Issad Rebrab, patron du groupe privé Cevital, presse le gouvernement de ne pas rater l’opportunité du projet Desertec. Sans fermer la porte, le ministre de l’Energie, Chakib Khelil, exprime des réserves...
Chakib Khelil : « Nous sommes prêts à discuter du projet Desertec. »
La Desertec Industrial Initiative sera lancée courant octobre 2009 en Europe. Il s’agit d’un immense projet de production d’énergie solaire pour couvrir 15% des besoins européens en électricité à partir du Sahara (voir nos précédentes éditions sur Les Afriques. Une douzaine d’entreprises sont impliquées dans cette opération, à l’image du Suisse ABB, des Allemands E.ON, RWE et Siemens, et de l’Algérien Cevital. Selon Issad Rebrab, patron du plus grand groupe privé algérien, Cevital, la course est ouverte entre le Maroc, la Tunisie, la Libye et l’Egypte pour accueillir des projets liés à cette initiative. « Aujourd’hui, il y a une concurrence au niveau des pays du sud de la Méditerranée. Les Egyptiens veulent que ce soit chez eux, les Tunisiens, les Marocains et les Libyens se battent déjà pour avoir les projets. Les Algériens doivent en faire autant », a-t-il déclaré en s’exprimant pour la première fois sur cette initiative depuis l’annonce faite début juillet 2009. « Nous sommes en train de nous battre pour obtenir un ou deux projets en Algérie. Nous avons le plus grand désert de la région, le plus grand espace », a-t-il ajouté. Autre avantage comparatif pour l’Algérie, l’existence d’une industrie du verre et du béton. « Nous avons beaucoup de matériaux produits localement qui vont servir pour la réalisation de ces centrales d’énergies renouvelables. C’est une grande opportunité pour notre pays », a insisté le patron de Cevital. Il a précisé que Desertec prévoit un démarrage avec trois projets de 1 gigawatt chacun pour les trois prochaines années.
Le partenariat avec l’Algérie est tributaire de plusieurs conditions : la majorité du capital à la partie algérienne, le transfert de technologie, la production locale du matériel et l’ouverture du marché européen à l’électricité exportée par l’Algérie.
« Il faut être dans la course »
Le choix des pays n’a pas encore été fait. D’où l’importance de se mettre rapidement dans la course et de défendre ses chances. L’Egypte a déjà une longueur d’avance puisqu’elle veut convaincre les associés de Desertec d’implanter une centrale électrique pour alimenter la bande de Ghaza en territoire palestinien. Issad Rebrab a écrit au Ministère de l’énergie et des mines pour que l’opération soit parrainée à haut niveau. « Nous avons exprimé notre souhait que cette opération se fasse dans l’intérêt de notre pays puisque nous avons énormément de potentialités solaires et industrielles. Nous pouvons être demain à l’avant garde dans la production de l’énergie durable et renouvelable », a-t-il noté. Une partie de la production sera, selon lui, destinée à satisfaire les besoins du marché national, et l’autre partie orientée vers l’exportation. Issad Rebrab a engagé des discussions avec les entreprises du secteur énergétique pour prendre part à l’initiative. « Nous souhaitons que des entreprises publiques, comme Sonelgaz ou Sonetrach, prennent part au projet toujours dans le but de l’intégration nationale et du développement économique du pays », a-t-il souligné.
