mardi 2 juin 2009 - par Nadjib Achour
Dans sa préface à la réédition du Jeune Musulman qui était l’organe en langue française de l’association des oulémas, le Docteur Ahmed Taleb Ibrahimi, le fils du Cheikh Bachir El Ibrahimi, invita la jeunesse algérienne à se souvenir du combat de leurs aînés afin dit-il de constater que « la guerre de libération a été précédée d’une longue résistance de leurs pères afin de préserver leurs âmes »[1]. En effet, la colonisation française en Algérie s’attaqua aux fondements même de la personnalité de l’Algérien en le privant de l’exercice de sa langue, de sa religion, car considérées comme les deux principaux obstacles à la politique de francisation.
Face à cette logique de destruction culturelle du colonisé, des voix s’élevèrent et la résistance s’organisa. Celle-ci fut à ses débuts timides, peu nombreux étaient ceux qui parlaient d’Algérie musulmane, de renaissance de la culture Arabe. Il y eu bien sur l’action des chouyoukhs Ben Smaya, El Medjaoui, Ben Zekri, celle du polémiste Omar Racim, qui se firent les ardents propagandistes des thèses réformistes, et ce bien avant la première guerre mondiale. Mais il fallut attendre le Cheikh Ben Badis pour voir véritablement la doctrine islahiste prendre corps, doctrine qu’il marquera de son sceau et ancrera dans les consciences algériennes, en lui insufflant un esprit patriotique qui lui faisait défaut jusqu’à alors.
Il fut épaulé dans son action de renaissance civilisationnelle du peuple algérien par diverses personnalités, dont la plus importance fut sans conteste, le Cheikh Mohamed Bachir El Ibrahimi. Celui-ci fut l’homme de la transition, de la mutation de l’association des Oulémas, qu’il présida après la disparition du Cheikh Ben Badis, et qu’il orienta vers une posture politique beaucoup plus marquée tranchant avec celle hésitante des débuts. Il réussit à préserver l’héritage badisien, à le capitaliser, à l’ériger en crédo idéologique qui influença de façon définitive le nationalisme algérien.
La répartition des tâches au sein de la mouvance réformiste orchestrée par Ben Badis conféra au Cheikh Ibrahimi l’important rôle de régénérateur de l’Arabiyya. Il fut pour l’Algérie comme l’écrit Ali Mérad « le sommet de la culture nationale arabe »[2]. Ainsi, dans le sillon idéologique tracée par Ben Badis, il se fit l’un des plus ardents défenseurs de la personnalité algérienne reposant sur l’Islam et l’arabité, dont il politisa les enjeux jusqu’à la fin de sa vie.
Le Cheikh Bachir El Ibrahimi naquit en 1889 au douar Ouled Braham, d’où son nom, dans la commune mixte des Rirha située dans le département de Constantine. Il étudia l’Arabe à la zaouïa Chellata en Petite-Kabylie. Celle-ci était dirigée par une puissante famille maraboutique, les Benaly Chérif. Vers 1911, il partit à Médine rejoindre son père, qui un an auparavant avait quitté l’Algérie suite à ses démêlés avec l’administration coloniale. A cette époque, nombreux sont les Algériens qui par vagues successives émigrèrent vers le Machreq.
Ils étaient mus comme l’écrit l’historien Charles Robert Ageron par « cette volonté de vivre et de mourir sous un gouvernement musulman »[3] ne supportant plus les rigueurs du régime colonial français qui s’était acharné à détruire tous les foyers de culture arabo-islamique. L’exil était alors perçu comme le meilleur moyen de préserver son identité culturelle bafouée. Les Algériens par fidélité à la mémoire de l’Emir Abdel Kader s’installèrent en Syrie, d’autres dans l’imitation de la gestuelle prophétique s’en allèrent à Médine.
La ville Sainte abritait en son sein, un nombre non négligeable d’exilés algériens. Le maître de Ben Badis, le Cheikh Hamdan Lounissi y vint pour terminer ses jours, le Cheikh Tayeb El Okbi, dont la famille avait également prit le chemin de l’exil, y débuta sa carrière de prédicateur et de journaliste. Quant au Cheikh Bachir El Ibrahimi, il fut durant toute la phase médinoise de son exil, étudiant, puis enseignant à la grande mosquée de la ville, c’est là qu’il se familiarisa avec la pensée d’El Afghani et Abdou. C’est en 1913 qu’il fit la connaissance du Cheikh Ben Badis, venu à la Mecque en pèlerinage.
De leurs discussions naquit l’idée d’un projet qu’ils se promirent de réaliser dès leur retour en Algérie. Par la suite, il prit le chemin de Damas, où l’attendait son père. Nous savons par le biais des écrits d’Ali Mérad et de Taleb Ibrahimi, qu’il fut nommé professeur à Maktab Anbar, premier lycée moderne de Syrie. Il fut conférencier dans les cercles panarabes, notamment le Nadi El Arabi animé par Abderahmane Chahbandar, et il se lia aux milieux inspirés par Rachid Rida. L’occupation de la Syrie par les français, qu’il avait fuis, aux lendemains de la Grande Guerre, le poussa à rentrer en Algérie en 1920.
