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Balade enchanteresse sur la «promenade des Algérois» : Le nouveau visage de la baie d’Alger

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  • Balade enchanteresse sur la «promenade des Algérois» : Le nouveau visage de la baie d’Alger




    Au gré des différents «plans stratégiques d’Alger», la requalification des sites entourant le front de mer a toujours constitué un formidable laboratoire de rénovation urbaine. En même temps, la baie d’Alger est longtemps restée un éternel casse-tête et un inépuisable objet de débat.



    Lundi 21 juillet 2025. 17h passées. Bab El Oued. Un soleil intense continue à darder ses rayons sur le vieux quartier algérois en cette fin d’après-midi incendiaire. La chaleur a certes légèrement baissé par rapport au pic incandescent de la mi-journée, mais la canicule est bien palpable, attisée par l’indécrottable humidité méditerranéenne. Aussi, des cohortes d’estivants continuent-ils d’affluer vers la plage urbaine la plus convoitée de la Cité «intramuros». Il faut dire que l’aménagement opéré au niveau de la façade ouest de la baie d’Alger a augmenté l’attractivité des trois plages de Bab El Oued, à savoir Qaâ Essour, El Kettani et Rmila.

    Plus qu’à un lifting, c’est à une véritable révolution urbaine que nous assistons au niveau du front de mer du cœur historique de la capitale dans le cadre de ce qui est appelé le Plan bleu. Cela a le mérite de permettre à Alger et aux Algérois de «ne plus tourner le dos à la mer» pour paraphraser une formule galvaudée et néanmoins bien expressive, et de vivre en communion avec leur patrimoine maritime. Il s’agit d’unparcours des plus agréables épousant les contours de la corniche, et qui va en gros des abords du stade Ferhani, à l’orée de Saint-Eugène, à l’ouest, jusqu’au square Sofia, à l’est, en contrebas de la Grande-Poste. Mais l’attraction balnéaire par excellence pour ce qui concerne cet arc marin, c’est évidemment Bab El Oued et sa Promenade des Algérois selon le nom de baptême qui a été donné à ce splendide parcours azuré.

    Alors que des palissades métalliques ont longtemps obstrué la vue de cet immense chantier en entretenant le mystère sur l’ouvrage urbain qui allait en sortir, c’est à l’inauguration de la saison estivale que le voile a été levé sur cette Promenade des Algérois dont le nom fait nécessairement penser à la «Promenade des Anglais» autour de la baie des Anges, à Nice. Et le résultat est franchement épatant. On se souvient que dès que la partie El Kettani a été ouverte au public en mai dernier, les premières images partagées sur les réseaux sociaux avaient tout de suite fait le buzz.

    Le parcours est conçu, faut-il le signaler, par le célèbre désigner urbain Yamo à qui l’on doit déjà, entre autres, le jardin situé à l’extrémité ouest du boulevard Mira (ex-Malakoff), en allant à Bologhine, près de l’agence SEAAL. «Bab El Oued, Alger, travaux en cours sur le brise vague de la Promenade des Algérois pour aménager la plage et les parcours divers», avait publié Yamo, de son vrai nom Mohamed Yahiaoui, sur son compte Instagram à une étape du projet, en février 2024. Depuis, les travaux ont considérablement avancé et la métamorphose est éclatante. Il n’y a rien à dire, ça en jette !

    Des rochers brise-vagues à Rmila

    Nous entamons notre parcours au long de la Promenade des Algérois depuis l’extrémité de la plage Rmila, à l’ouest. L’esplanade agglutinée au rivage grouille de monde, entre ceux qui attendent les minibus qui montent vers Zghara et « Madame l’Afrique », la basilique Notre Dame d’Afrique et sa terrasse très prisée ; ceux qui doivent prendre le transportà destination de Ain Benian, et ceux qui viennent spécialement pour la mer. Pour profiter du paysage, prendre un bon bol d’air salé, se gargariser d’embruns marins et faire trempette. La plateforme qui s’étend jusqu’aux abords de la plage El Kettani et le belvédère qui la surplombe sont investis par des contingents de Juilletistes en goguette. La bonne humeur est de sortie. Le muret qui séparait la partie haute de la place, de la partie basse qui flirte avec la mer, a été abattu.

