si nous veunions a mourire deffandez notre memoire
"didouche mourad"
en ces temps d'amnesie c de notre devoire d'evoque la memoire de celui qui est qualifie de "jean moulin algerien"
Né en 1919, ancien élève du collège de Blida, doué d’une solide culture, il était dès 1946 membre du MTLD. Il se distinguait rapidement par ses qualités d’organisateur, devenait membre du Comite central et chef de la wilaya de l'Est (à l’époque du Nord constantinois). Impliqué dans le " complot " dit du Constantinois, il était arrêté et condamné à six ans de prison, fin 1950.
Libéré en février 1955, Abane Ramdane entrait immédiatement au Front de Libération Nationale dont il devenait rapidement un membre dirigeant. A ce titre, il participera à l’organisation du Congrès de la Soummam (août 1956). Désigné comme membre du Comité de coordination et d’Exécution (CCE), il s’installait à Alger. Avec les autres frères, il menait " la bataille d’Alger " de décembre 1956 à mars 1957. Echappant de justesse au général Massu, il quittait l’Algérie pour participer à la conférence du Caire en août 1957.
Le 29 mai 1958, El Moudjahid, organe central du FLN, publiait son numéro 24, la première page entièrement encadrée de noir. En titre, au-dessus d’une grande photo : " Abane Ramdane est mort au champ d’honneur. "
C’est un texte historique dont mis à part la biographie, autant de lignes, autant de mensonges. Contrairement à ce qui est dit plus haut, la mort d’Abane est l’une des plus atroces non pour les raisons que donne la fraction dirigeante du CCE, inspiratrice de l’article.
Abane Ramdane n’est pas mort au champ d’honneur. Il a été, de la manière la plus lâche, attiré dans un guet-apens et assassiné, de sang-froid, par ceux qu il croyait " les siens ".
Militant du MTLD, et un des clandestins de l’Organisation spéciale (OS), Abane était en prison lorsque éclata l’insurrection du 1er Novembre. Mais des sa sortie, en 1955, il rejoignit évidemment le FLN où il joua très vite le rôle principal.
L organisation du Front, a ce moment-la, était encore embryonnaire. Il y avait des maquis en Kabylie, dans les Aurès ; dans d’autres régions, ils commençaient de s’étendre. Mais le MNA de Messali Hadj existait aussi et une grande confusion régnait dans beaucoup d’esprits. C’est elle qu’Abane entreprit de faire cesser dès qu’il assuma, à Alger, des responsabilités politiques.
Cependant, son action à Alger lui avait valu une autorité considérable dont certains avaient fini par prendre ombrage. La question ne se posa guère tant que le CCE resta à Alger, la personnalité d’Abane s’imposant par la force des choses. Elle ne tarda pas à surgir quand cet organisme dirigeant du Front dut, traqué par les parachutistes, quitter le territoire national, en été 1957, pour s’installer en Tunisie.
Cette installation même, en fait, fut obscurément la première source du conflit. Exigée par les circonstances, la " sortie " du CCE n’était vue par Abane que comme un pis-aller provisoire. Il fallait, pensait-il, revenir en Algérie le plus rapidement possible afin d’assumer, sur place, la direction du combat. Les premiers mois passés en Tunisie ne firent que renforcer, chez lui, cette conviction. Il ne tarda pas à constater, en effet, que la vie à l’extérieur pouvait mener facilement un dirigeant à se couper des réalités de la lutte et à perdre une vision saine des choses, quand elle ne le conduisait pas tout simplement à un mode de vie incompatible avec ses responsabilités.
Comme il ne mâchait pas ses mots, il indisposa rapidement ceux qu il prenait pour cible. Un jour, recevant plusieurs hauts responsables, il entra dans une violente colère, les menaçant de les dénoncer publiquement. " Puis je rentrerai en Algérie, ajouta-t-il, pour mener la lutte au milieu des djounouds et des militants. "
Abane, tous le savaient, était homme à le faire et une véritable panique s’empara des intéressés. Nul doute qu il n en mesura pas l’ampleur : cette témérité et ce franc-parler allaient précipiter les choses.
Abane attiré dans un traquenard
Quelque temps après, des messages en provenance des services de liaison du FLN commencèrent à parvenir du Maroc. Ils faisaient état de graves frictions entre le gouvernement marocain et les autorités locales du Front. On parlait de militants arrêtés, séquestrés, de stocks d’armes saisis, etc.