« C’est beau, magnifique… mais où trouver 30 milliards de dollars ? »
Le ministre algérien de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, est plutôt sceptique par rapport à l’initiative. « Desertec est une association de sociétés qui n’a pas fait de proposition concrète d’investissement. Il s’agit d’idées qui se discutent. C’est beau, c’est magnifique. Mais qui va trouver 30 milliards de dollars ? J’espère que les projets seront installés en Algérie, nous sommes prêts à y participer, mais à nos conditions », a-t-il soutenu. Il a précisé que l’Algérie a engagé 300 millions de dollars dans un projet hybride solaire-gaz. « J’aimerais rencontrer des investisseurs qui viennent nous proposer d’investir des milliards de dollars. Nous avons exprimé nos conditions. Nous ne voulons pas que les étrangers viennent installer leurs centrales chez nous et nous demandent d’acheter de l’électricité à quel prix ? S’il me vend l’électricité à dix fois le prix de Sonelgaz, je ne vais pas acheter cette énergie », a indiqué Chakib Khelil laissant la porte à demi ouverte. La politique énergétique de l’Algérie est, selon lui, transparente et le partenariat est tributaire de plusieurs conditions. Il a cité la majorité du capital à la partie algérienne, le transfert de technologie, la production locale du matériel et l’ouverture du marché européen à l’électricité exportée par l’Algérie.
Le gouvernement ouvert à la discussion
Cela dit, et devant la presse, Chakib Khelil a serré la main d’Issad Rebrab en marge d’une cérémonie à Alger de présentation du programme d’approvisionnement du marché algérien en gaz 2009-2018, et lui a dit ouvertement : « Nous sommes prêts à discuter du projet Desertec. » Profitant de la présence des journalistes, le patron du groupe Cevital a défendu, à haute voix, le sérieux de l’initiative Desertec. Pour rappel, Desertec a pour but de construire des centrales solaires thermiques (Concentrating Solar Power, CSP) connectées entre elles et au réseau de distribution de l’électricité. Des centrales qui seront également liées à d’autres installations d’énergies renouvelables et même à des installations de dessalement d’eau de mer. Les lignes à haute tension passeront sous la Méditerranée. D’après les concepteurs du projet, ces lignes de type CCHT(courant continu) permettraient de transporter l’énergie avec des pertes estimées à 3% par 1000 km de distance. Autre avantage : les CCHT ne provoquent pas de pollution électromagnétique. Les premières livraisons d’électricité sont prévues pour 2025. Un bureau d’étude sera bientôt créé pour élaborer les projets pilotes et les budgets qui y seront liés.
Par Fayçal Métaoui et Zohir Bouzid, Alger
20-10-2009
© Copyright Les Afriques
Chakib Khelil : « Nous sommes prêts à discuter du projet Desertec. »
La Desertec Industrial Initiative sera lancée courant octobre 2009 en Europe. Il s’agit d’un immense projet de production d’énergie solaire pour couvrir 15% des besoins européens en électricité à partir du Sahara (voir nos précédentes éditions sur Les Afriques. Une douzaine d’entreprises sont impliquées dans cette opération, à l’image du Suisse ABB, des Allemands E.ON, RWE et Siemens, et de l’Algérien Cevital. Selon Issad Rebrab, patron du plus grand groupe privé algérien, Cevital, la course est ouverte entre le Maroc, la Tunisie, la Libye et l’Egypte pour accueillir des projets liés à cette initiative. « Aujourd’hui, il y a une concurrence au niveau des pays du sud de la Méditerranée. Les Egyptiens veulent que ce soit chez eux, les Tunisiens, les Marocains et les Libyens se battent déjà pour avoir les projets. Les Algériens doivent en faire autant », a-t-il déclaré en s’exprimant pour la première fois sur cette initiative depuis l’annonce faite début juillet 2009. « Nous sommes en train de nous battre pour obtenir un ou deux projets en Algérie. Nous avons le plus grand désert de la région, le plus grand espace », a-t-il ajouté. Autre avantage comparatif pour l’Algérie, l’existence d’une industrie du verre et du béton. « Nous avons beaucoup de matériaux produits localement qui vont servir pour la réalisation de ces centrales d’énergies renouvelables. C’est une grande opportunité pour notre pays », a insisté le patron de Cevital. Il a précisé que Desertec prévoit un démarrage avec trois projets de 1 gigawatt chacun pour les trois prochaines années.
Le partenariat avec l’Algérie est tributaire de plusieurs conditions : la majorité du capital à la partie algérienne, le transfert de technologie, la production locale du matériel et l’ouverture du marché européen à l’électricité exportée par l’Algérie.
