Je retiens de l'article de Liberté le passage où un imam affirme que pendant le ramadhan, seuls les non-musulmans peuvent manger dans les restaurants. Comment savoir qui est musulman et qui ne l'est pas? Décidément, tous les moyens sont bons pour justifier l'intolérance!
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Les algériens sont-ils tolérants ? Les étrangers et le Ramadhan en Algérie
Si l’islam est catégorique sur la question : “Là ikrah fi din”, traduit littéralement “pas de contrainte en religion”, il en est tout autrement dans la pratique. Les plus strictes pulsions religieuses des Algériens s’exacerbent durant le mois de Ramadhan jusqu’à friser, parfois, l’intolérance pour toute personne qui ose transgresser, publiquement, la sacro-sainte obligation d’observer le jeûne durant les trente jours dédiés au carême. Dans l’absolu, religieux et juristes s’accordent à reconnaître qu’aucune loi, qu’elle soit divine ou établie par les hommes, n’interdit formellement de donner la possibilité aux non-jeûneurs de se restaurer, durant le Ramadhan, comme ils le feraient pendant le reste des mois de l’année.
Une condition est toutefois posée : il faudrait qu’ils soient non musulmans. “Du point de vue de l’islam, les non musulmans ne sont pas forcés d’observer le jeûne”, explique Djillali Kessoum, imam à la mosquée Al-Qods de Hydra. “Nous n’exerçons aucune pression sur eux. Nous leur demandons de respecter notre religion, c’est-à-dire ne pas manger ni fumer devant nous”, ajoute notre interlocuteur. Et c’est justement à ce niveau que la contrainte prend son envergure. Sur les grandes artères de la capitale — et même les petites au demeurant —, la plupart des restaurants et des fast-foods baissent rideau pendant la journée depuis le 24 septembre dernier. Quelques-uns proposent des ftours à des prix concurrentiels pour attirer une infime clientèle qui rompt le jeûne loin du foyer familial. Certains mettent leurs locaux à la disposition des bienfaiteurs qui offrent des repas chauds aux sans-abri.
D’autres se sont reconvertis carrément dans la vente du qalb ellouz, de la zlabia et autres douceurs. Aucun ne s’aventure, toutefois, à ouvrir franchement ses portes aux Algériens ou aux étrangers qui souhaiteraient honorer leurs vieilles habitudes, à savoir déjeuner ou simplement prendre un café en fumant une bonne cigarette. Le restaurant La Brasse, lieu de convergence de prédilection de tous les non-jeûneurs, pendant les années 1970 et 1980, se barricade solidement tout au long du mois sacré derrière ses portes en fer depuis que la menace terroriste est devenue trop grande. “Ce n’est pas dans le domaine de la loi d’interdire l’ouverture des restaurants durant le mois de Ramadhan, mais de la réglementation, plus précisément d’arrêtés administratifs ou de décisions de wali. Mais à ma connaissance, il n’existe aucune disposition y afférente”, atteste Nourredine Fekaïr, ancien magistrat, actuellement député FLN.
Seule exception, les grands hôtels
Dans la réalité, la prohibition est tacite. Seule dérogation à la règle : les restaurants des grands hôtels, à l’instar d’El-Aurassi, El-Djazaïr, Hilton, Mercure ou encore Sheraton. Là encore, l’exception est de mise. Ces restaurants ouvrent uniquement pour les étrangers. Les Algériens ne sont pas servis, sauf si les gérants et les serveurs, de temps à autre conciliants, ferment les yeux. “Cette situation est engendrée par des convictions religieuses. C’est la notion de hram (péché) qui empêche les gens de faire fonctionner normalement leurs commerces”, commente M. Fekaïr. Selon lui, les motivations d’ordre commercial (rareté des clients) interviennent en second plan. “Même si le restaurateur est assuré de faire le plein à 12h, il n’ouvrira pas”, affirme le député.
C’est plutôt la vindicte populaire que craignent les restaurateurs, avec lesquels nous nous sommes entretenus à la rue Didouche-Mourad. “Qui oserait travailler pendant le Ramadhan au rythme des autres jours de l’année ? On serait lynché par les gens”, témoignent-ils. Ils assurent qu’ils ne se permettent même pas, pour la plupart, de servir des clients pendant la prière du vendredi, en temps ordinaire. Il est étonnant, quand même, de constater que le carême revêt, pour les Algériens, une importance plus accrue que la prière, en ce sens que nul ne se permettrait d’apostropher un concitoyen qui ne se plie pas à l’obligation des cinq prières par jour alors que les non-jeûneurs seraient lapidés sur la place publique s’ils ne se fondaient pas dans la foule de ceux qui font carême. “Depuis longtemps, les Algériens en particulier, et les musulmans en général, donnent une grande importance au jeûne du Ramadhan qui s’exprime par l’abstinence, tandis que prier cinq fois par jour est un acte avéré”, explique Mustapha Chérif, ancien ministre de l’Enseignement supérieur et ancien ambassadeur d’Algérie au Caire. Il précise que le Ramadhan engendre un “mouvement collectif social et communautaire où il est difficile aux individualités de ne pas se laisser emporter”.
