Un avant-projet de charte citoyenne a été rendu public hier mardi. Plus d'une centaine de militantes et militants ont rédigé et signé ce texte fondateur "pour une Algérie libre et démocratique". Nous le publions ici dans son intégralité.
1. PRÉAMBULE
La révolution démocratique est en marche. En ces heures où le destin de l’Algérie se joue entre les forces du progrès et les nostalgiques des années de plomb agrégés au sein de l’ancien système, les patriotes sont appelés à leurs responsabilités. Leur union autour d’une vision politique et stratégique fidèle aux sacrifices d’hier et aux appels d’aujourd’hui est plus que jamais requise pour assurer le succès de cette révolution et mettre en échec les dévoiements visant à régénérer le système.
L’heure est décisive, elle ne permet ni hésitation, ni laxisme, ni débats fantaisistes. Elle exige de nous que nous nous portions à l’avant des luttes avec perspicacité, efficacité et détermination. Il y va du destin de notre pays et de notre avenir, c’est pourquoi nul n’a le droit de faire de ce grand moment de ferveur patriotique un sujet de marchandage. L’intérêt suprême du pays et de l’idéal démocratique qui lui est corollaire ne doivent souffrir d’aucune ambigüité.
Dans cette perspective et pour la clarté de nos objectifs, nous proposons en préalable une adhésion totale et convaincue aux principes qui constituent les fondements d’un État de droit moderne pour une Algérie démocratique tournée vers le progrès.
Conscients de l’importance vitale et évidente que revêtent ces principes pour une démocratie effective, nous ne doutons pas d’obtenir l’assentiment de tous les patriotes algériens.
L’Algérie est devant un défi historique majeur : doter le pays de l’État-nation qui lui assurera stabilité, liberté, justice et développement. Forte d’une mobilisation exceptionnelle et animée par un esprit citoyen salué par tous, la révolution du 22 février invite à parachever en fait la guerre de libération nationale par les prolongements politique et institutionnel empêchés par les affrontements fratricides de 1962 et les régimes qui en sont issus.
Faute d’avoir fait place au citoyen au lendemain de la guerre, le militant a cédé devant le militaire. Il aura fallu cinquante sept ans de despotisme avant que le soulèvement du 22 février, porté par les jeunes et les femmes, vienne surprendre le monde et bouleverser le paysage politique en Algérie.
La jeunesse, assujettie à une éducation sectaire, socialement précarisée, donnée pour désabusée et démobilisée et la femme algérienne présumée acquise et soumise à la régression constituent aujourd’hui le fer de lance de ce combat citoyen, déterminé et pacifique pour un changement radical impliquant le départ du système autoritaire qui sévit depuis l’indépendance. L’Algérien puise ses forces dans la dignité retrouvée et la confiance renouvelée – en soi et dans l’avenir.
Assumée et affirmée par le peuple libéré, l’exigence de rupture est une priorité nationale. Les esquives et autres manœuvres destinées à en voiler la nature ou en différer l’urgence sont l’une des menaces qu’il nous faut démasquer et combattre. L’Algérie ne peut se permettre une autre déception, un échec de plus.
S’il ne s’agit pas de se complaire dans le jugement facile, il est de notre devoir de procéder méthodiquement, sans surenchère mais sans complaisance à l’évaluation de notre passé récent.
Les non-dits, les censures, les maquillages et les propagandes sont les causes profondes du malheur algérien.
2. CONSIDERATIONS HISTORIQUES
Plusieurs fois contrariée, l’aspiration à une existence respectant l’individu et honorant les devoirs de solidarité et d’équité collectives a néanmoins souvent inspiré les moments les plus décisifs de notre passé. Niée, déformée ou censurée, l’Histoire nationale fut protégée par la mémoire socialisée qui reste la source première des grandes émergences nationales.
Plongeant ses racines dans une histoire multimillénaire, l’Afrique du nord centrale, zone privilégiée de grands mouvements historiques, a dû affronter une succession d’invasions qui lui ont laissé peu de temps pour se réaliser en tant qu’entité accomplie – sans tutelle externe – dans le bassin méditerranéen. Emiettées, quelques fois opposées et souvent soumises, les populations algériennes ont, malgré tout, su garder une âme singulière qui a permis, à chaque étape de leur parcours, la renaissance de l’être collectif. Dans les temps modernes, le cours de l’Histoire algérienne s’est heurté à deux grands obstacles :
La Régence turque dont l’administration parasitaire a exclu les autochtones des centres de décisions politiques. Durant trois siècles, celle-ci s’est employée à empêcher et au besoin réprimer toute velléité de construction nationale.
