"Que reste-t-il des traditions de nos fêtes?" Cette question mérite d'être posée car c'est un sujet qui anime de plus en plus les discussions notamment dans nos villages, sur les places ainsi que dans tous les lieux publics. Cela devient de plus en plus inquiétant de voir que des coutumes, des rites liés à ces moments de joie et de convivialité disparaître l'un après l'autre.
Certes, le nombre de fêtes notamment les mariages est si important qu'on oublie même les jours de semaine parce qu'ils sont programmés tous les jours. Mais il faut souligner que le charme d’antan manque. A commencer par ces DJ qui ont envahi nos villages.
DJ, musique à hauts décibels, la quiétude des personnes transgressée ?
"Vous voyez, on n'a presque pas une nuit pour dormir. Il y a des familles qui se permettent de mettre en branle cette machine endiablée durant une semaine entière sans savoir qu'il y a des malades, des bébés, des personnes âgées. C'est incroyable. C’est à croire que ces gens le font exprès", s'est interrogée une personne âgée. Ces paroles, on les entend partout. Mais, qui mettrait un terme à ce geste que d'aucuns considèrent comme une pollution sonore ? La question est destinée tout d'abord aux pouvoirs publics. "Il faudrait que les maires prennent des décisions dans ce sens. Ils ont quand même la prérogative de signer un décret municipal interdisant ces DJ dès minuit. Les comités de village ont eux aussi la possibilité d'introduire dans leur règlement intérieur une loi pénalisant ceux qui persistent dans cette pratique", estime un professeur de collège à Draâ El Mizan ville. Et puis, ne perdons pas de vue que les styles de musique diffusés avec des baffles assourdissantes n'ont rien à voir avec notre culture. Souvent, c'est du rai ou des reprises que certains chanteurs qui ne se soucient guère de défigurer.
Et les cortèges?
Là, il y a beaucoup à dire. Si dans nos traditions, le cortège nuptial d'antan ne se limitait qu'à quatre femmes au maximum et à des dizaines d'hommes, choisis parmi les plus robustes pour diverses raisons, aujourd'hui beaucoup de femmes et d'enfants constituent nos cortèges. "Je me souviens quand je m'étais marié à la fin des années quarante, il n'y avait dans le cortège que mes deux tantes et tous les hommes de notre tribu. Pendant ce temps là, les hommes étaient en force pour faire face aux agressions et à beaucoup de choses. Et puis, la mariée était juchée à dos de mulet. Aujourd'hui, si par malheur quelque chose arrivait en cours de route, qui riposterait? Les enfants? Les femmes? Vraiment, c'est un monde à l'envers", a préféré nous répondre un octogénaire au village de Tafoughalt dans la commune d'Ath Yahia Moussa. Combien de malheurs sont arrivés au cours de cortèges alors que la mariée n'était même pas encore arrivée au domicile de son mari.
Beaucoup d'accidents s’y produisent
Des jeunes au volant de voitures luxueuses se permettent tout. Ils conduisent n'importe comment: vitesse excessive, zigzags sur les routes..."On dirait qu'ils font du rallye", commente un quinquagénaire. Beaucoup de personnes sont contre ces cortèges mal guidés. Il y a même ceux qui recommandent de limiter le nombre de voitures.
Robe blanche pour la mariée et costume trois pièces pour le marié
Là encore, c'est un autre pan de notre culture qui s'en va. Si autrefois, le marié est complètement recouvert d'un burnous blanc dont les significations sont assez nombreuses pour ne pas toutes les évoquer, aujourd’hui, il ne porte que le costume trois pièces. Tradition qui n'est pas la nôtre. Abernous, est chanté par tous les anciens. Abernous, est une valeur culturelle. Le costume, c'est quoi? C'est un signe de civilisation ? Alors, ce n'est pas fait pour nos fêtes. Car, Abernous est la symbolique que le marié offre une sécurité à sa future moitié. Robe blanche à la place de la robe kabyle et amendil. Dans les temps anciens, personne ne peut voir le visage de la mariée. D'ailleurs, on dit chez nous qu'elle porte Azelum (un voile rouge) qui lui couvre le visage. Elle ne se dévoilera que le lendemain après la nuit des noces et le troisième jour quand elle ira remplir sa cruche à la fontaine du village. Hélas, nous dit cet octogénaire, tout a disparu. "Vous les voyez passer toutes maquillées, toutes coiffées et découvertes au regard de tous les passants. Où est la dignité de l'homme et de la femme kabyles?", s'est-il demandé.
Et le couscous?