L’expérience montre, pourtant, que c’est plutôt la majorité qui ne tolère pas le droit à se comporter autrement face aux exigences du Ramadhan. “L’abstinence de manger, de boire et de fumer crée des états de nervosité que les faibles de caractère ou de foi n’arrivent pas à réprimer”, note Mustapha Chérif, qui insiste sur le fait qu’une minorité d’Algériens vit le Ramadhan de manière aussi négative. L’épreuve, pour les étrangers résidant dans notre pays, est beaucoup plus dérangeante.
Le père Albert Gruson, qui officie à l’église de Hydra, résume la situation en quelques mots. “Le rythme particulier du Ramadhan bouleverse nos habitudes mais auquel nous sommes obligés de nous plier. Je vous donne un exemple : celui qui veut inviter un ami au restaurant, à 12h, ne peut pas le faire”. Il relativise, néanmoins, la contrainte, lui qui vit en Algérie depuis plus de 60 ans. Il raconte que les gens du quartier l’interpellent immanquablement, pendant qu’il fait ses courses. “Alors, père Albert, vous ne faites toujours pas carême ? me disent certains. D’autres s’invitent, en rigolant, à venir déjeuner chez moi”. Pondéré, le père Gruson recommande : “En ma qualité de responsable de la communauté chrétienne en Algérie, de ne pas porter un regard négatif sur la réalité du Ramadhan.” Il reconnaît, toutefois, que la tâche n’est pas toujours aisée. Les cadres européens, qui gèrent des affaires dans le pays, finissent par s’installer effectivement avec leurs familles. La majorité a du mal à s’accommoder aux obligations du mois sacré. “Beaucoup d’étrangers à la retraite, surtout d’anciens pieds noirs, quittent l’Algérie pendant le mois de carême”, précise père Gruson. Il s’avère que les contraintes du Ramadhan sont aussi grandes uniquement au Maghreb arabe.
Dans le reste du monde musulman, les choix individuels sont dûment respectés. “Au Proche et Moyen-Orient, la communauté chrétienne est très importante. C’est tout à fait normal qu’il y ait un équilibre entre la pratique des deux religions”, note M. Fekaïr. Quoi qu’il en soit, d’aucuns se rappellent que la situation était beaucoup plus souple avant l’émergence de la mouvance intégriste, à l’orée des années 80.
source : liberté
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Les algériens sont-ils tolérants ? Les étrangers et le Ramadhan en Algérie
Si l’islam est catégorique sur la question : “Là ikrah fi din”, traduit littéralement “pas de contrainte en religion”, il en est tout autrement dans la pratique. Les plus strictes pulsions religieuses des Algériens s’exacerbent durant le mois de Ramadhan jusqu’à friser, parfois, l’intolérance pour toute personne qui ose transgresser, publiquement, la sacro-sainte obligation d’observer le jeûne durant les trente jours dédiés au carême. Dans l’absolu, religieux et juristes s’accordent à reconnaître qu’aucune loi, qu’elle soit divine ou établie par les hommes, n’interdit formellement de donner la possibilité aux non-jeûneurs de se restaurer, durant le Ramadhan, comme ils le feraient pendant le reste des mois de l’année.
Une condition est toutefois posée : il faudrait qu’ils soient non musulmans. “Du point de vue de l’islam, les non musulmans ne sont pas forcés d’observer le jeûne”, explique Djillali Kessoum, imam à la mosquée Al-Qods de Hydra. “Nous n’exerçons aucune pression sur eux. Nous leur demandons de respecter notre religion, c’est-à-dire ne pas manger ni fumer devant nous”, ajoute notre interlocuteur. Et c’est justement à ce niveau que la contrainte prend son envergure. Sur les grandes artères de la capitale — et même les petites au demeurant —, la plupart des restaurants et des fast-foods baissent rideau pendant la journée depuis le 24 septembre dernier. Quelques-uns proposent des ftours à des prix concurrentiels pour attirer une infime clientèle qui rompt le jeûne loin du foyer familial. Certains mettent leurs locaux à la disposition des bienfaiteurs qui offrent des repas chauds aux sans-abri.
D’autres se sont reconvertis carrément dans la vente du qalb ellouz, de la zlabia et autres douceurs. Aucun ne s’aventure, toutefois, à ouvrir franchement ses portes aux Algériens ou aux étrangers qui souhaiteraient honorer leurs vieilles habitudes, à savoir déjeuner ou simplement prendre un café en fumant une bonne cigarette. Le restaurant La Brasse, lieu de convergence de prédilection de tous les non-jeûneurs, pendant les années 1970 et 1980, se barricade solidement tout au long du mois sacré derrière ses portes en fer depuis que la menace terroriste est devenue trop grande. “Ce n’est pas dans le domaine de la loi d’interdire l’ouverture des restaurants durant le mois de Ramadhan, mais de la réglementation, plus précisément d’arrêtés administratifs ou de décisions de wali. Mais à ma connaissance, il n’existe aucune disposition y afférente”, atteste Nourredine Fekaïr, ancien magistrat, actuellement député FLN.
