Les Algériens d’aujourd’hui, dans leur culture et leur organisation sociale, sont les héritiers d’une riche histoire millénaire, qui ne se réduit pas aux siècles écoulés depuis l’avènement de l’islam et aux cent trente-deux ans de la domination coloniale française.
C’est à la découverte de cet héritage antéislamique de l’Algérie, trop méconnu, qu’invite Gilbert Meynier dans ce livre «L'Algérie des origines» De la préhistoire à l'avènement de l'islam.

L'auteur de l'Histoire intérieure du FLN 1954 - 1962 (2003), Gilbert Meynier, vient de publier l'Algérie des origines, de la préhistoire à l'avènement de l'Islam (2006).
Or, en ne lui ayant consacré qu'un an et demi seulement contre douze pour sa magistrale thèse, s'est-il limité pour autant à une oeuvre de vulgarisation, alors que les travaux relatifs tant à la préhistoire qu'à l'Antiquité du territoire englobant et débordant le territoire algérien sont fort nombreux et sans cesse renouvelés à la lumière des avancées prodigieuses accomplies par les sciences auxiliaires de l'histoire ? Ne s'agit-il pas avant tout d'un condensé original mettant bien en exergue d'importantes déductions et conclusions ? En somme, une synthèse accessible à un public avisé, à dessein avec un titre et sous-titre accrochant à destination de tout observateur averti ? D'autant que par rapport aux publications antérieures, l'auteur ne s'est-il pas affranchi résolument des thèses si chères aux auteurs des XIXe et XXe siècles, les thèses ayant largement soutenu la colonisation française, prétendue digne héritière d'une romanisation totalitaire de l'Afrique du Nord ? Bien plus, avant, pendant et après la romanisation, l'essai ne souligne-t-il pas précisément l'autonomisation de L'Algérie des Origines, une approche innovante, solidement cernée à partir d'une très riche érudition, de surcroît confortée à dessein grâce à une féconde inter culturalité... ?
Aussi limitons-nous aux trois points suivants:
- une excellente synthèse accessible à tout public avisé;
- une dense urbanisation: foyer d'art et de lettres;
- l'Algérie: un des principaux berceaux de l'humanité.
- Une excellente synthèse accessible à tout public avisé
Indéniablement, une synthèse fort attrayante s'adressant à tout public s'efforçant de s'informer et de s'enrichir assidûment. Avant tout, à tout public averti et décidé à poursuivre des investigations interdisciplinaires, d'autant que les 20 pages consacrées aux annexes (p. 211 - 231) y facilitent grandement. Tel est l'un des principaux enseignements s'imposant rapidement au fur et à mesure de l'examen de cet essai captivant.
De prime à bord, compte tenu de leur importance primordiale, préhistoire et protohistoire s'étendant sur plus d'un millénaire ne sont esquissées que pour servir de cadre général afin de mieux cerner les processus de transformations socioéconomiques, culturels et politiques, durant les longs siècles antérieurs à l'avènement de l'Islam. Du reste, des processus situés dans le cadre géopolitique d'alors, le monde méditerranéen structuré et dominé par Rome. Davantage pour faire ressortir l'autonomisation croissante vis-à-vis de cette dernière.
Par ailleurs, fortement nourri par le classicisme à son âge d'or, par excellence le latin d'un Cicéron, mais non moins motivé et mû par son militantisme anticolonial à l'UNEF en 1960-62 (1), du reste durablement entretenu et consolidé tant par la maîtrise de la langue d'Al Moutannabî que par la culture algérienne largement décelable à travers la critique constructive d'un Tewfik Al Madani (2), Gilbert Meynier aborde et restitue brillamment l'héritage antéislamique. Aussi les différents rapports entretenus par Rome avec nos lointains ancêtres sont-ils objectivement disséqués et étayés solidement à partir d'une très riche documentation constituée non seulement par les sources et oeuvres maîtresses d'expression latine que par l'incomparable et riche patrimoine matériel, artistique et architectural, témoignage de l'éclat d'une civilisation urbaine inégalée car fondée avant tout sur des bases économiques riches et durables (3), celles de riches terroirs, de surcroît ayant alimenté abondamment et durablement Rome comme le montrent bien les livraisons de blé à cette dernière, soit le double de celles en provenance d'Egypte, alors que les deux principales productions, vin et huiles, ont largement couvert les besoins de la péninsule italienne. Précisément, ce sont bien ces données incontournables que Gilbert Meynier s'est attaché à analyser. Méthodiquement et solidement en les cernant dans tout leur contexte, territorial, des Mauritanies et Numidies suivant les époques, et extraterritorial, dans l'ensemble du bassin méditerranéen. Aussi un tableau d'ensemble situe-t-il admirablement l'urbanisation avec tout ce qu'elle implique plus particulièrement sur les plans artistique et culturel en soulignant ainsi le rôle de l'aménagement des espaces agricoles ainsi que celui des échanges multiformes entretenus avec aussi bien Rome que certaines contrées du bassin méditerranéen, l'oriental notamment.