Peu à peu les télégrammes devenaient plus pressants. La situation, disaient-ils, était devenue très grave. Seul le roi Mohamed V, désormais, pouvait régler le problème. Il y était disposé, mais il tenait à en discuter directement, au préalable, avec le principal dirigeant du FLN, Abane Ramdane.
Krim, Boussouf et Ben Tobbal intervinrent alors : " Tu dois te rendre à Rabat ", conseillèrent-ils à Abane.
Abane se laissa convaincre. Une date fut retenue. Quelques jours auparavant, Boussouf, responsable des liaisons, gagna le Maroc pour préparer l’arrivée de son compagnon. Et le 22 décembre 1957, Abane, accompagné de Krim Belkacem et de Mahmoud Chérif, tous deux membres du CCE, s’envolait, à son tour, via l’Espagne.
Trois versions principales existent sur la suite des événements. Elles se recoupent et ne divergent que sur la question du partage de la responsabilité entre Belkacem Krim, Abdelhafid Boussouf et Lakhdar Ben Tobbal, les fameux trois « B » dans l’assassinat de Abane Ramdane.
La première version est celle de Me Ahmed Boumendjel, à l’époque l’un des plus proches collaborateurs d’Abane, qui suivit le développement de la crise au sein du CCE et fit une enquête personnelle sur ce qui se passa au Maroc le 22 décembre 1957.
Krim, Boussouf et Ben Tobbal se sont retrouvés solidaires contre abane, surtout lorsque Abane les menaça de rentrer à l intérieur pour les dénoncer auprès des combattants. De ce jour, ils commencèrent a se réunir sans lui et même sans qu il fut informe. Ils cherchaient le moyen de diminuer son autorité et de l isoler au sein des cercles dirigeants. Mais la personnalité d’Abane, son prestige et son autorité rendaient la chose presque impossible. C est alors que le complot fut trame. Les messages prétendument envoyés du Maroc étaient des faux fabriqués par les services de Boussouf. Les enlèvements de militants FLN par la police marocaine, les refus de transit d’armes et les autres difficultés qu ils montaient en épingle finirent d ailleurs par intriguer Boumendjel, alors adjoint d’Abane au département de l’information.
Pour en avoir le coeur net, il rendit visite à son ami Alami, alors ambassadeur du Maroc à Tunis, et lui dit sa surprise du comportement attribué aux autorités marocaines. Alami tomba des nues : « Je n’ai connaissance d’aucun fait de cet ordre », lui affirma-t-il catégoriquement. « Pourrais-tu en demander confirmation » ? suggéra, pour plus de sûreté, Boumendjel. Alami adressa un télex à Rabat et reçut immédiatement un démenti formel des plus hautes autorités marocaines. Boumendjel, de plus en plus méfiant, fit part de ses craintes à Abane. Mais les services de Boussouf continuant à adresser au CCE des messages de plus en plus pressants, parlant d’une situation aggravée et réclamant l’intervention directe d’Abane, celui-ci, pour éclaircir l’affaire, finit par décider de partir quand même pour le Maroc. Il pensait que, peut-être grossis, les incidents signalés par les télégrammes pouvaient avoir un fond de vérité, même si les autorités marocaines les démentaient officiellement.
Comme il commençait, néanmoins, à perdre un peu confiance en ses trois collègues du CCE, il convint avec un de ses amis demeurés à Tunis, R. G., de lui envoyer un message à l’escale de Madrid si quelque chose lui semblait anormal.
De fait, un message de Madrid parvint à R. G. : selon le code convenu, il signalait des " choses bizarres " remarquées par Abane avant même qu’il fut parvenu à destination.
Quelques heures plus tard, l’avion atterrissait au Maroc. Aussitôt Boussouf, qui l’attendait, mit à exécution la décision prise en commun avec Krim et Ben Tobbal : Abane, conduit dans une villa, y fut étranglé par des hommes de main
Mohamed Lebdjaoui, ami du défunt Abane Ramdane et auteur d’un livre intitulé « Vérités sur la Révolution algérienne », paru en 1986 aux Editions Gallimard, en France a demandé à Belkacem Krim ce qu il pouvait répondre à ces accusations. « Abane, dit-il, faisait un " travail fractionnel " et tentait de dresser aussi bien les maquisards que les militants contre les autres membres du CCE. Plusieurs démarches furent faites auprès de lui pour le convaincre de modifier son attitude. En vain : on constata qu’Abane, loin de se modérer, persistait dans la même voie en aggravant ses attaques.
