22 Octobre 1956
ÉPISODE DE LA GUERRE SECRÈTE :
L'AVION DE BEN BELLA EST ARRAISONNÉ
On a souvent parlé de la capture de l’avion qui transportait du Maroc en Tunisie un des chefs de la rébellion algérienne, Ben Bella et quatre compagnons. Elle a soulevé tantôt le blâme, tantôt l’approbation. Quoiqu’il en soit, l’auteur des Secrets d’États, des Carnets secrets de la politique (Plon) nous raconte cet important épisode, ses causes, ses raisons et son déroulement.
J.P. Tournoux : Secrets d’Etat : Editions Plon 1960
[Extrait]
Un coup formidable!
«Un coup formidable, M. le secrétaire général ! Dans un moment, Ben Bella passera en avion au-dessus de nos têtes ! Il faut le « piquer » avec tous les « gaziers » qui l'accompagnent !
- Vous dites, Ben Bella ? Pas possible ! Comment cela ? - Voilà. Le sultan décollera à 10 h 45 T.U., du terrain de Salé, avec Ben Bella, Khider et consorts. La caravane se rend à la conférence de Tunis. L'appareil survolera le territoire algérien. Impossible de regarder, le nez en l'air, passer ces messieurs. Pourtant l'avion est celui d'un souverain étranger. L'immunité joue.
Comment expliquer ces subtilités aux gars qui se font descendre et qui seront survolés par les « salopards »? Ils gueuleront à la trahison !
- Il faut aviser, voir tout cela de très près.
- Coup de fil au général Frandon, commandant de la Ve Région aérienne, laquelle, survivance du temps des protectorats, couvre encore l'ensemble de l'Afrique du Nord.
Le contre-espionnage entre en scène
A vrai dire, le général Frandon sait tout depuis la veille. Le colonel Germain, chef du S.D.E.C.E. (contre-espionnage) à Alger, est à l'œuvre. La Xe Région militaire est informée. Une initiative? L'état- major ne déploie qu'un enthousiasme modéré « Cela regarde le gouvernement ! »
Or, le 22 octobre, M. Robert Lacoste se trouve en Dordogne, en déplacement à travers le département et ne peut être joint rapidement. M. Henry Laforest, secrétaire d'État à l'Air, achève une visite officielle à Lisbonne. M. Bourges-Maunoury, ministre de la Défense nationale, quitte son domicile à l'aube pour se rendre, avec son directeur du Cabinet, M. Abel Thomas, à Londres où les préparatifs de l'expédition de Suez s'amplifient. M. Abel Thomas, un Vendéen têtu, polytechnicien comme son patron, reçoit à 7 heures du matin, à l'instant de son départ, un coup de téléphone de l'état-major général qui annonce, pour la journée, le passage dans le ciel algérien de l'avion royal et des passagers rebelles :
« C'est une provocation ! L'Armée ne peut pas rester les bras croisés. Que faut-il faire? »
Abel THOMAS :
« C'est là une responsabilité du ministère de l'Algérie. Avisez et prenez les mesures que vous estimerez opportunes, conformément au droit international et aux directives générales concernant la sécurité des frontières. » Finalement, le général Lorillot joint, à Paris, M. Max Lejeune. Sans hésiter, le secrétaire d'État aux forces armées donne le feu vert à Alger et se met en rapport avec le général Cogny, commandant supérieur des troupes du Maroc.
« Arraisonnez l'avion du sultan! »
En attendant, à tout hasard, des « précautions » avaient été prises. A 10 heures du matin, l'ordre d'intercepter l'avion du sultan est lancé, ordre en quelque sorte « technique », car les plans de vol au-dessus de l'Algérie n'ont pas été communiqués aux autorités françaises : infraction aux règles de la circulation aérienne. En outre, une instruction permanente d'Alger prévoit l'arraisonnement (avec possibilité d'ouvrir le feu), de tout avion survolant le territoire algérien sans autorisation.
10 h 30 : la zone de défense aérienne (Z.D.A.), commandée par le général Destaillac, reçoit communication officieuse des caractéristiques de l'avion du sultan : Super-Constellation, affrété par le gouvernement chérifien. Toujours pas de plan de vol. Les « Mistral » reçoivent l'ordre d'alerte.
