Ali Yahia Abdennour Publié dans El Watan le 31 - 07 - 2013
Elle s'est libérée du colonialisme, mais l'armée des frontières a occupé le pays et colonisé le peuple.Le groupe d'Oudjda, qui prétend incarner la Révolution, a éliminé tous ceux qui lui étaient hostiles. La libération nationale s'est accompagnée de fruits amers. Elle a été suivie par l'instauration d'un système politique toujours en vigueur, qui refuse de donner aux Algériens plus de liberté et plus de droits que le régime colonial. Le peuple algérien a fait la Révolution contre l' oppression et la répression, qui ont enfanté les droits de l'homme, pour la liberté et la justice, et le voilà revenu à la case départ où l'a cantonné le colonialisme, celle de sujet sans droit.
L'oppression et la répression du peuple algérien ne sont plus coloniales mais nationales. Le peuple algérien n'a pas obtenu les droits politiques, la souveraineté nationale et la citoyenneté qui étaient à la base du combat pour l'indépendance nationale. Il ne s'agit pas seulement de libérer l'Algérie du colonialisme, mais de libérer aussi les Algériennes et les Algériens de la condition de sujets après tant de souffrances et de sacrifices. La vie politique est conçue avec un seul objectif, pérenniser le système conforté par la rente pétrolière.
Le système a hérité de deux rentes qu'il a exploitées pour se maintenir au pouvoir : la rente de la légitimité historique et celle des hydrocarbures. Le pouvoir se prend en Algérie par un coup d'Etat, par les armes et par les urnes et se garde par les moyens de la dictature. La réalité du pouvoir est aux mains de l'armée, du DRS en particulier. L'armée est le haut lieu de la politique, le centre de décision où s'élabore la politique du pays. Qui commande l'armée, commande le pays.
- Le terme de révolution est détourné de son sens et vidé de sa substance
La devise de «la révolution par le peuple et pour le peuple» est devenue sans le peuple et contre le peuple. La dictature est contenue dans l'action révolutionnaire elle-même, qui n'établit pas la liberté, mais un autre despotisme. On n'établit pas une dictature pour sauver la révolution, on fait une révolution pour établir une dictature. Nombreux sont ceux qui disent qu'il n' y a rien à faire contre la dictature, parce qu'elle s'attaque à la liberté et à la vie des gens. Il faut seulement du courage politique pour lutter contre elle. Un proverbe anglais dit : «Là où il y a une volonté, il y a un chemin.» Abane Ramdane, qui a lu et relu en prison les écrits des artisans de la révolution française de 1789, et russe de 1917, ainsi que les recommandations de Lenine «sur la ligne rouge de sang qu'il ne faut pas dépasser», et le conflit Staline-Trosky, savait : «Qu'un pur trouve toujours un plus pur que l'épure.»
- La dictature qu'exercent tant de dictateurs, de despotes, de tyrans, est en phase finale, en fin de règne, en voie de disparition, à quand le tour de celles qui restent ? Les dictatures militaires imposées aux peuples d'Amérique latine, avec le soutien actif des Etats-Unis d'Amérique, ont été éliminées dans les années 1950 par les mouvements de contestation populaires. Les peuples du monde arabe se libèrent de l'emprise d'une poignée de dictateurs qui les maintiennent en état de sujétion. Ben Ali et Moubarak sont tombés comme tombent les dictateurs, sans dignité et sans gloire. Le système politique algérien qui n'a qu'une seule vision, conserver le pouvoir, glisse sur une pente où il aura le même sort que le système tunisien ou égyptien. Il rappelle l'histoire du conducteur qui va dans le mur, et lui espère éviter l'accident en accélérant. Le changement de ce système et non le changement dans le système, s'impose par le vieillissement de ceux qui le dirigent, où la pyramide des âges est l'inverse de ce qu'elle est dans le pays. Comme les dinosaures et les zaïms du FLN historique, il est fermé à la nouvelle génération, alors qu'il est aux commandes du pays, depuis 1962. Il y a le temps de ce système politique désormais révolu, et dont la page se tourne définitivement.
