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Tlemcen, Il était une fois le café Romana

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  • Tlemcen, Il était une fois le café Romana


    "Le café est l'or de l'homme de la rue, et comme l'or, il apporte à tous un sentiment de luxe et de noblesse"(dixit Emir Abdelkader)

    Par Allal Bekkaï

    3ème partie

    Le café maure (re)visité par des orientalistes

    1) Alfred Prienti

    L’installation d’un café maure ne nécessite pas de grands frais, nous n’y trouvons pas le luxe de nos cafés européens.
    A l’intérieur, des bancs sont rangés tout le long de la muraille, sur lesquels viennent s’asseoir, à la mode orientale, les jambes croisées, les consommateurs.
    Dehors ? quand la température le permet, d’autres assis sur des tapis d’alfa, fument de longues pipes ou le narguilé sous l’ombre des platanes.
    Le matériel est rudimentaire à l’intérieur ; dans un coin de la salle, se trouve un fourneau en maçonnerie sur lequel repose une chaudière en métal.
    Texte de Alfred Parienti(Edition du « Petit Tlemcenien » sans date illustré d’une photo d’un cafetier arabe).

    2) M.E. De Lorral

    La première de ces rivières porte le nom d’Oued Zitoun.Sur l’une des rives de ce maigre cours d’eau, nous apercevons un kahoua(café).Le kahouadji(cafetier) s’empresse de raviver le feu de son réchaud. Il prend trois cafetières (bokradj), une par voyageur, et les rempli aux trois quarts à un réservoir où l’eau est toujours maintenue à une température élevée ; il y ajoute du café et de la cassonade. Dès que le liquide entre en ébullition ; il le retire du feu et le laisse déposer ; puis il le replace sur les charbons ardents, et, au moment où une seconde ébullition se produit, il vous sert la boisson parfumée dans des tasses à fleurs bleues et rouges qui n’ont rien de commun avec la porcelaine de Sèvres. La poudre de café reste pendant quelques minutes en suspension…
    Au bout de la rue de Mascara, voici un café maure. Ce n’est plus l’humble gourbi du kahouadji de l’Oued Zitoun. Autour d’une vaste salle, les consommateurs sont assis sur des bancs ou accroupis sur des tréteaux qui rappellent le lit de nos corps de garde ; ou bien encore courbés dans la rue sur des nattes. Des cages pleines d’oiseaux chanteurs sont suspendues à la porte ; des bouquets de lis sont placés de distance en distance(les Arabes sont passionnés de fleurs ; ici deux citadins sont absorbés par les péripéties d’une partie de dames ; là un chanteur ambulant régale l’auditoire attentif de longues histoires de guerre ou d’amour ; il entremêle son chant de ritournelles raclées sur un gombri(sorte de violon à une corde) ou soufflées dans un roseau. Quand, hors d’haleine, il s’arrête, des joueurs de hautbois s’imposent à leur tour à la bienveillance du public.
    Tandis que, bouche béante, nous regardons un fumeur de kif tirer lentement de sa petite pipe le poison qui le tuera…
    Texte de M.E. De Lorral(extrait du document « Le tour du monde : Tlemcen »(1875).

    3) Arnold Van Gennep

    J'ai parcouru l'Algérie pendant cinq mois : juillet-août 191 1 et avril-juin 1912…
    Il y a à Tlemcen un café maure à l'angle de la rue de Mascara et d'une petite place sur laquelle débouchent plusieurs rues commerçantes, comme la rue de la Sikak ; des voûtes de fondouqs engloutissent et y déversent des caravanes incessantes. La petite place, irrégulière, trapézoïdale, est ombragée d'arbres énormes contre lesquels s'appuient de larges bancs très hauts où se juchent, après avoir retiré leurs bottes de cuir, des oisifs de la ville, des crieurs publics, et surtout des paysans indigènes venus des quatre coins de l'Afrique du Nord. Quoique devant ces bancs il y ait des tables rondes en fer comme on en voit dans les cafés de nos villages, quoique pour les clients de marque, Européens ou cheikhs francisés, il y ait des chaises rempaillées qu'on met tant bien que mal en équilibre sur les cailloux roulés et dans les creux boueux de la petite place, les changeant d'endroit avec le mouvement des ombres, non certes, ce café maure n'est pas chic du tout. En m'y installant, je m'abaissai du premier jour dans l'estime des personnes bien de Tlemcen, tant Indigènes qu'Européens, qui, fonctionnaires ou colons, pour rien au monde ne se laisseraient voir par là, même pour accompagner quelque étranger curieux de mœurs locales : « Des Indigènes, Monsieur, ça ne se fréquente que pour le travail qu'on en tire et pour l'argent qu'ils vous rapportent. » Il y eut des exceptions. C'est le directeur de la Médersa, un bon et vieil ami à moi, qui m'avait indiqué ce café, où vinrent aussi par moments me tenir compagnie un professeur de la Médersa et le juge de paix. Mais, le plus souvent, j'y étais seul. Et j'y passais des heures à regarder le va et vient des hommes à burnous...

    A suivre...
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