11 h 30 : le plan de vol du Super-Constellation est transmis officiellement. La Ve Région aérienne téléphone à la chasse : abandon de surveillance. Les radars suivent l'appareil sans incidents à travers l'espace aérien de l'Algérie. Dans le même temps, les services d'Alger apprennent que Ben Bella et ses compagnons embarquent dans un DC 3.
Que s'est-il donc passé au Maroc?
Le palais impérial a été vivement sollicité d'admettre dans l'avion du sultan les «hôtes d'honneur » de Mohamed V. Le F.L.N., en particulier Hocine, délégué aux U.S.A., insiste parce qu'il voit là dixit, « un moyen, de se poser sur le plan diplomatique ».
Le Souverain est un fin politique : circonspect, il se rend compte du caractère scandaleux et dangereux que prendrait ce geste. Au colonel de la gendarmerie française Touya, Béarnais subtil et avisé, son geôlier de Madagascar, devenu son ami et son conseiller, le Malik confie, dès la veille au soir : «Tranquillisez-vous. Vous ne serez pas contraints de refuser de m'accompagner à Tunis : Ben Bella et ses compagnons voyageront à part. »
De fait, les dirigeants du F.L.N. prennent place dans un avion commercial mis à leur disposition par le gouvernement chérifien, après avoir été soustraits à la curiosité du public par un Marocain qui les fait monter dans le courrier d'Oran : ils en descendent à temps !
A Alger, l'idée de la capture de Ben Bella continue de cheminer, enfiévrant les imaginations : «C'est l'occasion ou jamais de porter un coup terrible à la rébellion. » Parti d'un renseignement devenu faux, le projet de l'arraisonnement est désormais allé trop loin pour s'arrêter. Le mécanisme est déclenché.
13 heures : Le Centre de contrôle régional de Maison-Blanche fait état d'un DC 3 F.O.A.B.V. devant effectuer, d'après le plan de vol, le trajet Casablanca -Salé- Oujda-Tunis. Alerte partout.
14 heures : coup de théâtre : le Centre de contrôle d'Alger apprend que le plan de vol du DC 3 est modifié par les Baléares.
Pourquoi? Parce que l'espace aérien étant divisé en « zones d'informations », dotées chacune, selon les accords internationaux, d'une longueur d'ondes particulière, la compagnie chérifienne de transports estime prudent d'échapper à l'écoute d'Alger pour passer dans le secteur relevant de Séville.
Le Centre régional d'Alger ne se laisse pas prendre de court : il se met sans tarder sur la longueur d'ondes espagnole.
15 heures : Toutes les stations radars sont à l'écoute.
16 heures : Oran entre en liaison avec l'équipage français du DC 3. Alors commence le grand dialogue :
« Il nous faut les cinq salopards. »
Oran : « Prétextez une panne. Venez-vous poser à Oran »
Le DC 3 : « Qu'est- ce que cette histoire? »
Oran : « Vous avez cinq «salopards» à bord. Il nous les faut. » L'identité de Ben Bella et des quatre chefs F.L.N. est alors révélée à l'équipage, qui semblait l'ignorer.
Le DC 3 : « Qui transmet l'ordre? »
Oran : « Le ministère de la Défense nationale. » Une profonde hésitation habite la cabine de pilotage.
16 h 30 : laconique réponse du DC 3 : « Attendez. Je vais me poser à Palma- de-Majorque. »
18 heures : le DC 3 redécolle et signale à la Compagnie chérifienne : « Arrivée prévue Tunis à 21 h 25 »
Perplexité à Alger. L'opération est mal engagée.
La tour de contrôle de Maison-Blanche prend le relais d'Oran.
Alger : « Venez-vous poser à Alger »
Le DC 3:« Au nom de qui parlez-vous? »
Alger : « Au nom du gouvernement français »
Le DC 3 : « Demandons précisions »
Alger : « Au nom du gouvernement français, ordre de M. Lacoste, ministre de l'Algérie »
Le DC 3: « Nous appartenons à une compagnie étrangère. Ces ordres ne nous concernent pas »
Alger : « Il nous faut les fellouzes »
Le DC 3 esquive encore la réponse fatidique.
Le commandant de bord rend compte à sa compagnie de l'ordre reçu. Ce message est transmis aux autorités marocaines pour « suite à donner ». Le ministère chérifien des transports donne aussitôt l'ordre à l'équipage de retourner à Palma. Mais le contrôle militaire intercepte et stoppe les messages : Rabat, isolée, ne sait plus rien.
