Résister par la parole...et par le cinéma. C'est le credo d'Abdenour Ziani qui, à travers un premier film très dépouillé, transmet des vérités profondes.
Peut-on dire de Fatah qu'il est l'Algérie ? Il en est en tout cas une voix, à la fois lucide, puissante, émouvante, terriblement humaine? et toujours absente des discours officiels. Cet Algérien du peuple, simple artisan maçon, pleure dans le film d'Abdenour Ziani, l'étouffement de la culture, de la poésie et d'une certaine forme d'humanité. Son rêve : que l'on puisse aller au cinéma tous les soirs... dans un pays où le cinéma est étrangement absent. La preuve, le film d'Abdenour Ziani souffre d'un surprenant manque de moyens : « Ce n'est même pas un film d'école » s'excuse-t-il. Mais la densité du témoignage de Fatah permet vite d'oublier cette lacune et de nous transmettre une authentique émotion.
Qui est Fatah ?
Fatah est... un personnage. Il est né en Ardèche, a passé son enfance et son adolescence en France, puis est parti s'installer en Algérie où il est marié et élève cinq enfants. Artisan maçon, il est devenu un homme à tout faire? plein de charisme. Avec un amour immodéré pour le cinéma.
Pourquoi en avoir fait votre personnage principal ?
J'ai toujours été militant. Je me sers du cinéma comme d'une arme. C'est pour moi un prétexte pour poser des problèmes, en discuter? Ici, je voulais rendre hommage aux anonymes d'Algérie, qui résistent dans un quotidien de plus en plus étouffant.
Lorsqu'il se déplace, Fatah égrène les cours du pétrole. Quel en est le sens ?
Pour moi, le pétrole est la vraie malédiction de l'Algérie. Une ressource accaparée par le pouvoir et dont le peuple ne reçoit que les miettes. J'ai toujours pensé que s'il n'y en avait pas, tout irait mieux, car de fait, j'ai constaté que la citoyenneté avait tendance à progresser dans ce pays pendant les périodes de crise. À l'inverse, quand l'argent se remet à couler, il permet au pouvoir de tout acheter, de mettre en place son clientélisme.
Pour autant votre film, très critique, n'a pas été interdit.
D'abord, précisons qu'il est devenu de plus en plus difficile de faire du cinéma dans ce pays. On fait beaucoup moins de films que pendant les années de guerre civile, et ce qui sort actuellement est souvent l'oeuvre d'Algériens de France. Ensuite, il faut savoir qu'il n'existe en Algérie aucune école, publique ou privée, de cinéma, et l'association Cinéma et mémoire, que je préside à Bejaia, ne touche aucune subvention. Elle n'est aidée que par des organismes étrangers. Cela dit, le pouvoir a besoin d'entretenir une contradiction, un semblant de liberté, et des journaux d'opposition sont ainsi maintenus. Pour le cinéma, le contrôle se fait surtout au niveau de la diffusion, des aides, même si la liberté de tourner reste relative : il faut ainsi savoir faire diversion, savoir envoyer une fausse équipe tourner ici, pour pouvoir tourner quasiment clandestinement ailleurs?
Pour Fatah, qui est passé à Oran, Alger et Constantine, j'ai ainsi appris il y a peu... qu'il ne serait pas diffusé en Algérie.
La nouvelle d'une sélection à Clermont-Ferrand en revanche a été une superbe surprise à laquelle je ne m'attendais absolument pas. Et c'est un encouragement pour raconter d'autres histoires.
la montagne.fr
Peut-on dire de Fatah qu'il est l'Algérie ? Il en est en tout cas une voix, à la fois lucide, puissante, émouvante, terriblement humaine? et toujours absente des discours officiels. Cet Algérien du peuple, simple artisan maçon, pleure dans le film d'Abdenour Ziani, l'étouffement de la culture, de la poésie et d'une certaine forme d'humanité. Son rêve : que l'on puisse aller au cinéma tous les soirs... dans un pays où le cinéma est étrangement absent. La preuve, le film d'Abdenour Ziani souffre d'un surprenant manque de moyens : « Ce n'est même pas un film d'école » s'excuse-t-il. Mais la densité du témoignage de Fatah permet vite d'oublier cette lacune et de nous transmettre une authentique émotion.
Qui est Fatah ?
Fatah est... un personnage. Il est né en Ardèche, a passé son enfance et son adolescence en France, puis est parti s'installer en Algérie où il est marié et élève cinq enfants. Artisan maçon, il est devenu un homme à tout faire? plein de charisme. Avec un amour immodéré pour le cinéma.
Pourquoi en avoir fait votre personnage principal ?
J'ai toujours été militant. Je me sers du cinéma comme d'une arme. C'est pour moi un prétexte pour poser des problèmes, en discuter? Ici, je voulais rendre hommage aux anonymes d'Algérie, qui résistent dans un quotidien de plus en plus étouffant.
Lorsqu'il se déplace, Fatah égrène les cours du pétrole. Quel en est le sens ?
Pour moi, le pétrole est la vraie malédiction de l'Algérie. Une ressource accaparée par le pouvoir et dont le peuple ne reçoit que les miettes. J'ai toujours pensé que s'il n'y en avait pas, tout irait mieux, car de fait, j'ai constaté que la citoyenneté avait tendance à progresser dans ce pays pendant les périodes de crise. À l'inverse, quand l'argent se remet à couler, il permet au pouvoir de tout acheter, de mettre en place son clientélisme.
Pour autant votre film, très critique, n'a pas été interdit.
D'abord, précisons qu'il est devenu de plus en plus difficile de faire du cinéma dans ce pays. On fait beaucoup moins de films que pendant les années de guerre civile, et ce qui sort actuellement est souvent l'oeuvre d'Algériens de France. Ensuite, il faut savoir qu'il n'existe en Algérie aucune école, publique ou privée, de cinéma, et l'association Cinéma et mémoire, que je préside à Bejaia, ne touche aucune subvention. Elle n'est aidée que par des organismes étrangers. Cela dit, le pouvoir a besoin d'entretenir une contradiction, un semblant de liberté, et des journaux d'opposition sont ainsi maintenus. Pour le cinéma, le contrôle se fait surtout au niveau de la diffusion, des aides, même si la liberté de tourner reste relative : il faut ainsi savoir faire diversion, savoir envoyer une fausse équipe tourner ici, pour pouvoir tourner quasiment clandestinement ailleurs?
Pour Fatah, qui est passé à Oran, Alger et Constantine, j'ai ainsi appris il y a peu... qu'il ne serait pas diffusé en Algérie.
La nouvelle d'une sélection à Clermont-Ferrand en revanche a été une superbe surprise à laquelle je ne m'attendais absolument pas. Et c'est un encouragement pour raconter d'autres histoires.
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