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Oralité et genres poétiques

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  • Oralité et genres poétiques

    Les spécialistes du domaine de recherche ont admis cette diversité et ont commencé dans leurs ouvrages à privilégier le conte, le proverbe, l’épopée, considérant que dans les continents à longue tradition d’oralité comme l’Afrique, on n’a pas trouvé de frontières entre ces types de production qui remontent aux origines.

    Le conte a été chanté autant que l’ont été les textes versifiés ou l’épopée. Le proverbe a toujours appartenu à la poésie.

    L’expression de «littérature orale» inventée par R. Sebillot en 1851 porte sur une classe de discours à finalité sapientielle ou éthique désignée chez les historiens de la littérature comme toute espèce d’énoncés métaphoriques ou fictionnels du genre contes, comptines, facéties, complaintes, autres discours traditionnelles ou autres récits d’anciens combattants, narrations à valeur d’actualité et fortement typées.

    Productions orales à caractère poétique

    On peut citer tout d’abord la poésie populaire véhiculée par la mémoire depuis la nuit des temps. Bien qu’elle ait été toujours libre, elle a une dominante, c’est celle de se coller à l’existence collective.

    Nous en avons la preuve avec la complainte qui est une chanson populaire de caractère plaintif sur un sujet tragique ou la fable versifiée ou non, dans sa version ancienne dont celle d’Esope.

    Actuellement, le champ d’exploration de ce type de production dont le langage relève souvent de l’ésotérisme est immense. L’analyse de corpus recueillis ça et là a apporté la preuve que le matériau est infiniment complexe et difficile à cerner. Théoriciens, ethnologues, ethnolinguistiques ou investigateurs de toutes disciplines concernées ont pu relever une extrême diversité des genres poétiques qui, selon les propres termes de Paul Zumthor, vont de la romancero hispanique aux ballades anglaises.

    A l’intérieur de la poésie orale, la poésie chantée dans toute sa diversité occupe une place importante dans la vie sociale.

    Elle façonne les caractères, apporte des explications aux comportements les plus insolites, procure un soutien moral à tous ceux qui se retrouvent fragilisés à la suite de situations éprouvantes. Sûrs de comporter des vers à vocation thérapeutique, les auteurs travaillent dans le langage de la quotidienneté, même si pour certains d’entre eux, l’oralité doit évoluer vers des formes esthétiques avec des ressemblances d’ordre fonctionnel, des traits lexicaux, grammaticaux et sémantiques à peu près semblables.

    Conventionnalité dans les genres

    Chaque type de texte poétique véhiculé par l’oralité porte une appellation déterminée par sa fonction dans la communication. C’est le cas de la devinette composée en langage esthétique, au même titre que le proverbe, les dictons, adages, chansons gaillardes.

    La littérature du Burkina, en Afrique, classe le conte, le proverbe et la devinette dans la catégorie d’ensembles fonctionnels en rapport avec l’âge, le sexe, le rang social de chaque destinataire. IL y eut d’autres classements, faits peut-être de manière arbitraire et sans critères de distinction des genres les plus divers comme les mythes, contes, légendes, proverbes, devinettes, formules rituelles ou actes de langage ritualisés, épopée, chansons auxquels il convient d’ajouter les généalogies, les devises, les discours coutumiers.
    Il fut un temps où l’usage de la parole pour des joutes oratoires, la transmission du savoir ou des genres narratifs ci-dessus énumérés était réservé aux plus éloquents de ceux qui auraient la maîtrise du langage. Et ces participants à la pédagogie de la communication des genres étaient hiérarchisés en fonction de leur compétence.

    Les genres littératures d’origine diverse n’ont pas la même acception dans toutes les langues. On ne sait pas au juste si «le conte de fée», qui a une place importante dans la littérature européenne, est accepté dans les autres pays. Il en est de même du mot «romance» qui n’a pas le même fond ni la même forme partout. Les traits pertinents sur lesquels s’appuie l’analyse dépend du contexte culturel déterminé par une classe sociale, un cénacle d’initiés.

    Il existe aussi une évolution qui fait que le contenu et le contenant ont changé. P. Zumthor, parfait connaisseur en la matière et théoricien de référence, cite l’exemple des Hunde du Congo où des chansons ont fini par se réduire à de courts proverbes.