Il faut une alternative où une alternance à ce mal ravageur qu'est la dictature. Le peuple algérien a en ce moment beaucoup de choses à dire aux décideurs de l'armée qui détiennent la réalité du pouvoir, mais il faut qu'ils en soient proches pour l'écouter ; parce qu'il attend des réponses politiques et des solutions économiques et sociales. L'Occident soutient les pouvoirs dictatoriaux, corrompus et oppresseurs, en échange de privilèges stratégiques et économiques. Il est bien informé des dérives préoccupantes des pouvoirs dictatoriaux et complice des clans cleptomanes, de ces pouvoirs, et capitule en sacrifiant l'universalité des droits de l'homme, au mercantilisme, en dissociant économie, liberté et justice, et en portant aide et assistance aux régimes despotiques. L'intégration économique de l'Afrique du Nord et son unité politique sont des mythes.
La maladie grave et durable du Président Péguy disait : «Il faut dire tristement les vérités tristes.»
La maladie du Président est une question importante qui conditionne toutes les autres. Elle est gardée dans l'opacité et le secret, et les dirigeants mentent du matin au soir pour garder le secret. Ils maltraitent la vérité en disant que le Président va mieux, ou va bien, ce qui est un faux. Le peuple algérien a vu s'étaler de manière cynique le mensonge sur la maladie du Président, qui est l'expression de la pensée unique. Les dirigeants qui multiplient le mensonge perdent leur crédibilité. Il faut bannir le mensonge politique qui est un mal absolu, qui vide la parole de son efficacité.Le mensonge moyen politique usuel est condamnable du point de vue éthique, et surtout quand il devient une fin. Saïd Bouteflika, en permanence au chevet de son frère chef d'Etat, a déclenché une polémique sans fin, en verrouillant l'information et en imposant sa ligne politique.
Pour lui, le mensonge n'est que de la dissimilation, et chaque dirigeant doit sous une forme ou sous une autre, dire et répéter que «le Président continue de suivre quotidiennement les dossiers et questions d'intérêt national». Quel Algérien peut croire que ces déclarations qui relèvent de la propagande peuvent être prises au sérieux par l'opinion publique ? L'humour manié avec subtilité fait naître des propos qui ridiculisent l'absurdité de comportement des dirigeants. Le secret ne concerne pas l'Occident, particulièrement l'Europe et l'Amérique, informées régulièrement par le président F. Hollande qui a suivi l'évolution de la maladie du président Bouteflika qui est devenue grave et durable, pour prévoir en connaissance de cause les échéances politiques de l'Algérie. Après une hospitalisation de 82 jours au Val-de-Grâce et à l'hôpital des Invalides, le président Bouteflika est rentré en Algérie en chaise roulante, hémiplégique, sans prononcer une seule parole, le visage hagard comme s'il venait de débarquer sur une planète inconnue.
Bilan des trois mandats du président, à défaut d'être positif est très instructif
Il faut faire un examen honnête de ce bilan, l'apprécier à sa juste valeur, pour préparer le redressement national. Il est plus que décevant, il est catastrophique, compte tenu des ressources dont dispose le pays. La déception est à la hauteur des attentes. Il éclaire la voie à suivre pour le changement par l'action politique, qui est un devoir, une obligation, un impératif, qu'il faut mener avec calme, précision, fermeté et conviction, et poursuivre avec détermination, vigilance, une pensée logique et une expression claire, pour établir la démocratie enjeu du combat politique qui consacre le régime de l'Etat de droit.
Le Président n'a à l'esprit au cours des trois quinquennats qu'une seule obsession capable de satisfaire son esprit, son appétit de pouvoir, instaurer et renforcer la dictature avec sa dérive monarchique, et sa tentation dynastique. Il a cédé en 2008 durant la révision de la Constitution à son penchant de prédilection, le goût de l'autorité absolue qui fait de lui le guide et le sauveur de l'Algérie, en décidant d'assumer tous les pouvoirs, de faire du gouvernement un pouvoir exécutant, de gouverner sous l'opprobre et l'accusation de dictateur. C'est l'arbitraire, le bon plaisir du président institué en norme juridique. Il a subtilisé le pouvoir au peuple proclamé souverain par la Constitution.
