Une certaine confusion s’est installée, ces derniers jours en Algérie, pour ce qui est de la gestion sécuritaire des manifestations. Certaines «attaques» sur les réseaux sociaux, venues d’«anonymes» mais aussi de quelques «politiques» tendant à semer la discorde au sein de la population accentuent cette confusion.
La contre-révolution serait-elle en marche ? Le changement d’attitude des services de sécurité, la semaine dernière, par rapport à «la gestion des foules» a poussé plus d’un à se poser des questions quant aux objectifs des responsables en place.
Qu’est-ce qui a changé pour que ces services adoptent une nouvelle stratégie, plutôt agressive, à l’endroit des manifestants ?
En plus des incidents déclenchés vendredi dernier sur la place Maurice Audin et sur l’esplanade de la Grande-Poste à partir de 15h30, où des échauffourées ont éclaté entre «manifestants» et policiers, plusieurs faits qui se sont déroulés la veille et dans la matinée de vendredi confirment ce changement d’attitude.
Durant les jours qui ont précédé ce «8e vendredi» de manifestation, les services de sécurité ont empêché tout rassemblement à Alger-Centre, contrairement aux semaines précédentes.
De plus, la Gendarmerie nationale a, la veille de ces grandioses marches, bouclé la capitale pour empêcher les citoyens des régions limitrophes de rejoindre la manifestation.
Samedi 13 avril dans la nuit, des militantes interpellées lors d’un rassemblement, ont été dénudées par une policière dans un commissariat à Baraki. Mais avant-hier, alors que le chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaïd Salah, prononçait un discours, les étudiants n’ont pas été réprimés comme ce fut le cas une semaine auparavant.
Dans son intervention, le vice-ministre de la Défense nationale a affirmé que «la décision de protéger le peuple, avec ses différentes composantes, est une décision irréversible dont nous ne dévierons point». «Partant de la solidité des liens de confiance liant le peuple à son armée, nous avons donné des instructions claires et sans équivoques pour la protection des citoyens, notamment lors des marches», a-t-il ajouté.
S’agit-il d’un message adressé à la police qui n’avait fait que réprimer les manifestants durant toute la semaine ? En tout cas, ce jour-là, les étudiants ont marché pacifiquement à travers tout le pays, y compris à Alger donc, et aucun incident n’a été signalé.
Sauf que dès le lendemain (hier mercredi), la faculté de droit de Saïd Hamdine a été le théâtre d’une descente d’éléments des «services de sécurité» qui tentait d’interpeller un étudiant.
Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Hassane Rabehi, disait au même moment, à l’occasion d’une conférence de presse, que ni le gouvernement ni la DGSN n’ont donné d’instruction pour réprimer les manifestants.
Qui le fait alors ? La police a également démenti le lancement de grenades lacrymogènes à l’intérieur du tunnel des Facultés, comme elle a nié avoir fait subir des «maltraitances» aux quatre militantes.
Y a-t-il un jeu d’instructions et de contre-instructions ou s’agit-il seulement d’un écran de fumée destiné à cacher une stratégie visant à «casser» le mouvement par la force dissuasive de la répression ?
Des «trolls» à l’œuvre sur les réseaux sociaux
Il est clair que l’ampleur de la protestation dérange beaucoup d’intérêts. Des personnalités politiques, économiques et autres ont beaucoup à perdre si l’Algérie se dirige vers une transition qui va dans le sens d’une démocratisation.
Le système en place a permis à des personnes de bâtir des fortunes ou des carrières non méritées pour la simple et unique raison qu’elles font partie du «cercle».
Et celles-là useront certainement de tous les moyens dont elles disposent pour faire avorter ce hirak. Le mouvement s’installe dans la durée et il est clair que la population est déterminée à ne pas faire marche arrière.
La répression exercée sur les étudiants mardi dernier n’a pas ébranlé leur détermination, bien au contraire, puisqu’ils ont été plus nombreux avant-hier.
Que reste-il donc à la «bande» comme la surnomme la rue – un terme qu’a emprunté Gaïd Salah dans un de ses discours – pour faire capoter ce processus et remettre le pays dans «sa» trajectoire ?
Parallèlement à la stratégie répressive adoptée la semaine précédant le vendredi 12 avril, de nombreuses pages Facebook ont vu le jour ces derniers jours, destinées tantôt à jouer sur les sensibilités identitaires en stigmatisant une région précise, en essayant même de donner une certaine interprétation à la déclaration d’Ahmed Gaïd Salah relative au drapeau national – une déclaration ambiguë et incongrue, faut-il le préciser –, tantôt à tenter de discréditer des personnalités nationales qui pourraient éventuellement faire consensus au sein de la société dans l’optique de la gestion de la période de transition.
Des attaques virulentes sont entretenues par certains médias, qui invitent de temps à autre des personnes qui développent ces discours controversés.
Une campagne qui d’ailleurs a commencé aux premiers jours de la contestation, avec l’apparition de ces «trolls» qui n’ont pas arrêté de balancer des messages provocants, rumeurs et fake news, dans l’objectif de créer cette confusion dont la paternité a été attribuée, au début, à des cercles proches du clan présidentiel.
Fort heureusement, les Algériens ont été jusque-là très alertes envers ces «manipulations». Lors des différentes manifestations, à travers toutes les régions du pays, les marcheurs n’ont exprimé aucun slogan clivant.
Les Algériens ont fait preuve jusque-là d’une maturité politique qui leur permet de se prémunir contre ces «manipulations» destinées principalement à monter les uns contre les autres. La contre-révolution est en marche, mais la révolution paraît «blindée» contre ces «attaques».