La colonisation française de 1830, menée par l’une des plus grandes puissances militaires et industrielles du 19ème siècle qui est devenue colonisation de peuplement après avoir défait le Dey Hussein en trois semaines. Démuni et sans institutions étatiques propres, le pays verra tous ses mouvements de révolte écrasés dans le sang.
Dans la nuit coloniale, des militants, en phase avec leur peuple, ont choisi de sacrifier leur confort personnel et même leur vie pour entretenir la flamme des combats longs ; ceux que l’on mène pour l’honneur et les générations futures. Et dans la guerre contre l’occupant, une autre guerre pour la citoyenneté n’a jamais cessé.
C’est grâce à eux qu’au début du 20e siècle apparaissent enfin des formes de lutte qui projettent l’État-nation algérien dans la rationalité. Face à un adversaire négateur de l’idée nationale, entravé par des archaïsmes entretenus et instrumentalisés par l’occupant, le mouvement national peine à trouver les formes et les voies les mieux indiquées pour mener de pair le défi de la libération nationale et celui de la démocratie post-coloniale. Profitant de carences dans l’élaboration du concept de nation moderne, notamment dans son identité et son ancrage historique, divers courants de pensée transnationaux hégémoniques alors en vogue cherchent à préempter, sinon contrôler idéologiquement, le combat national algérien. Le débat interne qui devait nourrir la réflexion sur le futur État national fut détourné avant d’être violemment combattu.
Dans le long et valeureux parcours du Mouvement national, des occasions d’aller vers la démocratie se sont présentées. Pour des raisons historiques, idéologiques, politiques, sociologiques et culturelles, toutes n’ont pas toujours été fructifiées. Ces propositions militantes ont cependant permis de perpétuer l’esprit critique et créateur dans les circonstances et les périodes de reflux politique.
Moins de dix ans après la terrible répression de mai 1945, dans un univers de misère sociale et de délabrement économique, au moment où l’impasse semblait totale, surgit un miracle algérien nourri par des militants anonymes. L’esprit de l’audace et du don de soi pour la patrie provoque l’insurrection du premier novembre 1954.
Salvateur, ce sursaut ne sera cependant pas suffisant pour conférer toute sa plénitude à l’émancipation algérienne. En août 1956, lors du congrès de la Soummam, est adoptée la plate-forme qui prolongera l’appel à la lutte armée par une révolution revendiquant l’autonomie décisionnelle et prônant une conception civile de la cité algérienne. Le document sera rapidement et sévèrement attaqué de l’intérieur et de l’extérieur. Une année plus tard, en août 1957, lors de la réunion de la direction du FLN au Caire, la force brutale l’emporte. Le fragile espoir d’une Algérie démocratique et sociale est tué dans l’œuf.
La lutte de libération a suivi son cours mais depuis la violence, le népotisme et l’opacité imprègnent la vie publique. L’arbitraire colonial qui accélère la formation de la conscience nationale n’empêche pas la mutilation politique de l’indépendance : la décolonisation n’apporte ni liberté ni démocratie.
Entamée comme une lutte emblématique du processus de décolonisation du tiers-monde, la guerre de libération algérienne finira, elle aussi, dans le désenchantement général post-colonial. Arbitraire, fraudes électorales, censure générale, paupérisation, corruption institutionnalisée,… soumettront la société. La congélation politique durera plus d’un demi-siècle. Jouant sur les divisions régionales qu’il prétend combattre, le système empêche l’inter-connexion des revendications populaires et se livre à une entreprise de conditionnement et d’embrigadement des nouvelles générations.