L'éclat du réseau urbain: le joyau des arts et des lettres
résentement, les ruines de Césarée (Cherchell), Tipasa, Timgad, Cuicul (Djemila)... ne restituent qu'une pâle image de la splendeur révolue, même si les pièces originaires de ces cités conservées tant au Bardo que dans les musées de ces villes captivent toujours notre attention.
Quoi qu'il en soit, contrairement à nombre d'auteurs contemporains, Gilbert Meynier est parvenu admirablement à brosser un tableau vivant de l'urbanisation. A nous faire entrevoir sa splendeur à travers son extension et son éclat, son rayonnement artistique et culturel ! En fait, toujours attestés par les trouvailles incessantes du sous-sol de l'Algérie orientale. En tout état de cause, le dénombrement relatif au IVe siècle en Afrique du Nord qui, paradoxalement, correspond partout ailleurs à la décadence de l'empire romain, est surprenant mais bien fondé. C'est ainsi que la quantification fait état de 322 chantiers urbains (p. 183). Et l'auteur de préciser: «On construisit beaucoup, et plus encore, on restaura». Pourquoi donc un tel engouement ? Par excellence, la ville romano- africaine était «le lieu de l'espace civique et sacré, où les dieux s'incarnaient dans l'art et où s'entremêlaient indistinctement la culture et les dieux» (p. 105). Assurément, ces derniers sont matérialisés à travers l'édification de somptueux temples, consacrés à «la triade» dite «capitoline» puis postérieurement aux édifices chrétiens (églises, basiliques...). Quant à la culture dans son expression à la fois noble et générale, elle est partout omniprésente à travers l'armature urbaine et captive toujours et longuement tout touriste avisé. Il en est ainsi du théâtre et des jeux de cirques partout présents à travers nombre de cités, comme notamment à Cirta, et dont certaines entretenaient de permanentes représentations grâce à la disponibilité de troupes d'histrions (acteurs bouffons). Nos lointains ancêtres appréciaient fortement les courses de chevaux que prouvent les hippodromes découverts à Césarée et Sitifis alors que sur le forum de Timgad, une inscription proclame: «chasser, se baigner, jouer, c'est vivre».
Assurément, les bains ont été favorisés par la richesse des eaux thermales plus que partout à travers toute l'aire romanisée. Dans une ville moyenne comme Timgad, n'a-t-on pas dénombré jusqu'à treize thermes, richement ornés avec des bassins d'eau chaude et froide ? Fort impressionnante est la mosaïque de Timgad peignant les toilettes de Vénus. D'autant que l'un des mieux conservés des établissements thermaux et utilisés naguère, avec les mêmes structures que celles de l'Antiquité, est celui d'El-Hammam (Aquae Flaviannae ), situé à 6 km à l'ouest de Khenchela. Les piscines anciennes sont encore en excellent état et l'on peut y voir encore les eaux chaudes déboucher à partir d'anciennes canalisations...
Par ailleurs, en sus des thermes et des adductions d'eau, il importe de mentionner les établissements balnéaires construits à proximité ou au-dessus des sources thermales, voire au bord de la mer, comme à Tipaza en particulier. L'engouement du bronzage était donc recherché et fort apprécié. Notons bien, avec Paul-Albert Février, «le décor de mosaïque était partout présent: sur les sols et parfois sur les parois, dans les péristyles, dans les bassins des jardins, ou les salles de réception des maisons...» Du reste, la pérennité de ce fond culturel se conservera dans les bas-reliefs et surtout le carrelage de faïence ou zellij. Pareil faste, n'était-il pas inhérent à une urbanité hautement cultivée ? Par excellence, des cités lieu de productions et d'expressions d'oeuvres littéraires recherchées, voire de portée universelle ?