Les confusions provoquées de temps à autre ne font pas perdre aux manifestants leur objectif principal, qui est le «changement du système».
ABDELGHANI AICHOUN
El Watan
La contre-révolution serait-elle en marche ? Le changement d’attitude des services de sécurité, la semaine dernière, par rapport à «la gestion des foules» a poussé plus d’un à se poser des questions quant aux objectifs des responsables en place.
Qu’est-ce qui a changé pour que ces services adoptent une nouvelle stratégie, plutôt agressive, à l’endroit des manifestants ?
En plus des incidents déclenchés vendredi dernier sur la place Maurice Audin et sur l’esplanade de la Grande-Poste à partir de 15h30, où des échauffourées ont éclaté entre «manifestants» et policiers, plusieurs faits qui se sont déroulés la veille et dans la matinée de vendredi confirment ce changement d’attitude.
Durant les jours qui ont précédé ce «8e vendredi» de manifestation, les services de sécurité ont empêché tout rassemblement à Alger-Centre, contrairement aux semaines précédentes.
De plus, la Gendarmerie nationale a, la veille de ces grandioses marches, bouclé la capitale pour empêcher les citoyens des régions limitrophes de rejoindre la manifestation.
Samedi 13 avril dans la nuit, des militantes interpellées lors d’un rassemblement, ont été dénudées par une policière dans un commissariat à Baraki. Mais avant-hier, alors que le chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaïd Salah, prononçait un discours, les étudiants n’ont pas été réprimés comme ce fut le cas une semaine auparavant.
Dans son intervention, le vice-ministre de la Défense nationale a affirmé que «la décision de protéger le peuple, avec ses différentes composantes, est une décision irréversible dont nous ne dévierons point». «Partant de la solidité des liens de confiance liant le peuple à son armée, nous avons donné des instructions claires et sans équivoques pour la protection des citoyens, notamment lors des marches», a-t-il ajouté.
S’agit-il d’un message adressé à la police qui n’avait fait que réprimer les manifestants durant toute la semaine ? En tout cas, ce jour-là, les étudiants ont marché pacifiquement à travers tout le pays, y compris à Alger donc, et aucun incident n’a été signalé.
Sauf que dès le lendemain (hier mercredi), la faculté de droit de Saïd Hamdine a été le théâtre d’une descente d’éléments des «services de sécurité» qui tentait d’interpeller un étudiant.
Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Hassane Rabehi, disait au même moment, à l’occasion d’une conférence de presse, que ni le gouvernement ni la DGSN n’ont donné d’instruction pour réprimer les manifestants.
Qui le fait alors ? La police a également démenti le lancement de grenades lacrymogènes à l’intérieur du tunnel des Facultés, comme elle a nié avoir fait subir des «maltraitances» aux quatre militantes.
Y a-t-il un jeu d’instructions et de contre-instructions ou s’agit-il seulement d’un écran de fumée destiné à cacher une stratégie visant à «casser» le mouvement par la force dissuasive de la répression ?
Des «trolls» à l’œuvre sur les réseaux sociaux
Il est clair que l’ampleur de la protestation dérange beaucoup d’intérêts. Des personnalités politiques, économiques et autres ont beaucoup à perdre si l’Algérie se dirige vers une transition qui va dans le sens d’une démocratisation.
Le système en place a permis à des personnes de bâtir des fortunes ou des carrières non méritées pour la simple et unique raison qu’elles font partie du «cercle».
Et celles-là useront certainement de tous les moyens dont elles disposent pour faire avorter ce hirak. Le mouvement s’installe dans la durée et il est clair que la population est déterminée à ne pas faire marche arrière.
La répression exercée sur les étudiants mardi dernier n’a pas ébranlé leur détermination, bien au contraire, puisqu’ils ont été plus nombreux avant-hier.
Que reste-il donc à la «bande» comme la surnomme la rue – un terme qu’a emprunté Gaïd Salah dans un de ses discours – pour faire capoter ce processus et remettre le pays dans «sa» trajectoire ?
Parallèlement à la stratégie répressive adoptée la semaine précédant le vendredi 12 avril, de nombreuses pages Facebook ont vu le jour ces derniers jours, destinées tantôt à jouer sur les sensibilités identitaires en stigmatisant une région précise, en essayant même de donner une certaine interprétation à la déclaration d’Ahmed Gaïd Salah relative au drapeau national – une déclaration ambiguë et incongrue, faut-il le préciser –, tantôt à tenter de discréditer des personnalités nationales qui pourraient éventuellement faire consensus au sein de la société dans l’optique de la gestion de la période de transition.
Des attaques virulentes sont entretenues par certains médias, qui invitent de temps à autre des personnes qui développent ces discours controversés.
Une campagne qui d’ailleurs a commencé aux premiers jours de la contestation, avec l’apparition de ces «trolls» qui n’ont pas arrêté de balancer des messages provocants, rumeurs et fake news, dans l’objectif de créer cette confusion dont la paternité a été attribuée, au début, à des cercles proches du clan présidentiel.
Fort heureusement, les Algériens ont été jusque-là très alertes envers ces «manipulations». Lors des différentes manifestations, à travers toutes les régions du pays, les marcheurs n’ont exprimé aucun slogan clivant.
Les Algériens ont fait preuve jusque-là d’une maturité politique qui leur permet de se prémunir contre ces «manipulations» destinées principalement à monter les uns contre les autres. La contre-révolution est en marche, mais la révolution paraît «blindée» contre ces «attaques».
Les confusions provoquées de temps à autre ne font pas perdre aux manifestants leur objectif principal, qui est le «changement du système».
ABDELGHANI AICHOUN
El Watan
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