Après des semaines d’hostilités opposant des segments lourds du pouvoir, le retour d’Ahmed Ouyahia semble marquer l’aboutissement d’un accord «nécessaire» pour la survie du régime.
L’installation d’Ahmed Ouyahia dans le pré carré présidentiel confirme, du moins provisoirement, l’arrêt des hostilités qui ont violemment opposé deux segments importants du régime. Un clan présidentiel décidé à imposer un 4e mandat de Bouteflika face à un Département du renseignement et de la sécurité (DRS) qui aurait affiché une opposition à un passage en force.
La guerre portée avec fracas sur la place publique par l’inénarrable Amar Saadani, à la veille d’une élection présidentielle pleine d’incertitudes, a révélé une profonde division dans le sérail. C’est l’une des rares fois où le régime étale sans ménagement ses divergences sur l’agenda politique immédiat. A la manœuvre et à la tête du clan, le frère cadet du chef de l’Etat, Saïd Bouteflika, a convié, à travers un Saadani galvanisé, le patron des services du renseignement, le général Mohamed Mediène, dit Toufik, à quitter ses fonctions en raison de l’«échec» dans ses missions. L’intervention dans le débat public des acteurs politiques au poids considérable, tels Mouloud Hamrouche, Ali Yahia Abdennour et Ahmed Taleb Ibrahimi et de hauts gradés de l’armée, à l’instar du général Hocine Benhadid, a sérieusement fait douter les antagonistes. Elle a inquiété mais surtout précipité la signature d’une trêve entre la famille présidentielle et le chef du DRS. Sentant le risque d’une guerre ouverte, ces deux pôles du pouvoir ont vite rangé leurs armes et se sont éloignées avec moins de dégâts d’une zone de tempête qui allait tout emporter sur son passage. Pour eux, il est aussi «urgent qu’indispensable de tenir bon» jusqu’au 17 avril.
Les termes de l’accord devant présider à l’armistice portent essentiellement sur la reconduction à la tête de l’Etat d’un «candidat absent», extrêmement affaibli par la maladie, qui sera à coup sûr le président désigné, à peine «un quart» de président. La contrepartie négociée serait le maintien voire le renforcement du rôle du Département du renseignement et de la sécurité dans la gestion des affaires du pays. Et subsidiairement, le maintien du chef du DRS et des hommes de confiance à leur poste, du moins à court terme. «Les nouvelles générations» peuvent attendre encore avant de voir venir leur tour de prétendre à des postes de responsabilité. Mais maintenir indéfiniment la vieille garde en poste n’est pas si évident que cela puisse paraître.
Ouyahia, garant d’un accord
C’est justement dans ce contexte qu’intervient la désignation de l’«ennemi intime» du chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Ouyahia, au névralgique poste de directeur de cabinet de la présidence de la République. Il est le garant de l’accord signé entre les deux segments du régime en conflit. En plus de sa mission de combler une réelle vacance du pouvoir, conséquence de la maladie durable du locataire d’El Mouradia, l’ancien chef de gouvernement aura un regard direct sur la gestion des affaires courantes au sein du palais présidentiel et un avis prépondérant sur les décisions à prendre. Une reprise en main des leviers du pouvoir.
Ahmed Ouyahia, que l’on dit jouissant d’une proximité avec le patron du DRS, «le frère Toufik», aura désormais entre les mains les clefs de la «Maison» vacante qui jusque-là était gardée par le frère cadet du Président, Saïd Bouteflika, qui bénéficie depuis des années de la proximité familiale et surtout du retrait du frère aîné pour asseoir, puis renforcer sa capacité d’influence et d’action. Vice-roi ou vizir, le très spécial conseiller du président a réussi à l’ombre des quinze ans de règne de Bouteflika à créer «une contre-société et une petite république» pour reprendre l’expression de Djamel Zenati. Le journaliste français, Nicolas Beau, avait même assuré sur un plateau de télévision, début du mois en cours, que Saïd Bouteflika se serait «rendu à l’Elysée et au Quai d’Orsay pour exprimer la disposition d’Alger à aider Paris à mettre en tenaille les djihadistes». L’information a certes été démentie par le porte-parole du ministère des Affaires étrangères français, cependant elle renseigne sur le rôle «central» et la liberté d’action du frère cadet, selon plusieurs lectures. Un mouvement qui n’est pas pour rassurer l’autre pôle du pouvoir que représente le DRS.
La nomination d’Ahmed Ouyahia – un homme connu pour son caractère bien trempé – pourrait probablement mettre un terme ou du moins réduirait la capacité d’influence du «frère» au sein de l’institution présidentielle qui reste la colonne sûre dans l’architecture du régime. Finie la «gestion familiale» ? Vraisemblablement. Avec un Président malade, un Ouyahia solidement soutenu aura sans doute les coudées franches pour «dicter sa loi». Mais une question reste posée. Signée dans l’urgence et sous la contrainte, «la trêve résistera-t-elle à l’épreuve de l’après-17 avril ?
elwatan
Hacen Ouali
L’installation d’Ahmed Ouyahia dans le pré carré présidentiel confirme, du moins provisoirement, l’arrêt des hostilités qui ont violemment opposé deux segments importants du régime. Un clan présidentiel décidé à imposer un 4e mandat de Bouteflika face à un Département du renseignement et de la sécurité (DRS) qui aurait affiché une opposition à un passage en force.