[...]
C’est à la découverte de cet héritage antéislamique de l’Algérie, trop méconnu, qu’invite Gilbert Meynier dans ce livre «L'Algérie des origines» De la préhistoire à l'avènement de l'islam.

L'auteur de l'Histoire intérieure du FLN 1954 - 1962 (2003), Gilbert Meynier, vient de publier l'Algérie des origines, de la préhistoire à l'avènement de l'Islam (2006).
Or, en ne lui ayant consacré qu'un an et demi seulement contre douze pour sa magistrale thèse, s'est-il limité pour autant à une oeuvre de vulgarisation, alors que les travaux relatifs tant à la préhistoire qu'à l'Antiquité du territoire englobant et débordant le territoire algérien sont fort nombreux et sans cesse renouvelés à la lumière des avancées prodigieuses accomplies par les sciences auxiliaires de l'histoire ? Ne s'agit-il pas avant tout d'un condensé original mettant bien en exergue d'importantes déductions et conclusions ? En somme, une synthèse accessible à un public avisé, à dessein avec un titre et sous-titre accrochant à destination de tout observateur averti ? D'autant que par rapport aux publications antérieures, l'auteur ne s'est-il pas affranchi résolument des thèses si chères aux auteurs des XIXe et XXe siècles, les thèses ayant largement soutenu la colonisation française, prétendue digne héritière d'une romanisation totalitaire de l'Afrique du Nord ? Bien plus, avant, pendant et après la romanisation, l'essai ne souligne-t-il pas précisément l'autonomisation de L'Algérie des Origines, une approche innovante, solidement cernée à partir d'une très riche érudition, de surcroît confortée à dessein grâce à une féconde inter culturalité... ?
Aussi limitons-nous aux trois points suivants:
- une excellente synthèse accessible à tout public avisé;
- une dense urbanisation: foyer d'art et de lettres;
- l'Algérie: un des principaux berceaux de l'humanité.
- Une excellente synthèse accessible à tout public avisé
Indéniablement, une synthèse fort attrayante s'adressant à tout public s'efforçant de s'informer et de s'enrichir assidûment. Avant tout, à tout public averti et décidé à poursuivre des investigations interdisciplinaires, d'autant que les 20 pages consacrées aux annexes (p. 211 - 231) y facilitent grandement. Tel est l'un des principaux enseignements s'imposant rapidement au fur et à mesure de l'examen de cet essai captivant.
De prime à bord, compte tenu de leur importance primordiale, préhistoire et protohistoire s'étendant sur plus d'un millénaire ne sont esquissées que pour servir de cadre général afin de mieux cerner les processus de transformations socioéconomiques, culturels et politiques, durant les longs siècles antérieurs à l'avènement de l'Islam. Du reste, des processus situés dans le cadre géopolitique d'alors, le monde méditerranéen structuré et dominé par Rome. Davantage pour faire ressortir l'autonomisation croissante vis-à-vis de cette dernière.
Par ailleurs, fortement nourri par le classicisme à son âge d'or, par excellence le latin d'un Cicéron, mais non moins motivé et mû par son militantisme anticolonial à l'UNEF en 1960-62 (1), du reste durablement entretenu et consolidé tant par la maîtrise de la langue d'Al Moutannabî que par la culture algérienne largement décelable à travers la critique constructive d'un Tewfik Al Madani (2), Gilbert Meynier aborde et restitue brillamment l'héritage antéislamique. Aussi les différents rapports entretenus par Rome avec nos lointains ancêtres sont-ils objectivement disséqués et étayés solidement à partir d'une très riche documentation constituée non seulement par les sources et oeuvres maîtresses d'expression latine que par l'incomparable et riche patrimoine matériel, artistique et architectural, témoignage de l'éclat d'une civilisation urbaine inégalée car fondée avant tout sur des bases économiques riches et durables (3), celles de riches terroirs, de surcroît ayant alimenté abondamment et durablement Rome comme le montrent bien les livraisons de blé à cette dernière, soit le double de celles en provenance d'Egypte, alors que les deux principales productions, vin et huiles, ont largement couvert les besoins de la péninsule italienne. Précisément, ce sont bien ces données incontournables que Gilbert Meynier s'est attaché à analyser. Méthodiquement et solidement en les cernant dans tout leur contexte, territorial, des Mauritanies et Numidies suivant les époques, et extraterritorial, dans l'ensemble du bassin méditerranéen. Aussi un tableau d'ensemble situe-t-il admirablement l'urbanisation avec tout ce qu'elle implique plus particulièrement sur les plans artistique et culturel en soulignant ainsi le rôle de l'aménagement des espaces agricoles ainsi que celui des échanges multiformes entretenus avec aussi bien Rome que certaines contrées du bassin méditerranéen, l'oriental notamment.