« Il faut être dans la course »
Le choix des pays n’a pas encore été fait. D’où l’importance de se mettre rapidement dans la course et de défendre ses chances. L’Egypte a déjà une longueur d’avance puisqu’elle veut convaincre les associés de Desertec d’implanter une centrale électrique pour alimenter la bande de Ghaza en territoire palestinien. Issad Rebrab a écrit au Ministère de l’énergie et des mines pour que l’opération soit parrainée à haut niveau. « Nous avons exprimé notre souhait que cette opération se fasse dans l’intérêt de notre pays puisque nous avons énormément de potentialités solaires et industrielles. Nous pouvons être demain à l’avant garde dans la production de l’énergie durable et renouvelable », a-t-il noté. Une partie de la production sera, selon lui, destinée à satisfaire les besoins du marché national, et l’autre partie orientée vers l’exportation. Issad Rebrab a engagé des discussions avec les entreprises du secteur énergétique pour prendre part à l’initiative. « Nous souhaitons que des entreprises publiques, comme Sonelgaz ou Sonetrach, prennent part au projet toujours dans le but de l’intégration nationale et du développement économique du pays », a-t-il souligné.
« C’est beau, magnifique… mais où trouver 30 milliards de dollars ? »
Le ministre algérien de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, est plutôt sceptique par rapport à l’initiative. « Desertec est une association de sociétés qui n’a pas fait de proposition concrète d’investissement. Il s’agit d’idées qui se discutent. C’est beau, c’est magnifique. Mais qui va trouver 30 milliards de dollars ? J’espère que les projets seront installés en Algérie, nous sommes prêts à y participer, mais à nos conditions », a-t-il soutenu. Il a précisé que l’Algérie a engagé 300 millions de dollars dans un projet hybride solaire-gaz. « J’aimerais rencontrer des investisseurs qui viennent nous proposer d’investir des milliards de dollars. Nous avons exprimé nos conditions. Nous ne voulons pas que les étrangers viennent installer leurs centrales chez nous et nous demandent d’acheter de l’électricité à quel prix ? S’il me vend l’électricité à dix fois le prix de Sonelgaz, je ne vais pas acheter cette énergie », a indiqué Chakib Khelil laissant la porte à demi ouverte. La politique énergétique de l’Algérie est, selon lui, transparente et le partenariat est tributaire de plusieurs conditions. Il a cité la majorité du capital à la partie algérienne, le transfert de technologie, la production locale du matériel et l’ouverture du marché européen à l’électricité exportée par l’Algérie.
Le gouvernement ouvert à la discussion
Cela dit, et devant la presse, Chakib Khelil a serré la main d’Issad Rebrab en marge d’une cérémonie à Alger de présentation du programme d’approvisionnement du marché algérien en gaz 2009-2018, et lui a dit ouvertement : « Nous sommes prêts à discuter du projet Desertec. » Profitant de la présence des journalistes, le patron du groupe Cevital a défendu, à haute voix, le sérieux de l’initiative Desertec. Pour rappel, Desertec a pour but de construire des centrales solaires thermiques (Concentrating Solar Power, CSP) connectées entre elles et au réseau de distribution de l’électricité. Des centrales qui seront également liées à d’autres installations d’énergies renouvelables et même à des installations de dessalement d’eau de mer. Les lignes à haute tension passeront sous la Méditerranée. D’après les concepteurs du projet, ces lignes de type CCHT(courant continu) permettraient de transporter l’énergie avec des pertes estimées à 3% par 1000 km de distance. Autre avantage : les CCHT ne provoquent pas de pollution électromagnétique. Les premières livraisons d’électricité sont prévues pour 2025. Un bureau d’étude sera bientôt créé pour élaborer les projets pilotes et les budgets qui y seront liés.
Par Fayçal Métaoui et Zohir Bouzid, Alger
20-10-2009
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