La guerre portée avec fracas sur la place publique par l’inénarrable Amar Saadani, à la veille d’une élection présidentielle pleine d’incertitudes, a révélé une profonde division dans le sérail. C’est l’une des rares fois où le régime étale sans ménagement ses divergences sur l’agenda politique immédiat. A la manœuvre et à la tête du clan, le frère cadet du chef de l’Etat, Saïd Bouteflika, a convié, à travers un Saadani galvanisé, le patron des services du renseignement, le général Mohamed Mediène, dit Toufik, à quitter ses fonctions en raison de l’«échec» dans ses missions. L’intervention dans le débat public des acteurs politiques au poids considérable, tels Mouloud Hamrouche, Ali Yahia Abdennour et Ahmed Taleb Ibrahimi et de hauts gradés de l’armée, à l’instar du général Hocine Benhadid, a sérieusement fait douter les antagonistes. Elle a inquiété mais surtout précipité la signature d’une trêve entre la famille présidentielle et le chef du DRS. Sentant le risque d’une guerre ouverte, ces deux pôles du pouvoir ont vite rangé leurs armes et se sont éloignées avec moins de dégâts d’une zone de tempête qui allait tout emporter sur son passage. Pour eux, il est aussi «urgent qu’indispensable de tenir bon» jusqu’au 17 avril.
Les termes de l’accord devant présider à l’armistice portent essentiellement sur la reconduction à la tête de l’Etat d’un «candidat absent», extrêmement affaibli par la maladie, qui sera à coup sûr le président désigné, à peine «un quart» de président. La contrepartie négociée serait le maintien voire le renforcement du rôle du Département du renseignement et de la sécurité dans la gestion des affaires du pays. Et subsidiairement, le maintien du chef du DRS et des hommes de confiance à leur poste, du moins à court terme. «Les nouvelles générations» peuvent attendre encore avant de voir venir leur tour de prétendre à des postes de responsabilité. Mais maintenir indéfiniment la vieille garde en poste n’est pas si évident que cela puisse paraître.
Ouyahia, garant d’un accord
C’est justement dans ce contexte qu’intervient la désignation de l’«ennemi intime» du chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Ouyahia, au névralgique poste de directeur de cabinet de la présidence de la République. Il est le garant de l’accord signé entre les deux segments du régime en conflit. En plus de sa mission de combler une réelle vacance du pouvoir, conséquence de la maladie durable du locataire d’El Mouradia, l’ancien chef de gouvernement aura un regard direct sur la gestion des affaires courantes au sein du palais présidentiel et un avis prépondérant sur les décisions à prendre. Une reprise en main des leviers du pouvoir.
Ahmed Ouyahia, que l’on dit jouissant d’une proximité avec le patron du DRS, «le frère Toufik», aura désormais entre les mains les clefs de la «Maison» vacante qui jusque-là était gardée par le frère cadet du Président, Saïd Bouteflika, qui bénéficie depuis des années de la proximité familiale et surtout du retrait du frère aîné pour asseoir, puis renforcer sa capacité d’influence et d’action. Vice-roi ou vizir, le très spécial conseiller du président a réussi à l’ombre des quinze ans de règne de Bouteflika à créer «une contre-société et une petite république» pour reprendre l’expression de Djamel Zenati. Le journaliste français, Nicolas Beau, avait même assuré sur un plateau de télévision, début du mois en cours, que Saïd Bouteflika se serait «rendu à l’Elysée et au Quai d’Orsay pour exprimer la disposition d’Alger à aider Paris à mettre en tenaille les djihadistes». L’information a certes été démentie par le porte-parole du ministère des Affaires étrangères français, cependant elle renseigne sur le rôle «central» et la liberté d’action du frère cadet, selon plusieurs lectures. Un mouvement qui n’est pas pour rassurer l’autre pôle du pouvoir que représente le DRS.
La nomination d’Ahmed Ouyahia – un homme connu pour son caractère bien trempé – pourrait probablement mettre un terme ou du moins réduirait la capacité d’influence du «frère» au sein de l’institution présidentielle qui reste la colonne sûre dans l’architecture du régime. Finie la «gestion familiale» ? Vraisemblablement. Avec un Président malade, un Ouyahia solidement soutenu aura sans doute les coudées franches pour «dicter sa loi». Mais une question reste posée. Signée dans l’urgence et sous la contrainte, «la trêve résistera-t-elle à l’épreuve de l’après-17 avril ?
elwatan
Hacen Ouali
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