Au cours de son discours la semaine passée devant les présidents des Assemblées populaires communales, le président Bouteflika a abordé les nouveaux enjeux charriés par l’évolution rapide des besoins de la jeunesse algérienne et les écueils qui se dressent sur son chemin, l’empêchant de s’épanouir et de vivre librement dans un pays aux immenses ressources, ressources mal gérées ou perverties par un système qui n’avait- sous le règne du parti unique et de la rente pétrolière - de compte à rendre qu’à…lui-même.
Outre les ressources naturelles avérées, dont la seule qui soit mise en exergue jusqu’à ce jour est l’énergie fossile, le pays recèle cette ressource humaine qui a pour nom la jeunesse. Cette ressource reste en friche, voire à la marge, tant qu’elle n’est pas prise en considération d’une façon sérieuse et rationnelle dans la stratégie de développement du pays. Les programmes sectoriels de plusieurs ministères ont intégré au cours de ces dernières années la donne des besoins de la jeunesse. Cependant, la cohérence et la durabilité des actions prévues ne sont pas véritablement garanties. Il y a même quelque part amalgame entre d’une part les programmes sociaux du gouvernement, pilotés par exemple par le ministère de la Solidarité et destinés à atténuer, seulement atténuer, les difficultés et l’angoisse générées par le chômage et la mal-vie, et, d’autre part, les projets d’investissements dans lesquelles s’impliquent les entreprises pour créer des richesses et des emplois. Cette confusion se prolonge dans les chiffres de l’emploi donnés par le ministère de la Solidarité et par les discours et explications des officiels promptement répercutés par la presse. En réalité, par-delà les chiffres (vrais, approximatifs ou carrément utopiques) qui voudraient établir une certaine ‘’prouesse’’ de la gestion du dossier de la jeunesse, les faits et les drames dans lesquels évoluent cette frange majoritaire de la société demeurent têtus ; ils ne semblent être sensibles à aucune ‘’atténuation chiffrée’’.
Ces drames ont pour noms violence sociale, banditisme, suicide, harga, tentation intégriste, analphabétisme (dans un monde de plus en plus numérisé), chômage, esprit nihiliste,…
Comment a-t-on pu faire pour transformer une énergie juvénile, fougueuse et prometteuse, en un boulet explosif que la société traîne nonchalamment et que les pouvoirs publics se contentent d’inscrire sur les tablettes de chimériques projets de développement ? Jusqu’au début de ce nouveau millénaire, l’Algérie était considérée plutôt comme zone de transit pour l’émigration clandestine africaine que véritable “acteur” en la matière. Il se trouve qu’en quelques années notre pays est en passe de rivaliser en la matière avec les pays du tiers-monde les plus enfoncés dans la misère.
Cette “exportation” d’une jeunesse poussée dans ses derniers retranchements et mise en situation de loques humaines n’a probablement pas d’équivalent dans l’histoire sociale de l’Algérie. Y a t-il un signe plus révélateur de l’échec d’une politique sensée servir la frange la plus importante de la population algérienne représentant presque 70% de celle-ci ? A l’échelle des anciennes colonies et du continent africain en particulier les analystes parlent crûment de l’échec des indépendances.
On ne sait précisément si la mission d’appréhender le phénomène de l’émigration clandestine devrait revenir au ministère de la Solidarité nationale, lequel a organisé un séminaire au cours de l’année dernière sur ce nouveau phénomène de société. Quoi qu’il en soit, il est heureux qu’une partie officielle ayant compétence de pouvoirs publics manifeste de l’intérêt à ce qui est devenu la réalité la plus symptomatique de l’état de déréliction humaine dans lequel se trouve plongée une importante frange de la jeunesse algérienne en ce début du 3e millénaire.
