C'est une économie russe à la fois en pleine forme et menacée par ses succès que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) décrit dans l'étude qu'elle lui consacre, lundi 27 novembre. Ce n'est pas la Chine, mais cela y ressemble par certains côtés.
Le redressement intervenu depuis la crise de 1998 est, en effet, spectaculaire. De 1999 à 2005, la croissance moyenne de la Russie s'est élevée à + 6,7 % par an. Les exportations ont bondi de 102 milliards de dollars (78 milliards d'euros) à 244 milliards et les importations ont crû de 54 milliards de dollars à 125 milliards. Les résultats sont patents : l'excédent des comptes courants est passé de 34 milliards de dollars à 83 milliards, les réserves de change de 37 milliards à 182 milliards. Le taux de pauvreté a reculé de 30 % en 2000 à 18 % en 2004. Quant au taux de chômage, il est revenu de 8,8 % en 2001 à 7,5 % en 2005.
Les auteurs du rapport ne sont pas avares de satisfecit. "Malgré un léger dérapage en 2005-2006, les autorités ont largement résisté à la tentation d'utiliser les revenus exceptionnels provenant des matières premières pour financer une hausse massive des dépenses", écrivent-ils.
La création d'un Fonds de stabilisation, en 2004, a permis de contrôler les excédents de recettes fiscales en provenance du pétrole et de les placer en réserve (70,7 milliards de dollars, le 1er octobre 2006) pour le jour où la chute des cours mettra le budget en déficit. Sagement, le gouvernement russe a consacré une partie de cette manne (23 milliards de dollars) à rembourser sa dette auprès du Club de Paris.
DES FACTEURS TEMPORAIRES
La Russie n'a pas succombé à la " maladie hollandaise", qui consiste en une déstructuration des secteurs non pétroliers sous l'effet de l'afflux de recettes en provenance des hydrocarbures et d'une forte appréciation de la monnaie nationale. " L'ajustement du marché du travail, est-il souligné, a permis jusqu'ici une réallocation de la main-d'oeuvre sans heurts de l'industrie vers les services."
La Russie devrait pourtant se méfier, selon les experts de l'OCDE, car les principaux facteurs de sa belle croissance sont temporaires et disparaîtront lorsque reculeront les cours des hydrocarbures et des matières premières. Ils soulignent plusieurs symptômes inquiétants. Tout d'abord, l'appréciation du rouble a dégradé la compétitivité de l'économie, tout comme la forte inflation, qui ne parvient pas à descendre sous la barre des 10 % par an.
L'insuffisance des investissements, notamment dans le domaine du pétrole et du gaz, fait craindre un plafonnement de la production industrielle et énergétique, et donc des exportations.
Le regain d'interventionnisme de l'Etat actionnaire dans les secteurs stratégiques comme l'énergie, l'aéronautique, l'automobile et la finance ne semble pas un gage d'efficacité accrue, bien au contraire. " L'appétit apparemment insatiable du monopole gazier public Gazprom pour l'acquisition de nouveaux actifs, souvent aux dépens d'un recentrage sur son coeur de métier, est particulièrement préoccupant", jugent les experts.
Parmi les mesures qu'ils préconisent pour permettre à la Russie de passer à une croissance "autonome", tirée par l'investissement et l'innovation, certaines sont techniques.
Par exemple, afin de conforter la relative rigueur budgétaire, ils souhaitent que le Fonds de stabilisation ne soit pas abondé par les recettes excédentaires pétrolières, mais aussi gazières et minérales. Ils évoquent la possibilité pour le Fonds de se rapprocher du modèle du Fonds norvégien pour les générations futures, afin que ses actifs ne soient plus seulement une assurance pour le budget, mais une source de revenus.
Le rapport formule des préconisations très politiques, en matière de lutte contre la corruption ou de protection des administrés et des consommateurs, ce qui passe par des médias indépendants.
Le voeu semblera bien pieux à ceux qui se souviennent que Gazprom, présidé par le vice-premier ministre Dmitri Medvedev, contrôle la chaîne de télévision NTV, la radio Echos de Moscou et les quotidiens Izvetsia, Komsomolskaya Pravda et Kommersant.