19 heures : le DC 3 demande à Alger l'autorisation de retourner au Maroc.
« Venez à Alger... Venez à Alger... »
La voix anonyme de la tour de contrôle de Maison-Blanche devient plus pressante de minute en minute : « Venez Alger... Ordre gouvernement atterrir Alger... Répétons : ordre donné, ordre donné... »
19 h 30 : le DC 3 demande, pour la seconde fois, l'autorisation de retourner au Maroc.
20 heures : Alger décide d'en terminer : « Négatif pour le Maroc. Venez-vous poser à Alger. Vous êtes couverts par le ministre. »
En l'air, en mer, des avions, des navires suivent avec passion - les messages étant passés en clair - ce film à épisodes. Le DC 3 : « Et nos familles qui sont au Maroc? »
Alger : « Nous nous en occupons immédiatement. Nous les mettrons en lieu sûr. »
Le DC 3:« Mais nous transportons aussi d'autres passagers, et notamment des journalistes étrangers. »
Alger :« Ne vous inquiétez pas. »
Le DC 3 : « Et si les rebelles sont armés? »
Alger : « Assurez- vous-en ! » L'hôtesse de l'air fait mine de ranger les papiers dans les pochettes des sièges. Ben Bella saisit rapidement le bras de la jeune femme :
« Ne prenez pas de peine pour nous, mademoiselle. » L'hôtesse a aperçu des canons noirs, et, du côté de Ben Bella, une mitraillette.
Le DC 3 interroge Maison-Blanche :« Que ferons-nous s'ils se rendent compte que nous arrivons au-dessus d'Alger et s'ils mettent leurs armes dans le dos du pilote? »
Alger : « La chasse décollera et vous pourrez ainsi arguer de la nécessité d'atterrir. » La nuit commence à tomber sur la Méditerranée.
Un avion d'Air-France passe au large, lance un message : « Bravo ! les gars ! N'hésitez pas ! Allez-y ! Nous sommes de coeur avec vous ! »
La suite ci-dessous...
ÉPISODE DE LA GUERRE SECRÈTE :
L'AVION DE BEN BELLA EST ARRAISONNÉ
On a souvent parlé de la capture de l’avion qui transportait du Maroc en Tunisie un des chefs de la rébellion algérienne, Ben Bella et quatre compagnons. Elle a soulevé tantôt le blâme, tantôt l’approbation. Quoiqu’il en soit, l’auteur des Secrets d’États, des Carnets secrets de la politique (Plon) nous raconte cet important épisode, ses causes, ses raisons et son déroulement.
J.P. Tournoux : Secrets d’Etat : Editions Plon 1960
[Extrait]
Un coup formidable!
«Un coup formidable, M. le secrétaire général ! Dans un moment, Ben Bella passera en avion au-dessus de nos têtes ! Il faut le « piquer » avec tous les « gaziers » qui l'accompagnent !
- Vous dites, Ben Bella ? Pas possible ! Comment cela ? - Voilà. Le sultan décollera à 10 h 45 T.U., du terrain de Salé, avec Ben Bella, Khider et consorts. La caravane se rend à la conférence de Tunis. L'appareil survolera le territoire algérien. Impossible de regarder, le nez en l'air, passer ces messieurs. Pourtant l'avion est celui d'un souverain étranger. L'immunité joue.
Comment expliquer ces subtilités aux gars qui se font descendre et qui seront survolés par les « salopards »? Ils gueuleront à la trahison !
- Il faut aviser, voir tout cela de très près.
- Coup de fil au général Frandon, commandant de la Ve Région aérienne, laquelle, survivance du temps des protectorats, couvre encore l'ensemble de l'Afrique du Nord.
