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Temoignage sur la corruption de certains exportateurs en Algérie

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  • Temoignage sur la corruption de certains exportateurs en Algérie

    Infractions à la législation des changes
    Les barons seraient-ils plus puissants que la République ?
    Dans cet entretien, Mohamed Benyacoub, un ancien opérateur spécialisé dans l'exportation de métaux non ferreux, nous explique comment des opérateurs véreux qui foulent au pied la réglementation relative aux changes peuvent échapper à toute punition. L’on comprend aisément, à travers cet exemple, comment des sommes colossales peuvent êtres placées dans des banques à l’étranger.


    Les Débats : Depuis près de deux ans, vous refusez de parler lorsqu’on vous sollicite pour nous parler du dossier des métaux non ferreux sous prétexte de ne pas dévoiler des enquêtes en cours. Mais en même temps on n’a rien vu venir à ce propos. S’agit-il d’un problème réglé ?




    M. Benyacoub : Il est vrai qu’une première affaire a fait l’objet d’une enquête judiciaire diligentée par la police judiciaire, mais sous le regard bienveillant du procureur de la République. L’affaire a porté ses fruits au point où la fraude avait été presque éradiquée durant la période 2001-2002, soit pendant l’enquête. Les dossiers portés à la connaissance de la justice ont été très bien traités par la douane.


    Y a-t-il eu des condamnations ?


    Oui, les personnes impliquées dans les dossiers pris ont charge ont été condamnées, et cela a même donné lieu à une multiplication par dix des prix des métaux à l’exportation, c'est-à-dire qu’ils sont revenus à leur véritable valeur. Des conteneurs habituellement déclarés à 4 tonnes ont commencés à être déclarés à 24 tonnes.

    Seulement, en dehors des dossiers traités par la justice, la fraude a continué. Elle a même été institutionnalisée au niveau des douanes à partir d’une certaine date.


    Quand exactement ?


    Je préfère ne pas la donner parce que des gens sont capables d’effacer les traces des dossiers.


    Qu’entendez-vous par "institutionnalisation de la fraude" ?


    C'est-à-dire qu’il est impossible d’exporter sans consommer une infraction à la législation des changes. Je profite de cette occasion pour dire que je préfère élargir le spectre de la fraude au seul secteur des métaux non ferreux. Je préfère parler d’organisation criminelle spécialisée dans l’infraction à la législation des changes, qui crée des patrimoines à l’étranger au détriment du Trésor public. Je précise que j’engage ma responsabilité civile et pénale pour l’ensemble des propos que je viens de tenir.

    Je sais que les complicités se situent dans certaines institutions. Mon message est destiné à ces gens qui se trouvent au niveau des banques et des douanes. Ils savent que je ne parle pas pour rien, que j’ai des preuves irréfragables. De hauts fonctionnaires sont impliqués dans ce genre de fraudes, pas par leur silence ou leur laxisme, mais bel et bien par complicité directe.


    A quel niveau se réalise la fraude ?


    Dans l’ensemble du processus de l’exportation. Elle commence dès l’acquisition du produit jusqu’à son exportation. A chaque étape il y a une infraction, à commencer par les factures de complaisance qui, à croire les montants qui y sont portés, montrent que les exportateurs travaillent à perte. Ce serait inimaginable sans fraude.

    Il y a très souvent fraude à la TVA, mais aussi et surtout un problème lié à l’origine des produits qui sont, pour une grande partie, issus de dégradation de biens publics.

    Mais comment se fait la justification au niveau des douanes ?



    Les fraudeurs finissent toujours par trouver quelqu’un pour "bénir" le produit en établissant une facture et en lui demandant d’aller payer les 17% de TVA pour se justifier au niveau des douanes, qui ferment les yeux. Plus grave encore, ce sont des gens qui ont été chassés par la porte qui sont revenus par la fenêtre. Ils ont de fortes relations au niveau des douanes et des banques.


    Comment un douanier peut-il faire pour vérifier l’authenticité de ces documents ?



    J’ai eu plusieurs contacts avec le directeur de la structure de lutte contre la fraude, je peux dire qu’il est animé de mauvaise volonté. Il a même légiféré à la place de l’Assemblée populaire nationale. Il a compliqué et bureaucratisé la procédure de contrôle sous prétexte de lutter contre la fraude, et ça a donné l’effet inverse.


    De quelles mesures s’agit-il ?


    Il impose aux exportateurs de disposer d’un parc qui doit être lié à la société. Il faut faire la demande aux douaniers et attendre leur bon vouloir de se déplacer pour contrôler la marchandise au niveau du parc avant d’acheminer le produit vers le port d’exportation.

    Je vous donne un petit exemple pour comprendre la complexité de cette démarche. Pour quelqu’un qui se trouve à Ouargla, il faudrait soit créer un port au Sud, soit lui trouver pas moins de 200 douaniers pour accompagner son produit jusqu’au Nord pour effectuer une seule opération d’exportation. Avec ces nouvelles mesures, l’exportateur du Sud doit faire ce qu’on appelle un transbordement, c'est-à-dire transporter son produit sur Alger, trouver un site pour l’entreposer, aller vers le notaire pour louer ce site et le lier à la société, tout cela pour une seule opération qui ne peut être rentable dans ce cas. C’est complètement absurde ce que font les douanes.


    Que devraient-ils faire selon vous ?



