Le paysage littéraire algérien est, en ce début du 21e siècle, incontestablement riche de la diversité de ses horizons, de l’éventail de ses styles, de la pluralité de ses thématiques et de la gamme de ses langues d’expression. Les études et les critiques littéraires nous apprendront dans quelques années si vraiment la relève de la génération de la guerre de libération nationale est assurée.
Cela ne pourra se faire que par des moyens académiques (université, revues littéraires spécialisées, séminaires, …) seuls à même de juger l’impact et l’importance des œuvres, jauger les décantations qui se feront dans un domaine où les auteurs faussaires disputent la vedette aux écrivains authentiques et dégager les tendances lourdes des écrits algériens qui s’expriment en arabe, en français et en berbère.
Dans l’univers esthétique des lettres algériennes, la puissance et la prégnance des pères fondateurs de la littérature moderne ne cessent d’exercer leur influence sur les lecteurs d’aujourd’hui et les auteurs en herbe au point de recouvrir d’une ombre gênante la génération des écrivains de l’après-indépendance. En effet, Mammeri, Feraoun, Kateb et Dib jouent, dans ce cas de figure, le rôle de mythe fondateur. La renommée et le mérite de ces pères ne sont pas surfaites. Ils ont participé par la plume à l’éveil de la société algérienne écrasée par un ordre colonial inique.
Les écrivains qui ont écrit après 1962 ont essayé d’exprimer les nouvelles préoccupations des Algériens liées aux nouvelles réalités politiques et sociales induites par la gestion autocratique et clientéliste du pays sous le règne d’un ‘’socialisme de caserne’’. Mimouni, Djaout, Rabah Belamri, Mouloud Achour et beaucoup d’autres encore ont pu donner un souffle nouveau à la littérature algérienne écrite en français et ce malgré les clivages et l’ostracisme secrétés par la tendance arabo-baâthiste du pouvoir.
Ce n’est pas sans surprise que de jeunes auteurs se sont imposés au milieu de la tourmente de la subversion islamiste. Autour de la revue ‘’Algérie/Littérature-Action’’, éditée en France par Aïssa Khelladi, se sont regroupés certains écrivains, à l’image de Aziz Chouaki, et ont redonné une autre vigueur à l’acte d’écrire en se situant dans le nouveau contexte fait de peur et d’inquisition, mais aussi de courage et de résistance. D’autres écrivains, issus d’horizons divers, ont pu aussi s’imposer sur la scène d’une façon inattendue : Boualem Sensal, fonctionnaire dans l’Industrie, Yasmina Khadra, ancien officier de l’ANP, Arezki Metref, journaliste, Salim Bachi, jeune auteur émigré…ont pu avoir les suffrages des lecteurs, du moins du peu de lecteurs qui restent encore en Algérie.
Pour un répertoire exhaustif du produit littéraire
La tradition établie dans les pays européens à riche parcours culturel et littéraire fait procéder à des inventaires périodiques des œuvres de l’esprit et de leurs auteurs. Les encyclopédies et des almanachs ont accompagné la production littéraire d’une façon instantanée ou, le plus souvent, après les grandes décantations des idées et des œuvres réalisées par les organes de la critique (universités, revues littéraires) et …le travail du temps.
Après avoir pendant longtemps figuré dans les répertoires des gens célèbres (hommes d’Etat, hommes de science, musiciens,…), les écrivains ont eu de plus en plus droit à des brochures spécifiques évoluant en véritables dictionnaires presque complets.
Les technologies de la communication moderne ont permis de faire un bond qualitatif en démocratisant l’accès à l’information par le moyen de l’informatique et d’Internet devenus à la portée d’un grand nombre de personnes à travers le monde.
Pour ce qui est de la littérature algérienne, le travail d’inventaire n’a commencé à se faire d’une manière élaborée qu’au début des années 1980 avec le rassemblement des notes biographiques et bibliographiques réalisées par Jean Déjeux.
