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Ayoub Kader.caricaturiste : je suis menacé par la mafia religieuse

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  • Ayoub Kader.caricaturiste : je suis menacé par la mafia religieuse

    youb Kader, illustre caricaturiste d'El Khabar, est un artiste peu médiatique. Mais il s'est confié à El Watan Week-end. Le verbe est, comme le trait, sans concession.

    -Vous exposez depuis le début du mois de janvier 2013 au niveau du siège de l’agence New Press à la maison de la presse Tahar Djaout, à Alger. Comment cette exposition a-t-elle été préparée ?


    C’est une exposition organisée par Wahab Habbat (responsable de l’agence New Press, ndlr) pour le Média Club. C’est une manière pour lui de me rendre hommage. Il m’a contacté pour préparer des dessins. Il a décidé de l'organiser à la maison de la presse Tahar Djaout, destinée surtout aux gens de la corporation. J’ai hésité au départ, mais j’ai fini par accepter. Le geste amical et généreux de Wahab m’a beaucoup touché. J’avoue que je ne m’intéresse plus aux expositions. Je suis quelque peu dépassé. Et je vous avoue : j’en ai assez ! J’ai reçu des menaces de certains extrémistes, j’évite donc de plus en plus d’apparaître en public. Dans les années 1990, les années du terrorisme, je me déplaçais à l’intérieur du pays. J’ai participé à des expositions dans plusieurs wilayas. J’ai arrêté tout cela.

    -Des menaces de quel genre ?

    Je reçois chaque jour par mail des menaces, parfois pour des dessins qui datent de presque une année. On m’a reproché certains dessins publiés lors de la campagne pour les élections législatives de mai 2012. Je suis menacé par la mafia religieuse.

    Un imam de la région d’El Achour (Alger) a appelé publiquement à mon assassinat. Un imam qui fait partie pourtant du personnel du ministère des Affaires religieuses !

    Je n’ai à aucun moment attaqué l’islam ou toute autre religion. Je respecte et je défends l’islam en tant que musulman. Cet imam n’a pas aimé le fait que j’ironise un peu sur l’habit des fanatiques religieux. Un habit primitif, clownesque, de cirque !

    -Et qu’écrivent ceux qui vous menacent par mail ?

    Pour eux, je suis l’ennemi de la religion, des islamistes et de l’Etat islamique. Je suis présenté comme un ennemi d’Allah. Je ris à chaque fois que je lis ces emails. Je sais bien faire la différence : je parle bien de mafia religieuse, pas de l’islam. Une religion que nous défendons avec logique. Eux, le font avec fanatisme, avec la mentalité de la «jahilia», de Koraïch… A El Khabar, on exprime une certaine crainte par rapport à cela (…). Tous ceux qui ont vu mes dessins ont bien compris ce que je veux exprimer. Il n’y a aucune agression contre l’islam. Je critique ceux qui utilisent la religion comme un fonds de commerce en dessinant des hommes portant des barbes et des kamis en déguisement. D’autres le font avec la drogue, avec l’import-import et ou avec la politique. Si les faux barbus ont réagi, c’est pour défendre leur fonds de commerce, pas la religion. L’islam est une religion de tolérance et d’ouverture, je refuse qu’il soit maltraité par la mafia et utilisé comme une arme. Heureusement que les Algériens connaissent l’islam depuis quinze siècles.

    -Vous ne pratiquez pas l’autocensure en raison de cette situation…

    Nous avons abandonné l’autocensure dans les années 1990. A cette époque, la mort accompagnait les professionnels de la presse quotidiennement. Les gens n’avaient plus peur. Il y a aujourd’hui une nouvelle peur née après les révoltes dans les pays arabes. Des groupes ont profité du mouvement démocratique populaire, détourné les révoltes, sans y avoir pris part, et sont arrivés au pouvoir, comme en Egypte et en Tunisie. A partir de là, la mafia religieuse d’ici a commencé à faire pression et à menacer. Son but est d’accélérer l’arrivée au pouvoir. Ils se sentent en position de force.

    Donc, ils veulent imposer une certaine censure. Je dessine un barbu qui descend d’une voiture de luxe, portant un mobile dernier cri et utilisant les dernières technologies. L’esprit de ce barbu est bloqué au premier siècle de l’hégire ! Donc, ces gens-là ne croient qu’à la modernité qui les sert. Et mon rôle en tant que caricaturiste est de se moquer de tout cela, de tourner en dérision ces phénomènes. C’est de la satire. Donc, lorsque je dessine un mini-kamis ou une fausse barbe, certains pensent que je me moque de la religion, car pour eux, l’islam, c’est l’habit, ça se limite à cela ! Mes enfants me demandent d’éviter ce genre de dessin, car ils entendent plein de choses dans la rue. Il y a une certaine pression sociale.

    -Vous dessinez toujours les représentants du pouvoir, des hommes avec de gros ventres, balafrés et portant des lunettes noires...


