Par Nadjib Stambouli.
Malheur au peuple qui perd de vue ses héros. Il y a seize ans (déjà…), le 16 janvier 92, un des authentiques héros algériens, Mohamed Boudiaf, foulait le sol de la mère-patrie après trois décennies d’exil. Paradoxalement, les raisons qui l’ont fait revenir étaient les mêmes que celles qui l’ont fait partir, et convergeaient toutes vers le même socle nationaliste, l’amour de la patrie.
Moment d’une rare émotion parce que gorgé du faisceau de contradictions et de tumultes qui avaient traversé le trajet tumultueux du pays, depuis le départ de Boudiaf vers l’Europe d’abord puis vers la briqueterie de Kenitra, ce retour avait permis aux aînés d’apprécier les retrouvailles avec une figure qui fait corps indissociable avec un demi-siècle de l’Histoire du pays, et aux plus jeunes de découvrir un visage qui semblait important, mais qui ne leur disait rien, parce qu’interdit des livres d’Histoire.
Cette masse de jeunes, et ça reste une énigme pour qui ignore ce que séduction politique veut dire, ont très rapidement adopté ce président pas comme les autres, qui tend la main à travers l’écran télé, qui se lève sans protocole juste à la fin d’une émission, et surtout qui parle leur langage, sans emphase, dans des discours délestés de toutes les scories et pesanteurs du classicisme ringard et désuet.
Cette figure aux traits secs, ce visage émacié auréolé de cheveux blancs, feront partie du paysage familial de la jeunesse, de leurs discussions et surtout de leurs espoirs placés en les promesses lucides, sans une once de démagogie, de cette personnalité historique qui a su mettre l’Histoire à portée de compréhension de monsieur tout le monde.
C’est que, qualité des grands hommes et vertu des êtres d’exception, Boudiaf incarnait la simplicité, ce qui lui conférait une dimension abordable par tout le peuple algérien. Tous, sauf… sauf ceux qu’il dérangeait, évidemment, et qui ne lui avaient pas laissé le temps de mettre ses plans à exécution, en l’exécutant, alors qu’il prononçait une de ses allocutions arrimées à la sauvegarde de «l’Algérie, avant tout».
De façon brutale et tragique, en l’assassinant, les ennemis de l’Algérie ont précocement interrompu un des beaux rêves de l’Algérie, en ciblant un symbole de la pulsion unitaire et rassembleuse, sur fond de la devise «ferme sur les principes, souple dans les méthodes», principe directeur qui a guidé son action autant dans le mouvement national libérateur dont il était l’un des principaux dirigeants et membres fondateurs, que lors de son long exil et enfin après son retour, lors d’une remise en ordre et une reprise en main prématurément et dramatiquement interrompues.
Bref, Boudiaf a été l’auteur d’une vie hors du commun, marquée par un itinéraire exceptionnel et un destin à nul autre pareil, destin pavant le chemin idéal d’entrée dans l’Histoire. Par la grande porte, évidemment.
N. S.
Le Jour d'Algérie.
Le 16 Janvier 2008.
Malheur au peuple qui perd de vue ses héros. Il y a seize ans (déjà…), le 16 janvier 92, un des authentiques héros algériens, Mohamed Boudiaf, foulait le sol de la mère-patrie après trois décennies d’exil. Paradoxalement, les raisons qui l’ont fait revenir étaient les mêmes que celles qui l’ont fait partir, et convergeaient toutes vers le même socle nationaliste, l’amour de la patrie.
Moment d’une rare émotion parce que gorgé du faisceau de contradictions et de tumultes qui avaient traversé le trajet tumultueux du pays, depuis le départ de Boudiaf vers l’Europe d’abord puis vers la briqueterie de Kenitra, ce retour avait permis aux aînés d’apprécier les retrouvailles avec une figure qui fait corps indissociable avec un demi-siècle de l’Histoire du pays, et aux plus jeunes de découvrir un visage qui semblait important, mais qui ne leur disait rien, parce qu’interdit des livres d’Histoire.
Cette masse de jeunes, et ça reste une énigme pour qui ignore ce que séduction politique veut dire, ont très rapidement adopté ce président pas comme les autres, qui tend la main à travers l’écran télé, qui se lève sans protocole juste à la fin d’une émission, et surtout qui parle leur langage, sans emphase, dans des discours délestés de toutes les scories et pesanteurs du classicisme ringard et désuet.
Cette figure aux traits secs, ce visage émacié auréolé de cheveux blancs, feront partie du paysage familial de la jeunesse, de leurs discussions et surtout de leurs espoirs placés en les promesses lucides, sans une once de démagogie, de cette personnalité historique qui a su mettre l’Histoire à portée de compréhension de monsieur tout le monde.
C’est que, qualité des grands hommes et vertu des êtres d’exception, Boudiaf incarnait la simplicité, ce qui lui conférait une dimension abordable par tout le peuple algérien. Tous, sauf… sauf ceux qu’il dérangeait, évidemment, et qui ne lui avaient pas laissé le temps de mettre ses plans à exécution, en l’exécutant, alors qu’il prononçait une de ses allocutions arrimées à la sauvegarde de «l’Algérie, avant tout».
De façon brutale et tragique, en l’assassinant, les ennemis de l’Algérie ont précocement interrompu un des beaux rêves de l’Algérie, en ciblant un symbole de la pulsion unitaire et rassembleuse, sur fond de la devise «ferme sur les principes, souple dans les méthodes», principe directeur qui a guidé son action autant dans le mouvement national libérateur dont il était l’un des principaux dirigeants et membres fondateurs, que lors de son long exil et enfin après son retour, lors d’une remise en ordre et une reprise en main prématurément et dramatiquement interrompues.
Bref, Boudiaf a été l’auteur d’une vie hors du commun, marquée par un itinéraire exceptionnel et un destin à nul autre pareil, destin pavant le chemin idéal d’entrée dans l’Histoire. Par la grande porte, évidemment.
N. S.
Le Jour d'Algérie.
Le 16 Janvier 2008.
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