Le contre-espionnage entre en scène
A vrai dire, le général Frandon sait tout depuis la veille. Le colonel Germain, chef du S.D.E.C.E. (contre-espionnage) à Alger, est à l'œuvre. La Xe Région militaire est informée. Une initiative? L'état- major ne déploie qu'un enthousiasme modéré « Cela regarde le gouvernement ! »
Or, le 22 octobre, M. Robert Lacoste se trouve en Dordogne, en déplacement à travers le département et ne peut être joint rapidement. M. Henry Laforest, secrétaire d'État à l'Air, achève une visite officielle à Lisbonne. M. Bourges-Maunoury, ministre de la Défense nationale, quitte son domicile à l'aube pour se rendre, avec son directeur du Cabinet, M. Abel Thomas, à Londres où les préparatifs de l'expédition de Suez s'amplifient. M. Abel Thomas, un Vendéen têtu, polytechnicien comme son patron, reçoit à 7 heures du matin, à l'instant de son départ, un coup de téléphone de l'état-major général qui annonce, pour la journée, le passage dans le ciel algérien de l'avion royal et des passagers rebelles :
« C'est une provocation ! L'Armée ne peut pas rester les bras croisés. Que faut-il faire? »
Abel THOMAS :
« C'est là une responsabilité du ministère de l'Algérie. Avisez et prenez les mesures que vous estimerez opportunes, conformément au droit international et aux directives générales concernant la sécurité des frontières. » Finalement, le général Lorillot joint, à Paris, M. Max Lejeune. Sans hésiter, le secrétaire d'État aux forces armées donne le feu vert à Alger et se met en rapport avec le général Cogny, commandant supérieur des troupes du Maroc.
« Arraisonnez l'avion du sultan! »
En attendant, à tout hasard, des « précautions » avaient été prises. A 10 heures du matin, l'ordre d'intercepter l'avion du sultan est lancé, ordre en quelque sorte « technique », car les plans de vol au-dessus de l'Algérie n'ont pas été communiqués aux autorités françaises : infraction aux règles de la circulation aérienne. En outre, une instruction permanente d'Alger prévoit l'arraisonnement (avec possibilité d'ouvrir le feu), de tout avion survolant le territoire algérien sans autorisation.
10 h 30 : la zone de défense aérienne (Z.D.A.), commandée par le général Destaillac, reçoit communication officieuse des caractéristiques de l'avion du sultan : Super-Constellation, affrété par le gouvernement chérifien. Toujours pas de plan de vol. Les « Mistral » reçoivent l'ordre d'alerte.
11 h 30 : le plan de vol du Super-Constellation est transmis officiellement. La Ve Région aérienne téléphone à la chasse : abandon de surveillance. Les radars suivent l'appareil sans incidents à travers l'espace aérien de l'Algérie. Dans le même temps, les services d'Alger apprennent que Ben Bella et ses compagnons embarquent dans un DC 3.
Que s'est-il donc passé au Maroc?
Le palais impérial a été vivement sollicité d'admettre dans l'avion du sultan les «hôtes d'honneur » de Mohamed V. Le F.L.N., en particulier Hocine, délégué aux U.S.A., insiste parce qu'il voit là dixit, « un moyen, de se poser sur le plan diplomatique ».
Le Souverain est un fin politique : circonspect, il se rend compte du caractère scandaleux et dangereux que prendrait ce geste. Au colonel de la gendarmerie française Touya, Béarnais subtil et avisé, son geôlier de Madagascar, devenu son ami et son conseiller, le Malik confie, dès la veille au soir : «Tranquillisez-vous. Vous ne serez pas contraints de refuser de m'accompagner à Tunis : Ben Bella et ses compagnons voyageront à part. »
De fait, les dirigeants du F.L.N. prennent place dans un avion commercial mis à leur disposition par le gouvernement chérifien, après avoir été soustraits à la curiosité du public par un Marocain qui les fait monter dans le courrier d'Oran : ils en descendent à temps !
A Alger, l'idée de la capture de Ben Bella continue de cheminer, enfiévrant les imaginations : «C'est l'occasion ou jamais de porter un coup terrible à la rébellion. » Parti d'un renseignement devenu faux, le projet de l'arraisonnement est désormais allé trop loin pour s'arrêter. Le mécanisme est déclenché.
13 heures : Le Centre de contrôle régional de Maison-Blanche fait état d'un DC 3 F.O.A.B.V. devant effectuer, d'après le plan de vol, le trajet Casablanca -Salé- Oujda-Tunis. Alerte partout.
14 heures : coup de théâtre : le Centre de contrôle d'Alger apprend que le plan de vol du DC 3 est modifié par les Baléares.