Premières esquisses
Pourtant, de louables tentatives à caractère didactique ont été réalisées au cours des années soixante aboutissant à des ouvrages qui font la part belle aux extraits d’auteurs ; la biographie de ces derniers étant réduite à la portion congrue par une espèce d’inexplicable ‘’pudeur’’. Il est tout à fait vrai que les auteurs eux-mêmes ont été trop discrets quant aux faits relatifs à leur vie personnelle. Parmi ces productions, nous retrouvons le livre de Denise Barrat intitulé ‘’Espoir et parole’’ publié en 1963 chez Seghers. C’est un recueil de textes poétiques d’auteurs algériens sorti une année après l’indépendance. Subdivisé en thèmes (réalité, guerre, torture, prison, souvenir, liberté), ce livre de 253 pages ne réserve à la vie des auteurs que quelques mots formant généralement une ligne. Mais, par rapport à l’époque où le travail fut réalisé, c’était déjà une avancée notable que de voir réunis dans un même opuscule des poèmes d’auteurs algériens qui étaient écrasés par l’anonymat ou même l’interdiction inhérents au système colonial.
Un autre célèbre ouvrage parut aux éditions ‘’Hachette’’ en 1965 sous le titre ‘’Anthologie maghrébine’’. Réalisé par le Centre pédagogique maghrébin, cette anthologie se positionne sciemment dans une perspective spatio-temporelle assez originale, mais très pertinente. Il s’agit de l’espace maghrébin en tant que terreau culturel commun y compris dans sa diversité et du repère Temps qui s’enfonce dans l’Antiquité bérbéro-romaine et qui remonte jusqu’aux écrits modernes. Sur 190 pages, se déroulent des extraits de Tertullien, Saint Augustin, l’Émir Abdelkader, Si Muh U M’hand, Averroès, Ibn Khaldoun, Léon l’Africain, Jean Amrouche, Mouloud Feraoun, Driss Chraïbi, Rachad Hamzaoui et des anonymes.
‘’Par-delà les langages, par-delà les confessions, à travers les siècles, des valeurs, des attitudes, une forme même se retrouvent, au fil des œuvres, avec les modulations inhérentes à la nature et au talent des hommes’’, écrivent les auteurs de l’anthologie. ‘’Un lien s’est renoué entre la tradition et le devenir, qui nous permet de confronter les éléments d’une littérature originale, observatrice et minutieuse, mais aussi déchaînée, hallucinée, passionnée et palpitante ; d’une littérature qui nous apparaît à la fois très proche de la sensation instinctive, liée à la terre comme tout ce qui sort de l’Afrique, et en même temps très savante dans ses formes, par l’intensité de ses images et par l’usage des mots. C’est cette permanence que nous trouverons en filigrane dans les extraits cités ici qui constitue l’originalité propre de la littérature maghrébine’’.
Cela ne pourra se faire que par des moyens académiques (université, revues littéraires spécialisées, séminaires, …) seuls à même de juger l’impact et l’importance des œuvres, jauger les décantations qui se feront dans un domaine où les auteurs faussaires disputent la vedette aux écrivains authentiques et dégager les tendances lourdes des écrits algériens qui s’expriment en arabe, en français et en berbère.
Dans l’univers esthétique des lettres algériennes, la puissance et la prégnance des pères fondateurs de la littérature moderne ne cessent d’exercer leur influence sur les lecteurs d’aujourd’hui et les auteurs en herbe au point de recouvrir d’une ombre gênante la génération des écrivains de l’après-indépendance. En effet, Mammeri, Feraoun, Kateb et Dib jouent, dans ce cas de figure, le rôle de mythe fondateur. La renommée et le mérite de ces pères ne sont pas surfaites. Ils ont participé par la plume à l’éveil de la société algérienne écrasée par un ordre colonial inique.
Les écrivains qui ont écrit après 1962 ont essayé d’exprimer les nouvelles préoccupations des Algériens liées aux nouvelles réalités politiques et sociales induites par la gestion autocratique et clientéliste du pays sous le règne d’un ‘’socialisme de caserne’’. Mimouni, Djaout, Rabah Belamri, Mouloud Achour et beaucoup d’autres encore ont pu donner un souffle nouveau à la littérature algérienne écrite en français et ce malgré les clivages et l’ostracisme secrétés par la tendance arabo-baâthiste du pouvoir.
Ce n’est pas sans surprise que de jeunes auteurs se sont imposés au milieu de la tourmente de la subversion islamiste. Autour de la revue ‘’Algérie/Littérature-Action’’, éditée en France par Aïssa Khelladi, se sont regroupés certains écrivains, à l’image de Aziz Chouaki, et ont redonné une autre vigueur à l’acte d’écrire en se situant dans le nouveau contexte fait de peur et d’inquisition, mais aussi de courage et de résistance. D’autres écrivains, issus d’horizons divers, ont pu aussi s’imposer sur la scène d’une façon inattendue : Boualem Sensal, fonctionnaire dans l’Industrie, Yasmina Khadra, ancien officier de l’ANP, Arezki Metref, journaliste, Salim Bachi, jeune auteur émigré…ont pu avoir les suffrages des lecteurs, du moins du peu de lecteurs qui restent encore en Algérie.