"didouche mourad"
en ces temps d'amnesie c de notre devoire d'evoque la memoire de celui qui est qualifie de "jean moulin algerien"
Né en 1919, ancien élève du collège de Blida, doué d’une solide culture, il était dès 1946 membre du MTLD. Il se distinguait rapidement par ses qualités d’organisateur, devenait membre du Comite central et chef de la wilaya de l'Est (à l’époque du Nord constantinois). Impliqué dans le " complot " dit du Constantinois, il était arrêté et condamné à six ans de prison, fin 1950.
Libéré en février 1955, Abane Ramdane entrait immédiatement au Front de Libération Nationale dont il devenait rapidement un membre dirigeant. A ce titre, il participera à l’organisation du Congrès de la Soummam (août 1956). Désigné comme membre du Comité de coordination et d’Exécution (CCE), il s’installait à Alger. Avec les autres frères, il menait " la bataille d’Alger " de décembre 1956 à mars 1957. Echappant de justesse au général Massu, il quittait l’Algérie pour participer à la conférence du Caire en août 1957.
Le 29 mai 1958, El Moudjahid, organe central du FLN, publiait son numéro 24, la première page entièrement encadrée de noir. En titre, au-dessus d’une grande photo : " Abane Ramdane est mort au champ d’honneur. "
C’est un texte historique dont mis à part la biographie, autant de lignes, autant de mensonges. Contrairement à ce qui est dit plus haut, la mort d’Abane est l’une des plus atroces non pour les raisons que donne la fraction dirigeante du CCE, inspiratrice de l’article.
Abane Ramdane n’est pas mort au champ d’honneur. Il a été, de la manière la plus lâche, attiré dans un guet-apens et assassiné, de sang-froid, par ceux qu il croyait " les siens ".
Militant du MTLD, et un des clandestins de l’Organisation spéciale (OS), Abane était en prison lorsque éclata l’insurrection du 1er Novembre. Mais des sa sortie, en 1955, il rejoignit évidemment le FLN où il joua très vite le rôle principal.
L organisation du Front, a ce moment-la, était encore embryonnaire. Il y avait des maquis en Kabylie, dans les Aurès ; dans d’autres régions, ils commençaient de s’étendre. Mais le MNA de Messali Hadj existait aussi et une grande confusion régnait dans beaucoup d’esprits. C’est elle qu’Abane entreprit de faire cesser dès qu’il assuma, à Alger, des responsabilités politiques.
Cependant, son action à Alger lui avait valu une autorité considérable dont certains avaient fini par prendre ombrage. La question ne se posa guère tant que le CCE resta à Alger, la personnalité d’Abane s’imposant par la force des choses. Elle ne tarda pas à surgir quand cet organisme dirigeant du Front dut, traqué par les parachutistes, quitter le territoire national, en été 1957, pour s’installer en Tunisie.
Cette installation même, en fait, fut obscurément la première source du conflit. Exigée par les circonstances, la " sortie " du CCE n’était vue par Abane que comme un pis-aller provisoire. Il fallait, pensait-il, revenir en Algérie le plus rapidement possible afin d’assumer, sur place, la direction du combat. Les premiers mois passés en Tunisie ne firent que renforcer, chez lui, cette conviction. Il ne tarda pas à constater, en effet, que la vie à l’extérieur pouvait mener facilement un dirigeant à se couper des réalités de la lutte et à perdre une vision saine des choses, quand elle ne le conduisait pas tout simplement à un mode de vie incompatible avec ses responsabilités.
Comme il ne mâchait pas ses mots, il indisposa rapidement ceux qu il prenait pour cible. Un jour, recevant plusieurs hauts responsables, il entra dans une violente colère, les menaçant de les dénoncer publiquement. " Puis je rentrerai en Algérie, ajouta-t-il, pour mener la lutte au milieu des djounouds et des militants. "
Abane, tous le savaient, était homme à le faire et une véritable panique s’empara des intéressés. Nul doute qu il n en mesura pas l’ampleur : cette témérité et ce franc-parler allaient précipiter les choses.
Abane attiré dans un traquenard
Quelque temps après, des messages en provenance des services de liaison du FLN commencèrent à parvenir du Maroc. Ils faisaient état de graves frictions entre le gouvernement marocain et les autorités locales du Front. On parlait de militants arrêtés, séquestrés, de stocks d’armes saisis, etc.