    Et c’est comme si un bout de plage a été soustrait au rivage pour être ajouté à la ville.
    Ce qui frappe d’emblée le regard, ce sont les hauts palmiers plantés un peu partout d’un bout à l’autre de la grande place. Autre détail visuel qui ne manque pas de vous interpeller : des amas de rochers sont solidement disposés sur tout le pourtour de la grève, servant de «brise-lames» naturels. Ils sont étalés sur toute la rive ouest, de sorte que les baigneurs sont obligés de les « enjamber », pour ainsi dire, pour pouvoir se jeter à l’eau. La plage de Rmila proprement dite, et dont le nom signifie littéralement «sable fin», n’est donc plus fonctionnelle. Il n’y a plus, ni sable fin, ni gros sel. Mais c’est pour la bonne cause. La digue rocheuse a pour but d’empêcher le déferlement des vagues sur la chaussée comme cela se produit assez souvent par temps de grosse houle.

    Cela suscitait parfois la panique, surtout pour les habitants du quartier qui ont encore en mémoire le traumatisme des inondations du 10 novembre 2001 qui avaient fait plus de 700 morts. «C’est une bonne chose, ces blocs de pierre. C’est pour notre sécurité » lâche Mohamed, une canne à pêcher plantée entre les rochers, lui qui pratique assidûment la pêche à la ligne «pas pour le poisson lui-même mais pour s’évader, bech tatkhalwa maâ rohek», précise-t-il. Mohamed habite tout près de Rmila, sur le boulevard Abderrahmane Mira, derrière le stade Ferhani. Il bénit clairement les travaux d’aménagement de la baie et ne regrette pas de voir ces enrochementscondamner la plage la plus proche de son quartier. «De toute façon, moi, je préfère les rochers.

    C’est plus intime», glisse-t-il, avant de faire remarquer : «Vous savez, vous pouvez vous baigner là-bas. Pas cette partie au milieu, elle n’est pas propre, mais côté Kettani où il y a du monde, vous voyez. Là-bas c’est autorisé ». Pourtant, du côté des rochers, des jeunes téméraires n’hésitent pas à plonger. « Ici, la mer est propre, certes, mais ça dépend du vent. Là, c’est du gharbi, un vent d’ouest, qui balaie les saletés laissées par les navires » dit-il en expert. « J’ai passé toute mon enfance et ma jeunesse à me baigner ici», poursuit le quadragénaire en bermuda, le torse nu, le couffin de rigueur et la canne-à-pêche côtoyant une moto.

    «Au lieu des palmiers, il faut des arbres qui donnent de l’ombre»


    «Ces rochers servent de brise-vagues et c’est bien qu’ils aient fait ça. Les vagues arrivent jusqu’à la route, là-bas. Avant les inondations de 2001, la voie carrossable était trop proche du bord de mer. Dès le lendemain des inondations, le visage de la baie de Bab El Oued a commencé à changer. Il fallait parer au plus pressé et éloigner la route. C’est pour ça qu’ils ont créé cette place qui jouxte Rmila. Pour protéger la ville de la mer en cas d’intempéries», explique Mohamed. S’il est satisfait de la rénovation qui a été effectuée, notre amateur de pêche à la ligne estime toutefois qu’une attention similaire devrait être accordée au vieux bâti. «Ces immeubles décrépis de Bab El Oued, avec La Casbah bien sûr, c’est l’âme du vieil Alger. Il faut aussi s’en occuper», plaide-t-il, avant de lancer : «Il y a des travaux de réhabilitation des bâtimentsvétustes mais de ce que je vois, ça ne touche que les façades qui donnent sur le grand boulevard.
    A l’intérieur de Bab El Oued, au fond des quartiers, c’est vermoulu. Je pense qu’à terme, rayhine irrahlouhoum gaâ. Tout le monde va être relogé et ces vieux bâtiments seront probablement rasés pour monter des projets touristiques ou commerciaux.» Yacine, la cinquantaine, habitant lui aussi du quartier, près des Trois-Horloges, considère égalementque cette vaste entreprise de requalification urbaine doit en même temps être accompagnée d’une sauvegarde des «IMR» comme il dit : les «Immeubles menaçant ruine» nombreux à Bab El Oued.
    Il se réjouit de voir des échafaudages installés devant certains vieux immeubles en pleine réhabilitation, signe que «l’État compte bien s’occuper des bâtiments qui tombent en ruine, et où la sécurité des habitants est menacée», insiste ce cadre de l’éducation nationale. «Mais le chantier est gigantesque et les travaux avancent lentement. Notre immeuble, situé sur le boulevard Colonel Lotfi, a été endommagé par le séisme du 1er août 2014. Les escaliers sont branlants, et à ce jour, rien n’a été fait pour sécuriser notre bâtisse malgré nos alertes», affirme-t-il. Une dame attire notre attention, quant à elle, sur la plantation de palmiers à tout-va sur la Promenade des Algérois, un choix qu’elle ne trouve pas très judicieux. «Les palmiers, c’est beau. Esthétiquement, ça fait joli, ça donne du charme à la corniche.