Quand quelqu'un vous invite à la fête. Il vous dira de venir manger du couscous. Malheureusement, ce n'est plus le cas aujourd'hui", nous a répondu un autre interlocuteur à ce sujet. Et de nous expliquer : "J'étais vraiment étonné d'entendre le serveur me demander si je prenais des frites, des haricots verts ou du riz. J'ai failli quitter les lieux. C'est vraiment très malheureux et décevant de voir qu'un pan entier de notre culture est mis de côté pour le remplacer par des valeurs qui n'ont rien à voir avec nous les Kabyles. Pour moi, une fête sans couscous, ce n'est plus une fête", rétorque un Kabyle venu de Bab El Oued, lui qui croyait trouver un plat de couscous. Mais ce qui fait réagir plus d'un, est ce morceau de viande. Désormais, ce dernier est servi dans une pochette. Si certains pensent que c'est plus hygiénique, d'autres disent le contraire. "Vraiment, c'est un manque de considération pour l'invité ou au mieux une insulte", nous a répondu sèchement un directeur d'un collège à Tizi-Gheniff. Comme lui, ils sont nombreux à approuver cette réponse. Et quelqu'un de nous raconter ce qui s'est passé dans une fête dans un village de la région de Draâ El-Mizan. "J'ai assisté dernièrement à une scène qui m'enlèvera le goût d’aller à une fête. Un invité a pris un sachet. En l'ouvrant, il découvre dedans un os. Etonné, il réclame à la personne qui l'a servi de le lui changer", s'arrête de nous dire cette personne avant de continuer la suite. "C'est votre chance", réponse sèche du serveur. Sur ce, l'invité prit l'os et le jeta dans un buisson tout proche du domicile où se déroulait la fête. "Voilà, ma chance. Elle est dans ce buisson", réagit-il avant de laisser son assiette et partir. Une autre personne ayant réagi à cette façon de distribuer ce petit morceau de viande trouve qu'il vaut mieux ne pas donner de viande que de se moquer des invités. Il faudrait, là aussi, reprendre nos traditions. "Je crois qu'il est temps aux comités de village d'imposer aux citoyens de ne plus servir par exemple ni de Frik, ni d'hors-d'oeuvre ni de dessert. Il faudrait se limiter seulement au couscous. C'est plus original", tel est l'avis d'un autre intervenant à ce sujet. Alors que d'autres sont carrément pour cet "emballage". "Vous savez ces dernières années, il y a trop d'intoxications alimentaires. Il faudrait quand même réfléchir à ça. Mettre la viande dans des sachets permet d'éviter ces maladies. C'est très propre. Je ne vois pas pourquoi m'y opposer. On est quand même au 21e siècle. Avant, il n'y avait pas de moyens, c'est tout", tel est l'avis de ce médecin. En définitif, même s'il y a des avis différents sur tout ce qui touche aux fêtes kabyles, il est important tout de même de retenir que la peur a changé de camp quand on sait que durant une décennie entière on n'entendait même pas de youyous, ni de musique dans nos villes, nos douars et villages. Tant mieux en dépit de tout ce que pensent les uns ou les autres.
Amar Ouramdane depêche de kabylie
Certes, le nombre de fêtes notamment les mariages est si important qu'on oublie même les jours de semaine parce qu'ils sont programmés tous les jours. Mais il faut souligner que le charme d’antan manque. A commencer par ces DJ qui ont envahi nos villages.
DJ, musique à hauts décibels, la quiétude des personnes transgressée ?
"Vous voyez, on n'a presque pas une nuit pour dormir. Il y a des familles qui se permettent de mettre en branle cette machine endiablée durant une semaine entière sans savoir qu'il y a des malades, des bébés, des personnes âgées. C'est incroyable. C’est à croire que ces gens le font exprès", s'est interrogée une personne âgée. Ces paroles, on les entend partout. Mais, qui mettrait un terme à ce geste que d'aucuns considèrent comme une pollution sonore ? La question est destinée tout d'abord aux pouvoirs publics. "Il faudrait que les maires prennent des décisions dans ce sens. Ils ont quand même la prérogative de signer un décret municipal interdisant ces DJ dès minuit. Les comités de village ont eux aussi la possibilité d'introduire dans leur règlement intérieur une loi pénalisant ceux qui persistent dans cette pratique", estime un professeur de collège à Draâ El Mizan ville. Et puis, ne perdons pas de vue que les styles de musique diffusés avec des baffles assourdissantes n'ont rien à voir avec notre culture. Souvent, c'est du rai ou des reprises que certains chanteurs qui ne se soucient guère de défigurer.
Et les cortèges?
Là, il y a beaucoup à dire. Si dans nos traditions, le cortège nuptial d'antan ne se limitait qu'à quatre femmes au maximum et à des dizaines d'hommes, choisis parmi les plus robustes pour diverses raisons, aujourd'hui beaucoup de femmes et d'enfants constituent nos cortèges. "Je me souviens quand je m'étais marié à la fin des années quarante, il n'y avait dans le cortège que mes deux tantes et tous les hommes de notre tribu. Pendant ce temps là, les hommes étaient en force pour faire face aux agressions et à beaucoup de choses. Et puis, la mariée était juchée à dos de mulet. Aujourd'hui, si par malheur quelque chose arrivait en cours de route, qui riposterait? Les enfants? Les femmes? Vraiment, c'est un monde à l'envers", a préféré nous répondre un octogénaire au village de Tafoughalt dans la commune d'Ath Yahia Moussa. Combien de malheurs sont arrivés au cours de cortèges alors que la mariée n'était même pas encore arrivée au domicile de son mari.
