La demande d'excuses ou comment «transformer une victoire en défaite»
par Kamel Daoud
par Kamel Daoud

Ce récent projet sent donc un peu cette mauvaise odeur du débat identitaire en France. Ici et là-bas, il y a encore des vendeurs de cadavres, minoritaires mais avec une voix stridente. En plus profond, il s'agit d'un meuble plus que d'une lutte est-on tenté de croire. Après le match du Soudan entre l'Algérie et l'Ex-Egypte, il y a eu trois cadavres : l'un physique (l'Ex-Egypte en campagne de reproduction présidentielle) et deux cadavres idéologiques : l'islamisme et le néo-nassérisme. Ici en Algérie, c'est un match de foot qui a réussi à parachever la liquidation de deux grandes illusions utopistes et émotionnelles «arabe» : l'arabité et la barbe. On comprendra alors qu'il ne restera plus rien à des courants nationalistes locaux qui ont fondé leur légitimité sur ces deux fleuves de nos amertumes. Que peuvent vendre aujourd'hui des partis comme le FLN à un peuple qui a compris qu'il est algérien et qui veut vivre ici et maintenant ? Comment rester dans la ligne de visibilité sans s'appuyer sur l'unité arabe fantasmatique ou le fond politisé de l'identité religieuse ? Que dire à un peuple qui court plus vite que soi et qui a compris qu'il est en avance sur ses militants démodés ? Comment capter son attention ? En lui inventant un remake de la guerre de libération et un nouveau spectacle d'héroïsme oral avec des martyrs que va épuiser la conjugaison et pas le maquis. C'est la dernière idéologie de rechange après le néo-nassérisme et l'islamisme soft. Les Algériens vont regarder puis s'occuper de leurs affaires. La raison ? Ils veulent un effet domino absolu : la colonisation a été un crime, la décolonisation a été transformée en crime. Les Algériens veulent les excuses de tous ceux qui ont fait mal à ce pays, l'ont colonisé, mangé, morcelé, détruit ou dépensé comme leur propre argent de poche. A commencer par la France et jusqu'à Sonatrach.
Le Quotidien d'Oran .
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