    Mais ça ne donne pas d’ombre. Ce n’est pas adapté pour une ville aussi ensoleillée qu’Alger. Il faut des ficus ou des pins parasols ; des arbres d’ombrage qui rafraîchissent l’air», insiste-t-elle. «Voyez comment les arbres adoucissent l’atmosphère en été. Malheureusement, des dizaines d’arbres ont été abattus un peu partout à Alger ces dernières années et on a laissé faire ce carnage», déplore-t-elle. «A Bab El Oued, pour les besoins du métro, on a sacrifié deux jardins, celui de Taleb Abderrahmane, ex-Guillemin, et celui qui jouxte le lycée Okba, en haut, et il y a aussi le jardin qui entoure la mosquée Ennasr, en bas, près des Trois-Horloges. Ça fait beaucoup. Ils n’avaient pas besoin de mettre autant de stations, qui plus est sur des distances aussi rapprochées. J’espère que ça n’affectera pas les fondations des bâtisses vétustes et que les arbres et les jardins seront restaurés après les travaux», prie-t-elle.

    Rush sur la plage El Kettani


    A la plage El Kettani, c’est le grand rush de l’été. Tout autour du plan d’eau, une nuée de parasols multicolores domine le paysage. Une foule de monde a pris place sur une bande sablonneuse, formant un demi-cercle joyeux. En famille, entre copains ou en solo, la plage ne désemplit pas. Alors que des cohortes de baigneurs se préparent à quitter la plage en s’employant à se nettoyer les pieds, faire un brin de toilette avant de se rhabiller au grand dam des bambins qui veulent prolonger le plaisir, d’autres flux de visiteurs en short et serviette prennent leur place.

    La plage est équipée de toute les commodités. Un poste de la protection civile veille sur le site, surtout qu’il y a un peu de vent qui a réveillé la houle. Un poste de police a été érigé à proximité des maîtres-nageurs. Nous pouvons remarquer aussi des agents d’une «police des plages» arborant un élégant t-shirt blanc sur un pantalon bleu marine patrouillant le périmètre à vélo. C’est en 2018 qu’a été créée cette «brigade cycliste» dédiée spécialement à la surveillance des plages.

  • #2


    Des ados proposent des boissons fraîches et du thé à la menthe. La nouveauté avec le «plan d’aménagement de la façade ouest de la baie d’Alger» selon la dénomination officielle du projet est qu’il est désormais connecté sur l’autre flanc du front marin de Bab El Oued, permettant une continuité tout au long du rivage bleu jusqu’à la plage de Qaâ Essour. Le parcours côtier forme ainsi un circuit des plus plaisants agrémenté d’équipements de qualité, y compris – et c’est loin d’être un détail anodin – des toilettes publiques.
    On peut voir ça et là, des terrains de jeu, des haltes, un skatepark pour faire de la trottinette, des pistes cyclables, pour ne citer que ces infrastructures, le tout à l’ombre de jeunes palmiers protégés par une armature en roseau en attendant que leurs feuillages éclosent.
    Ce parcours sinueux qui se déploie au plus près de la bande littorale est doublé à l’étage au-dessus par une promenade surplombant la mer et dont la structure épouse l’esplanade El Kettani. Cette longue plateforme qui entoure l’hôtel El Kettani, et qui est parsemée elle aussi de palmiers,se prolonge avec la place du 17-Octobre 1961 dominée par une stèle imposante à la mémoire des victimes de la police de Papon.