Beaucoup d'accidents s’y produisent
Des jeunes au volant de voitures luxueuses se permettent tout. Ils conduisent n'importe comment: vitesse excessive, zigzags sur les routes..."On dirait qu'ils font du rallye", commente un quinquagénaire. Beaucoup de personnes sont contre ces cortèges mal guidés. Il y a même ceux qui recommandent de limiter le nombre de voitures.
Robe blanche pour la mariée et costume trois pièces pour le marié
Là encore, c'est un autre pan de notre culture qui s'en va. Si autrefois, le marié est complètement recouvert d'un burnous blanc dont les significations sont assez nombreuses pour ne pas toutes les évoquer, aujourd’hui, il ne porte que le costume trois pièces. Tradition qui n'est pas la nôtre. Abernous, est chanté par tous les anciens. Abernous, est une valeur culturelle. Le costume, c'est quoi? C'est un signe de civilisation ? Alors, ce n'est pas fait pour nos fêtes. Car, Abernous est la symbolique que le marié offre une sécurité à sa future moitié. Robe blanche à la place de la robe kabyle et amendil. Dans les temps anciens, personne ne peut voir le visage de la mariée. D'ailleurs, on dit chez nous qu'elle porte Azelum (un voile rouge) qui lui couvre le visage. Elle ne se dévoilera que le lendemain après la nuit des noces et le troisième jour quand elle ira remplir sa cruche à la fontaine du village. Hélas, nous dit cet octogénaire, tout a disparu. "Vous les voyez passer toutes maquillées, toutes coiffées et découvertes au regard de tous les passants. Où est la dignité de l'homme et de la femme kabyles?", s'est-il demandé.
Et le couscous?
Quand quelqu'un vous invite à la fête. Il vous dira de venir manger du couscous. Malheureusement, ce n'est plus le cas aujourd'hui", nous a répondu un autre interlocuteur à ce sujet. Et de nous expliquer : "J'étais vraiment étonné d'entendre le serveur me demander si je prenais des frites, des haricots verts ou du riz. J'ai failli quitter les lieux. C'est vraiment très malheureux et décevant de voir qu'un pan entier de notre culture est mis de côté pour le remplacer par des valeurs qui n'ont rien à voir avec nous les Kabyles. Pour moi, une fête sans couscous, ce n'est plus une fête", rétorque un Kabyle venu de Bab El Oued, lui qui croyait trouver un plat de couscous. Mais ce qui fait réagir plus d'un, est ce morceau de viande. Désormais, ce dernier est servi dans une pochette. Si certains pensent que c'est plus hygiénique, d'autres disent le contraire. "Vraiment, c'est un manque de considération pour l'invité ou au mieux une insulte", nous a répondu sèchement un directeur d'un collège à Tizi-Gheniff. Comme lui, ils sont nombreux à approuver cette réponse. Et quelqu'un de nous raconter ce qui s'est passé dans une fête dans un village de la région de Draâ El-Mizan. "J'ai assisté dernièrement à une scène qui m'enlèvera le goût d’aller à une fête. Un invité a pris un sachet. En l'ouvrant, il découvre dedans un os. Etonné, il réclame à la personne qui l'a servi de le lui changer", s'arrête de nous dire cette personne avant de continuer la suite. "C'est votre chance", réponse sèche du serveur. Sur ce, l'invité prit l'os et le jeta dans un buisson tout proche du domicile où se déroulait la fête. "Voilà, ma chance. Elle est dans ce buisson", réagit-il avant de laisser son assiette et partir. Une autre personne ayant réagi à cette façon de distribuer ce petit morceau de viande trouve qu'il vaut mieux ne pas donner de viande que de se moquer des invités. Il faudrait, là aussi, reprendre nos traditions. "Je crois qu'il est temps aux comités de village d'imposer aux citoyens de ne plus servir par exemple ni de Frik, ni d'hors-d'oeuvre ni de dessert. Il faudrait se limiter seulement au couscous. C'est plus original", tel est l'avis d'un autre intervenant à ce sujet. Alors que d'autres sont carrément pour cet "emballage". "Vous savez ces dernières années, il y a trop d'intoxications alimentaires. Il faudrait quand même réfléchir à ça. Mettre la viande dans des sachets permet d'éviter ces maladies. C'est très propre. Je ne vois pas pourquoi m'y opposer. On est quand même au 21e siècle. Avant, il n'y avait pas de moyens, c'est tout", tel est l'avis de ce médecin. En définitif, même s'il y a des avis différents sur tout ce qui touche aux fêtes kabyles, il est important tout de même de retenir que la peur a changé de camp quand on sait que durant une décennie entière on n'entendait même pas de youyous, ni de musique dans nos villes, nos douars et villages. Tant mieux en dépit de tout ce que pensent les uns ou les autres.
Amar Ouramdane depêche de kabylie
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