DÉCRYPTAGE - Si la crise de l'euro a occupé le premier rang des préoccupations à Los Cabos, le G20 a avalisé pour la première fois la politique de change chinoise et évoque une sorte de Schengen à l'échelle mondiale.
Comme souvent dans ce genre d'événements, derrière l'écume des sommets il faut prendre le temps de décrypter les lames de fond. Au-delà de l'actualité brûlante européenne, le communiqué du G20 publié dans la nuit de mercredi à jeudi à Los Cabos au Mexique réserve quelques avancées intéressantes qui pourraient nourrir l'actualité des prochains mois.
En comparant ce communiqué à celui publié à Cannes, lors du précédent G20 en novembre 2011, cinq points saillants ressortent:
1. La place prise par la zone euro est désormais centrale. Certes, alors qu'à Cannes la crise de la dette souveraine apparaissait dès le 2e paragraphe, il faut attendre le 6e dans le communiqué de Los Cabos pour y retrouver mention. Mais cette fois-ci la rhétorique est autrement plus grave: «les pays membres de l'euro s'engagent à prendre toutes les mesures pour sauvegarder l'intégrité et la stabilité de la zone», explique-t-on au Mexique, alors qu'à Cannes, il s'agissait uniquement de tensions sur les marchés, consécutives à la crise de la dette.
En outre, cette fois, c'est l'Espagne qui est citée, alors que l'Italie occupait le devant de la scène fin 2011: «nous saluons le plan de l'Espagne pour recapitaliser son système bancaire», expliquent les 20 pays les plus riches de la planète.
«Le G20 a avalé une couleuvre»
2. La Chine a vu sa politique de change validée. Passée totalement inaperçu, c'est pourtant une avancée majeure du sommet mexicain: «nous saluons l'engagement de la Chine de laisser les forces de marché jouer un rôle plus important dans la détermination du niveau de change du remnimbi, de continuer à réformer son régime de change et d'accroître la transparence de sa politique monétaire».
Cette phrase, qui apparaît au 16e paragraphe, est une nouveauté absolue. C'est la première fois qu'un communiqué du G20 fait explicitement référence à la politique de change chinoise, qui est pourtant l'un des plus gros tabous diplomatiques contemporain. Victoire contre Pékin? Au contraire, victoire de Pékin contre le reste du monde! Car au final, les 19 pays valident la stratégie de change de la Chine qui a, au fil des derniers mois, élargi la barrière de fluctuation du yuan avec le dollar et autorisé l'expérimentation progressive d'échanges commerciaux en yuan dans certaines zones asiatiques.
Le plus ironique, c'est que la politique de change chinoise s'est certes assouplie mais alors que tout le monde s'attendait à ce que cela permette au yuan de gagner en valeur et donc d'être moins sous évalué par rapport au dollar, c'est exactement l'inverse qui s'est produit. Le dollar s'échangeait contre 6,34 yuans au lendemain du G20 de Cannes. Il est descendu jusqu'à 6,28 yuans pour subitement, depuis fin avril, remonter à 6,36 yuans. Autrement dit, la devise chinois n'a quasiment pas bougé: «Le G20 a encore avalé une couleuvre en accordant un satisfecit à la Chine pour sa politique de change alors que les Chinois n'ont rien fait et continuent même à manipuler leur devise», résume l'économiste Antoine Brunet.
Éviter la résurgence du protectionnisme
3. Dans la foulée de ce commentaire sur le yuan, le G20 reconnaît que «nombre de marchés émergents sont en train d'expérimenter un ralentissement de leur croissance». Cette mention est importante car cela signifie que certains de ces pays pourraient, toujours selon le communiqué, «introduire de nouvelles mesures pour doper leurs économies; en particulier en renforçant leur demande domestique dans un contexte d'affaiblissement de la demande extérieure».
4. Le communiqué de Los Cabos évoque pour la première fois de réelles sources d'inquiétudes au sujet de l'envolée du protectionnisme. À Cannes, le G20 se félicitait de ce que le système commercial multilatéral tienne bon et évite le protectionnisme. Mais depuis lors, l'Argentine a fermé la porte aux investissements pétroliers espagnols de Repsol, notamment. Le G20 promet donc de prendre plusieurs initiatives pour éviter cette résurgence du protectionnisme mais elles restent vagues à ce stade.
5. Dernier point remarquable du communiqué, qui peut sembler anecdotique mais est tout de même hautement symbolique: au paragraphe 25, les 20 pays les plus riches de la planète reconnaissent que le tourisme et le transport ont un rôle a jouer dans la création d'emploi et le développement de la croissance. C'est surtout la phrase d'après qui mérite d'être retenue: «tout en reconnaissant le droit des États à contrôler les entrées sur leur territoire, nous essaierons de multiplier les initiatives pour faciliter les transports à travers le monde». Le début d'un Schengen à l'échelle mondiale? On en est loin, mais peut-être que, dans quelques décennies, on se rappellera de Los Cabos comme ayant été le premier lieu où on en a parlé.
source: lefigaro.fr
Comme souvent dans ce genre d'événements, derrière l'écume des sommets il faut prendre le temps de décrypter les lames de fond. Au-delà de l'actualité brûlante européenne, le communiqué du G20 publié dans la nuit de mercredi à jeudi à Los Cabos au Mexique réserve quelques avancées intéressantes qui pourraient nourrir l'actualité des prochains mois.
