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Qui était vraiment Jaurès ?

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  • Qui était vraiment Jaurès ?

    Voilà bientôt cent ans, le 31 juillet 1914, Jean Jaurès était assassiné. Les jours suivants éclatait la Première Guerre mondiale. Dans son dernier livre, Laurent Lasne ressuscite la figure du grand orateur, du penseur et de l'homme politique. Entretien.


    Jaurès est une des figures les plus respectées de l'histoire de France et le père tutélaire de la gauche. Comment expliquer la puissance de son souvenir?

    Laurent Lasne: C'est par son assassinat à la veille de la Première Guerre mondiale que Jaurès est entré dans la mémoire collective. Il n'en est jamais sorti. Ce souvenir révèle que l'on peut laisser une trace politique prégnante sans occuper des positions de pouvoir de premier plan. Jaurès n'a participé à aucun gouvernement. Certes, il s'est battu pour de nombreuses lois sociales. En réalisant une synthèse entre réforme et révolution puis en devenant le héraut du combat pour la paix, il est devenu le leader incontesté de la gauche socialiste. Mais tout cela aurait été balayé si son action n'avait pas été nourrie par une philosophie qui reste l'arrière-plan essentiel de ses engagements.

    Quel est le milieu d'origine et la formation du jeune Jaurès?

    Jean Jaurès est né à Castres en 1859. Ses aïeux étaient établis dans la fabrication ou le négoce de textile. Mais à la suite du partage des héritages et en raison de la crise, ses parents sont devenus des petits notables déclassés. Son père exploite un modeste domaine agricole de 6 hectares à quelques kilomètres de Castres. Au collège de Castres, où le jeune Jaurès poursuit ses études grâce à une bourse, ses aptitudes intellectuelles sont repérées par un inspecteur général. Le destin de celui qui ambitionnait alors d'être receveur des postes va basculer. En 1876, il monte à Paris pour préparer le concours de Normale sup. Il est admis premier. En 1881, Jaurès est reçu troisième à l'agrégation de philosophie, derrière Henri Bergson. Professeur au lycée d'Albi puis chargé de cours à la faculté des lettres de Toulouse, il soutient ses deux thèses (1892): De la réalité du monde sensible et sa thèse complémentaire, rédigée en latin, Des premiers linéaments du socialisme allemand.
    On compte trois amiraux dans sa famille…

    Le frère du grand-père paternel de Jaurès, négociant fortuné, était le père de deux amiraux, Charles et Benjamin. Ce dernier est député du Tarn en 1871, puis sénateur. Ambassadeur en Russie, il devient ministre de la Marine en 1899. Il joue un rôle d'éducateur politique auprès de Jaurès. Son oncle maternel est aussi militaire. Et le frère de Jaurès, lui, deviendra le troisième amiral de la famille, cas unique en France!

    Pour publier son premier texte, Jaurès choisit… Le Figaro! Pourquoi?

    Nous sommes alors en 1880. Jaurès poursuit ses études à Normale sup. Déjà républicain, il approuve le projet de loi sur l'enseignement supérieur déposé par Jules Ferry dont l'article 7, qui vise à interdire l'enseignement aux membres d'une congrégation non autorisée. Pour avoir fait connaître publiquement son désaccord avec cet article de loi, un professeur catholique qui enseigne à Normale est suspendu par Ferry. Cette suspension est jugée insupportable par Jaurès. Il n'accepte pas de confondre avec la défense de la laïcité des mesures de répression contre les catholiques qui, considère-t-il, ont droit à leur liberté de pensée. Il adresse une lettre collective de soutien à ce professeur. Cette lettre sera publiée le 9 novembre 1880 dans le Figaro, alors en pleine expansion, très lu dans les milieux politique et littéraire. C'est son premier engagement public contre l'injustice.