Cependant, même coupée de son passé par un système éducatif aliénant et une désinformation primaire, la jeunesse algérienne a pu retrouver et se réapproprier les séquences fécondes de son passé. Les combats de Jugurtha et de Takfarinas contre Rome, l’épopée de Kahina ou de Fadhma n Soummeur, les règnes d’Abdelmoumen et de Yaghmorassen, les résistances d’Abdelkader et de Cheikh Aheddad tout comme les vérités cachées de la révolution seront progressivement redécouverts pour être assumés avec fierté et lucidité. Plus tard, les appels d’Amar Imache dans l’Etoile nord-africaine, l’invitation à débat de 1949, l’État civil de la Soummam de 1956, l’opposition résolue du FFS en 1963, la résistance de l’ORP (Organisation de la Résistance Populaire) au lendemain du putsch de 1965, la production critique du parti de la révolution socialiste (PRS) dans les années 70, l’insurrection citoyenne d’avril 80, les manifestations dans l’ouest du pays en 1986, celles des étudiants de Constantine la même année, l’explosion d’octobre 1988, les soulèvements successifs du Mzab, la révolte de 2001 en Kabylie, les mobilisations du Grand Sud contre le chômage et l’exploitation du gaz de schiste sont autant de luttes menées en faveur de l’instauration d’une cité démocratique arbitrée par le citoyen d’où seraient bannis l’abus d’autorité des despotes, le culte de leur personnalité ou la dictature de la majorité.
La transmission intergénérationnelle a été hachée et laborieuse mais la pugnacité patriotique est venue à bout de la censure et de l’endoctrinement.
L’accumulation de ces engagements, sacrifices et propositions transmis dans la clandestinité, arrivée enfin à maturité, constitue la sève de la révolution en cours dont il faut préserver sagacité, force et pérennité.
Cet apprentissage de soi volontariste sera l’un des facteurs les plus déterminants de l’avènement de l’insurrection pacifique du 22 février qui vient faire mentir tous les déterminismes qui avaient catalogué l’Algérie parmi les nations condamnées à survivre dans la violence atavique.
Dans cette nouvelle épopée, la tradition de l’héroïsme qui se nourrit de la confiance et de la fierté de soi est confirmée. L’Algérien ne sollicite ni aide ni compassion d’autrui.
Le règne de la démagogie et de la rente a vécu. Le pays est appelé à tout revoir avant de tout réinventer.
La phase de transition qui doit permettre à l’Algérie de renouer avec l’espérance démocratique trahie en 1962 revêt une importance capitale, sinon vitale. C’est de la façon dont est organisée cette étape que dépend la renaissance algérienne.
1. PRÉAMBULE
La révolution démocratique est en marche. En ces heures où le destin de l’Algérie se joue entre les forces du progrès et les nostalgiques des années de plomb agrégés au sein de l’ancien système, les patriotes sont appelés à leurs responsabilités. Leur union autour d’une vision politique et stratégique fidèle aux sacrifices d’hier et aux appels d’aujourd’hui est plus que jamais requise pour assurer le succès de cette révolution et mettre en échec les dévoiements visant à régénérer le système.
L’heure est décisive, elle ne permet ni hésitation, ni laxisme, ni débats fantaisistes. Elle exige de nous que nous nous portions à l’avant des luttes avec perspicacité, efficacité et détermination. Il y va du destin de notre pays et de notre avenir, c’est pourquoi nul n’a le droit de faire de ce grand moment de ferveur patriotique un sujet de marchandage. L’intérêt suprême du pays et de l’idéal démocratique qui lui est corollaire ne doivent souffrir d’aucune ambigüité.
Dans cette perspective et pour la clarté de nos objectifs, nous proposons en préalable une adhésion totale et convaincue aux principes qui constituent les fondements d’un État de droit moderne pour une Algérie démocratique tournée vers le progrès.
Conscients de l’importance vitale et évidente que revêtent ces principes pour une démocratie effective, nous ne doutons pas d’obtenir l’assentiment de tous les patriotes algériens.
L’Algérie est devant un défi historique majeur : doter le pays de l’État-nation qui lui assurera stabilité, liberté, justice et développement. Forte d’une mobilisation exceptionnelle et animée par un esprit citoyen salué par tous, la révolution du 22 février invite à parachever en fait la guerre de libération nationale par les prolongements politique et institutionnel empêchés par les affrontements fratricides de 1962 et les régimes qui en sont issus.
Faute d’avoir fait place au citoyen au lendemain de la guerre, le militant a cédé devant le militaire. Il aura fallu cinquante sept ans de despotisme avant que le soulèvement du 22 février, porté par les jeunes et les femmes, vienne surprendre le monde et bouleverser le paysage politique en Algérie.