Seule exception, les grands hôtels
Dans la réalité, la prohibition est tacite. Seule dérogation à la règle : les restaurants des grands hôtels, à l’instar d’El-Aurassi, El-Djazaïr, Hilton, Mercure ou encore Sheraton. Là encore, l’exception est de mise. Ces restaurants ouvrent uniquement pour les étrangers. Les Algériens ne sont pas servis, sauf si les gérants et les serveurs, de temps à autre conciliants, ferment les yeux. “Cette situation est engendrée par des convictions religieuses. C’est la notion de hram (péché) qui empêche les gens de faire fonctionner normalement leurs commerces”, commente M. Fekaïr. Selon lui, les motivations d’ordre commercial (rareté des clients) interviennent en second plan. “Même si le restaurateur est assuré de faire le plein à 12h, il n’ouvrira pas”, affirme le député.
C’est plutôt la vindicte populaire que craignent les restaurateurs, avec lesquels nous nous sommes entretenus à la rue Didouche-Mourad. “Qui oserait travailler pendant le Ramadhan au rythme des autres jours de l’année ? On serait lynché par les gens”, témoignent-ils. Ils assurent qu’ils ne se permettent même pas, pour la plupart, de servir des clients pendant la prière du vendredi, en temps ordinaire. Il est étonnant, quand même, de constater que le carême revêt, pour les Algériens, une importance plus accrue que la prière, en ce sens que nul ne se permettrait d’apostropher un concitoyen qui ne se plie pas à l’obligation des cinq prières par jour alors que les non-jeûneurs seraient lapidés sur la place publique s’ils ne se fondaient pas dans la foule de ceux qui font carême. “Depuis longtemps, les Algériens en particulier, et les musulmans en général, donnent une grande importance au jeûne du Ramadhan qui s’exprime par l’abstinence, tandis que prier cinq fois par jour est un acte avéré”, explique Mustapha Chérif, ancien ministre de l’Enseignement supérieur et ancien ambassadeur d’Algérie au Caire. Il précise que le Ramadhan engendre un “mouvement collectif social et communautaire où il est difficile aux individualités de ne pas se laisser emporter”.
L’expérience montre, pourtant, que c’est plutôt la majorité qui ne tolère pas le droit à se comporter autrement face aux exigences du Ramadhan. “L’abstinence de manger, de boire et de fumer crée des états de nervosité que les faibles de caractère ou de foi n’arrivent pas à réprimer”, note Mustapha Chérif, qui insiste sur le fait qu’une minorité d’Algériens vit le Ramadhan de manière aussi négative. L’épreuve, pour les étrangers résidant dans notre pays, est beaucoup plus dérangeante.
Le père Albert Gruson, qui officie à l’église de Hydra, résume la situation en quelques mots. “Le rythme particulier du Ramadhan bouleverse nos habitudes mais auquel nous sommes obligés de nous plier. Je vous donne un exemple : celui qui veut inviter un ami au restaurant, à 12h, ne peut pas le faire”. Il relativise, néanmoins, la contrainte, lui qui vit en Algérie depuis plus de 60 ans. Il raconte que les gens du quartier l’interpellent immanquablement, pendant qu’il fait ses courses. “Alors, père Albert, vous ne faites toujours pas carême ? me disent certains. D’autres s’invitent, en rigolant, à venir déjeuner chez moi”. Pondéré, le père Gruson recommande : “En ma qualité de responsable de la communauté chrétienne en Algérie, de ne pas porter un regard négatif sur la réalité du Ramadhan.” Il reconnaît, toutefois, que la tâche n’est pas toujours aisée. Les cadres européens, qui gèrent des affaires dans le pays, finissent par s’installer effectivement avec leurs familles. La majorité a du mal à s’accommoder aux obligations du mois sacré. “Beaucoup d’étrangers à la retraite, surtout d’anciens pieds noirs, quittent l’Algérie pendant le mois de carême”, précise père Gruson. Il s’avère que les contraintes du Ramadhan sont aussi grandes uniquement au Maghreb arabe.
Dans le reste du monde musulman, les choix individuels sont dûment respectés. “Au Proche et Moyen-Orient, la communauté chrétienne est très importante. C’est tout à fait normal qu’il y ait un équilibre entre la pratique des deux religions”, note M. Fekaïr. Quoi qu’il en soit, d’aucuns se rappellent que la situation était beaucoup plus souple avant l’émergence de la mouvance intégriste, à l’orée des années 80.
source : liberté
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