Peu à peu les télégrammes devenaient plus pressants. La situation, disaient-ils, était devenue très grave. Seul le roi Mohamed V, désormais, pouvait régler le problème. Il y était disposé, mais il tenait à en discuter directement, au préalable, avec le principal dirigeant du FLN, Abane Ramdane.
Krim, Boussouf et Ben Tobbal intervinrent alors : " Tu dois te rendre à Rabat ", conseillèrent-ils à Abane.
Abane se laissa convaincre. Une date fut retenue. Quelques jours auparavant, Boussouf, responsable des liaisons, gagna le Maroc pour préparer l’arrivée de son compagnon. Et le 22 décembre 1957, Abane, accompagné de Krim Belkacem et de Mahmoud Chérif, tous deux membres du CCE, s’envolait, à son tour, via l’Espagne.
Trois versions principales existent sur la suite des événements. Elles se recoupent et ne divergent que sur la question du partage de la responsabilité entre Belkacem Krim, Abdelhafid Boussouf et Lakhdar Ben Tobbal, les fameux trois « B » dans l’assassinat de Abane Ramdane.
La première version est celle de Me Ahmed Boumendjel, à l’époque l’un des plus proches collaborateurs d’Abane, qui suivit le développement de la crise au sein du CCE et fit une enquête personnelle sur ce qui se passa au Maroc le 22 décembre 1957.
Krim, Boussouf et Ben Tobbal se sont retrouvés solidaires contre abane, surtout lorsque Abane les menaça de rentrer à l intérieur pour les dénoncer auprès des combattants. De ce jour, ils commencèrent a se réunir sans lui et même sans qu il fut informe. Ils cherchaient le moyen de diminuer son autorité et de l isoler au sein des cercles dirigeants. Mais la personnalité d’Abane, son prestige et son autorité rendaient la chose presque impossible. C est alors que le complot fut trame. Les messages prétendument envoyés du Maroc étaient des faux fabriqués par les services de Boussouf. Les enlèvements de militants FLN par la police marocaine, les refus de transit d’armes et les autres difficultés qu ils montaient en épingle finirent d ailleurs par intriguer Boumendjel, alors adjoint d’Abane au département de l’information.
Pour en avoir le coeur net, il rendit visite à son ami Alami, alors ambassadeur du Maroc à Tunis, et lui dit sa surprise du comportement attribué aux autorités marocaines. Alami tomba des nues : « Je n’ai connaissance d’aucun fait de cet ordre », lui affirma-t-il catégoriquement. « Pourrais-tu en demander confirmation » ? suggéra, pour plus de sûreté, Boumendjel. Alami adressa un télex à Rabat et reçut immédiatement un démenti formel des plus hautes autorités marocaines. Boumendjel, de plus en plus méfiant, fit part de ses craintes à Abane. Mais les services de Boussouf continuant à adresser au CCE des messages de plus en plus pressants, parlant d’une situation aggravée et réclamant l’intervention directe d’Abane, celui-ci, pour éclaircir l’affaire, finit par décider de partir quand même pour le Maroc. Il pensait que, peut-être grossis, les incidents signalés par les télégrammes pouvaient avoir un fond de vérité, même si les autorités marocaines les démentaient officiellement.
Comme il commençait, néanmoins, à perdre un peu confiance en ses trois collègues du CCE, il convint avec un de ses amis demeurés à Tunis, R. G., de lui envoyer un message à l’escale de Madrid si quelque chose lui semblait anormal.
De fait, un message de Madrid parvint à R. G. : selon le code convenu, il signalait des " choses bizarres " remarquées par Abane avant même qu’il fut parvenu à destination.
Quelques heures plus tard, l’avion atterrissait au Maroc. Aussitôt Boussouf, qui l’attendait, mit à exécution la décision prise en commun avec Krim et Ben Tobbal : Abane, conduit dans une villa, y fut étranglé par des hommes de main
Mohamed Lebdjaoui, ami du défunt Abane Ramdane et auteur d’un livre intitulé « Vérités sur la Révolution algérienne », paru en 1986 aux Editions Gallimard, en France a demandé à Belkacem Krim ce qu il pouvait répondre à ces accusations. « Abane, dit-il, faisait un " travail fractionnel " et tentait de dresser aussi bien les maquisards que les militants contre les autres membres du CCE. Plusieurs démarches furent faites auprès de lui pour le convaincre de modifier son attitude. En vain : on constata qu’Abane, loin de se modérer, persistait dans la même voie en aggravant ses attaques.
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