Pourquoi? Parce que l'espace aérien étant divisé en « zones d'informations », dotées chacune, selon les accords internationaux, d'une longueur d'ondes particulière, la compagnie chérifienne de transports estime prudent d'échapper à l'écoute d'Alger pour passer dans le secteur relevant de Séville.
Le Centre régional d'Alger ne se laisse pas prendre de court : il se met sans tarder sur la longueur d'ondes espagnole.
15 heures : Toutes les stations radars sont à l'écoute.
16 heures : Oran entre en liaison avec l'équipage français du DC 3. Alors commence le grand dialogue :
« Il nous faut les cinq salopards. »
Oran : « Prétextez une panne. Venez-vous poser à Oran »
Le DC 3 : « Qu'est- ce que cette histoire? »
Oran : « Vous avez cinq «salopards» à bord. Il nous les faut. » L'identité de Ben Bella et des quatre chefs F.L.N. est alors révélée à l'équipage, qui semblait l'ignorer.
Le DC 3 : « Qui transmet l'ordre? »
Oran : « Le ministère de la Défense nationale. » Une profonde hésitation habite la cabine de pilotage.
16 h 30 : laconique réponse du DC 3 : « Attendez. Je vais me poser à Palma- de-Majorque. »
18 heures : le DC 3 redécolle et signale à la Compagnie chérifienne : « Arrivée prévue Tunis à 21 h 25 »
Perplexité à Alger. L'opération est mal engagée.
La tour de contrôle de Maison-Blanche prend le relais d'Oran.
Alger : « Venez-vous poser à Alger »
Le DC 3:« Au nom de qui parlez-vous? »
Alger : « Au nom du gouvernement français »
Le DC 3 : « Demandons précisions »
Alger : « Au nom du gouvernement français, ordre de M. Lacoste, ministre de l'Algérie »
Le DC 3: « Nous appartenons à une compagnie étrangère. Ces ordres ne nous concernent pas »
Alger : « Il nous faut les fellouzes »
Le DC 3 esquive encore la réponse fatidique.
Le commandant de bord rend compte à sa compagnie de l'ordre reçu. Ce message est transmis aux autorités marocaines pour « suite à donner ». Le ministère chérifien des transports donne aussitôt l'ordre à l'équipage de retourner à Palma. Mais le contrôle militaire intercepte et stoppe les messages : Rabat, isolée, ne sait plus rien.
19 heures : le DC 3 demande à Alger l'autorisation de retourner au Maroc.
« Venez à Alger... Venez à Alger... »
La voix anonyme de la tour de contrôle de Maison-Blanche devient plus pressante de minute en minute : « Venez Alger... Ordre gouvernement atterrir Alger... Répétons : ordre donné, ordre donné... »
19 h 30 : le DC 3 demande, pour la seconde fois, l'autorisation de retourner au Maroc.
20 heures : Alger décide d'en terminer : « Négatif pour le Maroc. Venez-vous poser à Alger. Vous êtes couverts par le ministre. »
En l'air, en mer, des avions, des navires suivent avec passion - les messages étant passés en clair - ce film à épisodes. Le DC 3 : « Et nos familles qui sont au Maroc? »
Alger : « Nous nous en occupons immédiatement. Nous les mettrons en lieu sûr. »
Le DC 3:« Mais nous transportons aussi d'autres passagers, et notamment des journalistes étrangers. »
Alger :« Ne vous inquiétez pas. »
Le DC 3 : « Et si les rebelles sont armés? »
Alger : « Assurez- vous-en ! » L'hôtesse de l'air fait mine de ranger les papiers dans les pochettes des sièges. Ben Bella saisit rapidement le bras de la jeune femme :
« Ne prenez pas de peine pour nous, mademoiselle. » L'hôtesse a aperçu des canons noirs, et, du côté de Ben Bella, une mitraillette.
Le DC 3 interroge Maison-Blanche :« Que ferons-nous s'ils se rendent compte que nous arrivons au-dessus d'Alger et s'ils mettent leurs armes dans le dos du pilote? »
Alger : « La chasse décollera et vous pourrez ainsi arguer de la nécessité d'atterrir. » La nuit commence à tomber sur la Méditerranée.
Un avion d'Air-France passe au large, lance un message : « Bravo ! les gars ! N'hésitez pas ! Allez-y ! Nous sommes de coeur avec vous ! »
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