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Le Sahara occidental est un territoire non autonome relevant de l’article 73 de la Charte des Nations Unies, que le Maroc occupe au sens du droit international humanitaire.
I – Avant 1975 : un territoire non autonome administré par l’Espagne
Une frontière connue depuis un siècle
En 1884, le Royaume d’Espagne s’implante au Sahara occidental comme l’y autorise la conférence de Berlin consacrée au partage de l'Afrique (Déclaration de protectorat du 26 décembre 1884).
De manière concomitante, la France s’établit au Maroc qu’elle place sous protectorat en 1912.
Dès cette époque, les frontières du Sahara occidental sont bien identifiées. La frontière au sud et à l’est avec la Mauritanie résulte de « la Convention pour la délimitation des possessions françaises et espagnoles dans l’Afrique occidentale, sur la côte du Sahara et sur la côté du Golfe de Guinée » signée entre la France et l’Espagne le 27 juin 1900 à Paris. Au nord, la frontière avec le Maroc est fixée par deux conventions conclus entre les puissances coloniales – celle de Paris du 3 octobre 1904 et celle de Madrid du 27 novembre 1912 – légèrement rectifiés par la Convention de Madrid du 19 décembre 1956. La Mauritanie opposera d’ailleurs l’ensemble de ces conventions au Maroc pour contrer les prétentions de ce dernier sur son territoire.
1946 : L’Espagne gère son territoire…
Au lendemain de la seconde guerre, le gouvernement adopte le décret du 20 juillet 1946 « établissant le régime de dépendance des possessions espagnoles d’Afrique occidentale ». Les territoires occupés par l’Espagne – Ifni, le Cape Juby et le Sahara occidental – deviennent l’« Africa Occidental Española ». Le 10 janvier 1958, le Sahara occidental sera constitué par décret en « province espagnole d’Afrique ».
Le 14 décembre 1955, l’Espagne franquiste devient membre de l’Organisation des Nations Unies. Priée par le Secrétaire général de préciser si elle administre des territoires non autonomes au titre de l’article 73 de la Charte, l’Espagne invoque son droit constitutionnel interne pour nier la compétence des Nations Unies et répond que ses territoires d’outre-mer sont des « provinces espagnoles d’Afrique » qui font partie intégrante de l’Etat espagnol, comme l’atteste la lettre 10 novembre 1958, adressée par la Mission permanente de l’Espagne au Secrétaire général des Nations Unies (A/C4/385). Devant la VIe Commission, son représentant déclare : « L’Espagne ne possède pas de territoires non-autonomes puisque ceux qui sont soumis à sa souveraineté en Afrique sont considérés et classés comme provinces espagnoles conformément à la législation en vigueur. En conséquence, le Gouvernement espagnol ne se considère pas visé par l’article 73 de la Charte des Nations Unies, qui se rapporte aux territoires non autonomes, lesquels n’ont pas d’existence légale au sein de l’organisation administrative espagnole »
1956 : La fin du protectorat français et la politique du « Grand Maroc »
Le 2 mars 1956, la France met fin au protectorat du Maroc qui devient un Etat souverain, et s’annonce aussitôt la politique du « Grand Maroc ». Le 7 juillet 1957, Allal el Fassi, président du Parti de l'Istiqlal, publie une carte du « grand Maroc », qui englobe l’ensemble du Sahara occidental et de la Mauritanie, l’ouest du Mali et le Nord-ouest de l’Algérie, dans le quotidien arabophone Al Alam. Son parti est alors majoritaire dans la vie politique marocaine et ses thèses sont reçues par le Roi Mohammed V. Le 14 octobre 1957, le Maroc endosse officiellement ces revendications devant des Nations Unies et demande au Conseil des tutelles la restitution de la Mauritanie, d’Ifni et du Sahara espagnol.
1960 : L’ONU s’engage le processus de décolonisation
Le 14 décembre 1960, l’Assemblée générale des Nations Unies adopte la résolution 1514 « Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux peuples colonisés ». Le 27 novembre 1961, elle crée le Comité de la décolonisation (Comité spécial des vingt-quatre » ») qu’elle charge de contrôler l’application de la résolution 1514.