    Dans une déclaration faite à l’ENTV le 8 janvier 2005, le DG des douanes a affirmé que le problème était réglé. Ce n’est pas du tout mon avis. J’ai, à plusieurs reprises, écrit à ce directeur, à qui je dois tout le respect, mais je constate que rien n’a changé. Quand je l'entends, dans ses déclarations, parler de "feuilleton des métaux ferreux et non ferreux" comme si tout le scandale était inventé de toute pièce, comme s’il n’y avait pas de fraude ni d'infraction aux changes ni de création d’avoirs à l’étranger. Dans ce cas-là c’est à moi de payer. Normalement, ces opérateurs que je dénonce doivent se porter partie civile et m’attaquer en justice s’ils estiment que je ne dis pas la vérité.


    Qu’en est-il des rapatriements ?



    Je peux vous assurer que 80% des devises produites par les ventes ne sont pas rapatriées. Entre 2002 et 2004, aucun euro n’a été rapatrié par les exportateurs. Nous sommes revenus à une situation pire qu’avant l’année 2000.

    Cela veut-il dire que depuis 2004, les choses se sont remises en ordre ?



    Après 2004, le problème des non-rapatriements a continué, tout en gardant à hauteur de 50 et 60% des devises à l’étranger. Les faits en ma possession le prouvent. Par exemple, on déclarait une valeur de la ferraille FOB de 80 dollars la tonne, alors qu’elle coûtait 220 dollars. J’ai alerté par plus d’une vingtaine d’écrits le DG des douanes à ce propos. Malheureusement, les opérateurs auteurs des infractions aux changes sont libérés sans contrôle a posteriori.

    D’ailleurs, l’ordonnance présidentielle du 19 février 2003 complétant l’ordonnance 96/22 relative à l’infraction à la législation des changes et des mouvements de capitaux n’est pas appliquée à ce jour. Je me demande ce que font des institutions comme la douane, avec sa direction de la lutte contre la fraude et celle du contentieux, ainsi que la Banque d’Algérie. Je considère qu’elles sont à un même niveau de responsabilité que les opérateurs incriminés.


    La pratique du prête-nom pour l'obtention du registre du commerce existe-t-elle encore ?



    Rien n’a changé. J’ai saisi la direction générale des douanes en leur donnant des noms, que je peux vous citer maintenant, mais rien n’a été fait. Le DG des douanes a déclaré avoir déposé quelque 200 plaintes concernant des dossiers datant de l’époque de son prédécesseur, ce qui est insuffisant par rapport aux 3 042 dossiers recensés.

    Par contre, je n’ai pas entendu parler de dépôt de plainte lié à des infractions commises entre juin 2001 et 2005, alors qu’il existe des centaines de cas. Cela veut-il dire que tout va bien dans le domaine des rapatriements ? Je ne le crois pas. Je peux même dire que la situation a empiré par rapport à la période antérieure à l’année 2000. Je persiste et signe : les rapatriements de fonds sont quasi inexistants. Justement, c’est à cela que sert le prête-nom qui permet aux véritables opérateurs qui manipulent derrière le rideau de ne pas rapatrier les devises générées par les ventes. Et je vais être plus précis en vous disant que la fraude a repris de plus belle à partir du 20 juin 2001.


    Avez-vous alerté d’autres responsables ?



    J’ai écris plusieurs fois à l’actuel chef du gouvernement, malheureusement c’est resté sans écho. C’est le mépris total, jamais aucune administration n’a répondu à mes écrits. Savez-vous que je suis injustement interdit de faire des opérations de commerce extérieur ?
    “If you think education is expensive, try ignorance”
    Derek Bok

  • #2
    Par qui et pourquoi ?



    Par la Banque d’Algérie qui considère, faussement, que j’ai exporté un navire de ferraille de 2 000 tonnes (voyez la précision, alors que ce n’est jamais le cas dans la réalité), alors que je n’ai pas exporté de ferraille, ne serait-ce qu’un seul gramme, dans ma vie. Bien au contraire j’étais favorable à l’élaboration d’un statut particulier pour la ferraille qu’on utilise à El-Hadjar.

    On prétend aussi que j’ai utilisé des prête-noms pour exporter de la ferraille. Une manière de me coller ce que j’ai dénoncé et que je continue à dénoncer.

    Je mets quiconque au défi d'apporter la preuve que j’ai pu utiliser ne serait-ce qu’une seule fois dans ma vie un prête-nom aussi bien dans l’achat des produits que dans l’exportation, ou de montrer que j’ai piétiné la réglementation du commerce extérieur. Par cette interdiction, ils veulent me réduire à la mendicité en croyant pouvoir me faire rallier cette maffia et me taire sur ses pratiques frauduleuses. Les barons de l’exportation des métaux non ferreux se targuent d’avoir acheté des fonctionnaires.


    Vous pensez que cela est vrai ?



    Sinon comment expliquez-vous que des enquêtes auxquelles j’ai participé, qui n’étaient pas cette fois sous le contrôle du parquet général, n’aient pas abouti ?


    Quel genre d’enquêtes et à quoi ont-elles abouti ?



    Sur des dossiers graves comme les prête-noms, le faux et usage de faux, l’infraction à la législation des changes, le recel, l’existence de groupes maffieux, etc.

    J'en suis à m’interroger sur ce qui s’est passé et à quel niveau pour que ces enquêtes n’aboutissent pas à des inculpations. Les barons seraient-ils aussi puissants que la République ?

    J’ai travaillé nuit et jour pour ces enquêtes qui ont duré de novembre 2004 à juin 2005. Je n’ai rien compris. Comment se fait-il que des corps de délits avec tous les éléments de l’infraction réunis soient étouffés ?

    Malheureusement, cette fois, ce n’est pas le cas des enquêtes de 2001 qui s’étaient déroulées sous l’œil vigilant du procureur général et du procureur de la République. Ça s’était d’ailleurs bien passé.


    Source lesdébats.com
    “If you think education is expensive, try ignorance”
    Derek Bok

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