    Jaurès est élu député à 25 ans. A l'époque, il n'est pas socialiste et fustige «ces fainéants avides qui couvrent du mot de socialisme leur paresse et leur convoitise»…

    Le jeune député du Tarn est alors un républicain de centre gauche. Entre le parti républicain qui «s'arrête au seuil du problème social» et les radicaux qui ont «la déclamation facile», Jaurès se sent isolé. Il s'oppose aux socialistes et s'irrite de leur paresse d'analyse, de leur activisme mis au service du fatalisme révolutionnaire, de leur déni de la République. Jaurès ne se reconnaît pas dans la stratégie de lutte des classes et de violence révolutionnaire du Parti ouvrier de Jules Guesde, à l'époque dominant dans la mouvance socialiste. Au jeune député, la révolution prolétarienne apparaît comme une forme de tyrannie et d'oppression. En outre, par crainte de la violence, il est très dubitatif sur le recours à la grève. Néanmoins, Jaurès ne critique pas l'idée socialiste en elle-même, du moins celle qu'il désigne comme la «vraie doctrine» formulée par Louis Blanc, Fourier ou Proudhon. Jaurès se reconnaît dans cette tradition républicaine et utopiste du socialisme français qu'il oppose au corpus marxiste de la social-démocratie allemande. Pour le député du Tarn, hors de la République, point de salut.

    A l'époque, le jeune Jaurès est favorable à la colonisation. Pourquoi?

    Il soutient alors la politique d'expansion coloniale au nom des grands idéaux de la République. Puis Jaurès va exprimer sa réprobation sur les violences qui se produisent dans les colonies. Lors du ralliement des radicaux à la colonisation, Jaurès prend conscience des antagonismes entre les réalités de la domination française et les aspirations des peuples colonisés. En 1896, Jaurès réprouve la politique coloniale parce qu'elle lui apparaît comme la conséquence la plus déplorable de la rapacité du système capitaliste. Enfin, avec la guerre opposant la Russie et le Japon (1905), Jaurès prend acte de l'universalisation du monde, préalable à la constitution d'une humanité vraiment totale.
    Autre fait frappant: Jaurès s'efforce de comprendre le boulangisme, au lieu de se contenter de le condamner…

    Jaurès a été ébranlé par l'adhésion massive des classes populaires à la personne du général Boulanger, qui a fédéré tous les déçus de la république opportuniste: conservateurs, bonapartistes et royalistes, ainsi qu'une minorité de radicaux et de socialistes. Avec l'élection triomphale du «général Revanche» à la députation en 1889, le mouvement cesse d'être une farce pour devenir une force. Jaurès, battu à Castres, analyse le boulangisme comme le «lieu géométrique de toutes les oppositions». Il décèle à la fois dans ce mouvement une aspiration confuse à un monde meilleur et un acte de désespoir lié à l'impuissance de la politique gouvernementale. Pour Jaurès, la seule réponse consiste à offrir un «idéal lumineux» aux classes populaires. Cet idéal, pense-t-il, sera peut-être le socialisme.

    Quand Jaurès devient-il socialiste?

    Il n'y a pas de conversion de Jaurès au socialisme, mais une évolution par étapes. «Le socialisme, c'est la République jusqu'au bout», dira-t-il. Jaurès devient un socialiste engagé entre la fièvre boulangiste et son soutien aux mineurs grévistes de Carmaux en 1892 qui lui fait franchir le pas. Il croit désormais à l'avenir d'un parti socialiste indépendant. Lorsqu'éclate la grève des mineurs de Carmaux, Jaurès les soutient. Il est déjà prêt à assumer le mandat socialiste que ceux-ci vont lui confier en 1893.

    Lorsque Dreyfus est condamné en 1894, Jaurès écrit: «on a surpris un prodigieux déploiement de la puissance juive (sic) pour sauver un des siens». Comment expliquer ces propos?