Elle s'est libérée du colonialisme, mais l'armée des frontières a occupé le pays et colonisé le peuple.Le groupe d'Oudjda, qui prétend incarner la Révolution, a éliminé tous ceux qui lui étaient hostiles. La libération nationale s'est accompagnée de fruits amers. Elle a été suivie par l'instauration d'un système politique toujours en vigueur, qui refuse de donner aux Algériens plus de liberté et plus de droits que le régime colonial. Le peuple algérien a fait la Révolution contre l' oppression et la répression, qui ont enfanté les droits de l'homme, pour la liberté et la justice, et le voilà revenu à la case départ où l'a cantonné le colonialisme, celle de sujet sans droit.
L'oppression et la répression du peuple algérien ne sont plus coloniales mais nationales. Le peuple algérien n'a pas obtenu les droits politiques, la souveraineté nationale et la citoyenneté qui étaient à la base du combat pour l'indépendance nationale. Il ne s'agit pas seulement de libérer l'Algérie du colonialisme, mais de libérer aussi les Algériennes et les Algériens de la condition de sujets après tant de souffrances et de sacrifices. La vie politique est conçue avec un seul objectif, pérenniser le système conforté par la rente pétrolière.
Le système a hérité de deux rentes qu'il a exploitées pour se maintenir au pouvoir : la rente de la légitimité historique et celle des hydrocarbures. Le pouvoir se prend en Algérie par un coup d'Etat, par les armes et par les urnes et se garde par les moyens de la dictature. La réalité du pouvoir est aux mains de l'armée, du DRS en particulier. L'armée est le haut lieu de la politique, le centre de décision où s'élabore la politique du pays. Qui commande l'armée, commande le pays.
- Le terme de révolution est détourné de son sens et vidé de sa substance
La devise de «la révolution par le peuple et pour le peuple» est devenue sans le peuple et contre le peuple. La dictature est contenue dans l'action révolutionnaire elle-même, qui n'établit pas la liberté, mais un autre despotisme. On n'établit pas une dictature pour sauver la révolution, on fait une révolution pour établir une dictature. Nombreux sont ceux qui disent qu'il n' y a rien à faire contre la dictature, parce qu'elle s'attaque à la liberté et à la vie des gens. Il faut seulement du courage politique pour lutter contre elle. Un proverbe anglais dit : «Là où il y a une volonté, il y a un chemin.» Abane Ramdane, qui a lu et relu en prison les écrits des artisans de la révolution française de 1789, et russe de 1917, ainsi que les recommandations de Lenine «sur la ligne rouge de sang qu'il ne faut pas dépasser», et le conflit Staline-Trosky, savait : «Qu'un pur trouve toujours un plus pur que l'épure.»
- La dictature qu'exercent tant de dictateurs, de despotes, de tyrans, est en phase finale, en fin de règne, en voie de disparition, à quand le tour de celles qui restent ? Les dictatures militaires imposées aux peuples d'Amérique latine, avec le soutien actif des Etats-Unis d'Amérique, ont été éliminées dans les années 1950 par les mouvements de contestation populaires. Les peuples du monde arabe se libèrent de l'emprise d'une poignée de dictateurs qui les maintiennent en état de sujétion. Ben Ali et Moubarak sont tombés comme tombent les dictateurs, sans dignité et sans gloire. Le système politique algérien qui n'a qu'une seule vision, conserver le pouvoir, glisse sur une pente où il aura le même sort que le système tunisien ou égyptien. Il rappelle l'histoire du conducteur qui va dans le mur, et lui espère éviter l'accident en accélérant. Le changement de ce système et non le changement dans le système, s'impose par le vieillissement de ceux qui le dirigent, où la pyramide des âges est l'inverse de ce qu'elle est dans le pays. Comme les dinosaures et les zaïms du FLN historique, il est fermé à la nouvelle génération, alors qu'il est aux commandes du pays, depuis 1962. Il y a le temps de ce système politique désormais révolu, et dont la page se tourne définitivement.
