Abdelaziz Bouteflika n’est pas le seul
président algérien à avoir ouvert l’espace
aérien national aux avions de chasse
français. Dans son livre intitulé France-Algérie,
50 ans d’histoires secrètes, paru l’été dernier
chez Fayard, Naoufel Brahimi El Mili, enseignant
à Sciences Po Paris, révèle que le premier chef
d’Etat à s’être distingué par une telle initiative a
été le défunt Chadli Bendjedid.
C’est précisément en 1986, lors du conflit tchadolibyen, que le successeur de Houari Boumediène
avait autorisé le survol du ciel algérien par des
Jaguar que le président Mitterrand avait dépêchés
dans le cadre de l’opération Epervier pour sauver
le président Hissène Habré dont la tête était
mise à pris par l’opposant Goukouni Oueddei et
Mouammar El Gueddafi. Il s’agissait alors de la
seconde fois que Paris demandait à l’Algérie une
autorisation de survol pour ses chasseurs.
La toute première requête avait été formulée en
1984, indique Naoufel Brahimi El Mili qui précise
néanmoins qu’Algérie n’y avait pas répondu
positivement en raison notamment de l’opposition
du général-major Mustapha Belloucif qui avait
également refusé à la même période d’équiper
l’Armée nationale populaire (ANP) par les seuls
radars français (Thomson, Ndlr). Belloucif, estil mentionné, ne voulait pas faire dépendre la
surveillance de l’espace aérien algérien d’une
seule entreprise. Autrement, le président Chadli
et le général Larbi Belkheir, son chef de cabinet,
y étaient favorables. Le général paiera cependant
cher son opposition aux deux hommes puisqu’il
sera envoyé à la retraite peu de temps après.
Naoufel Brahimi El Mili, qui décrit Chadli
Bendjedid comme le plus pro-Français des
présidents algériens, indique également qu’El
Mouradia avait donné à la même période son
feu vert à l’armée française pour installer une
base non loin de la frontière algéro-libyenne.
L’opération avait été classée secret défense. «Le
nom de code de cette base secrète en Algérie,
dédiée uniquement à la surveillance, est le ‘‘point
1010’’, coordonnées géographiques du lieu. En
aucun cas une opération militaire française ne
peut se déclencher à partir du territoire algérien.
Il ne s’agit que de la collecte de renseignements
militaires à partir d’un dispositif technologique
déployé à cet endroit», révèle l’enseignant à
Sciences Po Paris.
Le livre de Noufel Brahimi El Mili regorge
d’éléments croustillants et souvent de première
main sur les relations algéro-françaises durant
les premières années du recouvrement de
l’indépendance et les rivalités entre les différents
clans au pouvoir. La plus épique de ces rivalités
a opposé le lobby pro-américain incarné par
le défunt Messaoud Zeggar (ami intime de
Houari Boumediène) et le lobby pro-français
dont le général Belkhir, Mouloud Hamrouche
et Belkacem Nabi furent les plus grands
représentants. Sous Chadli, les pro-Français
finiront par neutraliser durablement les «amis» de
Washington dans le pouvoir algérien.
L’auteur décrit également la «ruse» avec laquelle
Chadli et Larbi Belkheir ont écarté Kasdi Merbah
de la course à la présidence de la République au
lendemain des événements d’Octobre 88. Naoufel
Brahimi El Mili éclaire par ailleurs d’un jour
nouveau les rapports qui existaient entre le Front
islamique du salut (FIS) et Mouloud Hamrouche.
L’auteur de France-Algérie, 50 ans d’histoires
secrètes défend l’idée que Mouloud Hamrouche
– qui ne faisait pas confiance au FLN – comptait
sur Abassi Madani et Ali Belhadj pour succéder à
Chadli Bendjedid. Cette thèse devrait certainement
faire réagir l’ancien Premier ministre.