    La mafia politique et la mafia financière sont des sœurs siamoises. La politique est aujourd’hui investie par les gens de la mafia financière. Il y a une alliance pour partager la rente et le pouvoir. Donc, je ne pouvais que dessiner un homme qui ressemble à un baril, balafré, repris de justice, prêt à tout faire. Bref, un hors-la-loi. A mon avis, il n’existe pas d’homme politique propre dans le Tiers-Monde. En mettant à nu les mafias religieuse, politique et financière, j’ai aujourd’hui beaucoup d’ennemis. J’avoue que j’ai des appréhensions. Je désespère, kraht ! Personne ne peut me protéger ! Les gens de la mafia financière auraient plus de pitié que ceux de la mafia religieuse. Je me suis replié sur moi-même.

    -Il n’y a pas de pressions politiques contre vous ?

    Au contraire ! Les hommes politiques adorent ce que je fais, même si je les critique. Je n’ai reçu aucune menace de ce côté-là, pas même une observation. J’ai une sorte de coexistence pacifique avec la mafia politique et la mafia financière, même si je n’ai aucun rapport avec elles.

    -Pensez-vous avoir des lignes rouges dans votre travail de création ?

    Je me suis imposé des lignes rouges. Je ne peux attaquer les religions, islam, christianisme ou judaïsme. J’ai du respect pour les convictions de millions de personnes. En matière politique, je n’ai pas de lignes rouges. Pour moi, les caricatures faites sur le Prophète de l’islam étaient quelque chose de normal. Pour les Européens, la liberté d’expression est sacrée autant que la religion. Ils ont déjà dessiné sur l’Eglise. Faire des dessins sur le Prophète de l’islam était, pour eux, ordinaire, surtout qu’ils ont déjà eu à faire des dessins sur Jésus-Christ ou sur Abraham. Mais pour ce qui me concerne, je ne peux pas faire un dessin sur Jésus-Christ, car l’islam impose le respect des autres cultes. En Europe, ils ont bien profité aussi de la vague de colère soulevée par des fanatiques après la publication des caricatures sur le Prophète de l’islam pour en faire un produit commercial aussi. En France, Charlie Hebdo a même compris que c'était un bon filon. Ce journal, inconnu auparavant, est devenu célèbre grâce à cela.

    -Quelle appréciation faites-vous des caricatures publiées actuellement en Algérie ?

    Sans citer de nom, il y a des caricatures de bonne qualité traitant de tous les sujets. Les idées sont bonnes et les traits bien soignés. La relève existe heureusement. Les jeunes caricaturistes promettent. Ils ont entre les mains les instruments de l’évolution et de la modernité. Il faut qu’on leur donne l’occasion de s’exprimer, des espaces. Je rends hommage aux anciens tels que Haroun, Maz, Slim et les autres (…). Je veux publier un ou deux albums de mes dessins, une manière de les conserver, d’avoir des archives. Je cherche un financement pour ce projet et un éditeur algérien. Je suis prêt à céder tous mes droits. Ce n’est pas un projet commercial.

    -Vous êtes resté cinq ans au Koweït. Vous avez publié des caricatures dans le quotidien Al Jarida. Qu’en est-il de cette expérience ?

    C’était une expérience enrichissante pour moi. J’ai pu connaître des personnes de plusieurs nationalités, en contact avec des cultures multiples. J’ai, en plus des Koweïtiens, connu des Turcs, des Indiens, des Iraniens, des Syriens, des Libanais, des Egyptiens… Bref, un véritable tour du monde. Au Koweït, j’ai appris à faire des caricatures sans légende (sans texte). Une forme difficile. C’est une pratique courante dans les pays du Golfe. En raison de la présence de la censure, on préfère des caricatures muettes. Libre à chacun d’interpréter le dessin comme il veut. C’est une lecture à l’œil. Cela laisse donc une certaine marge de manœuvre pour le caricaturiste qui, tout compte fait, n’est pas responsable des lectures qu’on peut faire de son dessin. Je me suis donc habitué à cette pratique. En Algérie, on aime la caricature avec le texte. C’est une idée consacrée. Le caricaturiste est presque tenu «d’expliquer» son œuvre…

    Bio express :

    Né en 1955 à Médéa, Abdelkader Abdou alias Ayoub est l’un des créateurs du quotidien arabophone El Khabar. Caricaturiste reconnu, il a également travaillé au Koweït dans le journal El Jarida. Ayoub a obtenu le prix international Omar Ouartilane en 2001.

    Fayçal Métaoui- Liberté

  • #2
    C'est fou comment la relgion et les religieux empêchent toute sorte de progrés !

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    • #3
      C'est fou comment la relgion et les religieux empêchent toute sorte de progrés !
      Ce n'est pas la religion qui est contre le progrès. La religion bien comprise s'oppose aux charlatans et à ceux qui menacent les honnêtes gens sous l'habit religieux. La réponse nous vient d'Egypte ces deux derniers jours : les faux religieux, les "Frères Musulmans" Égyptiens sont attaqués par le peuple égyptien, la "révolution" égyptienne se radicalise et poursuit son chemin vers la libération de l’Égypte d'une dictature au nom de l'Islam

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      • #4
        El watan et alkhabar sont des jumeaux

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