Pour un répertoire exhaustif du produit littéraire
La tradition établie dans les pays européens à riche parcours culturel et littéraire fait procéder à des inventaires périodiques des œuvres de l’esprit et de leurs auteurs. Les encyclopédies et des almanachs ont accompagné la production littéraire d’une façon instantanée ou, le plus souvent, après les grandes décantations des idées et des œuvres réalisées par les organes de la critique (universités, revues littéraires) et …le travail du temps.
Après avoir pendant longtemps figuré dans les répertoires des gens célèbres (hommes d’Etat, hommes de science, musiciens,…), les écrivains ont eu de plus en plus droit à des brochures spécifiques évoluant en véritables dictionnaires presque complets.
Les technologies de la communication moderne ont permis de faire un bond qualitatif en démocratisant l’accès à l’information par le moyen de l’informatique et d’Internet devenus à la portée d’un grand nombre de personnes à travers le monde.
Pour ce qui est de la littérature algérienne, le travail d’inventaire n’a commencé à se faire d’une manière élaborée qu’au début des années 1980 avec le rassemblement des notes biographiques et bibliographiques réalisées par Jean Déjeux.
Premières esquisses
Pourtant, de louables tentatives à caractère didactique ont été réalisées au cours des années soixante aboutissant à des ouvrages qui font la part belle aux extraits d’auteurs ; la biographie de ces derniers étant réduite à la portion congrue par une espèce d’inexplicable ‘’pudeur’’. Il est tout à fait vrai que les auteurs eux-mêmes ont été trop discrets quant aux faits relatifs à leur vie personnelle. Parmi ces productions, nous retrouvons le livre de Denise Barrat intitulé ‘’Espoir et parole’’ publié en 1963 chez Seghers. C’est un recueil de textes poétiques d’auteurs algériens sorti une année après l’indépendance. Subdivisé en thèmes (réalité, guerre, torture, prison, souvenir, liberté), ce livre de 253 pages ne réserve à la vie des auteurs que quelques mots formant généralement une ligne. Mais, par rapport à l’époque où le travail fut réalisé, c’était déjà une avancée notable que de voir réunis dans un même opuscule des poèmes d’auteurs algériens qui étaient écrasés par l’anonymat ou même l’interdiction inhérents au système colonial.
Un autre célèbre ouvrage parut aux éditions ‘’Hachette’’ en 1965 sous le titre ‘’Anthologie maghrébine’’. Réalisé par le Centre pédagogique maghrébin, cette anthologie se positionne sciemment dans une perspective spatio-temporelle assez originale, mais très pertinente. Il s’agit de l’espace maghrébin en tant que terreau culturel commun y compris dans sa diversité et du repère Temps qui s’enfonce dans l’Antiquité bérbéro-romaine et qui remonte jusqu’aux écrits modernes. Sur 190 pages, se déroulent des extraits de Tertullien, Saint Augustin, l’Émir Abdelkader, Si Muh U M’hand, Averroès, Ibn Khaldoun, Léon l’Africain, Jean Amrouche, Mouloud Feraoun, Driss Chraïbi, Rachad Hamzaoui et des anonymes.
‘’Par-delà les langages, par-delà les confessions, à travers les siècles, des valeurs, des attitudes, une forme même se retrouvent, au fil des œuvres, avec les modulations inhérentes à la nature et au talent des hommes’’, écrivent les auteurs de l’anthologie. ‘’Un lien s’est renoué entre la tradition et le devenir, qui nous permet de confronter les éléments d’une littérature originale, observatrice et minutieuse, mais aussi déchaînée, hallucinée, passionnée et palpitante ; d’une littérature qui nous apparaît à la fois très proche de la sensation instinctive, liée à la terre comme tout ce qui sort de l’Afrique, et en même temps très savante dans ses formes, par l’intensité de ses images et par l’usage des mots. C’est cette permanence que nous trouverons en filigrane dans les extraits cités ici qui constitue l’originalité propre de la littérature maghrébine’’.

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