Méga-bureaucratie et corps inertes
Sans prétendre détenir de fiables statistique ni de fines informations sur les organisations réticulées qui jouent le rôle de ‘’bureau de main-d’œuvre’’ en la matière, l’initiative du département d’Ould Abbas a certainement permis aux participants au séminaire en question d’échanger les informations disponibles sur le nouveau drame qui frappe la société et qui - ironie du sort ! - a même pu profiter des produits des crédits Angem-barques de pêche-pour faire prendre le large avec le “soutien de l’Etat” à des jeunes désemparés. La presse, après avoir régulièrement rapporté les mésaventures de ces candidats à l’exil, parle d’une ‘’affaire d’État’’ ou d’une affaire politique dès lors qu’une structure officielle s’est saisie du dossier. La vérité est qu’elle l’était dès le départ, c’est-à-dire dès le moment où un seul algérien en arrive à mettre sa vie en péril pour quitter ce qu’il considère comme l’enfer afin de rejoindre un hypothétique paradis supposé planté sur la rive d’en face. Que de drames familiaux ce genre de rêve fou a pu charrier ! On en est arrivé à voir se créer de façon informelle des associations des parents de disparus ‘’harragas’’ qui se donnent pour objectif d’interpeller les autorités du pays sur le sort de leurs enfants qui ont embarqué par une nuit sans étoiles à partir d’un anonyme cap ou d’une discrète calanque, vers une destination que seuls le vent et les courants marins auront décidée, même si le GPS-denière technologie qui permet de quitter son pays… sans naviguer à vue-peut en corriger parfois les angles.
Sociologues, économistes, psychologues et tous ceux qui ont l’occasion de plancher sur un tel sujet n’ont pas manqué-au-delà des angles de vue propres à leurs métiers respectifs-de faire converger leurs griefs au mode d’organisation de la société, en d’autres termes, à l’Etat en parlant crûment de faillite d’un système. Faillite économique qui, a pu introniser, à l’ombre de la rente, l’injustice sociale, la corruption et la bureaucratie comme règle de conduite, une faillite morale, culturelle et intellectuelle qui a dangereusement discrédité et avili les valeurs de l’école et mis au placard l’éducation esthétique et artistique. L’Algérie- société et gouvernants-est, en matière de prise en charge de sa jeunesse, en train de récolter ce que ses pouvoirs successifs ont semé depuis plus de quarante ans. Ce ne sont évidemment pas les structures et les institutions conçues pour le secteur de la jeunesse qui manquent en Algérie. Néanmoins, plus on fouine dans les arcanes de cette méga-bureaucratie, plus on se résout à considérer que ce sont souvent des corps inertes et désincarnés, en tous cas loin de se mettre au diapason d’une jeunesse travaillée au corps par les frustrations devant un monde, lointain et proche à la fois, où la vie grouille de moult exubérances, brille de mille feux et chante joie et alacrité, mais c’est un monde qui ne s’est pas fait ex nihilo. Notre école n’a pas su donner les clefs qui permettent d’accéder au savoir qui a fondé les sociétés occidentales. On en arrive même à oublier qu’avant d’être des société de consommation elles sont d’abord des sociétés de production.
Dimensions dramatique d’une étrange déréliction
Le pouvoir politique a eu largement à reconnaître au cours des deux dernières années la dimension dramatique et l’enjeu polico-social du phénomène de l’émigration clandestine tout en prenant acte de la signification d’un tel suicide collectif qui remet en cause bien des certitudes. Le président de la République a eu à présider au cours de l’année 2007 deux regroupements où l’émigration clandestine était au centre des débats. Les difficultés de la transition économique ont décidément charrié des pertes de repères sociaux et culturels au point que la jeunesse algérienne se livre en offrande aux “immensités océanes”. En évaluant à sa juste ampleur une telle déréliction humaine, le pouvoir algérien a sans aucun doute senti le poids de la responsabilité morale et politique, laquelle, risque si elle n’est pas tout de suite sollicitée et mise en branle, de discréditer pour longtemps les décideurs de la “Maison Algérie”. Loin de prendre conscience d’une donnée qui est réellement plus un atout qu’un handicap, les responsables qui se sont succédé à la tête du pays ont le moins qu’on puisse dire péché par manque d’attention dans les différents programmes et dans la stratégie globale de développement du pays à l’endroit de la jeunesse. Toutes les politiques et les initiatives qui auraient dû valoriser cette fougueuse énergie et l’enraciner dans les réalités culturelles et économiques de notre pays ont manifestement manqué de visibilité et de pertinence. Comme le constatent d’éminents analystes, tous les errements du populisme politique et de l’économie rentière ont eu pour principale victime la jeunesse de ce pays. L’illustration de cette déconvenue par la multiplication infernale des cas de ‘’harragas’’ en pleine embellie financière du pays n’est probablement que la partie visible de l’iceberg qui tangue au gré des promesses non tenues et des illusions savamment entretenues.