Z. C.
El Watan - Lundi 17 août 2020 - 5
L
président algérien à avoir ouvert l’espace
aérien national aux avions de chasse
français. Dans son livre intitulé France-Algérie,
50 ans d’histoires secrètes, paru l’été dernier
chez Fayard, Naoufel Brahimi El Mili, enseignant
à Sciences Po Paris, révèle que le premier chef
d’Etat à s’être distingué par une telle initiative a
été le défunt Chadli Bendjedid.
C’est précisément en 1986, lors du conflit tchadolibyen, que le successeur de Houari Boumediène
avait autorisé le survol du ciel algérien par des
Jaguar que le président Mitterrand avait dépêchés
dans le cadre de l’opération Epervier pour sauver
le président Hissène Habré dont la tête était
mise à pris par l’opposant Goukouni Oueddei et
Mouammar El Gueddafi. Il s’agissait alors de la
seconde fois que Paris demandait à l’Algérie une
autorisation de survol pour ses chasseurs.
La toute première requête avait été formulée en
1984, indique Naoufel Brahimi El Mili qui précise
néanmoins qu’Algérie n’y avait pas répondu
positivement en raison notamment de l’opposition
du général-major Mustapha Belloucif qui avait
également refusé à la même période d’équiper
l’Armée nationale populaire (ANP) par les seuls
radars français (Thomson, Ndlr). Belloucif, estil mentionné, ne voulait pas faire dépendre la
surveillance de l’espace aérien algérien d’une
seule entreprise. Autrement, le président Chadli
et le général Larbi Belkheir, son chef de cabinet,
y étaient favorables. Le général paiera cependant
cher son opposition aux deux hommes puisqu’il
sera envoyé à la retraite peu de temps après.
Naoufel Brahimi El Mili, qui décrit Chadli
Bendjedid comme le plus pro-Français des
présidents algériens, indique également qu’El
Mouradia avait donné à la même période son
feu vert à l’armée française pour installer une
base non loin de la frontière algéro-libyenne.
L’opération avait été classée secret défense. «Le
nom de code de cette base secrète en Algérie,
dédiée uniquement à la surveillance, est le ‘‘point
1010’’, coordonnées géographiques du lieu. En
aucun cas une opération militaire française ne
peut se déclencher à partir du territoire algérien.
Il ne s’agit que de la collecte de renseignements
militaires à partir d’un dispositif technologique
déployé à cet endroit», révèle l’enseignant à
Sciences Po Paris.
Le livre de Noufel Brahimi El Mili regorge
d’éléments croustillants et souvent de première
main sur les relations algéro-françaises durant
les premières années du recouvrement de
l’indépendance et les rivalités entre les différents
clans au pouvoir. La plus épique de ces rivalités
a opposé le lobby pro-américain incarné par
le défunt Messaoud Zeggar (ami intime de
Houari Boumediène) et le lobby pro-français
dont le général Belkhir, Mouloud Hamrouche
et Belkacem Nabi furent les plus grands
représentants. Sous Chadli, les pro-Français
finiront par neutraliser durablement les «amis» de
Washington dans le pouvoir algérien.
L’auteur décrit également la «ruse» avec laquelle
Chadli et Larbi Belkheir ont écarté Kasdi Merbah
de la course à la présidence de la République au
lendemain des événements d’Octobre 88. Naoufel
Brahimi El Mili éclaire par ailleurs d’un jour
nouveau les rapports qui existaient entre le Front
islamique du salut (FIS) et Mouloud Hamrouche.
L’auteur de France-Algérie, 50 ans d’histoires
secrètes défend l’idée que Mouloud Hamrouche
– qui ne faisait pas confiance au FLN – comptait
sur Abassi Madani et Ali Belhadj pour succéder à
Chadli Bendjedid. Cette thèse devrait certainement
faire réagir l’ancien Premier ministre.
Z. C.
El Watan - Lundi 17 août 2020 - 5
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