L’Espagne rend compte de son administration à l’ONU
Devant l’insistance de l’Assemblée générale, le représentant de l’Espagne annonce le 11 novembre 1960 devant la IVe commission que son gouvernement accepte de « communiquer au Secrétaire général des renseignements sur les territoires dont il est question au chapitre XI de la Charte ». Dans sa résolution 1542 (XV) en date du 15 décembre 1960, l’Assemblée générale prend note avec satisfaction de cette déclaration.
En avril 1961, l’Espagne transmet au Secrétaire général les premières informations relatives au Sahara occidental. Il poursuivra régulièrement la communication des renseignements au titre de l’article 73 de la Charte des Nations Unies jusqu’en 1975.
1962 : Le Sahara occidental sur la liste des territoires non autonomes
En avril 1962, le Comité spécial des vingt-quatre inscrit le « Sahara espagnol »sur la liste des territoires non autonomes, dont il discutera pour la première fois en séance en septembre 1963. Le 16 octobre 1964, le comité de décolonisation demande à l'Espagne d’appliquer la résolution 1514 [XV] aux territoires d’Ifni et du Sahara Occidental.
Le 16 décembre 1965, l’Assemblée générale adopte la résolution 2072 [XX], la première sur le Sahara occidental, dans laquelle elle « prie instamment le Gouvernement espagnol en tant que puissance administrante de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour la libération de la domination coloniale des territoires d’Ifni et du Sahara occidental et d’engager à cette fin des négociations sur les problèmes relatifs à la souveraineté que posent ces deux territoires », ce dernier point ne concernant que Ifni.
Procédant initialement à un examen global des territoires africains administrés par l’Espagne, le Comité spécial des vingt-quatre dissocie très nettement la question d’Ifni et de celle du Sahara occidental dès la session suivante. Ainsi, dans sa résolution du 16 novembre 1966, s’il considère Ifni comme une enclave territoriale dont la décolonisation doit aboutir au rétablissement de l’intégrité territoriale du Maroc, il affirme au contraire « le droit à l’autodétermination et à l’indépendance » du Sahara occidental.
Le Sahara occidental est un territoire non autonome relevant de l’article 73 de la Charte des Nations Unies, que le Maroc occupe au sens du droit international humanitaire.
I – Avant 1975 : un territoire non autonome administré par l’Espagne
Une frontière connue depuis un siècle
En 1884, le Royaume d’Espagne s’implante au Sahara occidental comme l’y autorise la conférence de Berlin consacrée au partage de l'Afrique (Déclaration de protectorat du 26 décembre 1884).
De manière concomitante, la France s’établit au Maroc qu’elle place sous protectorat en 1912.
Dès cette époque, les frontières du Sahara occidental sont bien identifiées. La frontière au sud et à l’est avec la Mauritanie résulte de « la Convention pour la délimitation des possessions françaises et espagnoles dans l’Afrique occidentale, sur la côte du Sahara et sur la côté du Golfe de Guinée » signée entre la France et l’Espagne le 27 juin 1900 à Paris. Au nord, la frontière avec le Maroc est fixée par deux conventions conclus entre les puissances coloniales – celle de Paris du 3 octobre 1904 et celle de Madrid du 27 novembre 1912 – légèrement rectifiés par la Convention de Madrid du 19 décembre 1956. La Mauritanie opposera d’ailleurs l’ensemble de ces conventions au Maroc pour contrer les prétentions de ce dernier sur son territoire.
1946 : L’Espagne gère son territoire…
Au lendemain de la seconde guerre, le gouvernement adopte le décret du 20 juillet 1946 « établissant le régime de dépendance des possessions espagnoles d’Afrique occidentale ». Les territoires occupés par l’Espagne – Ifni, le Cape Juby et le Sahara occidental – deviennent l’« Africa Occidental Española ». Le 10 janvier 1958, le Sahara occidental sera constitué par décret en « province espagnole d’Afrique ».
