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Histoire de l'Algérie médiévale - Le 7e siècle apr. J.-C.

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  • #16
    La dernière guerre : al-Kāhina (697-700)

    Après avoir définitivement réglé le problème romain en Ifrīqiya, Hassān b. Nu3mān regarde vers l'O., et c'est à ce moment que les sources mentionnent le nom de la Kāhina.

    Cheftaine d'une grande tribu nommée Jarāwa, on la disait reine de l'Aurès. Certaines sources tardives la disaient juive, elle était plus probablement chrétienne, ou peut-être païenne. Par-contre, contrairement à Kussayla (mort depuis 10 ans maintenant), elle ne semble avoir aucune relation ni lien avec les Romains et il n'y a aucun doute sur sa localisation dans l'Aurès. On cite la tribu zenatienne des Banī Ifrān parmi ses alliés. C'est tout ce qu'il y a de certain à son sujet.

    Il paraît que l'initiative vint de Hassān, qui commande une expédition dans l'Aurès en 698. Pour l'accueillir comme il se doit, la Kāhina rassemble une immense force, fait raser les défenses de la forteresse de Baghāï et attend les Arabes à une trentaine de km de cette position, sur une rivière aurassien que certaines sources nomment oued Nenni et d'autres oued Maskiāna. Là, Hassān reçoit la correction de sa vie, mais parvient tout de même à s'échapper avec les débris de son armée vers Tripoli (Libye), poursuivi par les Berbères jusqu'à Gafsa (Tunisie). Mais, contrairement à Kussayla à son époque, la Kāhina n'entre pas à Qayrawān et la ville resta sous contrôle musulman, gouvernée par un certain Abū-Sālih que Hassān avait chargé de l'intérim avant son départ.

    La dame ne semblait pas intéressée par la création d'un quelconque royaume africain. Elle voulait juste se débarrasser de toute menace arabe et, à ce qu'on dit, se mit immédiatement à détruire et à brûler les terres et les récoltes des riches domaines romano-africains de Byzacène et de Zeugitane afin de rendre le pays inintéressant pour les Arabes. Voyant cela, les habitants et surtout les propriétaires terriens du coin n'étaient pas du tout contents et se seraient mis à supplier Hassān, retiré en Tripolitaine depuis la défaite, à les délivrer des Barbares.

    Hassān prend le temps de réorganiser et regarnir son armée pendant un moment, tout en se gardant informé sur la situation dans le camps adverse. Il revient finalement à la charge en 699 ou en 700 : la Kāhina avance à sa rencontre et le choc eut lieu à Gabès, dans le S. tunisien. Cette fois la victoire est arabe et les Berbères durent se replier sur leur bastion aurassien. Hassān se lance à leur poursuite et, lors d'une seconde bataille à 10 km de Baghāï, l'armée de la Kāhina est définitivement détruite et elle y laisse elle-même la tête. On ne sait pas trop ce que valent les histoires sur son ordre à ses deux fils d'aller se joindre au camp musulman à la veille de cette bataille ultime, mais les Jerāwa seront souvent mentionneés parmi les tribus alliées aux gouverneurs ommeyades dans les événements du siècle qui s'ouvre.

    Quoi qu'il en soit, Hassān se dirige après cela vers le N., prend Būna (Annaba) et reçoit la soumission des villes et cités du Constantinois. Il rentre ensuite à Qayrawān et consacre le reste de son gouvernement à organiser sa province. Il sera rappelé de son poste en 704.

    Ce qui se passe après cela en Algérie et au Maghreb, c'est l'histoire du 8e siècle ...

    [Fin]
    Dernière modification par Harrachi78, 23 septembre 2022, 21h03.
    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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    • #17
      Après en avoir fini avec l'histoire événementielle de ce 7e siècle, on pourrait essayer de clarifier quelques problèmes géneraux qui en ressortent, mais qui ne peuvent pas être insérés dans la trame chronologique à un point bien précis :
      Dernière modification par Harrachi78, 24 septembre 2022, 22h50.
      "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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      • #18
        La Kahina est une chaoui et Tahouda oû il y eut la défaite de sidi okba est dans la limite du territoire chaoui. Sidi okba aujourd'hui est aussi le nom d'une moyenne ville à 10 kms de Biskra en hommage à ce seigneur, là oû il y a la vieille mosquée sidi okba, toujours debout mais en piteux état.
        Pourquoi les Chaoui n'honorent pas tant que ça la mémoire de la grande Kahina? Pourquoi l'Algérie ne le fait pas?

        je pense qu'elle le mérite même si elle a combattu des musulmans.
        ce qui se conçoit bien s'énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément

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        • #19
          1. D'où vient l'appellation "Berbères" ?

