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Fatiha Benabbou à Algérie1 : « Le parlement actuel est largement discrédité »

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  • Fatiha Benabbou à Algérie1 : « Le parlement actuel est largement discrédité »

    Fatiha Benabbou à Algérie1 : « Le parlement actuel est largement discrédité »


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    Par Nabil Semyane
    05 Septembre 2020

    [IMG]https://www.*************/medias-2020/source/SEPTEMBRE-2020/fatiha-benabbou.jpg[/IMG]


    Fatiha Benabbou, professeur de droit constitutionnel à l’université d’Alger, qui intervient régulièrement dans les médias pour donner son point de vue, nous explique dans cet entretien que la probable saisine du parlement par le président de la république, pour débattre du projet de révision constitutionnelle, marque une volonté de légalisme de sa part en plaçant la « Constitution au-dessus de tous » , alors que le passage direct à des législatives anticipées n'est pas sans quelque dangers nous explique t-elle.

    Néanmoins, elle prévient que le futur parlement, du fait de l’effondrement de l’ancienne alliance présidentielle risque de conduire à l’émergence d’un futur parlement patchwork avec des micros formations sans ancrage sociologique.

    Algérie1 : Contrairement à ce qu'ont "prophétisé" beaucoup de médias, le parlement sera bien saisi du projet de révision constitutionnelle. Pourquoi, selon vous, le président Tebboune a fait ce choix ? Ne prend-il pas un risque avec un parlement aussi discrédité, comme le confirme encore les dernières déclarations de l'ex-secrétaire général du FLN devant le tribunal ?

    Fatiha Benabbou : Certes, le parlement actuel est largement discrédité, encore plus par les aveux publics d’anciens responsables et parlementaires. Mais, dans tous les cas de figure, l’option en premier, entre -élections législatives anticipées ou révision de la Constitution- charrie des risques, sinon des dangers.

    La première alternative comporte, sans aucun doute, des impondérables. Il va sans dire que des élections législatives anticipées n’auraient eu un sens que si le Hirak avait donné naissance à des forces politiques nouvelles. Ce qui n’est pas le cas. Et quand bien même, une nouvelle force aurait surgi, il faut un minimum de temps pour évaluer sa radicalité, sinon sa dangerosité. De surcroît, le risque est que la nouvelle assemblée élue se croit investie en tant qu’assemblée constituante souveraine et qu’elle remette en cause le fragile compromis sur l’identité nationale. Il faut tenir compte de ces paramètres si on ne veut pas engager le pays dans l’aventure.

    Il est clair, alors, que si le Président de la République a choisi de réviser en premier, la Constitution, il n’a d’autres alternatives, s’il veut demeurer légaliste, que de respecter scrupuleusement, les prescriptions constitutionnelles. Or, le titre quatrième de la Constitution lui indique le chemin à suivre. Et la première garantie qu’offre un Etat moderne, c’est le respect des formalités juridiques. En respectant la Constitution, non seulement, on respecte la souveraineté du peuple, mais, on donne un gage : la Constitution est au –dessus de tous.

    A1 : Est-ce que la tenue du référendum sera suivi automatiquement de la dissolution de l'actuelle APN et que pensez-vous des propos du secrétaire général du RND qui met justement en garde contre cette dissolution qu'il assimile à une "phase de transition" qui ne dit pas son nom, "porteuse de potentiels soubresauts"

    D’abord, le référendum n’entraîne pas la dissolution automatique de l’Assemblée Populaire Nationale. En revanche, conformément à l’article 147 de la Constitution, le Président de la République dispose de la prérogative de dissoudre l’Assemblée Populaire Nationale, sans exiger aucune condition, mise à part des consultations formelles de certaines personnalités.

    Par ailleurs, je ne suis pas du tout d’accord avec le Secrétaire Général du R.N.D. Ce sont, plutôt, les relations incestueuses entre la politique et l’argent qui sont porteuses de grands dangers pour la stabilité du pays. Les effets délétères de l'argent sur la politique est une vieille rhétorique ; c’est même un mélange explosif en mesure d’emporter l’Etat.

    De plus, l'observation des affaires politico -financières récentes devant la justice (révélées par les médias) ne laisse plus planer de doutes. Elle dresse un bilan noir sur l’achat de sièges parlementaires sous la forme détestable de la chkara.

    Et c’est cette situation, qui a provoqué des comportements "antipolitiques", la défiance à l'égard des institutions publiques, l'abstentionnisme, et même, dans le passé, le vote pour le parti le plus radical.

    Par conséquent, s’il dissout l’Assemblée Populaire Nationale, le Président de la République répondra, certainement à l’une des revendications phares du hirak.

    A1 : Vous avez certainement pris connaissance de la copie présentée par la commission de révision, à la lumière des propositions d'amendements faits par la classe politique, lors des débats.

    A votre avis de spécialiste, est ce que ces amendements sont de nature à marquer vraiment le passage à "l'Algérie nouvelle", avec un rééquilibrage des pouvoirs? Est-ce que ces propositions d'amendements répondent de façon satisfaisante aux revendications du Hirak?


    Assurément, en Algérie, les évolutions se font par ruptures, et le hirak a, certainement, fait bouger des lignes. Mais il faut savoir que ce sont les conditions économiques, politiques et sociales qui feront évoluer le droit.

    Espérer avoir un rééquilibrage des pouvoirs, c’est renvoyer à une correspondance entre structure sociale et structure juridique ; qui, au-delà d’une séparation juridique des pouvoirs, doit renvoyer, en réalité, à une séparation au niveau de la structure politique, c’est à dire, à une conception des rapports des classes sociales en lutte ; Autrement dit, doit s’opérer un partage du pouvoir entre forces sociales en présence. Par conséquent, assurer l’équilibre constitutionnel entre des pouvoirs constitutionnels, cela signifie reproduire l’équilibre social entre des forces politiques réelles.

    A1 : Or, quid de ces forces politiques réelles actuellement, en Algérie ?

    La recomposition du champ politique après l’effondrement de l’alliance présidentielle, mènera vers l’effritement du champ politique, aujourd’hui fort de près de 70 formations politiques, en majorité sans base partisane ; donc, ne reposant sur aucune force politique.

    Dès lors, la sociologie actuelle ne permet pas l’émergence de majorités politiques au sein du Parlement. Ce qui implique le retour à un éclatement de la représentation qu’aucun mécanisme constitutionnel, aussi perfectionné soit-il ne pourrait endiguer. Il s’ensuit, logiquement que la fragmentation du champ politique entraînera de fait, des coalitions fragiles et éphémères ; et la reproduction de crises politiques.
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