Le 14 décembre 1955, l’Espagne franquiste devient membre de l’Organisation des Nations Unies. Priée par le Secrétaire général de préciser si elle administre des territoires non autonomes au titre de l’article 73 de la Charte, l’Espagne invoque son droit constitutionnel interne pour nier la compétence des Nations Unies et répond que ses territoires d’outre-mer sont des « provinces espagnoles d’Afrique » qui font partie intégrante de l’Etat espagnol, comme l’atteste la lettre 10 novembre 1958, adressée par la Mission permanente de l’Espagne au Secrétaire général des Nations Unies (A/C4/385). Devant la VIe Commission, son représentant déclare : « L’Espagne ne possède pas de territoires non-autonomes puisque ceux qui sont soumis à sa souveraineté en Afrique sont considérés et classés comme provinces espagnoles conformément à la législation en vigueur. En conséquence, le Gouvernement espagnol ne se considère pas visé par l’article 73 de la Charte des Nations Unies, qui se rapporte aux territoires non autonomes, lesquels n’ont pas d’existence légale au sein de l’organisation administrative espagnole »
1956 : La fin du protectorat français et la politique du « Grand Maroc »
Le 2 mars 1956, la France met fin au protectorat du Maroc qui devient un Etat souverain, et s’annonce aussitôt la politique du « Grand Maroc ». Le 7 juillet 1957, Allal el Fassi, président du Parti de l'Istiqlal, publie une carte du « grand Maroc », qui englobe l’ensemble du Sahara occidental et de la Mauritanie, l’ouest du Mali et le Nord-ouest de l’Algérie, dans le quotidien arabophone Al Alam. Son parti est alors majoritaire dans la vie politique marocaine et ses thèses sont reçues par le Roi Mohammed V. Le 14 octobre 1957, le Maroc endosse officiellement ces revendications devant des Nations Unies et demande au Conseil des tutelles la restitution de la Mauritanie, d’Ifni et du Sahara espagnol.
1960 : L’ONU s’engage le processus de décolonisation
Le 14 décembre 1960, l’Assemblée générale des Nations Unies adopte la résolution 1514 « Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux peuples colonisés ». Le 27 novembre 1961, elle crée le Comité de la décolonisation (Comité spécial des vingt-quatre » ») qu’elle charge de contrôler l’application de la résolution 1514.
L’Espagne rend compte de son administration à l’ONU
Devant l’insistance de l’Assemblée générale, le représentant de l’Espagne annonce le 11 novembre 1960 devant la IVe commission que son gouvernement accepte de « communiquer au Secrétaire général des renseignements sur les territoires dont il est question au chapitre XI de la Charte ». Dans sa résolution 1542 (XV) en date du 15 décembre 1960, l’Assemblée générale prend note avec satisfaction de cette déclaration.
En avril 1961, l’Espagne transmet au Secrétaire général les premières informations relatives au Sahara occidental. Il poursuivra régulièrement la communication des renseignements au titre de l’article 73 de la Charte des Nations Unies jusqu’en 1975.
1962 : Le Sahara occidental sur la liste des territoires non autonomes
En avril 1962, le Comité spécial des vingt-quatre inscrit le « Sahara espagnol »sur la liste des territoires non autonomes, dont il discutera pour la première fois en séance en septembre 1963. Le 16 octobre 1964, le comité de décolonisation demande à l'Espagne d’appliquer la résolution 1514 [XV] aux territoires d’Ifni et du Sahara Occidental.
Le 16 décembre 1965, l’Assemblée générale adopte la résolution 2072 [XX], la première sur le Sahara occidental, dans laquelle elle « prie instamment le Gouvernement espagnol en tant que puissance administrante de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour la libération de la domination coloniale des territoires d’Ifni et du Sahara occidental et d’engager à cette fin des négociations sur les problèmes relatifs à la souveraineté que posent ces deux territoires », ce dernier point ne concernant que Ifni.
Procédant initialement à un examen global des territoires africains administrés par l’Espagne, le Comité spécial des vingt-quatre dissocie très nettement la question d’Ifni et de celle du Sahara occidental dès la session suivante. Ainsi, dans sa résolution du 16 novembre 1966, s’il considère Ifni comme une enclave territoriale dont la décolonisation doit aboutir au rétablissement de l’intégrité territoriale du Maroc, il affirme au contraire « le droit à l’autodétermination et à l’indépendance » du Sahara occidental.

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