          On a vu que dans les sources romaines entre le 3e et le 7e siècles, les populations nord-africaines non romanisées sont appelées par le terme générique de "Maures" (Maurii en latin, Maurusōï en grec), que ce soit à l'intérieur des territoires sous contrôle romain ou à l'extérieur. Il arrivait aussi qu'on parle de Barbarus pour parler de ces peuples (gentes), mais il ne s'agissait pas dans ce cas d'un éthnonyme, mais plutôt un mot général pour dire tout ce qui est "sauvage" dans un certain sens, c'est-à-dire tout ce qui ne parlait ni latin ni grec et qui ne vivait pas dans le cadre social et politique gréco-romain classique, celui de la "cité".

          Or, dès que les sources arabes commencent à s'intéresser au Maghreb à la fin du 7e siècle, le seul terme qui apparaît pour désigner ces tribus et ces populations est al-Barbar. On ne trouve aucune trace de "Maures" ou autre, ce qui veut dire que les Arabes n'ont pas emprunté le nom de ce peuple des sources littéraires gréco-romaines. Mais, ils ne peuvent non plus l'avoir repris des Berbères car, même en supposant que ceux-ci avaient à l'époque un nom générique pour se désigner eux-mêmes, il y a peu de chances qu'ils se soient appelés "Barbares" de leur propre gré.

          L'explication doit donc se trouver dans la langue latine tardive, celle qui était parlée par le petit peuple des romano-africain des villes et des campagnes de cette époque, et que les sources arabes appellent Afāriq. La dārija romane donc, qui n'était plus forcément en phase avec tous les usages de la langue savante des érudits Latins et Grecs, auteurs des écrits qui nous sont parvenues, mais qui n'a elle-même pas laissé de traces écrites ... ou presque. Ainsi, dans un manuel de grammaire latine tardif dont l'auteur est inconnu mais qui fut apparemment rédigé en Afrique, on signale comme une faute courante dans la langue populaire de ce temps la prononciation barbar au lieu de la forme latine classique barbari. Or, "barbar" est justement la transcription exacte du nom arabe qui a donné le français "Berbères", et donc le plus probable est que les Arabes l'aient tout simplement repris à leur arrivée au Maghreb après l'avoir entendu en usage parmi les gens des villes et des campagnes romaines pour désigner ces tribus, le prenant pour l'ethnonyme ordinaire de ce peuple. Il en fut de même en Egypte, où ils avaient tiré Qobt/Aqbāt du grec Aeguptos pour nommer les populations autochrones du pays, qu'ils distinguaient des Romaiōï (al-Rūm).
          Dernière modification par Harrachi78, 29 septembre 2022, 04h48.
          "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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          • #20
            Bachi
            La Kahina est une chaoui et Tahouda oû il y eut la défaite de sidi okba est dans la limite du territoire chaoui ...
            Justement, les liens (au sens direct) ne sont pas aussi systématiques que cela. Les groupes berbères n'étaient pas tous sédentaires, et donc pas forcément liés à un territoire unique ou fixe du début à la fin de leur existence historique. Nous verrons cela aux siècles qui vont suivre.

