C'est un scandale!
Quand Alain Juppé donne des consignes à l’Algérie...
Paris demande à Alger de fêter « dans la modération » son cinquantième anniversaire d’indépendance.
Il paraît que l’Algérie serait indépendante de la France depuis cinquante ans. Apparemment, notre ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, ne doit pas être au courant. Il y a dix jours, lors d’une audition devant la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, le patron du Quai d’Orsay a rappelé qu’il avait suggéré aux autorités algériennes de fêter « dans un esprit de modération » ce cinquantenaire. « Oui chef ! », a dû penser son homologue.
« Nous sommes convenus avec le président Abdelaziz Bouteflika, lorsque je lui ai rendu visite l’année dernière, d’envisager la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie dans un esprit de modération, en essayant d’éviter les extrémismes de tous bords », a expliqué aux députés Alain Juppé, comme s’il fallait faire table rase du passé. « J’espère qu’on va continuer sur cette ligne. Surtout nous nous étions mis d’accord pour dire : “Regardons l’avenir.” Essayons de fonder la relation franco-algérienne sur l’avenir et pas sur le passé », a-t-il ajouté.
Hormis des commentaires d’internautes algériens, sur le thème « de quoi il se mêle celui-là », la sortie d’Alain Juppé n’a pas suscité de réactions officielles des autorités algériennes. Selon la presse algérienne, Alger semble aussi gêné aux entournures que Paris par ce cinquantenaire. Car, au-delà des responsabilités historiques de l’ancienne puissance coloniale et de l’examen de la guerre d’Algérie (1954-1962), ce cinquantenaire est aussi l’occasion de faire le bilan de cinquante ans de politique algérienne. « Les autorités algériennes se font très discrètes sur les préparatifs », écrit le quotidien en ligne Tout sur l’Algérie (TSA). « Une discrétion qui peut s’expliquer de deux façons. D’une part, cette année du demi‑siècle de l’indépendance est aussi une “année bilan” pour le pouvoir en place depuis 1962. Une année qui commence sur fond de protestations sociales à Laghouat, Alger, Oran, Bejaïa… comme autant d’illustrations de l’échec du système. Services publics défectueux, éducation délaissée, économie stagnante, culture absente… En cinquante ans, le pays a peu progressé. D’autre part, la discrétion d’Alger est liée au contexte en France qui s’apprête à vivre deux élections : présidentielle et législatives », analyse TSA.
Le président de la très opaque commission pour l’organisation du cinquantenaire n’est autre que le premier ministre lui-même, Ahmed Ouyahia. Un choix qui ne doit rien au hasard. Contrairement au Front de libération nationale, le chef du Rassemblement national démocratique (RND) est opposé à une repentance de la France. « Il faut cesser de faire de la colonisation de l’Algérie un fonds de commerce », a-t-il récemment indiqué à son homologue turc. Visiblement, les consignes de la France sont appliquées à la lettre.
Damien Roustel
L'Humanité
Quand Alain Juppé donne des consignes à l’Algérie...
Paris demande à Alger de fêter « dans la modération » son cinquantième anniversaire d’indépendance.
Il paraît que l’Algérie serait indépendante de la France depuis cinquante ans. Apparemment, notre ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, ne doit pas être au courant. Il y a dix jours, lors d’une audition devant la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, le patron du Quai d’Orsay a rappelé qu’il avait suggéré aux autorités algériennes de fêter « dans un esprit de modération » ce cinquantenaire. « Oui chef ! », a dû penser son homologue.
« Nous sommes convenus avec le président Abdelaziz Bouteflika, lorsque je lui ai rendu visite l’année dernière, d’envisager la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie dans un esprit de modération, en essayant d’éviter les extrémismes de tous bords », a expliqué aux députés Alain Juppé, comme s’il fallait faire table rase du passé. « J’espère qu’on va continuer sur cette ligne. Surtout nous nous étions mis d’accord pour dire : “Regardons l’avenir.” Essayons de fonder la relation franco-algérienne sur l’avenir et pas sur le passé », a-t-il ajouté.
Hormis des commentaires d’internautes algériens, sur le thème « de quoi il se mêle celui-là », la sortie d’Alain Juppé n’a pas suscité de réactions officielles des autorités algériennes. Selon la presse algérienne, Alger semble aussi gêné aux entournures que Paris par ce cinquantenaire. Car, au-delà des responsabilités historiques de l’ancienne puissance coloniale et de l’examen de la guerre d’Algérie (1954-1962), ce cinquantenaire est aussi l’occasion de faire le bilan de cinquante ans de politique algérienne. « Les autorités algériennes se font très discrètes sur les préparatifs », écrit le quotidien en ligne Tout sur l’Algérie (TSA). « Une discrétion qui peut s’expliquer de deux façons. D’une part, cette année du demi‑siècle de l’indépendance est aussi une “année bilan” pour le pouvoir en place depuis 1962. Une année qui commence sur fond de protestations sociales à Laghouat, Alger, Oran, Bejaïa… comme autant d’illustrations de l’échec du système. Services publics défectueux, éducation délaissée, économie stagnante, culture absente… En cinquante ans, le pays a peu progressé. D’autre part, la discrétion d’Alger est liée au contexte en France qui s’apprête à vivre deux élections : présidentielle et législatives », analyse TSA.
Le président de la très opaque commission pour l’organisation du cinquantenaire n’est autre que le premier ministre lui-même, Ahmed Ouyahia. Un choix qui ne doit rien au hasard. Contrairement au Front de libération nationale, le chef du Rassemblement national démocratique (RND) est opposé à une repentance de la France. « Il faut cesser de faire de la colonisation de l’Algérie un fonds de commerce », a-t-il récemment indiqué à son homologue turc. Visiblement, les consignes de la France sont appliquées à la lettre.
Damien Roustel
L'Humanité
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