La jeunesse, assujettie à une éducation sectaire, socialement précarisée, donnée pour désabusée et démobilisée et la femme algérienne présumée acquise et soumise à la régression constituent aujourd’hui le fer de lance de ce combat citoyen, déterminé et pacifique pour un changement radical impliquant le départ du système autoritaire qui sévit depuis l’indépendance. L’Algérien puise ses forces dans la dignité retrouvée et la confiance renouvelée – en soi et dans l’avenir.
Assumée et affirmée par le peuple libéré, l’exigence de rupture est une priorité nationale. Les esquives et autres manœuvres destinées à en voiler la nature ou en différer l’urgence sont l’une des menaces qu’il nous faut démasquer et combattre. L’Algérie ne peut se permettre une autre déception, un échec de plus.
S’il ne s’agit pas de se complaire dans le jugement facile, il est de notre devoir de procéder méthodiquement, sans surenchère mais sans complaisance à l’évaluation de notre passé récent.
Les non-dits, les censures, les maquillages et les propagandes sont les causes profondes du malheur algérien.
2. CONSIDERATIONS HISTORIQUES
Plusieurs fois contrariée, l’aspiration à une existence respectant l’individu et honorant les devoirs de solidarité et d’équité collectives a néanmoins souvent inspiré les moments les plus décisifs de notre passé. Niée, déformée ou censurée, l’Histoire nationale fut protégée par la mémoire socialisée qui reste la source première des grandes émergences nationales.
Plongeant ses racines dans une histoire multimillénaire, l’Afrique du nord centrale, zone privilégiée de grands mouvements historiques, a dû affronter une succession d’invasions qui lui ont laissé peu de temps pour se réaliser en tant qu’entité accomplie – sans tutelle externe – dans le bassin méditerranéen. Emiettées, quelques fois opposées et souvent soumises, les populations algériennes ont, malgré tout, su garder une âme singulière qui a permis, à chaque étape de leur parcours, la renaissance de l’être collectif. Dans les temps modernes, le cours de l’Histoire algérienne s’est heurté à deux grands obstacles :
La Régence turque dont l’administration parasitaire a exclu les autochtones des centres de décisions politiques. Durant trois siècles, celle-ci s’est employée à empêcher et au besoin réprimer toute velléité de construction nationale.
La colonisation française de 1830, menée par l’une des plus grandes puissances militaires et industrielles du 19ème siècle qui est devenue colonisation de peuplement après avoir défait le Dey Hussein en trois semaines. Démuni et sans institutions étatiques propres, le pays verra tous ses mouvements de révolte écrasés dans le sang.
Dans la nuit coloniale, des militants, en phase avec leur peuple, ont choisi de sacrifier leur confort personnel et même leur vie pour entretenir la flamme des combats longs ; ceux que l’on mène pour l’honneur et les générations futures. Et dans la guerre contre l’occupant, une autre guerre pour la citoyenneté n’a jamais cessé.
C’est grâce à eux qu’au début du 20e siècle apparaissent enfin des formes de lutte qui projettent l’État-nation algérien dans la rationalité. Face à un adversaire négateur de l’idée nationale, entravé par des archaïsmes entretenus et instrumentalisés par l’occupant, le mouvement national peine à trouver les formes et les voies les mieux indiquées pour mener de pair le défi de la libération nationale et celui de la démocratie post-coloniale. Profitant de carences dans l’élaboration du concept de nation moderne, notamment dans son identité et son ancrage historique, divers courants de pensée transnationaux hégémoniques alors en vogue cherchent à préempter, sinon contrôler idéologiquement, le combat national algérien. Le débat interne qui devait nourrir la réflexion sur le futur État national fut détourné avant d’être violemment combattu.
Dans le long et valeureux parcours du Mouvement national, des occasions d’aller vers la démocratie se sont présentées. Pour des raisons historiques, idéologiques, politiques, sociologiques et culturelles, toutes n’ont pas toujours été fructifiées. Ces propositions militantes ont cependant permis de perpétuer l’esprit critique et créateur dans les circonstances et les périodes de reflux politique.