Il faut une alternative où une alternance à ce mal ravageur qu'est la dictature. Le peuple algérien a en ce moment beaucoup de choses à dire aux décideurs de l'armée qui détiennent la réalité du pouvoir, mais il faut qu'ils en soient proches pour l'écouter ; parce qu'il attend des réponses politiques et des solutions économiques et sociales. L'Occident soutient les pouvoirs dictatoriaux, corrompus et oppresseurs, en échange de privilèges stratégiques et économiques. Il est bien informé des dérives préoccupantes des pouvoirs dictatoriaux et complice des clans cleptomanes, de ces pouvoirs, et capitule en sacrifiant l'universalité des droits de l'homme, au mercantilisme, en dissociant économie, liberté et justice, et en portant aide et assistance aux régimes despotiques. L'intégration économique de l'Afrique du Nord et son unité politique sont des mythes.
La maladie grave et durable du Président Péguy disait : «Il faut dire tristement les vérités tristes.»
La maladie du Président est une question importante qui conditionne toutes les autres. Elle est gardée dans l'opacité et le secret, et les dirigeants mentent du matin au soir pour garder le secret. Ils maltraitent la vérité en disant que le Président va mieux, ou va bien, ce qui est un faux. Le peuple algérien a vu s'étaler de manière cynique le mensonge sur la maladie du Président, qui est l'expression de la pensée unique. Les dirigeants qui multiplient le mensonge perdent leur crédibilité. Il faut bannir le mensonge politique qui est un mal absolu, qui vide la parole de son efficacité.Le mensonge moyen politique usuel est condamnable du point de vue éthique, et surtout quand il devient une fin. Saïd Bouteflika, en permanence au chevet de son frère chef d'Etat, a déclenché une polémique sans fin, en verrouillant l'information et en imposant sa ligne politique.
Pour lui, le mensonge n'est que de la dissimilation, et chaque dirigeant doit sous une forme ou sous une autre, dire et répéter que «le Président continue de suivre quotidiennement les dossiers et questions d'intérêt national». Quel Algérien peut croire que ces déclarations qui relèvent de la propagande peuvent être prises au sérieux par l'opinion publique ? L'humour manié avec subtilité fait naître des propos qui ridiculisent l'absurdité de comportement des dirigeants. Le secret ne concerne pas l'Occident, particulièrement l'Europe et l'Amérique, informées régulièrement par le président F. Hollande qui a suivi l'évolution de la maladie du président Bouteflika qui est devenue grave et durable, pour prévoir en connaissance de cause les échéances politiques de l'Algérie. Après une hospitalisation de 82 jours au Val-de-Grâce et à l'hôpital des Invalides, le président Bouteflika est rentré en Algérie en chaise roulante, hémiplégique, sans prononcer une seule parole, le visage hagard comme s'il venait de débarquer sur une planète inconnue.
Bilan des trois mandats du président, à défaut d'être positif est très instructif
Il faut faire un examen honnête de ce bilan, l'apprécier à sa juste valeur, pour préparer le redressement national. Il est plus que décevant, il est catastrophique, compte tenu des ressources dont dispose le pays. La déception est à la hauteur des attentes. Il éclaire la voie à suivre pour le changement par l'action politique, qui est un devoir, une obligation, un impératif, qu'il faut mener avec calme, précision, fermeté et conviction, et poursuivre avec détermination, vigilance, une pensée logique et une expression claire, pour établir la démocratie enjeu du combat politique qui consacre le régime de l'Etat de droit.
Le Président n'a à l'esprit au cours des trois quinquennats qu'une seule obsession capable de satisfaire son esprit, son appétit de pouvoir, instaurer et renforcer la dictature avec sa dérive monarchique, et sa tentation dynastique. Il a cédé en 2008 durant la révision de la Constitution à son penchant de prédilection, le goût de l'autorité absolue qui fait de lui le guide et le sauveur de l'Algérie, en décidant d'assumer tous les pouvoirs, de faire du gouvernement un pouvoir exécutant, de gouverner sous l'opprobre et l'accusation de dictateur. C'est l'arbitraire, le bon plaisir du président institué en norme juridique. Il a subtilisé le pouvoir au peuple proclamé souverain par la Constitution.
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