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Ces nouveaux nés que l'on abandonne en Algérie

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  • Ces nouveaux nés que l'on abandonne en Algérie

    Quel est le tort des enfants nés en Algérie d'une liaison illégitime et clandestine ? Pourquoi une fois nés, certains sont carrément abandonnés dans la rue ou dans des décharges sauvages, dans de mauvaises conditions, constituant une éventuelle proie pour les animaux errants ?

    Ce sujet est rarement évoqué en Algérie, car une grossesse illégitime qui constitue un tabou sur le plan social est également un péché du côté religieux. Or, le nombre des enfants nés de relations hors mariage ne cesse d'augmenter. A Oran, la situation est devenue plus que jamais inquiétante. Des nouveau-nés sans vie sont souvent découverts par les services de la Gendarmerie nationale ou de la police. Cette année, cinq nouveau-nés, sans vie, ont été découverts durant les dix premiers jours du mois de janvier, à l'USTO, à Maraval, à la décharge d'El-Kerma, au Plateau... Le mois dernier également, un nouveau-né de sexe féminin a été découvert, abandonné dans un cartable à Haï Oussama (ex-Boulanger). L'année dernière, 37 nouveau-nés, dont 22 morts, ont été découverts abandonnés et autant en 2006 dont une vingtaine sans vie. En 2005, la protection civile de la wilaya d'Oran avait découvert 23 nouveau-nés abandonnés (16 de sexe masculin et 7 de sexe féminin) dont 8 ont été trouvés morts (6 garçons et 2 filles). Il en est ainsi pour les enfants naturels ou adultérins qui font trop souvent partie du non-dit de la société algérienne.

    Par manque d'informations, les mères célibataires, de crainte d'être reconnues et identifiées, au lieu de s'adresser au centre d'accueil des enfants ou aux pouponnières, préfèrent abandonner leur progéniture dans la rue. Toutefois, les services concernés se portent garants de la discrétion pour tout ce qui touche à l'identification de la mère biologique. «La décision d'abandon implique la rupture de tout lien avec l'enfant, la perte de tout droit sur lui et le secret absolu de son placement. La mère est assurée du secret des renseignements fournis qui ne peuvent en aucune façon être utilisés contre elle», affirme une source bien informée. Les mères qui abandonnent leurs enfants ont trois mois pour revenir sur leur décision si elles émettent le voeu de les récupérer dès le premier mois de l'abandon. En effet, le procès-verbal de l'abandon est renouvelable chaque mois, et pendant deux mois, et le délai de réflexion de la mère est de trois mois, un temps de réflexion mais également le temps de trouver la solution à un problème, d'ordre familial ou autre, lié à la récupération de l'enfant. Une fois le délai expiré, l'enfant sera systématiquement placé en milieu familial. Dans ce cadre, une vingtaine d'enfants abandonnés ont été récupérés par leurs mères biologiques l'année dernière.

    Par ailleurs, selon les sociologues, la pression sociale et le faible équipement du pays en centres d'accueil semblent être les causes principales de l'augmentation du nombre d'enfants abandonnés. «Certaines femmes, notamment les mères célibataires, rejettent leurs enfants de peur d'être rejetées par leurs familles et par la société. La plupart des mères qui viennent chez nous pour laisser leurs enfants reviennent pour se rassurer que leurs enfants sont bien pris en charge. Elles quittent leurs petits les larmes aux yeux», nous confie une représentante d'une pouponnière. Les sociologues affirment que ce phénomène a pris de l'ampleur, ces dernières années, pour diverses raisons : la pauvreté qui a poussé des jeunes filles à la prostitution, l'ouverture médiatique, la moyenne d'âge du mariage qui dépasse les 28 ans pour les filles et 33 ans pour les garçons, ce qui les poussent à chercher des relations hors mariage, car ils n'ont aucune perspective de pouvoir fonder, un jour, un foyer à cause, notamment, de la crise du logement et du problème du chômage.

    C'est ainsi que la kafala a permis à des milliers d'enfants algériens privés d'affection familiale d'intégrer une famille. Notre source ajoute que la demande de kafala exprimée par les couples est plus importante que le nombre d'enfants abandonnés. Ainsi, et sur plus de 400 demandes exprimées en moyenne annuellement, quelque 250 cas aboutissent. La famille kafila a toujours le libre choix du sexe et de l'âge de l'enfant. Ce dernier doit garder sa filiation d'origine s'il est de parents connus. Dans le cas contraire, l'agent de l'état civil lui choisit deux prénoms dont le premier lui sert de patronyme, car notre religion proscrit tout lien de filiation. La mission de confier un enfant à une famille est une tâche assez délicate et pour les couples demandeurs de la kafala le temps est assez long. Comme première formalité d'usage, imposée, le couple candidat devra faire l'objet d'une rigoureuse enquête sociale. Cette enquête vise à obtenir des renseignements concernant la moralité du couple, des renseignements sur l'aspect psychologique, éducatif et culturel du milieu d'accueil. Le couple est soumis à une autre enquête, socioéconomique. Les conditions économiques du couple, qui doit justifier d'un revenu acceptable pour être capable d'accueillir et d'élever un enfant dans un milieu convenable, sont aussi exigées. D'autre part, si l'âge avancé des couples est l'une des causes de rejet des demandes de kafala, celle-ci ne peut en aucun cas être accordée si la fonction maternelle ne peut être assurée.

    En effet, pour la kafala d'un nouveau-né de moins d'un an, la mère «adoptive» ne doit pas dépasser les 50 ans. En outre, les femmes célibataires qui veulent «adopter» un enfant doivent dépasser les 40 ans et avoir un emploi fixe. Pour les nationaux résidant à l'étranger, les enquêtes sont assurées par les services consulaires. L'une des conditions est que le kafil doit être musulman.

    Concernant les chiffres, et grâce aux efforts louables de la direction de l'Action sociale, au moins 120 enfants abandonnés ont été placés dans des familles au niveau local durant les onze premiers mois de l'année dernière, tandis qu'une trentaine de dossiers sont en finalisation, contre plus de 70 en étude. Concernant la demande de la kafala à l'étranger, six ont été satisfaites, contre une vingtaine de dossiers en instance d'étude. Actuellement, plus de 150 enfants en bas âge sont admis à la pouponnière d'Ekhmühl, dont 90% sont des enfants abandonnés. Cette dernière a enregistré en 2005 l'admission de 293 enfants. Parmi eux, 288 ont quitté définitivement l'établissement. 204 enfants ont été recueillis dans le cadre de la «kafala» locale, 39 ont été pris par des nationaux résidant à l'étranger, tandis que 32 ont été récupérés par leurs mères. Pour les enfants qui n'ont pas eu la chance d'être récupérés ou placés, une fois atteint l'âge de six ans, les garçons sont transférés au centre d'enfants assistés de Saint Hubert et les filles au centre de Misserghine.

    Par le Quotidien d'Oran
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