Dans sa préface à la réédition du Jeune Musulman qui était l’organe en langue française de l’association des oulémas, le Docteur Ahmed Taleb Ibrahimi, le fils du Cheikh Bachir El Ibrahimi, invita la jeunesse algérienne à se souvenir du combat de leurs aînés afin dit-il de constater que « la guerre de libération a été précédée d’une longue résistance de leurs pères afin de préserver leurs âmes »[1]. En effet, la colonisation française en Algérie s’attaqua aux fondements même de la personnalité de l’Algérien en le privant de l’exercice de sa langue, de sa religion, car considérées comme les deux principaux obstacles à la politique de francisation.
Face à cette logique de destruction culturelle du colonisé, des voix s’élevèrent et la résistance s’organisa. Celle-ci fut à ses débuts timides, peu nombreux étaient ceux qui parlaient d’Algérie musulmane, de renaissance de la culture Arabe. Il y eu bien sur l’action des chouyoukhs Ben Smaya, El Medjaoui, Ben Zekri, celle du polémiste Omar Racim, qui se firent les ardents propagandistes des thèses réformistes, et ce bien avant la première guerre mondiale. Mais il fallut attendre le Cheikh Ben Badis pour voir véritablement la doctrine islahiste prendre corps, doctrine qu’il marquera de son sceau et ancrera dans les consciences algériennes, en lui insufflant un esprit patriotique qui lui faisait défaut jusqu’à alors.
Il fut épaulé dans son action de renaissance civilisationnelle du peuple algérien par diverses personnalités, dont la plus importance fut sans conteste, le Cheikh Mohamed Bachir El Ibrahimi. Celui-ci fut l’homme de la transition, de la mutation de l’association des Oulémas, qu’il présida après la disparition du Cheikh Ben Badis, et qu’il orienta vers une posture politique beaucoup plus marquée tranchant avec celle hésitante des débuts. Il réussit à préserver l’héritage badisien, à le capitaliser, à l’ériger en crédo idéologique qui influença de façon définitive le nationalisme algérien.
La répartition des tâches au sein de la mouvance réformiste orchestrée par Ben Badis conféra au Cheikh Ibrahimi l’important rôle de régénérateur de l’Arabiyya. Il fut pour l’Algérie comme l’écrit Ali Mérad « le sommet de la culture nationale arabe »[2]. Ainsi, dans le sillon idéologique tracée par Ben Badis, il se fit l’un des plus ardents défenseurs de la personnalité algérienne reposant sur l’Islam et l’arabité, dont il politisa les enjeux jusqu’à la fin de sa vie.
Le Cheikh Bachir El Ibrahimi naquit en 1889 au douar Ouled Braham, d’où son nom, dans la commune mixte des Rirha située dans le département de Constantine. Il étudia l’Arabe à la zaouïa Chellata en Petite-Kabylie. Celle-ci était dirigée par une puissante famille maraboutique, les Benaly Chérif. Vers 1911, il partit à Médine rejoindre son père, qui un an auparavant avait quitté l’Algérie suite à ses démêlés avec l’administration coloniale. A cette époque, nombreux sont les Algériens qui par vagues successives émigrèrent vers le Machreq.
Ils étaient mus comme l’écrit l’historien Charles Robert Ageron par « cette volonté de vivre et de mourir sous un gouvernement musulman »[3] ne supportant plus les rigueurs du régime colonial français qui s’était acharné à détruire tous les foyers de culture arabo-islamique. L’exil était alors perçu comme le meilleur moyen de préserver son identité culturelle bafouée. Les Algériens par fidélité à la mémoire de l’Emir Abdel Kader s’installèrent en Syrie, d’autres dans l’imitation de la gestuelle prophétique s’en allèrent à Médine.
La ville Sainte abritait en son sein, un nombre non négligeable d’exilés algériens. Le maître de Ben Badis, le Cheikh Hamdan Lounissi y vint pour terminer ses jours, le Cheikh Tayeb El Okbi, dont la famille avait également prit le chemin de l’exil, y débuta sa carrière de prédicateur et de journaliste. Quant au Cheikh Bachir El Ibrahimi, il fut durant toute la phase médinoise de son exil, étudiant, puis enseignant à la grande mosquée de la ville, c’est là qu’il se familiarisa avec la pensée d’El Afghani et Abdou. C’est en 1913 qu’il fit la connaissance du Cheikh Ben Badis, venu à la Mecque en pèlerinage.
De leurs discussions naquit l’idée d’un projet qu’ils se promirent de réaliser dès leur retour en Algérie. Par la suite, il prit le chemin de Damas, où l’attendait son père. Nous savons par le biais des écrits d’Ali Mérad et de Taleb Ibrahimi, qu’il fut nommé professeur à Maktab Anbar, premier lycée moderne de Syrie. Il fut conférencier dans les cercles panarabes, notamment le Nadi El Arabi animé par Abderahmane Chahbandar, et il se lia aux milieux inspirés par Rachid Rida. L’occupation de la Syrie par les français, qu’il avait fuis, aux lendemains de la Grande Guerre, le poussa à rentrer en Algérie en 1920.
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