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Cette Algérie vaniteuse et pourtant incapable de dire sa colère

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  • Cette Algérie vaniteuse et pourtant incapable de dire sa colère

    Les malheurs des pays arabes voisins semblent permettre au régime algérien de se maintenir en place. Mais pour combien de temps encore?

    Ça y est! Le package va être complété et livré: une APN (Assemblée populaire nationale, le Parlement algérien), des mairies puis, prochainement, une Constitution que personne ne lira et que tout le monde subira. Et, enfin, une présidentielle où personne ne pourra choisir.

    Donc, presque deux ans après les révolutions des voisins ( printemps arabe ), le régime s’en sort plus fort, plus solide, plus implanté et plus légitime.

    Et c’est étrange ce jeu de chance de la dictature molle que nous subissons: les malheurs d’autrui font sa survie comme une vieille fille qui rajeunit, quand meurent ses rivales, dont elle absorbe la jeunesse et la peau fraîche.

    Cela est arrivé avec les attentats du 11 septembre 2001, et cela arrive à nouveau avec le printemps arabe et cela va être consolidé avec la crise au Nord-Mali .

    Au fil du temps, notre pouvoir qui est notre devoir, grandit, devient plus fort, retrouve son utilité internationale et régionale et nous, en comparaison, nous devenons plus petits, plus légers, plus futiles, plus invisibles.

    La tentation d'un quatrième mandat pour Bouteflika

    Aux yeux de l’Occident qui vote, la Tunisie de Ben Alii avait la légitimité du pain qui passait avant celle de la démocratie, selon l'ancien président français Jacques Chirac. L’Egypte avait celle du bouchon régional et de la rente géostratégique, selon les experts. Celle de la Libye était celle des gisements de pétrole et de son influence sur le Sahel.

    D’un coup, l’Algérie, après 2011, bénéficie des trois excuses, en même temps et à haute dose: la rente géostratégique avec le Mali, la rente des ressources avec les gisements de gaz et de pétrole, et la rente du «pain», genre «vaut mieux la caste d’Alger que des islamistes, quoi que l’on dise en public».

    Le président Abdelaziz Bouteflika et compagnie ne pouvaient rêver de mieux pour asseoir l’idée d'un quatrième mandat. Aux yeux du monde qui décide, Bouteflika vaut mieux que Morsi, Ghannouchi, Marzouki et les milices libyennes.
    Et nous? Vous mangez mieux et vous avez le calme sous les fenêtres. L’Occident nous parle comme Jacques Chirac a parlé aux Tunisiens, il y a des années, de par les fenêtres de Ben Ali et sa femme.

    Dans un truculent entretien paru dans Algérie News, Sid Ahmed Ghozali, l’ex ex-chef du gouvernement des années 90, a été de mauvaise foi, comme à son habitude, mais il a touché du doigt un concept essentiel du pouvoir: la légitimité.

    La nostalgie de la guerre de libération

    La légitimité du pouvoir est passée, selon Sid Ahmed Ghozali, de la légitimité du «j’ai fait la guerre de libération» à celle de «je suis dans l’armée héritière de celle qui a fait la guerre»; de celle de «j’ai fait la lutte antiterroriste des années 90» (légitimité par le sécuritaire), à celle de «je suis proche de Bouteflika depuis ses vingt ans de disgrâce et je suis proche de sa famille».

    Le tout allant dans le sens de la légitimité opportuniste internationale: je suis vital, important, incontournable et essentiel à plus de 70 ans.

    On lira et relira ces compliments de l’Occident qui en abuse à l’adresse d’une Algérie que l’on sait vaniteuse et nostalgique des années 70: le rôle dit «incontournable» de l’Algérie, dispense aujourd’hui le peuple de voter ou de se soulever.

    On restera donc assis à regarder le régime promener le nœud papillon que Sid Ahmed a perdu. Car l’Algérie est incontournable justement. Mais nous on est contournables. Par tous. Et de plus en plus.


    Kamel Daoud ( Le Quotidien d'Oran )
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