que les garçons).

    Qu'un lien existe entre cette régression et la déception causée par l'échec du Front islamique de salut (FIS) à prendre le pouvoir, il y a quinze ans, ne fait guère de doute. "La population n'espère plus de solution collective. Elle se contente de croire à un salut individuel, par le biais d'un islam à tendance salafiste. Ce mouvement n'est pas politique. Il vise la société et ses moeurs. C'est pourquoi l'Etat a laissé faire", remarque le sociologue Nacer Djabi.
    Dans ce contexte, les débits de boissons se font de plus en plus rares. Les commerces ont tendance à fermer leurs portes à l'heure de la prière, y compris à Alger. Des Algériens de confession chrétienne sont poursuivis en justice pour "prosélytisme en milieu musulman". Le nombre de hidjabs explose. Les mosquées font le plein de fidèles. A tout cela s'ajoute l'engouement pour les pèlerinages à La Mecque, en Arabie saoudite. Il est de bon ton de s'y rendre, et plutôt trois fois qu'une. La plupart de ces dévots sont, selon Nacer Djabi, de nouveaux riches "qui pratiquent une religiosité de façade, souvent hypocrite, où l'apparence l'emporte sur le fond".
    L'islam, valeur refuge dans un pays en crise, toujours pas remis des "années de sang" ? Beaucoup en conviennent. Nouria Benghabrit-Remaoun, maître de conférences au Centre de recherches en anthropologie sociale et culturelle d'Oran, insiste pour sa part sur "la grave crise identitaire" que traversent les hommes.
    Dépassés par les filles dans la course aux diplômes et à la réussite, et déstabilisés par le chômage, les Algériens se crispent sur leur dernier pré carré : les moeurs, en particuliers ceux de leurs soeurs.
    La part de responsabilité des autorités dans ce processus est lourde. Jamais les confréries religieuses, les zaouias, n'auront été autant courtisées qu'au cours de ces dix dernières années. Pire, le pouvoir a systématiquement combattu l'émergence de figures ou de courants capables de représenter la société civile. L'élection présidentielle, jeudi 9 avril, en est une parfaite illustration : aucun candidat d'envergure n'a été admis face au président sortant, Abdelaziz Bouteflika.
    L'Algérie est-elle destinée à tourner le dos à la modernité ? Personne ne semble le croire sérieusement. "Les jeunes Algériens sont en réalité tiraillés en tous sens. Ils sont à la recherche de modèles islamiques positifs, comme en Turquie", analyse Said Benmerad, expert au Centre national d'études et d'analyses pour la population et le développement. Cet enseignant à l'université d'Alger en donne pour exemple le succès grandissant, en Algérie, des feuilletons turcs qui passent sur les télévisions arabes.
    Ces influences contradictoires se ressentent à tous les niveaux et en toutes circonstances. En 2008, par exemple, le président Bouteflika a financé le pèlerinage à La Mecque d'une cinquantaine de personnalités algériennes.
    Parmi elles, se trouvait Zahouani, une chanteuse de raï très libre, aux textes souvent audacieux, voire crus. L'affaire a fait grand bruit.
    Rentrée d'Arabie saoudite avec le titre respectable de "hadj", la chanteuse éprouve à présent des difficultés manifestes à combiner en public son ancienne et sa nouvelle vie. Du coup, elle garde ses tenues vestimentaires toujours un peu provocantes, mais porte en même temps le hidjab !
    Les Algérois, eux, se moquent gentiment : "Ceux qui ont fait le "pèlerinage Zahouani" (de l'année 2008) doivent le refaire car il n'est pas valable ! Le bon Dieu ne l'accepte pas", plaisantent-ils. L'Algérie, c'est aussi cela...
    Florence Beaugé

    Source : Le Monde
    « la libération de l'Algérie sera l'œuvre de tous », Abane Ramdane 1955.

  • #2
    Ces chiffres font vraiment froid dans le dos.

    Commentaire


    • #3
      Terrible...

      Commentaire

      Chargement...
      X