L'éclat du réseau urbain: le joyau des arts et des lettres
résentement, les ruines de Césarée (Cherchell), Tipasa, Timgad, Cuicul (Djemila)... ne restituent qu'une pâle image de la splendeur révolue, même si les pièces originaires de ces cités conservées tant au Bardo que dans les musées de ces villes captivent toujours notre attention.
Quoi qu'il en soit, contrairement à nombre d'auteurs contemporains, Gilbert Meynier est parvenu admirablement à brosser un tableau vivant de l'urbanisation. A nous faire entrevoir sa splendeur à travers son extension et son éclat, son rayonnement artistique et culturel ! En fait, toujours attestés par les trouvailles incessantes du sous-sol de l'Algérie orientale. En tout état de cause, le dénombrement relatif au IVe siècle en Afrique du Nord qui, paradoxalement, correspond partout ailleurs à la décadence de l'empire romain, est surprenant mais bien fondé. C'est ainsi que la quantification fait état de 322 chantiers urbains (p. 183). Et l'auteur de préciser: «On construisit beaucoup, et plus encore, on restaura». Pourquoi donc un tel engouement ? Par excellence, la ville romano- africaine était «le lieu de l'espace civique et sacré, où les dieux s'incarnaient dans l'art et où s'entremêlaient indistinctement la culture et les dieux» (p. 105). Assurément, ces derniers sont matérialisés à travers l'édification de somptueux temples, consacrés à «la triade» dite «capitoline» puis postérieurement aux édifices chrétiens (églises, basiliques...). Quant à la culture dans son expression à la fois noble et générale, elle est partout omniprésente à travers l'armature urbaine et captive toujours et longuement tout touriste avisé. Il en est ainsi du théâtre et des jeux de cirques partout présents à travers nombre de cités, comme notamment à Cirta, et dont certaines entretenaient de permanentes représentations grâce à la disponibilité de troupes d'histrions (acteurs bouffons). Nos lointains ancêtres appréciaient fortement les courses de chevaux que prouvent les hippodromes découverts à Césarée et Sitifis alors que sur le forum de Timgad, une inscription proclame: «chasser, se baigner, jouer, c'est vivre».
Assurément, les bains ont été favorisés par la richesse des eaux thermales plus que partout à travers toute l'aire romanisée. Dans une ville moyenne comme Timgad, n'a-t-on pas dénombré jusqu'à treize thermes, richement ornés avec des bassins d'eau chaude et froide ? Fort impressionnante est la mosaïque de Timgad peignant les toilettes de Vénus. D'autant que l'un des mieux conservés des établissements thermaux et utilisés naguère, avec les mêmes structures que celles de l'Antiquité, est celui d'El-Hammam (Aquae Flaviannae ), situé à 6 km à l'ouest de Khenchela. Les piscines anciennes sont encore en excellent état et l'on peut y voir encore les eaux chaudes déboucher à partir d'anciennes canalisations...
Par ailleurs, en sus des thermes et des adductions d'eau, il importe de mentionner les établissements balnéaires construits à proximité ou au-dessus des sources thermales, voire au bord de la mer, comme à Tipaza en particulier. L'engouement du bronzage était donc recherché et fort apprécié. Notons bien, avec Paul-Albert Février, «le décor de mosaïque était partout présent: sur les sols et parfois sur les parois, dans les péristyles, dans les bassins des jardins, ou les salles de réception des maisons...» Du reste, la pérennité de ce fond culturel se conservera dans les bas-reliefs et surtout le carrelage de faïence ou zellij. Pareil faste, n'était-il pas inhérent à une urbanité hautement cultivée ? Par excellence, des cités lieu de productions et d'expressions d'oeuvres littéraires recherchées, voire de portée universelle ?
[...]

Commentaire