Moins de dix ans après la terrible répression de mai 1945, dans un univers de misère sociale et de délabrement économique, au moment où l’impasse semblait totale, surgit un miracle algérien nourri par des militants anonymes. L’esprit de l’audace et du don de soi pour la patrie provoque l’insurrection du premier novembre 1954.
Salvateur, ce sursaut ne sera cependant pas suffisant pour conférer toute sa plénitude à l’émancipation algérienne. En août 1956, lors du congrès de la Soummam, est adoptée la plate-forme qui prolongera l’appel à la lutte armée par une révolution revendiquant l’autonomie décisionnelle et prônant une conception civile de la cité algérienne. Le document sera rapidement et sévèrement attaqué de l’intérieur et de l’extérieur. Une année plus tard, en août 1957, lors de la réunion de la direction du FLN au Caire, la force brutale l’emporte. Le fragile espoir d’une Algérie démocratique et sociale est tué dans l’œuf.
La lutte de libération a suivi son cours mais depuis la violence, le népotisme et l’opacité imprègnent la vie publique. L’arbitraire colonial qui accélère la formation de la conscience nationale n’empêche pas la mutilation politique de l’indépendance : la décolonisation n’apporte ni liberté ni démocratie.
Entamée comme une lutte emblématique du processus de décolonisation du tiers-monde, la guerre de libération algérienne finira, elle aussi, dans le désenchantement général post-colonial. Arbitraire, fraudes électorales, censure générale, paupérisation, corruption institutionnalisée,… soumettront la société. La congélation politique durera plus d’un demi-siècle. Jouant sur les divisions régionales qu’il prétend combattre, le système empêche l’inter-connexion des revendications populaires et se livre à une entreprise de conditionnement et d’embrigadement des nouvelles générations.
Cependant, même coupée de son passé par un système éducatif aliénant et une désinformation primaire, la jeunesse algérienne a pu retrouver et se réapproprier les séquences fécondes de son passé. Les combats de Jugurtha et de Takfarinas contre Rome, l’épopée de Kahina ou de Fadhma n Soummeur, les règnes d’Abdelmoumen et de Yaghmorassen, les résistances d’Abdelkader et de Cheikh Aheddad tout comme les vérités cachées de la révolution seront progressivement redécouverts pour être assumés avec fierté et lucidité. Plus tard, les appels d’Amar Imache dans l’Etoile nord-africaine, l’invitation à débat de 1949, l’État civil de la Soummam de 1956, l’opposition résolue du FFS en 1963, la résistance de l’ORP (Organisation de la Résistance Populaire) au lendemain du putsch de 1965, la production critique du parti de la révolution socialiste (PRS) dans les années 70, l’insurrection citoyenne d’avril 80, les manifestations dans l’ouest du pays en 1986, celles des étudiants de Constantine la même année, l’explosion d’octobre 1988, les soulèvements successifs du Mzab, la révolte de 2001 en Kabylie, les mobilisations du Grand Sud contre le chômage et l’exploitation du gaz de schiste sont autant de luttes menées en faveur de l’instauration d’une cité démocratique arbitrée par le citoyen d’où seraient bannis l’abus d’autorité des despotes, le culte de leur personnalité ou la dictature de la majorité.
La transmission intergénérationnelle a été hachée et laborieuse mais la pugnacité patriotique est venue à bout de la censure et de l’endoctrinement.
L’accumulation de ces engagements, sacrifices et propositions transmis dans la clandestinité, arrivée enfin à maturité, constitue la sève de la révolution en cours dont il faut préserver sagacité, force et pérennité.
Cet apprentissage de soi volontariste sera l’un des facteurs les plus déterminants de l’avènement de l’insurrection pacifique du 22 février qui vient faire mentir tous les déterminismes qui avaient catalogué l’Algérie parmi les nations condamnées à survivre dans la violence atavique.
Dans cette nouvelle épopée, la tradition de l’héroïsme qui se nourrit de la confiance et de la fierté de soi est confirmée. L’Algérien ne sollicite ni aide ni compassion d’autrui.
Le règne de la démagogie et de la rente a vécu. Le pays est appelé à tout revoir avant de tout réinventer.
La phase de transition qui doit permettre à l’Algérie de renouer avec l’espérance démocratique trahie en 1962 revêt une importance capitale, sinon vitale. C’est de la façon dont est organisée cette étape que dépend la renaissance algérienne.
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