En comparant ce communiqué à celui publié à Cannes, lors du précédent G20 en novembre 2011, cinq points saillants ressortent:
1. La place prise par la zone euro est désormais centrale. Certes, alors qu'à Cannes la crise de la dette souveraine apparaissait dès le 2e paragraphe, il faut attendre le 6e dans le communiqué de Los Cabos pour y retrouver mention. Mais cette fois-ci la rhétorique est autrement plus grave: «les pays membres de l'euro s'engagent à prendre toutes les mesures pour sauvegarder l'intégrité et la stabilité de la zone», explique-t-on au Mexique, alors qu'à Cannes, il s'agissait uniquement de tensions sur les marchés, consécutives à la crise de la dette.
En outre, cette fois, c'est l'Espagne qui est citée, alors que l'Italie occupait le devant de la scène fin 2011: «nous saluons le plan de l'Espagne pour recapitaliser son système bancaire», expliquent les 20 pays les plus riches de la planète.
«Le G20 a avalé une couleuvre»
2. La Chine a vu sa politique de change validée. Passée totalement inaperçu, c'est pourtant une avancée majeure du sommet mexicain: «nous saluons l'engagement de la Chine de laisser les forces de marché jouer un rôle plus important dans la détermination du niveau de change du remnimbi, de continuer à réformer son régime de change et d'accroître la transparence de sa politique monétaire».
Cette phrase, qui apparaît au 16e paragraphe, est une nouveauté absolue. C'est la première fois qu'un communiqué du G20 fait explicitement référence à la politique de change chinoise, qui est pourtant l'un des plus gros tabous diplomatiques contemporain. Victoire contre Pékin? Au contraire, victoire de Pékin contre le reste du monde! Car au final, les 19 pays valident la stratégie de change de la Chine qui a, au fil des derniers mois, élargi la barrière de fluctuation du yuan avec le dollar et autorisé l'expérimentation progressive d'échanges commerciaux en yuan dans certaines zones asiatiques.
Le plus ironique, c'est que la politique de change chinoise s'est certes assouplie mais alors que tout le monde s'attendait à ce que cela permette au yuan de gagner en valeur et donc d'être moins sous évalué par rapport au dollar, c'est exactement l'inverse qui s'est produit. Le dollar s'échangeait contre 6,34 yuans au lendemain du G20 de Cannes. Il est descendu jusqu'à 6,28 yuans pour subitement, depuis fin avril, remonter à 6,36 yuans. Autrement dit, la devise chinois n'a quasiment pas bougé: «Le G20 a encore avalé une couleuvre en accordant un satisfecit à la Chine pour sa politique de change alors que les Chinois n'ont rien fait et continuent même à manipuler leur devise», résume l'économiste Antoine Brunet.
Éviter la résurgence du protectionnisme
3. Dans la foulée de ce commentaire sur le yuan, le G20 reconnaît que «nombre de marchés émergents sont en train d'expérimenter un ralentissement de leur croissance». Cette mention est importante car cela signifie que certains de ces pays pourraient, toujours selon le communiqué, «introduire de nouvelles mesures pour doper leurs économies; en particulier en renforçant leur demande domestique dans un contexte d'affaiblissement de la demande extérieure».
4. Le communiqué de Los Cabos évoque pour la première fois de réelles sources d'inquiétudes au sujet de l'envolée du protectionnisme. À Cannes, le G20 se félicitait de ce que le système commercial multilatéral tienne bon et évite le protectionnisme. Mais depuis lors, l'Argentine a fermé la porte aux investissements pétroliers espagnols de Repsol, notamment. Le G20 promet donc de prendre plusieurs initiatives pour éviter cette résurgence du protectionnisme mais elles restent vagues à ce stade.
5. Dernier point remarquable du communiqué, qui peut sembler anecdotique mais est tout de même hautement symbolique: au paragraphe 25, les 20 pays les plus riches de la planète reconnaissent que le tourisme et le transport ont un rôle a jouer dans la création d'emploi et le développement de la croissance. C'est surtout la phrase d'après qui mérite d'être retenue: «tout en reconnaissant le droit des États à contrôler les entrées sur leur territoire, nous essaierons de multiplier les initiatives pour faciliter les transports à travers le monde». Le début d'un Schengen à l'échelle mondiale? On en est loin, mais peut-être que, dans quelques décennies, on se rappellera de Los Cabos comme ayant été le premier lieu où on en a parlé.
source: lefigaro.fr