    La Promenade des Algérois continue encore avec la place du Millénaire qui fait face à la DGSN, puis on enchaîne d’un même élan avec le parking de la plage de Qaâ Essour et tout le bloc formé par le Bastion 23. La magie du magnifique belvédère et son panoramique envoûtant se prolongent avec le chemin qui domine le boulevard Angkor et qui débouche sur le Musée de la marine et le tableau fascinant de Bab Labhar, la Porte de la Mer.

    «Enfin on respire ! »

    En contrebas de l’hôtel El Kettani, une ambiance festive égaie l’atmosphère en cette fin de journée. Les estivants affluent en masse, dont des familles entières, avec le papa, la maman, les enfants, les mamies, les cousins et les tatas. Dans le brouhaha général, un homme en djellaba et béret vissé au crâne, un gobelet de café et une bouteille d’eau minérale à ses pieds, remplit tranquillement une grille de mots fléchés sans broncher.
    Un autre monsieur a juste ramené sa petite chaise pliable et l’a posée au bord de l’eau pour se rafraichir au contact des embruns iodés. Beaucoup préfèrent se mettre sur un rocher et faire bronzette en admirant l’immense nappe apaisante. Ça et là, des groupes de forment.
    Les gamins sont aux anges, que ce soit dans l’eau ou dans les aires de jeux qui ponctuent le parcours. Certaines font du vélo, d’autres du roller, de la trottinette ou du skateboard. Ambiance très animée sur le «skatepark» que se dispute une légion d’amateurs des sports à roulettes.

    Une autre foule est massée sur une bande grise bordée de blocs de béton qui délimite le petit bassin. Sur cette courte jetée, le flâneur est en état de grâce. Sentiment d’une fusion totale avec la mer. Les baigneurs pagaient en toute insouciance dans la mare malgré le panneau rouge sur lequel il est marqué en anglais : « No swmining. Restricted area » (baignade interdite, zone réglementée). Mais personne ne s’avisera de les déloger. L’eau a l’air très bonne. Au final, la rade est encerclée de tous les côtés par les chercheurs de farniente et de douceur estivale. Une espèce de communion bienveillante règne entre les gens. Comme des retrouvailles intenses après une séparation. Ce sentiment de communion est d’autant plus fort que les visiteurs viennent de différentes wilayas.

    Cela s’entend aux accents et se vérifie aux matricules des voitures dans le grand parking jouxtant le Bastion 23 qui donne sur la plage mitoyenne de Qaâ Essour. L’accent parisien ou marseillais est très présent aussi, celui des Algériens de l’émigration. «Il n’y a rien à dire, l’opération de transformation des plages d’El Kettani jusqu’à Qaâ Essour est réussie. Ça a pris du temps mais le résultat est probant. Les équipements sont très bien. C’est formidable. Ça met en valeur le site balnéaire et ça permet aux gens d’avoir enfin un vrai accès à la mer » commente un baigneur prenant un bain de soleil. Une vacancière abonde dans le même sens : « C’est très agréable. Enfin on respire ! Le site est propre. Les enfants peuvent jouer au foot ou au basket. Il y a tout ce qu’il faut.»