    Ce parfum d'antisémitisme est certainement lié au mouvement populaire porté par l'anticapitalisme. Si Jaurès est effleuré par l'antisémitisme populaire dénonciateur des puissances d'argent, il ne va jamais jusqu'à s'afficher avec des antisémites déclarés. En 1898, après le «J'accuse…» de Zola, Jaurès intervient à la Chambre pour défendre Dreyfus. Sa marge de manœuvre est limitée. Le groupe socialiste a invité les élus et le prolétariat à ne pas se mêler de «cette guerre civile bourgeoise». Battu aux élections de 1898, désigné par son adversaire comme «l'esclave du syndicat des Juifs sans patrie», Jaurès retrouve une totale liberté d'expression. Il rédige Les Preuves: «Si Dreyfus a été illégalement condamné, (…), il n'est plus ni un officier ni un bourgeois, il est dépouillé (…) de tout caractère de classe, il n'est plus que l'humanité elle-même (…).» La commotion produite par l'Affaire va déterminer chez Jaurès une distance par rapport au marxisme. Il réaffirme son ancrage républicain. Ces prises de position irritent ses alliés marxistes. Après son combat en faveur de Dreyfus, l'appui d'amis républicains fortunés va lui permettre de fonder l'Humanité en 1904.

    Clémenceau a eu ce mot: «On reconnaît un discours de Monsieur Jaurès à ce que tous les verbes sont au futur»…

    Les deux hommes ont été dreyfusards, mais la création de la SFIO (1905) a changé la donne politique. Lors des législatives de 1906, les radicaux dominent à gauche en voix et en élus. Il reste que le parti socialiste a désormais un programme, une discipline et un sens du collectif. Clemenceau, devenu président du Conseil, annonce des réformes sociales. Mais, confronté aux grèves ouvrières menées par la CGT, Clémenceau choisit de défendre l'ordre avant tout et renonce à son programme de réformes. Jaurès engage alors avec lui une terrible joute oratoire. La vraie fracture entre les deux hommes est politique.

    Jaurès a fait faire sa première communion à sa fille… et a été traduit en conseil de discipline du parti socialiste!

    Jaurès n'est nullement hostile au fait religieux. Pour Jaurès, le socialisme, en créant une égalité véritable par un régime de production collective, rendra aux hommes le sens de l'infini que le christianisme a trahi en se mettant au service des puissants. Cet aspect idéaliste de la pensée de Jaurès constitue une divergence fondamentale avec Marx. En 1899, contre l'avis de ses «camarades» marxistes, Jaurès a soutenu la participation d'un socialiste au gouvernement. Deux ans plus tard, les «amis» politiques de Jaurès vont répliquer et monter en épingle cette affaire de première communion. Accusé de se renier et menacé de se voir retirer toute délégation, Jaurès doit s'expliquer. Il évoque une transaction entre un père «socialiste et libre penseur» et une mère «chrétienne et pratiquante»: si sa fille a fait sa communion, elle a été élevée dans des écoles laïques. Jaurès a été meurtri par ces attaques venues de son propre camp.

  • #2
    suite

    Avant 1914, Jaurès juge-t-il la guerre seulement possible ou probable?
    Jaurès a une vraie prédilection pour l'histoire militaire et la défense nationale. Il sent monter les périls avec la révolution russe de 1905 et les enjeux coloniaux. Jaurès présente la «paix humaine» comme sa divinité. «C'est à cause d'elle et pour elle que je lance toujours un cri d'espérance et de douleur», déclare-t-il. Ce grand orateur plaide contre l'allongement de la durée du service militaire (1913). Il pense que la solidarité européenne de la classe ouvrière peut enrayer l'implacable mécanique des alliances. En désignant «Herr Jaurès» comme un traitre à sa patrie, une certaine presse a armé le bras de Raoul Villain, qui l'assassine le 31 juillet 1914. En définitive, Jaurès était d'abord un atypique et un inclassable, qui refusait d'aliéner sa liberté de pensée

    le figaro

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    • #3
      Qui était vraiment Jaurès ?

      Jaurès est un homme de haute culture nourrie d'humanisme, comme ses paires Franc Maçons , sans son assassina beaucoup de l'armes et surtout de victimes aurons pues êtres évitées .

      Arezki HAMOUDI

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      • #4
        En lisant cet article, je crois avoir compris un aspect de sa pensée, entre autres, qu'il avait compris l'essence du capitalisme basée sur l'exploitation des salariés et des pays colonisés et aussi que les guerres déclenchées entre capitalistes n'avaient rien à voir avec l'intérêt des peuples qui servaient de chair à canon pour des capitalistes en guerre entre eux dans le but du partage des marchés et des terres!!

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