    Récit et discours ou récit dans le discours

    Le discours est, à des degrés divers, porteur de marques de narrativité. Ce à quoi, nous dit Greimas : «Une narrativité généralisée investit toute forme de discours organisée.»

    «C’est la narration qui créa l’humanité», rétorque P. Janet. Souvenir, rêve, mythe, légende, histoire sont autant de manières qui permettent à l’individu de se situer par rapport au monde. On peut poser par hypothèse que toute production d’art ou faits de culture, en poésie comme en peinture, en musique sont, de manière implicite ou latente, des formes de récit. Les spécialistes ajoutent à cette série de noms métaphoriques ou métonymiques chez les Africains, les Amérindiens, les sociétés primitives de quelque continent qu’elles soient.

    Les mêmes spécialistes, qui classent la devise africaine dans le genre poétique, considèrent l’accompagnement gestuel dans toute forme narrative comme une forme narrative autour de laquelle s’est créée en se développant la polyphonie discursive.

    Ne peut-on pas dire aussi que le conte, le mythe et la fable sont des formes de discours narratif ? Il existe dans certains régions du monde des formes chantées des mêmes genres.

    Le conte, aux confins des domaines de la voix et de l’écriture, qui a fasciné bien des critiques et fins lettrés, forme de l’imaginaire aux nombreuses variantes et définitions, a été, depuis les origines, évolutif, mouvant et constant. Un Eskimo canadien confie dans ses mémoires en 1830 sur le thème que conter faisait la vie : «Entre enfants, on en organisait des concours ; le grand-père prenait son tambour et se mettait à chanter l’arctique, les chasses, les danses, ses femmes, les guérisseurs d’autrefois… Cela, dans sa banalité : chacun de ces récits, grâce à la chaleur d’une présence plus que par son prétexte, comblait un vide du monde, jamais le même puisque les jours changent.»

    Le conte est-il un pur divertissement ou un récit initiatique ou les deux à la fois ? La même question pourrait être posée pour la poésie orale.
    Chanter ou conter répond à un désir humain ; cela correspond à la réalisation d’un rêve. Ce qui explique le plaisir de conter, de séduire, de capter l’attention de l’autre pendant le temps de parole.

    Dans les sociétés traditionnelles, le conte est un univers d’expérimentation qui offre des occasions inouïes d’affrontements imaginables. La voix des conteurs est d’un apport vital à la stabilisation des sociétés. Ces dernières ont besoin de toutes les voix porteuses de messages utiles autant que l’est le théâtre que nous avons défini comme une thérapie et une catharsis.
    Dans sa forme la plus élaborée, l’art oral peur cerner une situation moyennant un langage, un public attentionné et désireux de se comporter en partie prenante. On peut imaginer une situation de communication primaire où les acteurs se parlent, entraînant une identification réciproque entre porteur de voix et récepteurs, exprimant par là le désir qu’a chacun de s’imaginer dans la peau de l’autre.

    Antérieurement à l’influence de l’écriture, la voix accompagnée de gestes entraîne à l’action. Au théâtre, le geste a plus d’importance ; il focalise autour de lui tous les regards. Quand il ne se subordonne pas au langage, il contribue à la valorisation de la voix. Ceci a été vrai dans tous les temps et dans toutes les cultures.

    Dans la Chine des époques anciennes, l’ensemble des activités collectivistes convergeaient vers l’art théâtral en acquérant des formes multiples accompagnées de danse, jonglerie, fêtes paysannes, sport. A l’exception des marionnettes fondées sur le jeu des poupées mais qui n’ont pas de sens et de grâce que par la voix, le théâtre est un art très complexe en lui-même, qui peut ou non associer à son déroulement d’autres arts perçus comme des arts annexes. Roland Barthes le définit comme l’écriture du corps intégrant la voix porteuse de langage humain. Il est considéré comme le modèle de toute poésie orale.

    Par la nouvelle République

  • #2
    Le conte est-il un pur divertissement ou un récit initiatique ou les deux à la fois ?
    Plutot les deux à la fois. Il a investit tous les genres littéraires et les différentes formes de textes. Y compris les textes "Sacrés" où le conte est à caractère "pédagogique".

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