Source : Le Monde
Le redressement intervenu depuis la crise de 1998 est, en effet, spectaculaire. De 1999 à 2005, la croissance moyenne de la Russie s'est élevée à + 6,7 % par an. Les exportations ont bondi de 102 milliards de dollars (78 milliards d'euros) à 244 milliards et les importations ont crû de 54 milliards de dollars à 125 milliards. Les résultats sont patents : l'excédent des comptes courants est passé de 34 milliards de dollars à 83 milliards, les réserves de change de 37 milliards à 182 milliards. Le taux de pauvreté a reculé de 30 % en 2000 à 18 % en 2004. Quant au taux de chômage, il est revenu de 8,8 % en 2001 à 7,5 % en 2005.
Les auteurs du rapport ne sont pas avares de satisfecit. "Malgré un léger dérapage en 2005-2006, les autorités ont largement résisté à la tentation d'utiliser les revenus exceptionnels provenant des matières premières pour financer une hausse massive des dépenses", écrivent-ils.
La création d'un Fonds de stabilisation, en 2004, a permis de contrôler les excédents de recettes fiscales en provenance du pétrole et de les placer en réserve (70,7 milliards de dollars, le 1er octobre 2006) pour le jour où la chute des cours mettra le budget en déficit. Sagement, le gouvernement russe a consacré une partie de cette manne (23 milliards de dollars) à rembourser sa dette auprès du Club de Paris.
DES FACTEURS TEMPORAIRES
La Russie n'a pas succombé à la " maladie hollandaise", qui consiste en une déstructuration des secteurs non pétroliers sous l'effet de l'afflux de recettes en provenance des hydrocarbures et d'une forte appréciation de la monnaie nationale. " L'ajustement du marché du travail, est-il souligné, a permis jusqu'ici une réallocation de la main-d'oeuvre sans heurts de l'industrie vers les services."
La Russie devrait pourtant se méfier, selon les experts de l'OCDE, car les principaux facteurs de sa belle croissance sont temporaires et disparaîtront lorsque reculeront les cours des hydrocarbures et des matières premières. Ils soulignent plusieurs symptômes inquiétants. Tout d'abord, l'appréciation du rouble a dégradé la compétitivité de l'économie, tout comme la forte inflation, qui ne parvient pas à descendre sous la barre des 10 % par an.
L'insuffisance des investissements, notamment dans le domaine du pétrole et du gaz, fait craindre un plafonnement de la production industrielle et énergétique, et donc des exportations.
Le regain d'interventionnisme de l'Etat actionnaire dans les secteurs stratégiques comme l'énergie, l'aéronautique, l'automobile et la finance ne semble pas un gage d'efficacité accrue, bien au contraire. " L'appétit apparemment insatiable du monopole gazier public Gazprom pour l'acquisition de nouveaux actifs, souvent aux dépens d'un recentrage sur son coeur de métier, est particulièrement préoccupant", jugent les experts.
Parmi les mesures qu'ils préconisent pour permettre à la Russie de passer à une croissance "autonome", tirée par l'investissement et l'innovation, certaines sont techniques.
Par exemple, afin de conforter la relative rigueur budgétaire, ils souhaitent que le Fonds de stabilisation ne soit pas abondé par les recettes excédentaires pétrolières, mais aussi gazières et minérales. Ils évoquent la possibilité pour le Fonds de se rapprocher du modèle du Fonds norvégien pour les générations futures, afin que ses actifs ne soient plus seulement une assurance pour le budget, mais une source de revenus.
Le rapport formule des préconisations très politiques, en matière de lutte contre la corruption ou de protection des administrés et des consommateurs, ce qui passe par des médias indépendants.
Le voeu semblera bien pieux à ceux qui se souviennent que Gazprom, présidé par le vice-premier ministre Dmitri Medvedev, contrôle la chaîne de télévision NTV, la radio Echos de Moscou et les quotidiens Izvetsia, Komsomolskaya Pravda et Kommersant.
Source : Le Monde


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