Outre les ressources naturelles avérées, dont la seule qui soit mise en exergue jusqu’à ce jour est l’énergie fossile, le pays recèle cette ressource humaine qui a pour nom la jeunesse. Cette ressource reste en friche, voire à la marge, tant qu’elle n’est pas prise en considération d’une façon sérieuse et rationnelle dans la stratégie de développement du pays. Les programmes sectoriels de plusieurs ministères ont intégré au cours de ces dernières années la donne des besoins de la jeunesse. Cependant, la cohérence et la durabilité des actions prévues ne sont pas véritablement garanties. Il y a même quelque part amalgame entre d’une part les programmes sociaux du gouvernement, pilotés par exemple par le ministère de la Solidarité et destinés à atténuer, seulement atténuer, les difficultés et l’angoisse générées par le chômage et la mal-vie, et, d’autre part, les projets d’investissements dans lesquelles s’impliquent les entreprises pour créer des richesses et des emplois. Cette confusion se prolonge dans les chiffres de l’emploi donnés par le ministère de la Solidarité et par les discours et explications des officiels promptement répercutés par la presse. En réalité, par-delà les chiffres (vrais, approximatifs ou carrément utopiques) qui voudraient établir une certaine ‘’prouesse’’ de la gestion du dossier de la jeunesse, les faits et les drames dans lesquels évoluent cette frange majoritaire de la société demeurent têtus ; ils ne semblent être sensibles à aucune ‘’atténuation chiffrée’’.
Ces drames ont pour noms violence sociale, banditisme, suicide, harga, tentation intégriste, analphabétisme (dans un monde de plus en plus numérisé), chômage, esprit nihiliste,…
Comment a-t-on pu faire pour transformer une énergie juvénile, fougueuse et prometteuse, en un boulet explosif que la société traîne nonchalamment et que les pouvoirs publics se contentent d’inscrire sur les tablettes de chimériques projets de développement ? Jusqu’au début de ce nouveau millénaire, l’Algérie était considérée plutôt comme zone de transit pour l’émigration clandestine africaine que véritable “acteur” en la matière. Il se trouve qu’en quelques années notre pays est en passe de rivaliser en la matière avec les pays du tiers-monde les plus enfoncés dans la misère.
Cette “exportation” d’une jeunesse poussée dans ses derniers retranchements et mise en situation de loques humaines n’a probablement pas d’équivalent dans l’histoire sociale de l’Algérie. Y a t-il un signe plus révélateur de l’échec d’une politique sensée servir la frange la plus importante de la population algérienne représentant presque 70% de celle-ci ? A l’échelle des anciennes colonies et du continent africain en particulier les analystes parlent crûment de l’échec des indépendances.
On ne sait précisément si la mission d’appréhender le phénomène de l’émigration clandestine devrait revenir au ministère de la Solidarité nationale, lequel a organisé un séminaire au cours de l’année dernière sur ce nouveau phénomène de société. Quoi qu’il en soit, il est heureux qu’une partie officielle ayant compétence de pouvoirs publics manifeste de l’intérêt à ce qui est devenu la réalité la plus symptomatique de l’état de déréliction humaine dans lequel se trouve plongée une importante frange de la jeunesse algérienne en ce début du 3e millénaire.