            Par exemple, on avait mentionné le groupe zenète des Bani Ifrān comme une des tribus alliées aux Jarāwa et de la Kāhina dans les années 695-700. Ils étaient donc dans l'Aurès où ses alentours à cette époque, mais ils migrent à partir de 700 (probablement suite à la défaite de la Kāhina) plus à l'O, vers la vallée du Cheliff dans un premier temps, c'est-à-dire une zones que la poussée arabo-musulmane finale n'avait pas encore atteint. Il en va de même pour les Banī Abdelwād, des zenètes eux aussi, qui se seraient ralliés à Uqba b. Nāfi3 lors de son passage par l'Aurès en 683 à l'aller, mais qu'on retrouvera plutôt dans le Hodna au siècle suivant, et beaucoup plus à l'O. (à Tlemcen) aux siècles d'après. Les Awerba (peuple de Kussayla) sont soit près de l'Aurès soit dans le Telemçenois jusqu'aux années 680, mais on va le retrouvera au siècle suivant au N. du Maroc. Quant aux Jarāwa, on perdra route trace d'eux une ou deux générations après la mort de la Kāhina. A l'inverse, des tribus comme les Hawwāra, qu'on signalais au début du 7e siècle en Tripolitaine (Libye), vont s'établir à la fin de ce siècle dans le Constantinois et sur le versant N. de l'Aurès, ou du moins une partie d'entre eux. Les exemples sont infinis ...

            Bref, c'est pour dire que nos Chaouis des époques récentes ne sont pas nécessairement les descendant directes des tribus Berbères qui occupaient la même zone aux siècles qui précèdent, et il est très difficile de suivre les mouvements de tous ces groupes sur plus de 1000 ans car il s'agissait de communautés nomades et semi-nomades pour beaucoup d'entre eux, et pour qui le territoire était un espace de parcours et non pas forcément un espace d'appartenance : si on les emmerde trop (soit par un Etat soit par un autre groupe tribal) dans une zone et qu'ils ne parviennent pas à imposer leur indépendance par leur force, ils se tirent voir ailleurs si l'herbe est plus verte ...
            Dernière modification par Harrachi78, 25 septembre 2022, 23h42.
            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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            • #21
              La suite, la suite , la suite lol

              Dommage que l'histoire des berbères ne soit pas assez documentée pour qu'on puisse vivre l'hisoire de leur point de vu.

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              • #22
                sammy

                Il reste encore 9 siècles à résumer. Tu aura du berbère à en sortir par le nez dans les prochains topics ... Héhéhéhé
                "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                • #23
                  Non non, pas de spoil stp, je ne veux pas connaitre la fin avant d'avoir lu le livre

                  Ce que je veux dire, c'est que c'est dommage de ne pas avoir leur version de cette partie de l'histoire, leur son de cloche, rana ghir hada romain, hada byzantin, hada arabe, wach kanou idirou pendant ce temps, au moins tkherbicha ou deux sur kach djeld ta3 begura pour nous donner un indice ou deux sur leur ressenti berk ya sidi ...aya ani t9ele9t ( )

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                  • #24
                    Allāh ghāleb yā khti, hāda mā halbet el-bagra ...

                    Héhéhéhé ...
                    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                    • #25

                      Ce que je veux dire, c'est que c'est dommage de ne pas avoir leur version de cette partie de l'histoire, leur son de cloche, rana ghir hada romain, hada byzantin, hada arabe, wach kanou idirou pendant ce temps, au moins tkherbicha ou deux sur kach djeld ta3 begura pour nous donner un indice ou deux sur leur ressenti berk ya sidi ...aya ani t9ele9t)
                      Demande ce que tu cherches a infinity, il a tous les documents qu'il faut.
                      ثروة الشعب في سكانه ’المحبين للعمل’المتقنين له و المبدعين فيه. ابن خلدون

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                      • #26
                        Ce que je veux dire, c'est que c'est dommage de ne pas avoir leur version de cette partie de l'histoire, leur son de cloche,
                        Personne n'a vraiment pensé à écrire quoi que ce soit au moment ou les faits se déroulent ,il n'y avait pas vraiment de culture de l'écrit ni chez les berbères ni chez les arabes ,il faudra attendre un peu moins de deux siècles pour commencer à voir ici ou là des chroniqueurs s'intéresser au sujet maghrébin et son corolaire berbère ,tous ces faits liés à la conquête islamique ont été narrés à postériori sur la base de tradition ou paroles rapportés , pour beaucoup par les descendants des descendants de certaines personnes ayant été acteurs de cette histoire et habitants essentiellement en Ifriqiya ou en Andalousie ..
                        ارحم من في الارض يرحمك من في السماء
                        On se fatigue de voir la bêtise triompher sans combat.(Albert Camus)

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                        • #27
                          Demande ce que tu cherches a infinity, il a tous les documents qu'il faut.