    Un adolescent nous aborde pour nous proposer une virée en mer à bord d’une barque équipée de gilets de sauvetage. Plusieurs barques bleues et blanches proposent ce service. « C’est 200 DA la place pour les adultes et 100 DA pour les enfants. On vous fait une virée jusqu’au phare, là-bas», détaille-t-il en désignant le phare près de l’Amirauté. Une faune de vendeurs sillonne la Promenade. Au long de la plage, vous avez celui qui vous propose un «beignet skhoun» (beignet chaud) ou des m’hadjeb, vous avez des garçons assis derrière des glacières et qui vendent des boissons fraîches, ou encore tel marchand ambulant chargé de jouets gonflables…

    De Qaâ Essour aux quais de la pêcherie

    À la plage de Qaâ Essour où la baignade est autorisée, un carré se distingue par des rangées de parasols identiques siglés «OPLA». C’est l’acronyme de l’Office des parcs, des sports et des loisirs d’Alger, un organisme public affilié à la wilaya. «Pour 1000 DA, vous avez un parasol, une table en plastique et quatre chaises. Nous sommes ouverts de 8h30 à 20h», nous explique un représentant de cet office qui veille au grain avec d’autres collègues installés sous une tente. C’est le seul prestataire autorisé à louer des chaises et des parasols, à ce que nous avons constaté. Au-dessus de la plage, sur la gauche, deux terrains de football sont juxtaposés.

    Des jeunes se livrent à une partie de foot. D’autres font du jogging. Les visiteurs continuent d’affluer au niveau du grand parking dans lesquels ont pris position des fourgons de police ainsi que des agents en uniforme. Ammi Maâmmar, un septuagénaire à l’esprit vif coiffé d’une casquette, se balade gaîment au long de l’esplanade qui donne sur la place du 17-Octobre, près de la rue Icosium. Il s’arrête régulièrement pour admirer le sublime panoramique marin, discute avec les passants, distribue des bons mots à droite et à gauche. « Moi je suis de Chlef. En ce moment, je suis de passage à Alger. Je suis venu profiter de la mer et humer un peu d’air frais. Rahmate rabbi. C’est grandiose ce que l’État a réalisé ici», se réjouit-il.
    Puis il lance : «Voilà pourquoi on nous envie notre pays ! Regardez toute cette richesse. En plus, c’est un pays qui ne courbe pas l’échine. Nous sommes les seuls à tenir tête à l’ennemi sioniste, c’est pour ça qu’ils cherchent par tous les moyens à nous nuire. L’Algérie les rend fous.» Un homme accompagné d’un petit garçon, qui s’apprête à descendre à la plage, se joint à la discussion en entendant au vol le mot «Palestine». Maâmmar se met à déclamer de mémoire un poème émouvant, en français, en hommage à Ghazza. Au moment de nous séparer, il cherche ses mots puis nous confie : «J’ai un autre poème que je suis en train de composer.
    Il n’est pas encore prêt mais ça va venir en marchant», sourit-il avant de reprendre sa balade poétique. Nous poursuivons notre chemin en direction de la pêcherie. Nous nous engouffrons sous la trémie de l’avenue Angkor avant de nous retrouver près du club d’aviron. Des palissades métalliques ont été dressées au long de la façade du bâtiment. Tout le secteur est en chantier.

    De grands travaux sont engagés entre la pêcherie et la gare maritime. Un haut panneau explique la teneur du projet : «Réalisation d’une esplanade avec passerelle et ascenseur urbain reliant le boulevard Che Guevara aux quais de la pêcherie.» Comme pour la requalification de la façade maritime ouest, à Bab El Oued, là encore, le maître d’ouvrage, c’est la Direction des travaux publics de la wilaya d’Alger. L’exécution est confiée à Cosider avec un délai de réalisation de 18 mois. Le maître d’œuvre n’est autre que le brillant architecte Karim Louni et son cabinet Bet Kael. Karim Louni connaît intimement ce secteur pour avoir conçu et conduit ici même, dès 1998, le fameux projet baptisé «Carrefour du Millénaire» et les travaux de rénovation des voûtes et des terrasses de la pêcherie. C’est à lui que nous devons la transformation de toute cette partie qui va de la pêcherie à l’esplanade Bounetta qui fait face au siège de la wilaya d’Alger.