Méga-bureaucratie et corps inertes
Sans prétendre détenir de fiables statistique ni de fines informations sur les organisations réticulées qui jouent le rôle de ‘’bureau de main-d’œuvre’’ en la matière, l’initiative du département d’Ould Abbas a certainement permis aux participants au séminaire en question d’échanger les informations disponibles sur le nouveau drame qui frappe la société et qui - ironie du sort ! - a même pu profiter des produits des crédits Angem-barques de pêche-pour faire prendre le large avec le “soutien de l’Etat” à des jeunes désemparés. La presse, après avoir régulièrement rapporté les mésaventures de ces candidats à l’exil, parle d’une ‘’affaire d’État’’ ou d’une affaire politique dès lors qu’une structure officielle s’est saisie du dossier. La vérité est qu’elle l’était dès le départ, c’est-à-dire dès le moment où un seul algérien en arrive à mettre sa vie en péril pour quitter ce qu’il considère comme l’enfer afin de rejoindre un hypothétique paradis supposé planté sur la rive d’en face. Que de drames familiaux ce genre de rêve fou a pu charrier ! On en est arrivé à voir se créer de façon informelle des associations des parents de disparus ‘’harragas’’ qui se donnent pour objectif d’interpeller les autorités du pays sur le sort de leurs enfants qui ont embarqué par une nuit sans étoiles à partir d’un anonyme cap ou d’une discrète calanque, vers une destination que seuls le vent et les courants marins auront décidée, même si le GPS-denière technologie qui permet de quitter son pays… sans naviguer à vue-peut en corriger parfois les angles.
Sociologues, économistes, psychologues et tous ceux qui ont l’occasion de plancher sur un tel sujet n’ont pas manqué-au-delà des angles de vue propres à leurs métiers respectifs-de faire converger leurs griefs au mode d’organisation de la société, en d’autres termes, à l’Etat en parlant crûment de faillite d’un système. Faillite économique qui, a pu introniser, à l’ombre de la rente, l’injustice sociale, la corruption et la bureaucratie comme règle de conduite, une faillite morale, culturelle et intellectuelle qui a dangereusement discrédité et avili les valeurs de l’école et mis au placard l’éducation esthétique et artistique. L’Algérie- société et gouvernants-est, en matière de prise en charge de sa jeunesse, en train de récolter ce que ses pouvoirs successifs ont semé depuis plus de quarante ans. Ce ne sont évidemment pas les structures et les institutions conçues pour le secteur de la jeunesse qui manquent en Algérie. Néanmoins, plus on fouine dans les arcanes de cette méga-bureaucratie, plus on se résout à considérer que ce sont souvent des corps inertes et désincarnés, en tous cas loin de se mettre au diapason d’une jeunesse travaillée au corps par les frustrations devant un monde, lointain et proche à la fois, où la vie grouille de moult exubérances, brille de mille feux et chante joie et alacrité, mais c’est un monde qui ne s’est pas fait ex nihilo. Notre école n’a pas su donner les clefs qui permettent d’accéder au savoir qui a fondé les sociétés occidentales. On en arrive même à oublier qu’avant d’être des société de consommation elles sont d’abord des sociétés de production.
Dimensions dramatique d’une étrange déréliction
Le pouvoir politique a eu largement à reconnaître au cours des deux dernières années la dimension dramatique et l’enjeu polico-social du phénomène de l’émigration clandestine tout en prenant acte de la signification d’un tel suicide collectif qui remet en cause bien des certitudes. Le président de la République a eu à présider au cours de l’année 2007 deux regroupements où l’émigration clandestine était au centre des débats. Les difficultés de la transition économique ont décidément charrié des pertes de repères sociaux et culturels au point que la jeunesse algérienne se livre en offrande aux “immensités océanes”. En évaluant à sa juste ampleur une telle déréliction humaine, le pouvoir algérien a sans aucun doute senti le poids de la responsabilité morale et politique, laquelle, risque si elle n’est pas tout de suite sollicitée et mise en branle, de discréditer pour longtemps les décideurs de la “Maison Algérie”. Loin de prendre conscience d’une donnée qui est réellement plus un atout qu’un handicap, les responsables qui se sont succédé à la tête du pays ont le moins qu’on puisse dire péché par manque d’attention dans les différents programmes et dans la stratégie globale de développement du pays à l’endroit de la jeunesse. Toutes les politiques et les initiatives qui auraient dû valoriser cette fougueuse énergie et l’enraciner dans les réalités culturelles et économiques de notre pays ont manifestement manqué de visibilité et de pertinence. Comme le constatent d’éminents analystes, tous les errements du populisme politique et de l’économie rentière ont eu pour principale victime la jeunesse de ce pays. L’illustration de cette déconvenue par la multiplication infernale des cas de ‘’harragas’’ en pleine embellie financière du pays n’est probablement que la partie visible de l’iceberg qui tangue au gré des promesses non tenues et des illusions savamment entretenues.
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