Je suis à un pas de mon départ définitif d’Algérie. J’ai en préparation, depuis quelque temps, un article, mais la maison est envahie par les emballeurs qui me chassent d’une pièce à l’autre: impossible de travailler. Seule solution: recycler un vieil écrit.
C’est pour cela que je vous propose cette semaine d’évoquer la vie surprenante de Sabbathai Zevi. Imaginez-vous un messie qui apostasie sa religion. (J’ai publié l’histoire de sa vie avec 28 autres biographies de personnages aussi étranges dans «Les naufragés de ma mémoire», édité par Casbah).
Le bruit courait parmi les communautés juives d’Egypte, qu’un savant, Nathan de Ghaza, pouvait dévoiler à chacun le mystère de son âme. Sabbathai Zevi n’hésita pas un seul instant: il fallait à tout prix qu’il rencontre Nathan, afin qu’il lui rende la paix. Parce que Sabbathai souffrait depuis sa jeunesse d’un mal obscur. Né dans l’Empire ottoman, à Smyrne en 1626, d’une famille de juifs sépharades, originaires d’Espagne, il avait été à l’école du grand maître Eskafa qui lui avait appris les secrets de la Kabbale, cette doctrine initiatique qui permet de pénétrer le sens caché des anciennes écritures sacrées. Il se perfectionne tellement dans ce savoir ésotérique que, encore adolescent, il reçoit par son maître, le titre de Sage.
Installé à Salonique, il choque les pieux Juifs à cause de ses actions bizarres, hors norme; il en arrive même à faire célébrer une véritable cérémonie de mariage dans la synagogue entre lui, le fils de Dieu, et les rouleaux de la Torah: ce dernier scandale le fera expulser de la ville. Il commence alors une longue pérégrination qui le conduit au Caire d’où il compte rejoindre Jérusalem.
Il alterne à de longues périodes de profonde dépression, qui lui ôtent jusqu’au goût de la lecture, des moments d’euphorie lumineuse. Il reprend alors ses études, il a des ravissements et des visions et surtout, il prêche admirablement, conquérant les coeurs de ceux qui l’écoutent, semblable à «un être de majesté et de lumière». Il chante d’une belle voix les psaumes qu’il mélange à des chansons d’amour espagnoles, auxquelles il attribue une signification mystique. Comme ceux de Smyrne, les pieux Juifs du Caire trouvent ses pratiques rituelles excessives et désapprouvent par-dessus tout ces actes étranges, presque sacrilèges. Les rabbins le chassent des lieux de prière, l’écartent de la communauté, il leur arrive même de le fouetter.
Ce mal obscur qui le poursuit lui vient d’une terrible question qu’il porte enfouie tout au fond de son coeur. A Smyrne, grâce à l’étude de la Kabbale et d’après de savants calculs, il avait découvert que les premiers versets de la Bible révélaient que c’était lui, Sabbathai Zevi, le Messie attendu par son peuple, qui aurait soulagé les juifs de leur misère et rétabli l’unité brisée du ciel et de la terre. C’était une prophétie tirée d’un ancien manuscrit «La sagesse de Salomon» qu’il avait longuement étudiée. Il en avait tiré des indices presque sûrs qu’il serait «celui qui humiliera le dragon», le vrai Messie.
Il a entendu qu’à Livourne, en Italie, Sarah, une juive d’origine polonaise, qu’on dit être une prostituée, avait affirmé qu’on lui avait révélé qu’elle était destinée à se marier avec le Messie. Il la fait chercher, la ramener au Caire et il l’épouse.
Certains le considéraient comme un pauvre fou, mais d’autres étaient convaincus qu’il était un vrai prophète: n’avait-il pas un jour, à la synagogue, prononcé correctement le nom de Dieu ? Tout le monde savait que l’articulation exacte du nom divin avait été perdue à jamais à la mort du dernier grand prêtre, en l’an 70, lors de la destruction du Temple de Salomon par les légions romaines de Titus. Comment dès lors pouvait-il la connaître ?
Voilà pourquoi Sabbathai décida d’interroger Nathan, le savant kabbaliste de Ghaza, sur son être et sur son destin.
Mais bien avant son arrivée, Nathan connaissait déjà la réponse qui lui avait été révélée par une vision prophétique: «Après avoir accompli la prière, l’Esprit vint sur moi, mes cheveux se dressèrent, mes genoux tremblèrent, mon coeur sut qui était l’objet de la prophétie: Sabbathai Zevi était le Messie annoncé».