    La baie en chantier vue du boulevard Che Guevara

    Cet immense chantier est toujours en cours. Cependant, des segments ont d’ores et déjà été livrés, offrant pour la première fois au public l’opportunité de disposer d’un accès direct à la mer. Des bancs en béton, au design soigné, ainsi que du mobilier urbain en bois, sont disposés tout près des quais où des pêcheurs s’affairent à équiper leurs chalutiers. A notre passage, des bateaux de pêche s’apprêtaient à prendre la mer sous le regard charmé des badauds attablés aux terrasses. Deux buvettes proposent des boissons, des pizzas et autres pâtisseries. Tout près du carré enclavé, les travaux se poursuivent dare-dare. Du balcon du boulevard Che Guevara, vue plongeante sur toute cette partie où des grues géantes sont en action.
    Sur une grue, des goélands viennent se poserallègrement sous l’œil amusé des piétons. La passerelle devant relier le boulevard Che Guevara à la pêcherie est quasiment terminée mais elle n’est pas encore ouverte au public. Un peu plus loin vers l’est, tout près du port de voyageurs, une place avec des bancs et entourée de palmiers est presque terminée. Le belvédère faisant face au siège de la mairie de La Casbah, près de la place des Martyrs, est noir de monde. Tout au long du boulevard Che Guevara et du boulevard Zighoud Youcef qui le prolonge, en passant par le Square Port Saïd, des processions ininterrompues déambulent avec fébrilité.
    Partout, les gens s’arrêtent pour faire des photos avec leur téléphone. Ici, la star, c’est Alger. Sur la chaussée, à moment donné, passe un bus à impériale de l’Etusa transportant des touristes enchantés. Des nationaux dans leur majorité. Sur le bus, il est marqué : «Tahwissa fi Dzaïr» (balade à Alger). Il s’agit de circuits organisés par l’entreprise de transport urbain sous le nom «Alger City tour». Cela consiste en des trajets autour des lieux emblématiques de la capitale : la place des Martyrs, la Grande Poste, la Grande Mosquée d’Alger, la Promenade des Sablettes, le Jardin d’essais, Maqam Echahid….

    Le prix du ticket varie entre 450 et 1000 DA selon la durée du circuit. Près de l’APN, en face de l’hôtel Essafir (ex-Aletti), toujours en travaux, du monde sur la place aménagée autour d’une stèle imposante élevée à la mémoire des déportés en Nouvelle Calédonie.
    Un jeune homme en barbichette, bras tatoués, ne lâche pas son téléphone ; il filme toutavec frénésie, comme s’il réalisait un Vlog. C’est l’effet Alger. Quelques centaines de pas plus loin et nous voici devant la nouvelle attraction du front de mer.En face de la wilaya d’Alger et son splendide bâtiment de style néo-mauresque s’étale une magnifique esplanade qui offre une plateforme avancée dans la mer, et donnant sur la gare maritime. C’est l’esplanade Bounetta,signée là encore Karim Louni. Il est presque 20h, il fait frais, et la place est très animée.

    Ça grouille de monde. Il n’y a pas où s’asseoir. Au milieu de la place trône un café-restaurant des plus chics : Bab Dzira. L’établissement dispose d’une grande terrasse étendue sous une structure métallique et équipée de parasols. Il n’y a pas une seule table de libre. L’esplanade ne désemplit pas. Des cohortes de visiteurs continuent d’affluer à mesure que la nuit déploie son manteau d’étoiles. D’ici, les ferrys sont très proches. Vus d’aussi près, ils sont de taille impressionnante, à l’image du Badji Mokhtar, un des joyaux de la compagnie nationale. Le bâtiment naval ressemble à un paquebot. De la nouvelle place, on a l’impression de pouvoir y grimper d’un simple saut.

    Les autres bateaux qui mouillent au large paraissent également tout aussi proches à l’instar de ce container ship de forme étonnante, le Tahat. Quelle majesté, cette vue sur la baie depuis cet ilot magique qui semble se détacher de la ville et sur le point de prendre le large tel une plateforme flottante! Toute cette balade est un véritable enchantement pour le regard. Rien de tel pour se changer les idées. Et c’est gratuit ! Devant un tel spectacle où se marient harmonieusement nature et architecture, on a le sentiment de chausser des «semelles de vent» pour paraphraser Verlaine qui appelait Rimbaud «l’homme aux semelles de vent». Oui, car avec le vertige d’une telle virée, vous avez vraiment l’impression d’être en apesanteur, et de planer au-dessus d’Alger comme un goéland…

    El watan ; dz

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