                          L'Algérie est un territoire de l'Afrique du Nord, appelé Maghreb par les Orientaux.

                          Le Maghreb est une région composé de cinq pays: (Maroc, l'Algérie, la Tunisie, la Libye et la Mauritanie), qui n'est ni l'Europe, ni l'Afrique, ni le Moyen Orient; elle n'est même pas, en tout cas, encore actuelement le Maghreb (puisque tartiné à l'arabité). Mais elle prétend être tout cela à la fois, tout cela pour occulter son identité séculaire: le Pays de TAMZGHAT.
                          Dernière modification par infinite1, 27 septembre 2022, 21h02.

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                          • #28
                            2. La question des sources :

                            La question de l'historiographie est complexe, l'idée du topic étant d'essayer de simplifier le sujet autant que possible, tout en étant le plus exhaustif possible aussi. Un point rapide sur cette question donc.

                            En somme, le plus ancien texte qui nous soit parvenu et qui aborde l'histoire de la conquête musulmane du Maghreb comme un tout est Kitāb futūh Miçr wa Ifrīqiyya wa l-Andalus, composé en Egypte par Ibn Abdalhakam (800-870). Il est même le plus ancien document disponible qui mentionne al-Barbar tout court. Cela veux-il dire qu'il n'y avait aucune matière avant cette date ? Pas forcément, puisque Ibn Abdalhakam puise lui-même chez d'autres auteurs ou rapporteurs, comme un certain Abdallāh b. Lahī3a (714-790) qui vécut au siècle précédent, et qui consigna des traditions (akhbār) éparses et des notices sur le sujet, mais dont l'œuvre écrite ne nous est pas parvenue. D'autres matières du genre ont existé et ont servis d'une manière ou d'une autre aux historiens ultérieurs, sans qu'on en saches nécessairement tout à leur sujet.

                            La valeur d'une source primaire n'est donc pas forcément pesée par sa date de composition, car un ouvrage du 13e siècle peut parfois reposer sur de la matière plus ancienne qu'un ouvrage composé au 9e siècle. Exemple : la plus ancienne source arabe qui mentionne al-Kāhina est al-Wāqidi (745-822), soit plus d'un siècle après la disparition de la présumée cheftaine, et en Egypte. Pourtant, cet ouvrage de Wāqidi est lui-même perdu, et le passage en question ne nous est parvenu que par le biais d'un autre historien qui le cite, Ibn al-Athīr (1160-1233), postérieur de plus de quatre siècle. D'un autre côté, Ibn Abdalhakam rapportera lui aussi des informations sur la Kāhina une génération après Wāqidi, mais via une source différente et contemporaine de Wāqidi, soit un un certain Uthmān b. Sālih (m. 833) dont Ibn Abdalhakam aurait été l'élève, mais dont aucun écrit n'a survécu au temps.

                            Bref, porter le sujet sur la question (après tout très technique) des sources aurait trop allongé et compliqué le topic. Ce qui est résumé ici, c'est l'essentiel de ce qui est connu et globalement admis, sachant que même certaines dates ou certains lieux d'événements sont sujets à discussion et qu'il s'agissait parfois pour moi de faire un choix parmi plusieurs possibilités ...
                            Dernière modification par Harrachi78, 29 septembre 2022, 04h37.
                            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                            • #29
                              tout cela pour occulter son identité séculaire: le Pays de TAMZGHAT.
                              écoute cette vidéo pour savoir le point de vue des africains.

                              https://mobile.twitter.com/Nabiletto...84760411357184

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                              • #30
                                écoute cette vidéo pour savoir le point de vue des africains.

                                Le soubassement tribal de la société africaine constitue une réalité historique. Aussi bien quand le pouvoir colonial s'adressait aux peuplades en tant que constellation de tribus. Mais la résistance à la colonisation, même si elle fût d'abord une résistance de tribus, avait fini par s'organiser et par assoir dans l’action une unité de nations.

                                Aujourd'hui en assument ouvertement les pratiques claniques et régionalistes, et en faisant dans l'ostentation et l'injustice dans cette partie du monde, on prend dangereusement le risque de réveiller les vieux démons, toujours vivants mais endormis, du tribalisme...
                                Dernière modification par infinite1, 28 septembre 2022, 19h12.

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