Frontière parallèle
Par : Mustapha Hammouche
Des cortèges de dirigeants d’entreprise étrangers, présentés comme autant d’investisseurs potentiels, ont défilé à Alger durant la dernière décennie. Des délégations de chefs d’État et de gouvernement, “accompagnés d’hommes d’affaires”, comme il était souvent précisé, se sont succédé à Alger pendant la même période. Des foires et salons, des colloques, des rencontres d’entrepreneurs, des missions de promotion du marché algérien ont été organisés en nombre incalculable.
Une véritable industrie du marketing de la destination Algérie, en direction de possibles partenaires, investisseurs et acquéreurs d’entreprises privatisables, a prospéré, dix ans durant.
Les IDE n’ont pas suivi. La longue campagne de réclame n’a pas suffi. Lasse de subir les tergiversations des promoteurs ou déçue des comportements spéculatifs de certains promoteurs, l’Algérie a préféré prendre le chemin inverse et verrouiller son espace économique. Ce n’était peut-être pas nécessaire : la loi de finances complémentaire pour 2009 n’explique pas, à elle seule, la baisse de 60% des investissements directs étrangers de l’année dernière.
Le pays, en imposant la règle du 51/49 aux investisseurs étrangers, s’est peut-être mis à l’abri des investissements spéculatifs et des transferts excessifs, mais il s’est aussi interdit l’entrée de capitaux extérieurs, mais aussi l’apport de technologies qui leur sont souvent concomitantes.
La fermeture aux capitaux, qui déjà ne se bousculaient pas à nos frontières, encourage l’inertie en matière de gouvernance : la pression pour diminuer de l’obstacle bureaucratique ou pour réformer l’activité bancaire s’en trouve fortement réduite. Par le même train de décisions, le financement de l’exploitation des entreprises locales s’en trouve renchéri et les prix à la consommation augmentés.
En gros, tout en aggravant le mouvement inflationniste, qui, bien sûr, doit avoir d’autres causes encore, la nouvelle politique compromet un développement déjà contrarié, même si les frontières sont désormais moins permissives aux flux de monnaies. Les frontières institutionnelles bien sûr, parce que les frontières physiques ont du mal à contenir les assauts de contrebande en tous genres.
Tous les officiels en charge de lutte contre les crimes transfrontaliers s’en alarment : le commerce de la drogue, de la fausse monnaie, nationale étrangère, et de la contrefaçon, n’a, semble-t-il, jamais été aussi florissant. Cela est devenu possible parce que là où l’on “serre” sur les transferts par circuit officiel, l’on tolère une industrie parallèle du change, parce que là où l’on complique les procédures d’importation, l’on permet les “bazars”, boutiques de produits “chinois” et le blanchiment, par “Dubaï” interposé, de l’argent du racket et parce que là où il fallait séparer le licite de l’illicite, on distingue le halal du haram… La situation provoque comme un appel d’offres de produits de trafic. Les effets de loi, nonobstant sa pertinence, sont contredits par la vraie vie. Une vie parallèle, faite de marchés parallèles.
Le résultat en est qu’il y a deux frontières, l’une, de plus en plus régentée, s’adressant aux opérateurs déclarés, l’autre, de plus en plus pénétrable, qu’exploitent les brigands de tout poil.
Liberté
Par : Mustapha Hammouche
Des cortèges de dirigeants d’entreprise étrangers, présentés comme autant d’investisseurs potentiels, ont défilé à Alger durant la dernière décennie. Des délégations de chefs d’État et de gouvernement, “accompagnés d’hommes d’affaires”, comme il était souvent précisé, se sont succédé à Alger pendant la même période. Des foires et salons, des colloques, des rencontres d’entrepreneurs, des missions de promotion du marché algérien ont été organisés en nombre incalculable.
Une véritable industrie du marketing de la destination Algérie, en direction de possibles partenaires, investisseurs et acquéreurs d’entreprises privatisables, a prospéré, dix ans durant.
Les IDE n’ont pas suivi. La longue campagne de réclame n’a pas suffi. Lasse de subir les tergiversations des promoteurs ou déçue des comportements spéculatifs de certains promoteurs, l’Algérie a préféré prendre le chemin inverse et verrouiller son espace économique. Ce n’était peut-être pas nécessaire : la loi de finances complémentaire pour 2009 n’explique pas, à elle seule, la baisse de 60% des investissements directs étrangers de l’année dernière.
Le pays, en imposant la règle du 51/49 aux investisseurs étrangers, s’est peut-être mis à l’abri des investissements spéculatifs et des transferts excessifs, mais il s’est aussi interdit l’entrée de capitaux extérieurs, mais aussi l’apport de technologies qui leur sont souvent concomitantes.
La fermeture aux capitaux, qui déjà ne se bousculaient pas à nos frontières, encourage l’inertie en matière de gouvernance : la pression pour diminuer de l’obstacle bureaucratique ou pour réformer l’activité bancaire s’en trouve fortement réduite. Par le même train de décisions, le financement de l’exploitation des entreprises locales s’en trouve renchéri et les prix à la consommation augmentés.
En gros, tout en aggravant le mouvement inflationniste, qui, bien sûr, doit avoir d’autres causes encore, la nouvelle politique compromet un développement déjà contrarié, même si les frontières sont désormais moins permissives aux flux de monnaies. Les frontières institutionnelles bien sûr, parce que les frontières physiques ont du mal à contenir les assauts de contrebande en tous genres.
Tous les officiels en charge de lutte contre les crimes transfrontaliers s’en alarment : le commerce de la drogue, de la fausse monnaie, nationale étrangère, et de la contrefaçon, n’a, semble-t-il, jamais été aussi florissant. Cela est devenu possible parce que là où l’on “serre” sur les transferts par circuit officiel, l’on tolère une industrie parallèle du change, parce que là où l’on complique les procédures d’importation, l’on permet les “bazars”, boutiques de produits “chinois” et le blanchiment, par “Dubaï” interposé, de l’argent du racket et parce que là où il fallait séparer le licite de l’illicite, on distingue le halal du haram… La situation provoque comme un appel d’offres de produits de trafic. Les effets de loi, nonobstant sa pertinence, sont contredits par la vraie vie. Une vie parallèle, faite de marchés parallèles.
Le résultat en est qu’il y a deux frontières, l’une, de plus en plus régentée, s’adressant aux opérateurs déclarés, l’autre, de plus en plus pénétrable, qu’exploitent les brigands de tout poil.
Liberté
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