C’est pour cela que je vous propose cette semaine d’évoquer la vie surprenante de Sabbathai Zevi. Imaginez-vous un messie qui apostasie sa religion. (J’ai publié l’histoire de sa vie avec 28 autres biographies de personnages aussi étranges dans «Les naufragés de ma mémoire», édité par Casbah).
Le bruit courait parmi les communautés juives d’Egypte, qu’un savant, Nathan de Ghaza, pouvait dévoiler à chacun le mystère de son âme. Sabbathai Zevi n’hésita pas un seul instant: il fallait à tout prix qu’il rencontre Nathan, afin qu’il lui rende la paix. Parce que Sabbathai souffrait depuis sa jeunesse d’un mal obscur. Né dans l’Empire ottoman, à Smyrne en 1626, d’une famille de juifs sépharades, originaires d’Espagne, il avait été à l’école du grand maître Eskafa qui lui avait appris les secrets de la Kabbale, cette doctrine initiatique qui permet de pénétrer le sens caché des anciennes écritures sacrées. Il se perfectionne tellement dans ce savoir ésotérique que, encore adolescent, il reçoit par son maître, le titre de Sage.
Installé à Salonique, il choque les pieux Juifs à cause de ses actions bizarres, hors norme; il en arrive même à faire célébrer une véritable cérémonie de mariage dans la synagogue entre lui, le fils de Dieu, et les rouleaux de la Torah: ce dernier scandale le fera expulser de la ville. Il commence alors une longue pérégrination qui le conduit au Caire d’où il compte rejoindre Jérusalem.
Il alterne à de longues périodes de profonde dépression, qui lui ôtent jusqu’au goût de la lecture, des moments d’euphorie lumineuse. Il reprend alors ses études, il a des ravissements et des visions et surtout, il prêche admirablement, conquérant les coeurs de ceux qui l’écoutent, semblable à «un être de majesté et de lumière». Il chante d’une belle voix les psaumes qu’il mélange à des chansons d’amour espagnoles, auxquelles il attribue une signification mystique. Comme ceux de Smyrne, les pieux Juifs du Caire trouvent ses pratiques rituelles excessives et désapprouvent par-dessus tout ces actes étranges, presque sacrilèges. Les rabbins le chassent des lieux de prière, l’écartent de la communauté, il leur arrive même de le fouetter.
Ce mal obscur qui le poursuit lui vient d’une terrible question qu’il porte enfouie tout au fond de son coeur. A Smyrne, grâce à l’étude de la Kabbale et d’après de savants calculs, il avait découvert que les premiers versets de la Bible révélaient que c’était lui, Sabbathai Zevi, le Messie attendu par son peuple, qui aurait soulagé les juifs de leur misère et rétabli l’unité brisée du ciel et de la terre. C’était une prophétie tirée d’un ancien manuscrit «La sagesse de Salomon» qu’il avait longuement étudiée. Il en avait tiré des indices presque sûrs qu’il serait «celui qui humiliera le dragon», le vrai Messie.
Il a entendu qu’à Livourne, en Italie, Sarah, une juive d’origine polonaise, qu’on dit être une prostituée, avait affirmé qu’on lui avait révélé qu’elle était destinée à se marier avec le Messie. Il la fait chercher, la ramener au Caire et il l’épouse.
Certains le considéraient comme un pauvre fou, mais d’autres étaient convaincus qu’il était un vrai prophète: n’avait-il pas un jour, à la synagogue, prononcé correctement le nom de Dieu ? Tout le monde savait que l’articulation exacte du nom divin avait été perdue à jamais à la mort du dernier grand prêtre, en l’an 70, lors de la destruction du Temple de Salomon par les légions romaines de Titus. Comment dès lors pouvait-il la connaître ?
Voilà pourquoi Sabbathai décida d’interroger Nathan, le savant kabbaliste de Ghaza, sur son être et sur son destin.
Mais bien avant son arrivée, Nathan connaissait déjà la réponse qui lui avait été révélée par une vision prophétique: «Après avoir accompli la prière, l’Esprit vint sur moi, mes cheveux se dressèrent, mes genoux tremblèrent, mon coeur sut qui était l’objet de la prophétie: Sabbathai Zevi était le Messie annoncé».

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